1 1 UNE REGION EN LETHARGIE LA HAUTE VALLEE DU TARAVO en CORSE DU SUD JEAN-BAPT

1 1 UNE REGION EN LETHARGIE LA HAUTE VALLEE DU TARAVO en CORSE DU SUD JEAN-BAPTISTE LECCIA 1985 2 2 UNE REGION EN LETHARGIE LA HAUTE VALLEE DU TARAVO EN CORSE DU SUD Jean-Baptiste Leccia Thèse de Géographie et d’Aménagement Université de la Méditerranée Directeur de recherche : André de Réparaz 1985 3 3 En couverture portrait d’un notable début XXème siècle : Vincent LECCIA (Sampolo) 4 4 A la mémoire de mon père et à tous les miens qui reposent dans la Haute Vallée du Taravo A ma mère qui vit loin de la moyenne vallée de ses ancêtres A ma femme continentale qui a su comprendre la réalité de mes racines A ma sœur et à son fils A mes fils et mes petits-fils pour qu'ils n'oublient pas, et qu'ils soient des corses d'aujourd'hui. 5 5 AVANT PROPOS J'ai commencé ce travail il y a quarante deux ans, sans le savoir bien entendu mais je me rends compte au moment de la rédaction définitive, une fois achevées les investigations nécessaires, combien j'ai été imprégné, depuis ma naissance, de tout ce qui touche à la HAUTE VALLEE DU TARAVO et plus généralement à la CORSE entière. Au fur et à mesure de mes recherches, les documents, les enquêtes, les témoignages recueillis ont réveillé en moi les souvenirs des propos de mon père, de ma mère et de mes grands parents, les lectures en tout sens sur la question corse et les innombrables discussions que j'ai pu avoir aussi bien dans les villages de la vallée du TARAVO que partout dans les endroits du monde où j'ai habité et où j'ai fréquenté les colonies corses de la DIASPORA. Chez moi, en bonne place dans la salle de séjour, se trouvait un parchemin daté de 1562 frappé du sceau de la Sérénissime République de CENES, qui accordait à mes ancêtres le droit de port d'armes « y compris l'arquebuse ! » et des exemptions d'impôts en tout genre. Ce document fait état de l'ancienneté de ma famille, « parmi les plus anciennes de l'au- delà des Monts »... Cela m'a toujours fait rêver et a incontestablement constitué l'élément majeur qui m'a conduit au présent travail ; surtout que mon père se désolait de la disparition de l'arbre généalogique de la famille, brûlé dans l'incendie de la maison familiale de SAMPOLO en 1920. « On remonte à UGO COLONNA », m'affirmait-il. J'ai toujours eu envie d'en savoir davantage... et j'ai du attendre le présent travail pour apprendre que UGO COLONNA n'a vraisemblablement jamais existé. En fait ma connaissance de la Corse jusqu'à l'âge de quinze ans s'est limitée à ce rapport mythique et à deux mois de vacances tous les deux ans où j'ai accumulé les souvenirs d'enfance dans la vallée du TARAVO. La Corse, c'était pour moi cet univers du village où se mêlaient pêle -mêle l'évocation d'une société disparue, les enterrements, les dernières vendanges où on foula le raisin aux pieds, les ânes chargés de bois, les châtaignes, les fours du village qui fonctionnaient encore... et cette vendetta très meurtrière à laquelle j'ai assisté bien malgré moi à l'âge de onze ans à MOCA CROCE. Un univers si différent du monde dans lequel je vivais, un univers désuet, austère et violent, désabusé et finissant. Ceux de ma génération n'avaient en général, je crois, pas d'autre attitude vis à vis de leur patrie. Et envisagions-nous la Corse comme une patrie? Je ne crois pas. Nos parents et nos grands parents ont constitué sûrement la génération la plus « française », façonnée par les deux guerres mondiales, l'aventure coloniale et la Résistance. 6 6 Le reste c'était le « passé », à commencer par la langue corse que mes parents n'ont pas jugé utile de m'apprendre. Les années soixante seront le grand tournant de la Corse contemporaine : un pays nouveau se crée dans les soubresauts, les contestations et la violence sans qu'on puisse discerner les chemins à prendre. Le fatalisme devient interrogation et cette interrogation engendre des attitudes fondamentalement différentes selon qu'elle entraine l'indifférence, l'incompréhension, l'angoisse ou l'engagement. Suivant la personnalité, le tempérament, il y a maintes manières de s'engager : l'écriture, le verbe et toutes les formes de la violence au service d'une cause ou d'une autre. C'est traduire le problème en forme de camps. Ne peut-on pas s'engager au service de la Corse ? Considérer que quel que soit son destin, la Corse aura besoin de tous ceux qui par leur compétence, leur qualification et leur ENCAGEMENT, pourront permettre à ceux qui auront en charge le devenir de l'Ile de disposer de tous les outils nécessaires pour son développement économique, social, culturel, politique ? Cela est, en tout état de cause et pour le moment du moins, notre option : une attirance affective et un engagement intellectuel. Ma vie professionnelle m'a d'abord conduit longtemps hors de FRANCE et m'a amené, par goût, par tempérament et aussi par hasard, à devenir essentiellement un homme de terrain au service de l'aménagement de l'espace dans les pays du TIERS MONDE puis, par curiosité, pendant quatre ans au service de la veuve et de l'orphelin, en tant qu'avocat au barreau de MARSEILLE avant de me trouver pris dans les grandeurs et les servitudes de l'enseignement de l'aménagement à l'Ecole d'Architecture de MARSEILLE sur les problèmes du TIERS-PONDE et dans son antenne de CORTE, que j'ai créée, à enseigner l'urbanisme et l'aménagement depuis 1978. C'est donc en néophyte de la recherche, déformé par un vécu professionnel qui ne m'y prédispose pas, et avec un goût prononcé de l'Histoire que m'a donné mon éducation, que j'ai entrepris le présent travail. Toutes ces données vont me conduire à m'impliquer de manière personnelle dans la mise en forme de mes recherches sur le HAUT TARAVO et, pour être honnête, il s'agit là d'un choix délibéré. Pourquoi en effet ne pas porter témoignage ? A condition de ne pas trop tomber dans l'anecdote, le récit n'en sera que plus vivant et facile à lire. 7 7 INTRODUCTION DU CHOIX DE NOTRE METHODE Nous avons parfois été frappé par le coté quelque peu rébarbatif de certains travaux universitaires - qu'on nous pardonne - qui, par leur rédaction et leur présentation, se trouvent de fait réservés aux chercheurs eux-mêmes et ne peuvent que difficilement constituer des instruments de travail utiles aux décideurs. Nous avons donc choisi, au contraire, d'atteindre deux objectifs qui ne nous paraissent pas inconciliables : d'une part être utile à la recherche en portant notre réflexion, nos hypothèses et nos conclusions sur une région de la Corse très mal connue, d'autre part constituer un outil pour les acteurs du développement en même temps qu'un ouvrage susceptible d'être lu par les habitants de notre canton dont beaucoup sont avides d'en savoir davantage sur leur passé et sur leur devenir. Plus généralement notre ambition sera d'apporter notre pierre (bien modeste nous en sommes conscients), à la réflexion et à l'action sur les régions en mal de développement dans les pays industrialisés. Dans cette optique, le domaine de notre étude se prête admirablement à notre tentative. L'actuel CANTON DE ZICAVO a constitue une entité dès le MOYEN AGE lorsque GENES dessina la carte administrative de la Corse, reprenant par là même les limites des PIEVES du temps de la domination pisane, elles-mêmes issues de la souveraineté papale. Nos premières recherches ont confirmé ce que nous savions déjà : la PIEVE DE TALAVO, actuel CANTON DE ZICAVO, avec ses possessions littorales où s'imbriquaient si étroitement les intérêts des deux PIEVES voisines d'ISTRIA et d'ORNANO, se doit d'être abordée comme un élément d'un ensemble géographique plus vaste : la VALLEE DU TARAVO. Aujourd'hui un canton qui constitue la HAUTE VALLEE, et deux autres qui se partagent moyenne et basse vallée, jadis trois PIEVES composant une entité : ceci est suffisant pour justifier une démarche dans le temps afin de déterminer les permanences et les rémanences de la société traditionnelle chez les Talavais d'aujourd'hui. Notre méthode n'a rien d'original : aucune étude sur la Corse contemporaine n'a pu se passer d'un appel important à l'Histoire. Allons même plus loin... C'est un trait général de l'insulaire que de se situer dans la dimension historique d'une communauté villageoise et d'une famille avec un sentiment qui implique l'appartenance à ce qui a été, est et sera sur un espace donné. C'est donc sur l'espace, et les rapports du Talavais avec son espace, que s'appesantira notre réflexion dans toute sa dimension géographique et historique en gardant présent le double objectif que nous nous sommes fixés de contribuer aux recherches sur la Corse et de constituer un outil pour le développement. 8 8 Nous avons déjà dit que nous n'arrivions pas sur ce terrain d'études vierge de toute connaissance et de toute réflexion et il est certain que nous ne pouvons nous détacher des constatations et des impressions que nous avons accumulées depuis l'enfance et qui s'imposent d'ailleurs dès les premières vérifications comme une évidence à tous les observateurs : le canton de ZICAVO ne cesse de se uploads/Geographie/ la-haute-valle-du-taravo-these-jb-leccia-1985-version-site-pdf.pdf

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