CHANTS POPULAIRES DU PAYS CASTRAIS. Cfjante Populaires CASTRES IMPRIMERIE DE VE
CHANTS POPULAIRES DU PAYS CASTRAIS. Cfjante Populaires CASTRES IMPRIMERIE DE VEEVE GKaiOJi , RUE SABBATERXE . N» 7. 186%, CHANTS POPULAIRES «9K»—- INTRODUCTION. « Il s'est enfin trouvé des hommes de talent u et de bonne volonté pour recueillir et fixer « par l'écriture cl la notation quelques-unes de « nos vieilles chansons rustiques, dont la tradi- « tion va se perdant de jou» en jour dans nos « campagnes, chassée par l'irruption de cet argot, « soi-disant français, qui bientôt aura lait dispa- « railre les patois, dialectes originaux si précieux « à l'artiste et à l'historien. » Alexis AZÉVÈDO. J'emprunte celle épigraphe à un compte-rendu des Chants populaires des Provinces de la France, recueillis par MM. Champfleury et Wekerein (1 vol. grand in-8«, illustre, 1860, librairie nouvelle); et j'ajoute : Moi aussi j'ai été un de ces hommes, si non par le talent, du moins par la bonne volonté, qui ont voulu s'opposera l'oubli, déjà répandu autour de nous, sur toutes les œuvres un peu ori- ginales, et par cela même primitives, naturelles, sponta- nées, dont l'étude n'est pas sans un certain charme. La musique des masses, eclle des champs, celle des ateliers des villes n'est pas un art, seulement c'est beaucoup mieux ; c'est un sentiment. Le peuple ainsi, se plaint, s'excite à la joie, fêle ses jouissances, s'exalte dans ses plaisirs, et tout cela en cherchant à le communiquer aux autres. La langue de ses passions est toujours expressive, quoique quelquefois grossière. Si l'image saisissante et vraie, n'existe pas souvent dans l'expression, croyez qu'elle se retrouve au fonds même de la pensée; miroir fidèle, lors même que sa surface se trouve un peu ternie, et que son cadre a perdu son premier lustre. Les chants populaires de la France forment un enseigne- ment; judicieusement recueillis, ils constitueraient une série de jalons propres à mesurer la distance qui sépare- les diverses époques de notre histoire, d'après les progrès de la langue; comme aussi ils résumeraient en petits ta- bleaux les mœurs locales, plus ou moins distinctes suivant l'éloignemcnt des grands centres, ou l'influence de ceux- ci, à mesure qu'on se rapproche du point de la plus grande agglomération. Sous un autre rapport, ces chants pourraient être d'un certain secours aux musiciens s'inspirant du caractère national pour donner aux masses des mélodies qu'elles puissent sentir et comprendre ; car, ainsi que l'a dit M. Scudo dans sa critique et littérature musicales : « Peut- « être sommes-nous arrivés à une de ces époques criti- « ques où l'art épuisé par le raffinement du métier et des « écoles ne pourra se retremper que dans l'instinct supé- « rieur des IGNORANTS. » Tels sont les principes qui vont me guider dans ce mé- moire. Je me propose d'y rechercher : t° S'il reste et s'il peut rester quelque chose de la mu- sique du pays Castrais pendant le moyen âge? 2° Ce qu'elle fut à l'époque de la renaissance, par suite de l'introduction de l'imprimerie, et de l'influence de la réforme religieuse? 3° Comment elle dut perdre son caractère local, sous l'Académie de Castres, et le règne de Louis XIV? 4° Quelles traces elle a laissées de sa résurrection, de sa nature populaire, et de sa spontanéité pendant le 18« siècle? 5o Qu'est-ce qu'il en reste aujourd'hui, après son pas- sage à travers la révolution, l'Empire, la Restauration et les gouvernements qui se sont succédés depuis 1830? PREMIÈRE PARTIE. MOYEN AttE. Dans mes recherches sur la langue romano-castraise au moyen âge j e n'ai pu trouver que deux morceaux de poésie, assez bien mesurés et rimés, pour faire supposer qu'une espèce de chant devait les accompagner. Ce sont les stances d'Arnaud de Marwiel, troubadour d'Adélaïde de Burlals. Ce qui pourrait faire supposer que l'art musical n'était pas étranger à ce genre de poésie, c'estqu'elles datent du commencement du 13<= siècle. Or, déjà cent cinquante ans auparavant Guy d'Arezzo avait inventé la gamme, et seize ans plus tard Franco de Cologne avait trouvé le rhylmc moderne et la figure des notes. Ce double perfectionnement, presque contemporain, dut agir sur le rôle même des troubadours. Ils chantaient évi- demment plus qu'ils ne parlaient leurs compositions. Ils s'accompagnaient d'un de ces instruments à cordes dont la forme nous a été transmise par la sculpture. Ils s'en aidaient peut-être à la fin de chaque strophe, comme de nos jours les improvisateurs italiens terminent leurs réci- tatifs par une ritournelle instrumentée ; mais toujours est-il vraisemblable qu'ils ne séparaient pas entièrement la mu- sique et la poésie. Qu'était cette musique? Voilà le point où commence la difficulté. Pour la résoudre il n'existe que des analogies. La mémoire ne fournit rien; la tradition est insuffisante. Toutefois on-peut conjecturer que les chants populaires de cette époque participaient beaucoup des chants de l'église, de laquelle procédaient tous les arts : peinture, sculpture, architecture, musique, etc. Celle-ci avait reçu sa constitu- tion religieuse de saint Grégoire au commencement du 7e siècle. Elle se conservait encore intacte au milieu de l'invasion des troubadours ; par conséquent il est à croire que les chants de ces derniers admettaient, comme les au- tres, quatre parties relatives aux quatre conditions natu- relles de la voix, la haute-contre, le ténor, la taille et la basse-taille. Il ne faut pas supposer d'ailleurs que les écoles spéciales établies après la constitution grégorienne, fussent très florissantes. Une seule existait à Rome ; elle ne se peuplait que de jeunes orphelins ; elle était destinée à fournir à tous les besoins du culte catholique, apostolique, romain. Aussi voit-on, après une intermittence très marquée, le progrès musical ne s'effectuer depuis le 13e siècle jusqu'au 16" que par les Flamands d'abord, les Français leurs plus proches voisins ensuite, qui tous envoyèrent leurs meilleurs sujets en Italie. Le passage de ces derniers à travers la France ne s'ef- fectua certainement pas sans laisser des traces. Admis dans les églises ou les couvents qui leur servaient d'hôtellerie, ils propageaient partout le chant des hymnes religieux dont la plupart tenaient à un texte scandé et rimé. Ils enseignaient à notre Midi l'admirable Ponge lingua, œu- vre, dit-on, de saint Thomas d'Aquin, paroles et musique, sur lequel semblent s'être modelés la plus grande partie des chants profanes de cette époque. Non pas ce Pange lingua que j'ai entendu chanter, il y a trente ans, dans quelques églises de l'ancien diocèse de Lavaur, où s'était introduit le rite parisien, sur l'air de Pergolèse : Que ne suis-je sur la fougère, air qui traînait dans nos rues, à certain temps de l'année, dénaturé par les paroles, Adiou paouré carnaval, mais le produit de l'inspiration primitive du grand saint, avec sa majesté harmonieuse, ses phrases accentuées, sa poésie redondante, son caractère, en un mot, de conviction religieuse. La facture prosodique de cet hymne, ses désinences ri- ches, la suavité de ses fermes, qui tous semblent avoir été l'objet d'un choix particulier, se rapprochent étonnam- ment de la manière des plus anciens poètes de la langue d'oc. Ceux-ci étaient-ils des originaux ou des imitateurs ? L'influence bien positive, bien universelle en même temps de l'Eglise en ce temps là, résout la question dans ce second sens. On peut donc tenir pour constant que les chants popu- laires du moyen-âge , en appelant ainsi par extension les compositions des troubadours, ne leur appartiennent que secondairement. La musique qui les accompagnait, ne — 6 - peut avoir été souvent qu'une copie de celle que le cuile catholique avait constituée , réduite en théorie et vulgari- sée dans les temples. Ce n'est pas toutefois que les mélodies du dehors, ce'les qui apportaient avec elles une inspiration nettement for- mulée, ne s'introduisissent en retour dans les chants sa- crés. Ceux-ci étaient de leur nature trop universels, pour ne pas accepter ce qui tendait à les étendre ou à les em- bellir. Les cantiques, les noëls, les proses spéciales , se ressentaient de ce voisinage toujours envahisseur. Il se formait ainsi un ensemble musical, dont on aurait eu de la peine à déterminer les origines diverses. Le plain-chant est sérieux, mais par là-même peu varié. II représente {'unité, avec certaines conditions, mais il ne saurait exclure la multiplicité des habitudes, suivant les pays. Aussi , M. de Coussemaker , un des membres les plus distingués du comité des travaux historiques, disait-il dans la séance du 16 avril 1885 : « Les 14= et lb= siècles notamment, ont vu se produire a de nombreux chants populaires. Si l'on interrogeait les « compositions des musiciens de cette époque , on serait « étonné de la quantité d'airs populaires qui ont servi de « thèmes aux messes , motets et autres pièces de la musi- « que d'église. La mention de ces airs est souvent de na- « turc à mettre sur la voie pour retrouver le texte de bien « des chansons considérées aujourd'hui comme perdues. » Ces rapports réciproques des chants sacrés et des chants profanes , durent également exister au moyen âge , entre les productions de la langue d'oil et celles uploads/Geographie/ chants-populaires-du-pays-castrais-par-anacharsis-combes.pdf
Documents similaires










-
27
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Mar 18, 2021
- Catégorie Geography / Geogra...
- Langue French
- Taille du fichier 34.9688MB