VIER MARS 2010 DOM/S 7.60 € TOM/S 980 XPF BEL 7.60 € LUX 7.60 € ALL 7.90 € ESP

VIER MARS 2010 DOM/S 7.60 € TOM/S 980 XPF BEL 7.60 € LUX 7.60 € ALL 7.90 € ESP 7.60 € GR 7.60 € ITA 7.60 € PORT.CONT 7.60 € CAN 9.95 $CAN CH 13.50 FS MAR 65 DH TUN 7.5 TND MAY 9 € ISSN 01822411 Les Collections de L Histoire trimestriel janvier 2010 Les grandes migrations N ’:HIKPSH=[U[^U\:?k@a@r@a@a" M 05876 - 70 - F: 6,90 E - RD LES COLLECTIONS DE CARTHAGE A TUNIS 3 000 ans d’exception Association des Riverains de Carthage LEEMAGE HANNIBAL EN ITALIE Le général carthaginois qui fit trembler Rome (fresque de Jacopo Ripanda, xvie siècle, Rome, palais des Conservateurs). 1. Carthage et le monde punique La petite colonie phénicienne fondée, selon la légende, par la reine Didon, prospéra si bien qu’elle devint la plus redoutable adversaire de Rome : il fallut trois guerres pour en venir à bout. Association des Riverains de Carthage 14 LES COLLECTIONS DE L’HISTOIRE N°70 Au cœur d’ un réseau marchand Archéologue et historien, professeur à l’université de Neuchâtel, Hédi Dridi est notamment l’auteur de Carthage et le monde punique (Les Belles Lettres, 2009). « Par leur puissance, ils égalèrent les Grecs, par leurs richesses, les Perses », écrivait Appien. Carthage ne fut jamais à la tête d’un empire comme Rome, mais une plateforme commerciale puissante en Méditerranée. Tout a commencé en 814 av. J.-C. Par HÉDI DRIDI LUISA RICCIARINI/LEEMAGE A priori, rien ne laissait présager qu’une cité au nom aussi banal que Qart Hadasht (la ville neuve en phénicien) – qui a donné Carthago en latin puis Carthage en fran- çais – allait connaître une postérité aussi exceptionnelle. Certes, son destin tra- gique la rapproche de l’illustre Troie et elle fut un objet de récits littéraires et d’œuvres lyriques ou picturales. Que l’on songe au Salammbô de Flaubert, aux Troyens de Berlioz ou à la Didon faisant construire Carthage de Turner. Certains auteurs anciens, en attribuant aux Carthaginois des mœurs cruelles, ont conféré à cette cité une altérité et un exotisme barbare qui ne pouvaient que retenir l’at- tention des Anciens comme des Modernes. Mais la pos- térité de Carthage est avant tout due à ses confrontations avec le monde classique, d’abord avec les Grecs en mer Tyrrhénienne et en Sicile, ensuite avec les Romains. En se dressant comme le premier véritable obstacle à leur expansion en Méditerranée, Carthage est devenue indis- sociable du récit historique grec et romain. Les traditions littéraires, aussi bien orientales avec Ménandre d’Éphèse (iie siècle av. J.-C.) qu’occidentales Jeune homme Les artistes carthaginois faisaient preuve d’un éclectisme débridé nourri d’influences égyptiennes et grecques (terre cuite, vie siècle av. J.-C., Cagliari, Musée archéologique national). Association des Riverains de Carthage LES COLLECTIONS DE L’HISTOIRE N°70 15 avec Timée de Taormine (iiie siècle av. J.-C.) et Justin (iie siècle ap. J.-C.), s’accordent à situer la date de fon- dation de Carthage par des Phéniciens de Tyr durant le dernier quart du ixe siècle av. J.-C., plus particu- lièrement en 814 av. J.-C., si l’on adopte le comput issu du récit de Timée de Taormine. Selon ce der- nier, Carthage fut fondée trente-huit ans avant les premiers Jeux olympiques (776 av. J.-C.). Cette date, longtemps sujette à débat, semble désormais accep- tée par la majorité des chercheurs, plutôt comme une date conventionnelle que comme une date absolue. La recherche archéologique et le réexamen des trou- vailles anciennes suggèrent en effet que le site était occupé au cours de la première moitié du viiie siècle, voire la fin du ixe siècle av. J.-C. d’après les récentes datations par le radiocarbone. DES ARISTOCRATES DE TYR La tradition littéraire (cf. p. 16) indique que le premier noyau d’habitants de la nouvelle cité était composé d’aris- tocrates tyriens et de Chypriotes auxquels s’étaient pro- bablement joints des autochtones libyens. Les données de l’archéologie ne contredisent pas l’idée d’une popula- tion cosmopolite dès l’origine. L’un des niveaux les plus anciens du sanctuaire du tophet (cf. Françoise Briquel- Chatonnet, p. 22) a livré de la céramique eubéenne d’Occident associée à de la céramique phénicienne. Si on y ajoute la céramique locale retrouvée dans les plus anciens niveaux d’habitat, cela suggère la présence de familles mixtes dans la Carthage des premiers temps. L’anecdote du crâne de bœuf et du crâne de cheval (cf. p. 16) laisse entendre que la cité aspirait dès l’ori- gine à la puissance, contrairement aux autres fonda- tions phéniciennes. Carthage n’était pas un simple port de commerce, comme il en existait tant le long du litto- ral africain ou andalou. Sa position était relativement JEAN-PAUL MOREL/DR Celtes Illyriens Celtes cisalpins Thraces Ibères Numides Maures ivoire, or, esclaves, peaux de fauves, aromates, œufs d’autruche blé blé, huile, vin blé, papyrus cuivre plomb, fer, argent, garum ambre vin, huile, armes, marbre, mercenaires vin, huile or, bois Éphèse Cyrène Barcè Abdère Méthone Tarente Alalia Nikaia Antipolis Agathè Emporiae Sagonte Sybaris Crotone Élée Pithécusses Cumes Arezzo Chiusi Tarquinia Rome Massalia Locres Rhégion Syracuse Athènes Sparte Corinthe Naucratis Alexandrie Salamine Lepcis Magna Oea Meninx Acholla Hadrumète Malte Neapolis Utique Hippone Igilgili Malaca Carteia Lucentum Carthagène Tharros Sulcis Nora Cagliari Ibiza Tingis Gadès Thapsus Sabratha Biruta Byblos Sidon Tyr Carthage Mer Égée Mer Tyrrhénienne Mer Ionienne Mer Rouge Mer Adriatique MER MÉDITERRANÉE OCÉAN ATLANTIQUE MER NOIRE Sardaigne Crète Chypre Sicile Corse Baléares Pyrénées A l p e s EMPIRE PERSE ACHÉMÉNIDE ÉTRURIE Èbre Rhône Nil Légendes Cartographie 500 km Métropole phénicienne au IXe siècle av. J.-C. Le domaine carthaginois au Ve siècle av. J.-C. Comptoir phénicien sous domination carthaginoise Expédition d’Hannon blé Route maritime Produit exporté Empire perse Grèce et colonisation grecque Extension maximale du domaine étrusque Un « hub » antique Carthage est dès le vie siècle av. J.-C. au cœur d’un réseau de colonies et de comptoirs. Vers 500 av. J.-C., le navigateur Hannon passe peut-être, avec 30 000 colons, le détroit de Gibraltar, avant de redescendre le long des côtes de l’Afrique, sans doute jusqu’au Cameroun actuel. Interface entre l’Afrique et les empires et cités bordant la Méditerranée, Carthage prélevait sur les marchandises transitant par ses ports des impôts qui alimentaient le Trésor et permettaient de lever localement des armées si besoin était. Amphores De nombreux vestiges attestent la vitalité du commerce avec le reste de la Méditerranée. Les amphores servaient au transport, surtout maritime, du vin, de l’huile d’olive, du garum (saumure), du blé (amphores, assiette et lampe à huile retrouvées à Carthage, fin vie siècle av. J.-C.). Association des Riverains de Carthage 16 LES COLLECTIONS DE L’HISTOIRE N°70 marginale par rapport aux routes empruntées par les navires phéniciens qui longeaient la côte septentrionale de l’Afrique du Nord et la pointe méridionale de la Sicile. Elle n’était pas non plus une simple colonie car sinon elle n’aurait pas supplanté aussi rapidement son aînée et voisine Utique, l’une des plus anciennes villes du bassin occidental de la Méditerranée. On pourrait alors avan- cer que la fondation de Carthage résulte d’un projet politique et social différent de celui de la métropole, Tyr. Le premier noyau urbain de Carthage s’est proba- blement développé autour d’un lieu de culte qui pour- rait être celui situé sous l’actuelle rue Ibn-Chabbat dans la plaine littorale et partiellement mis au jour par les fouilles de l’Institut archéologique de Rome. La ville s’est ensuite étendue sur un périmètre circonscrit du nord à l’ouest par une série de collines qui forme un arc de cercle et au sud par le sanctuaire du tophet. La colline de Byrsa, présentée par la tradition clas- sique comme l’acropole, n’a été lotie que dans le dernier demi-siècle de la vie de la cité, probablement en raison de la pression démographique due aux conflits avec le roi numide Massinissa. A son sommet, le temple d’Es- culape (selon toute vraisemblance la divinité salutaire Eshmoun) serait donc d’implantation récente et ne serait pas la divinité poliade de la cité comme on l’a longtemps cru. Protégée par la colline de Sidi Bou Saïd au nord, et par le lac de Tunis, renforcée par une muraille simple au sud, Carthage s’est dotée d’un triple système défensif de près de 5 km pour barrer l’isthme à l’ouest et se protéger des incursions terrestres. Appien a décrit la muraille qui pouvait abriter les défenseurs de la ville, mais aussi leurs éléphants et leurs chevaux. A l’intérieur de cette ceinture, la population atteignait les 700 000 personnes au milieu du iie siècle av. J.-C. selon Strabon. La société carthaginoise, héritière des sociétés proche-orientales, était fortement hiérarchisée. La richesse, le pouvoir politique et religieux étaient déte- nus par une oligarchie jalouse de ses privilèges, mais pas nécessairement conservatrice. Sur le plan poli- tique et contrairement à sa métropole Tyr ou à sa rivale Syracuse, Carthage n’a jamais confié le pouvoir à un roi ou à un tyran. Ses institutions semblent avoir été HAMBOURG, HAMBURGER KUNSTHALLE ; DEAGOSTINI/LEEMAGE LA RUSE DE DIDON S elon le mythe de fondation de Carthage, Élissa, la sœur du roi de Tyr, s’enfuit de la cité avec des fidèles après l’assassinat de son mari. Elle fait escale à Chypre, où uploads/Geographie/ histoire-de-carthage.pdf

  • 21
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager