RAYMOND RENAUD Chevalier dans l’Ordre de l’Honneur et du Mérite d’Haïti Docteur
RAYMOND RENAUD Chevalier dans l’Ordre de l’Honneur et du Mérite d’Haïti Docteur en droit Licencié des lettres Diplôme de l’Ecole de Notariat de Paris LE REGIME FONCIER EN HAITI Préface de son Excellence, Monsieur Sténio VINCENT Président de la République d’Haïti Paris 1 LES EDITIONS DOMAT-MONTCHRESTIEN F.Loviton& Cie 160, Rue Saint-Jacques, 160 1934 A LA MEMOIRE DE MON PERE Qui fut mon premier maître Il aima passionnément la terre et lui demeura fidèle, tou- jours. Puisse ma plume, comme sa charrue, faire une besogne utile, féconde, et suivre le sillon honnête où il m’a devancé. Mon ambition ne va pas au-delà. R.R.. 2 3 PREFACE Port-au-Prince, le 3 septembre 1934 Cher Monsieur Renaud, Il n’est peut-être pas trop tard pour que je m’acquitte envers vous d’un double devoir : des remerciements à vous présenter ; une promesse à tenir. Les remerciements vous sont dus en retour du sentiment qui me vaut d’avoir été préféré à tout autre – bien mieux qualifié – pour la PREFACE à votre thèse. Cette partie de ma tâche m’est plutôt aisée : je n’ai, pour la remplir, qu’à laisser parler mon cœur. Que je regrette de ne pouvoir en dire autant de l’autre devoir – quelque chose comme un autre danger – écrire une PREFACE !... Et à votre ouvrage, encore !... A mon avis, ce travail de préparation du lecteur ne peut avoir toute sa raison d’être que s’il participe, d’une façon ou d’une autre, au travail qu’il précède, l’éclairant ou le justifiant. Dans l’un et l’autre cas, il importe, par conséquent, que l’ouvrage à préfacer ait été considéré, examiné, approfondi. Toute chose qui demande du temps, forcément. Or, depuis notre conversation touchant l’objet de votre actuelle démarche, c’est à peine, en vérité, si j’ai pu disposer d’un moment pour m’occuper d’autre chose que des questions urgentes, délicates, complexes – dont ma 4 fonction de Chef de Gouvernement s’est trouvée particulièrement surchargée, ces mois derniers, et maintenant encore. Il y a là, cependant, qui m’attend… cette fameuse « promesse »…, Et, aussi, votre intention – manifeste – de ne pas m’en libérer !... Et, ce qui est de beaucoup plus grave, il y a surtout la date qui approche, où il vous faudra remettre votre manuscrit à votre président de thèse et tenir vos engagements envers votre éditeur. Que faire, dans ces conditions ?... Tout considéré, le plus simple est encore de s’exécuter. C’est ce que je fais, résigné, mais confiant dans votre bienveillance aussi bien que dans celle de vos lecteurs. «La lecture de la thèse n’est pas indispensable, affirmez-vous, pour en rédiger l’exorde…, sur la foi d’un résumé… » Voilà qui est encourageant pour moi. Il ne faudrait tout de même pas arrêter, par une déclaration imprudente, le chercheur qui s’apprêterait à nous aborder, dans l’espoir de quelques renseignements substantiels et profitables, Car, unePREFACE, après tout, ça doit avoir son utilité. Mais, j’y pense, n’est-ce point, aussi, être utile que, dans telle ou telle circonstance, délivrer un certificat de sincérité, par exemple ? N’est-ce point être encore utile que d’apporter, dans telle controverse éventuelle, son attestation sur la probité scientifique de l’une, au moins, des parties en cause ? Donc, ne serait-ce qu’à ce seul titre, « l’exorde », que vous 5 sollicitez de moi pour votre travail, n’aura pas été tout à fait inutile, puisqu’il établit un fait que, personnellement, j’ai eu à constater : le souci d’exactitude qui vous a constamment animé dans la préparation de votre ouvrage. Et j’ajoute que ce n’est pas seulement avec votre intelligence que, pendant votre séjour de documentation parmi nous, vous avez approfondi notre Histoire, notre Géographie, notre Législation, nos coutumes, nos problèmes, nos anxiétés et même nos angoisses: il me semble que vous y avez mis aussi un peu de votre cœur. Toutes vos démarches, toutes vos activités, en témoignent. Cela méritait bien d’être signalé, et, pour ma part, c’est avec un réel plaisir que je le proclame ici. A en juger par l’aperçu analytique que vous m’avez communiqué, c’est un ouvrage considérable que celui que vous vous êtes proposé. Il apporte d’abord, au point de vue général, une contribution fort intéressante à l’étude comparée des divers régimes fonciers, des mécanismes de ces institutions juridiques, de leur évolution historique, de leurs répercussions économiques et sociales. Mais la tâchedifficile – je ne dis pas pour un étranger, car un Français n’est jamais un étranger parmi nous - mais pour un jeune juriste qui n’avait jusqu’alors sur Haïti que des informations assez vagues –la tache difficile était d’étudier, sous ses divers aspects, la législation immobilière haïtienne, d’y apporter une méthode si sûre, et de parvenir à dégager, des réalités d’ordre économique et politique propres à notre milieu – et de leur complexité est évidente – tous les inconvénients de notre actuelle organisation foncière et la nécessité d’une réforme qui s’adapte aux nouvelles conditions 6 de l’activité générale du pays et assure, notamment, le développement normal de sa production agricole. Vous y étés parvenus avec une aisance qui mérite tous les éloges. Et c’est bien la première fois, il faut le dire, que les matières immobilières et hypothécaires spécifiquement haïtiennes ont été traitées avec la belle unité scientifique dont témoigne la composition de votre ouvrage et qui permet d’avoir désormais une vue d’ensemble de notre Droit immobilier et des rapports nécessaires de ses diverses parties avec nos particularité nationales que vous avez si bien mises en relief. Qu’il s’agisse, en effet, de l’histoire de notre propriété foncière, de la situation spéciale de paysannerie haïtienne, de notre problème agraire, de la question si compliquée du cadastre, on ne peut qu’applaudir à la pénétration, à la pondération et à l’impartialité avec lesquelles vous avez su apprécier et critiquer les opinions et les thèses, sans jamais vous écarter de l’objectivité nécessaire à la clarté et l’exactitude de vos explications. V os recherches sur le cadastre m’ont particulièrement intéressé, parce que la question de l’établissement du cadastre haïtien est une de celles qui m’ont le plus vivement préoccupé nos Gouvernements. Elle est intiment liée à deux autres question palpitantes d’actualité: celles du crédit agricole et de l’impôt foncier. Mais comment parler de crédit agricole dans l’état de «quasi-anarchie foncière» qui sévit encore en Haïti? Et l’impôt foncier lui-même ne doit-il pas être conditionné par un nouvel aménagement de l’agriculture nationale, arrachant notre production aux conditions de précaritéinvétérée où elle continue de végéter? Et le cadre vicieux s’élargie ainsi sans cesse, puisque la mise en valeur des terres par l’irrigation et par la technique 7 n’est possible qu’au moyen de nouvelles ressources de l’Etat qui ne peuvent provenir précisement que d’impôts nouveaux et, en l’espèce, d’un impot foncier solidement et équitablement assis, et destiné à remplacer les taxes scélérates et insensées que nous maintenons encore malgré nous, hélas ! l’exportation de nos principales denrées... De telle sorte que tout l’ensemble du problème se ramène en definitive à cette à cette réforme immobilière que vous préconisez et qui a fait l’objet de si judicieuses observations de votre part. J’avoue que l’œuvre juridique accomplie en ces dernières années et dans divers pays au sujet de l’existence, du transfert, des sûretés et de la preuve des droits immobiliers, ne m’est pas très familière. Mais il me semble que les nouvelles législations immobilières et hypothécaires révèlent une tendance marquée à modifier assez profondément le régime de la propriété foncière. Déjà le Code Civil allemand 1900 et le Code Civil Suisse de 1912, abandonnant la notion du transfert de la propriété par le seul consentement des parties, sont revenus à la vente romaine, la vente simplement génératrice d’obligations personnelles, puisque, dans ces pays, la propriété ne peut être pratiquement transférée aujourd’hui que par une formalité matérielle et substantielle analogue a la tradition et qui consiste dans l’inscription au registre foncier. Il y a la une très curieuse évolution du Droit, remontant à ses sources et rétablissant d’anciennes notions juridiques, de vieux systèmes qu’on pouvait croire pour toujours abolis. Ce qui prouve que l’expérience, les nécessités de la pratique : la vie du Droit, en un mot, est plus forte que les pures spéculations des juristes et ne s’accommode que de bases réalistes satisfaisant aux besoins des peuples, besoins 8 permanents ou changeants. Si de vieux pays comme l’Allemagne et la Suisse ont décidé de transformer leur organisation foncière devant les exigences du crédit foncier, faisant de l’inscription au Registre, non seulement un mode de preuve très simple qui réagit sur l’existence même du droit, facilite les contrats immobiliers et donne les plus sûres garanties aux transactions mais encore y attachant une sorte de foi publique et positive dans l’attribution du droit de propriété, comment un petit pays comme le nôtre qui a tant besoin de crédit pour son développement économique, ne chercherait-il pas à établir, dans son organisation juridique, des conditions d’acquisition et de transfert de la propriété immobilière inspirant la plus entière confiance aux prêteur ?... Cependant, je doute que pour assurer, en Haïti, la sécurité des titres, les facilités de transmission des immeubles et uploads/Geographie/ le-regime-foncier-haitien-raymond-renaud-1934.pdf
Documents similaires










-
84
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Oct 24, 2022
- Catégorie Geography / Geogra...
- Langue French
- Taille du fichier 0.2899MB