La question du séparatisme : Le Québec et la lutte pour la souveraineté JANE JA
La question du séparatisme : Le Québec et la lutte pour la souveraineté JANE JACOBS Traduction française du livre The Question of Separatism : Quebec and the Struggle for Sovereignty (1980) La Question du séparatisme : le Québec et la lutte pour la souveraineté a été publié en anglais en 1980. L’urbaniste philosophe Jane Jacobs, américaine de naissance et torontoise d’adoption, y prenait parti sans équivoque pour l’indépendance du Québec qui, à son avis, serait bénéfique pour le Québec, pour le Canada et pour Montréal. Trente ans après sa publication initiale, le passage du temps a confirmé la plupart de ses prédictions, et son constat de la nature coloniale de l’économie du Canada et du Québec est plus que jamais d’actualité. Plus qu’un simple appui au projet souverainiste, ce livre représente une contribution incontournable à la com préhension des enjeux de l’avenir pour le Québec et pour le Canada. Traduction et présentation : Marc Collin (2010) PRÉSENTATION Publié en 1980, The Question of Separatism : Quebec and the Struggle over Sovereignty de Jane Jacobs est probablement un des meilleurs plaidoyers jamais écrit en faveur de la souveraineté du Québec. Dans un article de 2006, Robin Philpot rapportait ces paroles de l’architecte montréalais Joseph Baker dans The Gazette : « Si j’étais René Lévesque, j’achèterais tous les exemplaires du livre de Jane Jacobs et je le distribuerais gratuitement à l’ouest du boulevard Saint-Laurent. Aussi, je le traduirais et je retirerais le livre blanc. » C’était, remarque Philpot, deux mois avant le référendum de 1980. Cela n’est jamais arrivé. Chose tout à fait curieuse, en trois décennies personne au Québec n’a voulu ou n’a trouvé moyen de traduire ce petit ouvrage afin de le rendre accessible à la population qui est directement concernée par son propos. Pourtant, quatre livres de Jane Jacobs, auteure très populaire, ont été traduits et publiés au Québec depuis 1990. Cet appui à la souveraineté du Québec ne venait pas de n’importe qui. Auteure, activiste, philosophe de l’architecture et de l’urbanisme, Jane Jacobs s’est mérité une renommée mondiale et une grande popu larité auprès des architectes et urbanistes et du grand tout en s’impliquant notamment contre un projet d’autoroute et contre les fusions municipales en 1997. Devenue citoyenne canadienne en 1974, elle a vécu dans cette ville qu’elle aimait passionnément jusqu’à sa mort en 2006 à l’âge de 89 ans. Autodidacte et anticonformiste, surnom mée affectueusement la « mère Jacobs » par ses détracteurs, Jane Jacobs opposait une démarche humaniste à la spécialisation, aux méthodolo gies mécaniques et à la domination du quantitatif. S’inspirant de sources aussi diverses que l’histoire, la biologie, la littérature et l’expérience person nelle, elle privilégiait l’observation, le qualitatif et l’analyse des rapports complexes entre les différents aspects des choses. Elle est connue surtout dans le milieu de l’urbanisme, mais ses essais ont aussi porté sur le développement économique et la phi losophie politique, sans toutefois perdre de vue son intérêt pour ces milieux extraordinairement créatifs que sont les grandes villes. Son ouvrage Cities and the Wealth of Nations a été au développement économique ce que Death and Life of Great American Cities était à la plani fication urbaine : une critique des théories désin carnées qui évacuent l’humain et le qualitatif. Selon ces théories, ce sont les investissements de capitaux qui sont la source du développement économique. Mais d’où provient d’abord ce surplus de richesse à La question du séparatisme 3 public canadien-anglais et américain. Son livre le plus connu, The Death and Life of Great American Cities, publié en 1961, s’est vendu à 250 000 exem plaires, a été traduit en six langues, et a eu une |influence profonde pendant des décennies dans le monde anglo-saxon et en Europe, révolutionnant la manière dont on aborde le développement des villes. Elle a été nommée officier de l’ordre du Canada en 1996 et a reçu le Outstanding Lifetime Contribution Award de l’American Sociological Association en 2002. Deux prix annuels ont été créés à son nom, le prix Jane Jacob au Canada en 1997, et la médaille Jane Jacobs, créée à New York par la fondation Rockfeller en 2007. Née en 1916 dans la petite ville de Scranton en Pennsylvanie, Jane Jacobs s’est installée à New York dans les années trente. Amoureuse de la vie citadine riche et diversifiée de son quartier de Greenwich Village, elle s’est impliquée dans les affaires urbaines en critiquant la conception alors dominante du développement des villes, axée sur les mégaprojets, la destruction de la trame urbaine, les banlieues-dortoirs, l’étalement urbain et ses corol laires, le tout-à-l’auto et les grandes autoroutes. En 1968, elle a quitté les États-Unis pour s’installer à Toronto, parce qu’elle s’opposait à la guerre du Vietnam et pour soustraire ses deux fils au risque d’être conscrits. Elle y a poursuivi sa carrière La question du séparatisme entre l’économie et la culture, la qualité de l’en vironnement, le bien-être des populations ni même les aspirations à l’indépendance nationale (sujet du présent livre). Au contraire, ces éléments humains vont de pair et constituent les facettes essentielles du développement économique. Enfin, l’observation de la vie économique dans les cités conduit Jane Jacobs à critiquer la notion d’économie nationale et la centralisation des poli tiques économiques qui en découle. Les lieux de la vie économique ne sont pas les nations mais les villes. L’histoire nous montre que leur existence est beaucoup plus pérenne que celle des ensembles territoriaux dont elles font partie. Elles survivent aux royaumes, aux empires et aux nations que font et défont les guerres et les conquêtes. Noyaux de population humaine, cosmopolites, bouillonnantes de créativité, de réseaux et d’échanges, elles ont chacune leurs forces et leurs besoins particuliers. Les politiques économiques centralisées sont néfastes parce qu’elles s’appliquent en bloc à de nombreuses villes dont les besoins ne sont pas les mêmes, qui n’en sont pas au même point de développement, ou qui ne fonctionnent pas au même rythme. Puisque les politiques nationales sont déterminées par les intérêts d’un ou plusieurs centres économiques dominants, la tendance qui en résulte est une crois sance démesurée de ces centres dominants et un La question du séparatisme 5 investir ? La vraie source de cette richesse, affirme Jane Jacobs, se trouve dans la créativité des com munautés urbaines denses, complexes et diversi fiées, propices aux échanges, à la complémentarité, au bouillonnement culturel et à l’innovation. Pour qu’une économie reste prospère, il faut que le capital accumulé soit réinvesti de manière à stimuler cette créativité. Or les investissements ne stimulent pas tous également la créativité ; certains y sont plus favo rables que d’autres. Le bénéfice d’un investisse ment ne se mesure pas au taux de profit, ni même au nombre d’emplois créés, mais à la qualité de l’activité créatrice qu’il met en branle. Tout dépend dans quoi on investit. Jane Jacobs voit le développement économique à l’image d’un écosystème qui lie mixité et com plémentarité. Comme dans un écosystème, il y a des étapes de développement qui ne peuvent être sautées. D’où les échecs répétés de ces mégaprojets qui ne tiennent pas compte des réalités du milieu. Par exemple, on implante des usines d’hélicoptères dans des communautés où il faudrait plutôt encou rager une multitude d’entreprises autochtones plus modestes, comme une manufacture de bicyclettes. En réintroduisant le qualitatif et les facteurs humains dans la vie économique, Jane Jacobs montre qu’il n’y a pas de choix déchirant à faire La question du séparatisme paresseuse » de l’exploitation des ressources. C’est là une idée originale, qui renouvelle complètement les cadres du débat sur la souveraineté. Jane Jacobs a eu la bonne idée d’appuyer sa thèse sur une comparaison entre le Québec et la Norvège, une nation assez similaire quant à la taille, la population, le climat et les ressources, et qui a réalisé son indépendance pacifiquement au début du 20e siècle. À lui seul, le chapitre qui relate l’histoire de l’indépendance de la Norvège, relativement peu connue, vaut le détour et regorge d’enseignements précieux pour les Québécois. Elle se livre ensuite à une réflexion philosophique sur la taille des nations et des organismes et sur l’équilibre entre indépen dance et connexions au sein des sociétés humaines. Enfin, elle formule des commentaires extrêmement intéressants sur la notion de dualité canadienne, qu’elle juge impraticable, et sur le projet de souve raineté-association de René Lévesque, dont le seul point négatif, à son avis, réside dans les compromis qui en affaiblissent la cohérence. Trente ans après sa publication initiale, le pas sage du temps a confirmé la plupart des prédictions de Jane Jacobs, et son constat de la nature coloniale de l’économie du Canada et du Québec est plus que jamais d’actualité. La question du séparatisme dépérissement des autres régions. C’est pourquoi, faute de pouvoir en revenir à l’ancienne notion de cités-États, Jane Jacobs croit que l’économie a tout à gagner à ce que les nations soient plus petites, afin de permettre aux villes de jouir de politiques économiques plus souples et répondant mieux à leurs besoins. La uploads/Geographie/ jane-jacobs-la-question-du-separatisme.pdf
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- Publié le Mai 14, 2021
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