1 Ohadata D-13-30 TRIBUNAUX DE COMMERCE Par François KOMOIN, Magistrat Actualit
1 Ohadata D-13-30 TRIBUNAUX DE COMMERCE Par François KOMOIN, Magistrat Actualités Juridiques, Edition économique n° 1 / 2011, p. 30. Un projet d’ordonnance important, qui bouleversera positivement le droit des affaires, plus largement le droit économique, passera bientôt du statut de projet à celui d’ordonnance. Il s’agit du projet d’ordonnance portant création, organisation et fonctionnement des tribunaux de commerce. Des juridictions de commerce sont en passe d’être instituées dans notre pays. A ce propos, un atelier s’est tenu à Grand-Bassam dans la première capitale de notre pays, en août 2010. Les acteurs concernés étaient invités à confronter leurs réflexions sur la thématique de la création des tribunaux de commerce en Côte d’Ivoire. Cette initiative (l’institution des tribunaux de commerce) est destinée à impacter positivement la vie des affaires, par l’amélioration du traitement des contentieux y relatifs. Quels sont les principaux traits du projet d’ordonnance ? Les lignes qui suivent ont pour objet de les mettre en lumière. Le projet, du point de vue formel, comprend 43 articles que regroupent sept (7) titres, respectivement consacrés aux dispositions générales, aux attributions des tribunaux de commerce, aux juges desdits tribunaux, à leur organisation, à la procédure, au contrôle de leurs activités, et aux dispositions diverses et finales. Au titre des dispositions générales, il faut retenir la définition du statut des tribunaux de commerce et le principe du caractère obligatoire de la conciliation. L’article 2 du projet d’ordonnance définit les tribunaux de commerce comme des « juridictions autonomes de premier degré ». Ce sont des juridictions spéciales, constituant un premier degré de juridiction et devant lesquelles la tentative de conciliation est obligatoire (v. les art. 6 et 22 al. 1 du projet). Le principe de la conciliation obligatoire traduit bien cette réalité que le monde des affaires abhorre les contentieux, réalité si bien exprimée par la célèbre formule : « un mauvais arrangement vaut mieux qu’un bon procès ». Au niveau des attributions des tribunaux de commerce (titre II), il faut noter qu’ils statuent en premier et dernier ressort, sur toutes les demandes dont l’intérêt du litige est supérieur à dix millions (10.000. 000) de francs ou est indéterminé, en premier et dernier ressort, sur toutes les demandes dont l’intérêt du litige n’excède pas dix millions (10.000.000) de francs (art. 8). Les demandes, pour relever de la compétence des tribunaux de commerce, doivent, selon l’article 7, porter sur : - des contestations relatives aux engagements et transactions entre commerçants au sens de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général ; - des contestations entre associés d’une société commerciale ou d’un groupement d’intérêt économique ; 2 - des contestations, entre toutes personnes, relatives aux actes de commerce au sens de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général. Toutefois, dans les actes mixtes, la partie non commerçante demanderesse peut saisir les tribunaux de droit commun : - des procédures collectives d’apurement du passif ; - plus généralement, des contestations relatives aux actes de commerce accomplis par les commerçants à l’occasion de leur commerce et de l’ensemble de leurs contestations commerciales comportant même un objet civil ; - des contestations et oppositions relatives aux décisions prises par les tribunaux de commerce. S’agissant du titre III relatif aux « Juges des tribunaux de commerce », on peut faire les observations ci-après. Il faut, de prime abord, relever que les tribunaux de commerce sont composés, suivant le système de l’échevinage, de deux catégories de juges : des juges professionnels (des magistrats de carrière), qui reçoivent le nom de « juges », et des juges non professionnels, appelés « juges consulaires ». Les deux catégories de juges sont choisies sur une « liste d’aptitude aux fonctions de juges », établie par la Chambre de commerce, pour les juges consulaires et leurs suppléants, et par le Ministre de la Justice, pour les juges professionnels. Ceci dit, la nature de l’acte les désignant dans les fonctions de juges n’est pas la même pour les deux catégories de juges. Ainsi, tandis que les juges professionnels sont nommés par voie de décret, donc par décision du Président de la République, les juges consulaires sont nommés par voie d’arrêté ministériel émanant du Ministre de la Justice, sur proposition de la Chambre de Commerce et d’Industrie. On peut remarquer que la question de la désignation des juges consulaires a été réglée de façon très judicieuse, en associant activement la Chambre de Commerce et d’Industrie à cette désignation. Le titre III du projet d’ordonnance traite plus du statut des juges consulaires que de ceux des juges professionnels. Ce qui n’est pas une surprise, puisque le statut de ces derniers est déjà défini par les textes particuliers qui les régissent. L’accession à la fonction de juge consulaire est subordonnée, outre la nomination par arrêté ministériel, à certaines conditions cumulatives énumérées par l’article 10. Il doit être de nationalité ivoirienne, âgé de trente (30) ans au moins et jouir de ses droits civils et civiques. Il doit avoir aussi exercé le commerce ou participé à la gestion d’une société commerciale ou à la direction d’une organisation professionnelle ou interprofessionnelle représentative du commerce ou de l’industrie ou de tout autre secteur d’activité assimilé, pendant une période de cinq (5) ans au moins. Enfin, il doit, ou n’avoir subi aucune condamnation pour crime ou à une peine d’emprisonnement ferme, pour escroquerie, faux et usage de faux, abus de confiance, abus de biens sociaux, banqueroute, ou n’avoir pas fait l’objet de règlement judiciaire ou de liquidation de biens. Dans le cas où l’une des conditions viendrait à manquer en cours d’exercice, le juge consulaire sera déchu de son mandat. La durée de ce mandat est, aux termes de l’article 11 alinéa 1 du projet, de 3 ans renouvelables. Aucune limite au mandat n’a été fixée, ce qui autorise à croire que le mandat est renouvelable indéfiniment. Avant d’accomplir ses fonctions, le juge consulaire prête serment. Il perçoit une indemnité dans l’exercice de ses fonctions. 3 Les fonctions du juge consulaire prennent fin en cas de démission, d’expiration du mandat, d’empêchement absolu, de déchéance, de décès. Du point de vue de l’organisation des tribunaux de commerce (titre IV), il faudra retenir que lesdits tribunaux sont composés : - d’un Président ayant au moins rang de Président de tribunal de première instance ; - de juges ayant rang de vice-président de tribunal de première instance ou de juges d’instance ; - de juges consulaires. Le Ministère public devant le tribunal de commerce est représenté par le Procureur de la République près le tribunal de première instance dans le ressort duquel se trouve le siège du tribunal de commerce. On verra que le Procureur de la République n’est pas tenu d’être présent à l’audience. On verra également qu’aucune procédure n’est obligatoirement communicable au Ministère public, sauf en matière de procédures collectives d’apurement du passif, où le dossier doit lui être obligatoirement communiqué (art. 25 du projet). On a fait en sorte que la présence du Ministère public ne soit pas source de pesanteur pour la justice commerciale. Ainsi, le Ministère public est présent sans être omniprésent. Le titre V relatif à la procédure permet de voir que celle-ci est marquée de l’empreinte de la célérité. Par exemple, selon l’article 22, le tribunal doit délibérer « dans les meilleurs délais », le délai de délibération ne pouvant excéder 15 jours, dès que l’affaire est en état d’être jugée. Si l’affaire n’est pas en état d’être jugée, le tribunal confie à l’un de ses membres, le soin de l’instruire en qualité de juge rapporteur, ce dernier disposant d’un délai de deux (2) mois à compter de sa désignation, pour rendre son ordonnance de clôture. En tout état de cause, le jugement doit être rendu dans un délai impératif de trois (3) mois, à compter de la première audience (art. 26 al. 3). Ce délai peut, à titre exceptionnel, être prorogé d’un (1) mois par ordonnance du Président du tribunal (art. 26 al. 4). Les jugements des tribunaux de commerce sont susceptibles d’appel, sauf si l’intérêt du litige n’excède pas dix millions (10.000.000 de francs), puisque dans ce cas, ils statuent en premier et dernier ressort (art. 8). La procédure d’appel se déroule devant des « chambres commerciales spéciales de la Cour d’Appel » (art. 27). La procédure devant la Cour d’Appel est aussi marquée par le sceau de la célérité, dans la mesure où les délais de prononcé de la décision et de l’instruction du juge rapporteur sont respectivement réduits d’un (1) mois (art. 30 al. 2). Le projet d’ordonnance a prévu le contrôle des activités des tribunaux de commerce (titre VI). Ce contrôle est confié à un organe appelé « Conseil de Surveillance ».Ce Conseil comprend : - un Président de chambre à la Cour de Cassation, désigné par le Président de ladite Cour, Président ; - l’Inspecteur Général des Services Judiciaires, vice-président ; - un Avocat, désigné par le Barreau, membre ; - un Administrateur des services judiciaires, désigné par le Ministre de la Justice, membre ; 4 - deux représentants des chambres consulaires et uploads/Geographie/ doctrine-tribunal-de-commerce.pdf
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- Publié le Aoû 21, 2021
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