Dissertation rédigée : Alain dit : « Aimer c’est chercher sa richesse hors de s
Dissertation rédigée : Alain dit : « Aimer c’est chercher sa richesse hors de soi ». Dans Le Banquet de Platon, la déesse Diotime relate la naissance d’Éros en mettant l’accent sur sa double nature. Éros est le fils d’un dieu et d’une mortelle : Poros, représentant la ressource et la richesse intellectuelle et psychologique, et Pénia représentant la pauvreté et l’indigence. L'amour apparaît comme contradictoire car incarnant un état de manque et constituant une source de richesse. Cette idée de contradiction ou de paradoxe amoureux, comme étant une prise de conscience de sa pauvreté et un élan vers une richesse extérieure, nous la retrouvons chez le philosophe Alain qui affirme qu’ : « Aimer, c'est trouver sa richesse hors de soi. ». La citation d'Alain se présente sous forme d'une affirmation Claire et concise formulant une définition d'aimer. L’usage du présent de vérité générale ajoute à la force du postulat d’Alain qui s’apparente à une maxime. De même l’emploi du pronom démonstratif « ce » et du verbe être, établissant un lien d'équivalence entre aimer et trouver, a pour but la mise en relief de cette définition. Le verbe trouver implique de façon implicite l'idée d'une quête orientée vers l'extérieur et dont la finalité est un objet précieux ou nécessaire qui n'est que l'objet d'amour, d’où l’emploi du substantif « richesse ». Une richesse contradictoire à l’image de l’amour lui-même car appartenant au sujet « sa richesse » mais se trouvant « hors de soi ». L'objet de l’amour apparaît dans cette citation comme un moyen de remédier à un manque et à une pauvreté ou besoin qui ne peuvent être satisfaits que par l’autre, inscrivant dès lors le moi dans un mouvement vers l’extérieur et dans un attachement à l’objet ou l’être aimé. Aimer est-il quête ou trouvaille ? Est-on sûr de trouver sa richesse hors de soi ? Ce mouvement vers l'autre ou vers son objet d'amour est-il sans risque ? Dans quelle mesure aimer est-il le moyen de remédier à un manque et d'accéder à une richesse extérieure, sachant qu'il expose le sujet à la dépendance à l'aliénation et à la perte de soi ? Pour répondre à cette problématique, nous verrons, tout d’abord, qu’aimer est un mouvement vers l’extérieur pour y chercher sa richesse et son bonheur. Ensuite, nous démontrerons qu’aimer expose l’individu aux risques du narcissisme, de dépendance et d’aliénation. Finalement, nous montrerons comment l’amour désintéressé, empathique et philanthropique amène à aimer l’autre véritablement et à aimer Dieu. Plan : I- Aimer : à la quête d’une richesse extérieure 1- Aimer : signe de manque, de besoin et de misère 2- Élan vital et tentative de retrouver une unité perdue 3- Aimer : du moi vers l’autre (enrichissement, bonheur et engendrement) II- Aimer : narcissisme, dépendance et aliénation 1-Aimer est toujours narcissique 2-Dépendance et aliénation 3-L’autre entre possession et instrumentalisation III- Aimer l’autre, aimer Dieu 1-Trois formes d’aimer, trois richesses 2-Dépassement de soi et altruisme 3-Aimer Dieu Aimer est un élan du cœur qui porte le sujet vers un être ou un objet considérés comme beaux ou bons. Cette inclination vers son objet d’amour est l’une des plus puissantes émotions humaines. Aimer, passion ou action, est ce qui donne sens à l’existence humaine en permettant à l’individu de satisfaire le manque naturel inhérent à sa condition. Aimer est indissociable de l’idée du manque et du besoin. Il est un élan vers l’objet de son amour qui s’accompagne d’une prise de conscience de son manque et de son besoin de l’autre. Aimer c’est reconnaître implicitement son incomplétude et vouloir y remédier. C’est en effet l’idée que l’on retrouve chez Platon dans Le Banquet où il affirme que l’homme ne désire et n’aime que ce qui lui manque et que ce dont il a besoin : « ce qu'on n'a pas, ce qu'on n'est pas, ce dont on manque, voilà les objets du désir et de l'amour ». Aimer est révélateur de la misère et de l’indigence de l’existence humaine notamment sur le plan de l’être. « L’amour est signe de notre misère. Dieu ne peut aimer que soi. Nous ne pouvons aimer qu’autre chose. » affirme Simone Weil dans La pesanteur et la grâce. Cette passion qui s’oriente vers l’extérieur est le signe d’une imperfection inhérente à l’être humain, mais elle est aussi le moyen permettant d’accéder au beau et au bon comme le soutient Socrate dans Le Banquet. Aimer transporte ainsi le sujet vers l’objet de son amour dans un mouvement menant à l’extériorité. Le moi projette sur cet objet ses attentes, ses manques et ses désirs ou ce qui constitue une partie de son intériorité en voulant se l’approprier ou l’assimiler car il voit en lui un moyen d’augmenter sa puissance et sa capacité d’agir. Si aimer est révélateur d’un manque, il est en même temps ce qui permet de le combler. D’après Spinoza, aimer n’est pas qu’une simple passion, il est un besoin vital nécessaire à la continuité de l’espèce car renvoyant aux efforts et aux moyens déployés par l’homme dans le but de persévérer dans son être ou ce qu’il appelle son conatus essendi. Saint Augustin confirme la nécessité d’aimer pour la vie humaine en disant que : « Personne ne vit sans aimer ». L'amour est essentiellement une tendance qui attache l’homme à la vie et qui augmente sa force de vivre. C’est dans ce sens que Spinoza le définit comme étant « une joie accompagnée de l'idée d'une cause extérieure ». Cette joie trouve son origine dans l’image idéalisante que le sujet a de son objet d’amour et dans les potentialités dont il le dote. L’objet d’amour est souvent représenté comme une promesse de plaisir et de bonheur. Pour la psychologie, aimer dans sa forme passionnelle est un moyen de retrouver une unité perdue en renouant avec ses sources de plaisir. Cette perte de l’unité initiale est ce qui justifie le sentiment de manque et d’attachement à son objet d’amour comme à une moitié à laquelle on tente désespérément de s’unir. Dans Le Banquet de Platon, Aristophane présente le mythe de l’androgyne : à l’origine, il y avait une espèce androgyne, composée de mâle et de femelle et les hommes étaient heureux, mais leur hubris les a conduits à s’attaquer aux dieux qui, lassés de l'orgueil humain, ont séparé chaque individu en deux. Une séparation qui causa le malheur de l'homme et créa chez lui un sentiment permanent d’incomplétude. Aimer peut donc être considéré comme moyen de reproduire cette osmose originelle de l’être avec sa moitié. Aimer est considéré, pour plusieurs raisons, comme un dépassement de soi. En effet, le sujet porté par le sentiment amoureux, dépasse sa sphère intérieure pour explorer la sphère extérieure dans l’espoir de retrouver l’autre, de l’aimer et d’être aimé par lui. Oscar Wilde dit à ce propos : « Aimer c’est se surpasser ». Aimer, c’est manquer de quelque chose et aller à sa quête en dehors de soi pour se compléter et s’enrichir comme le dit Platon dans Le Banquet : « L’amour, par la privation où il est du bien et du beau, les désire ». L’objet ou l’être aimés sont désirés parce qu’ils sont considérés comme source de bonheur et d’enrichissement. Ils incarnent aux yeux du sujet amoureux le bon et le beau. Socrate dit que : « L’objet de l’amour c’est, en somme, d’avoir à soi ce qui est bon, toujours ». Aimer est une tendance vers l’autre entraînant un sentiment de joie et de bonheur. Le sujet se réjouit de la présence de l’autre (présence physique ou intellectuelle) et jouit d’un sentiment de plénitude et de bien-être en ayant l’impression d’avoir possédé le monde. Aimer et être aimé est une affirmation de soi, une reconnaissance et une motivation. L’existence du sujet prend ainsi plus de valeur : « C’est là le fond de la joie d’amour, lorsqu’elle existe: nous sentir justifiés d’exister » explique Sartre. Outre son sentiment de plaisir et de bonheur, le sujet amoureux devient créatif. Aimer est avant tout un acte de création et de production. Platon montre qu’aimer mène l’individu vers l’engendrement non seulement de corps mais de vertus et de beauté : « Ne crois-tu pas, au contraire, que cet homme, étant le seul ici-bas qui perçoive le beau par l'organe auquel le beau est perceptible, pourra seul engendrer, non pas des images de vertu, puisqu’il ne s'attache pas à des images, mais des vertus véritables, puisque c'est à la vérité qu'il s'attache ? ». Platon associe l’amour à la création. Une création qui se traduit essentiellement par la belle parole : « Touché par l’amour, tout homme devient poète ». Pour Victor Hugo, aimer dote l’homme de facultés insoupçonnables et le rattache à la vie : « L’amour fait songer, vivre et croire ». Hegel confirme l’idée de l’amour comme motivation et source de création en disant clairement que : «Rien de grand ne s’est accompli dans le monde sans passion». Mais même si aimer donne une raison d’être, une joie, il uploads/Geographie/ dissert-aimer-alain.pdf
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- Publié le Mai 04, 2021
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