1 habiter dakar quels outils pour inventer une architecture sénégalaise ? Nzing

1 habiter dakar quels outils pour inventer une architecture sénégalaise ? Nzinga Biegueng Mboup - Caroline Geffriaud - GoEthe institut sÉNÉgal 2 3 CAROLINE GEFFRIAUD, architecte française, vit et exerce à Dakar. Après avoir travaillé six ans dans différentes agences parisiennes, Elle est, aujourd’hui, cheffe de projet au sein de l’agence GA2D, chargée des chantiers de réhabilitation des gares historiques de Dakar et Rufisque. Elle a également été membre active de l’association New South, plateforme de recherche et de promotion d’initiatives culturelles ayant trait à l’urbanisme et à l’architecture des villes africaines. NZINGA BIEGUENG MBOUP est architecte sénégalo-camerounaise vivant à Dakar. Depuis 2018, elle est Associée et cofondatrice de l’Agence Worofila, spécialisée en architecture bioclimatique. Avec l’architecte Carole Diop, Elle est également à l’origine de l’exposition Dakarmorphose sur l’évolution des villages lebou, organisée lors de la biennale d’art contemporain de Dakar en 2018. Le Goethe-Institut est l’institut culturel de la République fédérale d’Allemagne. IL promeut la connaissance de la langue allemande à l’étranger et entretient des collaborations culturelles internationales. Aujourd’hui, le Goethe Institut Sénégal s’engage dans la promotion de l’architecture durable, qualitative et respectueuse de l’environnement. Par cette exposition, il manifeste sa volonté de mettre en avant la culture sénégalaise et participe à la définition d’un mode de vie dakarois, émancipé des influences occidentales. Conception scientifique de l’exposition et du catalogue UNE EXPOSITION InitiéE PAR LE GOETHE INSTITUT Sénégal 4 5 habiter dakar quels outils pour inventer une architecture sénégalaise ? « L’Afrique devrait se défaire des modèles venus de l’extérieur pour inventer des villes dans lesquelles ils [les habitants] aimeraient vivre »* Le principe d’urbanisation proposé par Jérôme chenal, enseignant-chercheur à l’école polytechnique Fédérale de Lausanne, prône l’identification des besoins réels existants comme point de départ d’une politique du logement efficace. À défaut de copier des modèles universels de villes inadaptées au contexte local, la question qui se pose alors est : comment peut-on partir des spécificités sociales et culturelles des habitants pour améliorer leurs conditions de vie ? Nzinga B. Mboup et Caroline Geffriaud, toutes les deux architectes vivant et pratiquant à Dakar, ont étudié spécifiquement le cas de cette ville. Elles ont centré leur étude sur le thème du logement, essentiel dans la constitution et l’évolution de cette métropole. Leur travail explore les frontières poreuses entre l’espace domestique et son pendant public et collectif pour contribuer à l’invention de logements mieux adaptés à leurs habitants. * Jérôme Chenal, Jeune Afrique, 16 août 2017 Cette publication synthétise l’exposition virtuelle «Habiter Dakar» qui s’est déroulée en décembre 2020 sur les réseaux sociaux Instagram et facebook sur les pages @habiter.dakar. 6 7 0. petite histoire du logement à dakar 1. L’importance du confort physiologique 2. Place des lieux de vie communautaire dans l’espace public 3. Usage des espaces extérieurs privatifs 4. Portée du lexique du logement 76 88 98 62 56 30 8 5. Rôle des espaces de représentation 6. Modularité, extensions et mutations du bâti Sommaire 8 9 0. PETITE HISTOIRE DU LOGEMENT À DAKAR Dakar, capitale du Sénégal, rassemblant environ 1.056.000 habitants (pour la seule ville de Dakar et jusqu’à 3 215 255 pour toute la région urbaine), soit plus de 6.5% de la population sénégalaise, s’est construite au fil d’événements historiques majeurs. D’abord siège de l’ethnie Lebou, Dakar subit une première transformation brutale au moment de la colonisation. S’en suit la transformation en capitale, une forte exode rurale, la décolonisation et enfin l'application de la politique du logement actuelle. Pour que tout le monde comprenne le contexte urbain et architectural de cette exposition, voici, en introduction, un petit rappel historique sur l’évolution du logement à Dakar. 10 11 TIMELINE DAKAR événements politiques fAITS SOCIAUX - - 1ères colonies Lebou sur la presqu’île du Cap Vert fin XVème s Instauration de la République Lebou 1793 Création SICAP 1950 SNHLM 1959 et lancement des quartiers Karack et Baobab en 1953 Création Banque de l’Habitat du Sénégal BHS 1979 Plans directeurs Lambert / Ecochard 1946 - 1957 Installation des concessions Lebou sur la presqu’île 1er choc pétrolier 1973 Exode Rurale 1940-1950 Indépendance Sénégal 1960 Dakar découpé en 19 communes 1996 Loi sur l’architecture Parallélisme asymétrique 1978 PLANIFICATION URBAINE Colonisation de Dakar par la France 1857 Mise en oeuvre de divers plans cadastraux pour Dakar 1858 - 1862 - 1876 - 1898 Ségrégation spatiale création Medina Projet ville nouvelle Diamniadio 2010 Plan 100 000 logements sociaux Macky Sall 2019 Epidémie de peste 1914 Dakar capitale de l’AOF 1902 Popularisation de la climatisation dans les logements 2000 Expansion urbaine forte et peu encadrée 1990 à aujourd’hui 12 13 Les ressources sur le type de logements présents à Dakar avant l’implantation coloniale sont de nature graphique. Plusieurs images d’archives (illustrations et photos) montrent les concessions sur la presqu’île de Dakar et font référence à des typologies de milieu “rural” ou l’habitat s’organise en concessions familiales. Le travail de l’architecte Patrick Dujarric dans son ouvrage “Maisons Sénégalaises” (1986) nous représente les typologies du logement en zones rurales et fait une différenciation des typologies selon les différents groupages ethniques. Dans cet ouvrage, les habitat-types des Lébou sont décrits comme étant organisés en différentes concessions groupées autour d’une place centrale ou en une série de concessions alignées le long de la plage. La concession, Keur en Wolof, abrite tous les parents descendants d’un même ancêtre et sont régis par l’aîné de la famille. Ainsi, plusieurs cellules familiales y cohabitent. La concession est clôturée et est constituée de cases qui servent de chambres, stockage, etc ... En plus de ceci, il existe dans la concession les cuisines, les espaces pour les animaux et des douchières aménagées entre les différentes cases. En ce qui concerne la structure familiale, à travers les différents groupes ethniques du Sénégal, on retrouve des foyers monogames et polygames et le sens de la famille traditionnelle est élargie. La plupart des concessions regroupent des membres d’une même famille élargie et logent dans leurs enceintes plusieurs ménages. Ainsi, on y retrouve généralement une pièce ou case habitée par le chef de famille et plusieurs autres pièces/ cases pour sa/ses femmes et enfants respectifs. La première typologie de logement qu’on dénote sur la péninsule dakaroise, bien avant l’implantation coloniale des français au 18ème/19e siècles est la concession Lébou regroupée autour du ‘Penc’ . Les 12 Penc de Dakar constituaient les centres de gouvernance et les territoires des 12 familles fondatrices. Elles étaient regroupées en une république et avaient leur propre organisation sociopolitique. L’emplacement original des 12 Penc, se trouvait dans la zone du plateau, centre-ville actuel de Dakar. Dans ces concessions, plusieurs membres et générations d’une même famille cohabitaient et les bâtisses se regroupaient autour d’un arbre à palabres central. L’organisation spatiale du Penc suit une logique fractale : plusieurs cours centrales y existent à plusieurs petites échelles au sein des microcellules qui forment la plus grande cellule spatiale. DAKAR AVANT LA COLONISATION : ORGANISATION EMPIRIQUE DES LOGEMENTS LEBOU DE LA PRESQU’ILE DU CAP VERT Concession traditionnelle, Dakar 1873, Sénégal Famille Lebou, Sénégal Dakar, concession Lébou, Sénégal Dakar, concession Lébou, Sénégal Famille Wolof, Sénégal 14 15 lexique de la concession lebou Ce que l’on remarque rapidement à travers le travail de Parick Dujarric, notamment dans son plan d’une concession Lébou représenté ci-dessous, c’est la place des espaces extérieurs. En effet, les espaces extérieurs représentent 70% de la surface totale de la concession, contre 30% pour les espaces couverts et fermés. Ces espaces couverts et fermés correspondent d’ailleurs presque exclusivement à l’usage du couchage et du degré d’intimité le plus important. A l’époque et dans l’habitat traditionnel, les espaces sont définis par des termes que nous avons obtenus lors de notre entretien avec le Prof. Samba Mboup dont Certains sont repris dans le lexique ci-dessous et indiqués sur le plan. 1: Keur : la concession ou la maison au sens large 2: Hëtt : La cour est l’unité centrale d’une concession, il est souvent organisé autour de l’arbre à palabres. On y retrouve souvent des bancs, ou lits, qui en font un espace de socialisation en journée. Ce lieu sert souvent d’espace de prière. 3: Borom Keur : le propriétaire de la maison/ concession. La maison où habite le « borom Keur » est toujours située à l’axe de l’entrée et est souvent la plus grande. 4: Khambe : l’autel de prière/rituels 5: Néeg : la pièce privée qui sert de chambre ou de salon bien qu’aucun usage spécifique ne lui est conférée 6: Waañ: la cuisine souvent partagée par les différents foyers de la concession et située au fond de la concession, excentrée des pièces d’habitations. 7: Mbañ Gacce: la palissade: enclos qui délimite la périphérie de la concession mono-familiale 8: Wanak: douchières & sanitaires 9: Panterr: le débarras qui peut servir de stockage ou de chambre pour les invités 9 : Càq : grenier servant au stockage de denrées comme le mil 6 8 Plan d’une concession Lébou à Hann (Dakar), Patrick Dujarric 2 3 4 5 7 9 16 17 PENDANT LA PÉRIODE COLONIALE : INGÉRENCE D’UNE NOUVELLE MANIÈRE D’HABITER Le tracé colonial de uploads/Geographie/ catalogue-1.pdf

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