Vocabulaire de ... Co!!ectùm dirigée par Jean-Pierre Zarader Le vocabulaire de

Vocabulaire de ... Co!!ectùm dirigée par Jean-Pierre Zarader Le vocabulaire de Merleau-Ponty Pascal Dupond Professeur de Première supérieure Dans la même collection Le vocabulaire de Bergson, par Frédéric Worms Le vocabulaire de Berkeley, par Philippe Hamou Le vocabulaire de Fichte, par Bernard Bourgeois Le vocabulaire grec de la philosophie, par Ivan Gobry Le vocabulaire de Hegel, par Bernard Bourgeois Le vocabulaire de Heidegger, par Jean-Marie Vaysse Le vocabulaire de Hume, par Philippe Saltel Le vocabulaire de Kant, par Jean-Marie Vaysse Le vocabulaire de Maine de Biran, par Pierre Montebello Le vocabulaire de Maître Eckhart, par Gwendoline Jarczyk et Pierre-Jean Labarrière Le vocabulaire de Marx, par Emmanuel Renault Le vocabulaire de Merleau-Ponty, par Pascal Dupond Le vocabulaire de Nietzsche, par Patrick Wotling Le vocabulaire de Platon, par Luc Brisson et Jean-François Prade au Le vocabulaire de saint Thomas d'Aquin, par Michel Nodé-Langlois Le vocabulaire de Sartre, par Philippe Cabestan et Arnaud Tomes Le vocabulaire de Schopenhauer, par Alain Roger Le vocabulaire de Spinoza, par Charles Ramond Le vocabulaire de Suarez, par Jean-Paul Coujou ISBN 2-7298-0488-9 © Ellipses Édition Marketing S.A., 2001 32, rue Bargue 75740 Paris cedex 15 Le Code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L.122-5.2° et r'a), d'une part, que les cc copies ou reproductions strictement réservées à J'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective ». et d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration. cc toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite» (AI1. L.l22-4). Celte représenlation ou reproduction. par quelque procédé que ce soit constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 ct suivants du Code de la pro- priété intellectuelle. «Comme le tisserand [ ... J, l'écrivain travaille à l'envers il n'a affaire qu'au langage et c'est ainsi que soudain il se trouve environné de sens ». Ce que Merleau-Ponty nous apprend ici de l'écrivain éclaire bien la difficulté de le lire. Son œuvre philosophique s'élabore en une « parole parlante» qui déconcerte son lecteur en déplaçant les écarts réglés de signification déposés dans l'univers de la culture ou dans la « parole parlée» et en l'invitant à une initiation qui est indivisiblement de langue et de pensée. Cette parole neuve, dit-on parfois, substitue l'éclat de la métaphore à la rigueur austère du concept. Un tel jugement reste dans l'extériorité. Pour qui accepte d'entrer dans le champ d'expé- rience qu'elle nous propose, cette parole dessine avec sûreté les essences que trace le recoupement de l'expérience par elle-même et elle répond à toutes les exigences de la rationalité philosophique. Ce vocabulaire s'est proposé de faire voir quelques fils de la trame, afin que le lecteur de Merleau-Ponty, par la merveille du tisserand, soit, à son tour, environné de sens. CN EP LMG NC P PM pp RC S SC SNS VI Abréviations La Nature, Notes, Cours du Collège de France (Seuil, 1995) Éloge de la philosophie (Gallimard, 1953 et 1960) Lettre à Martial Guéroult (<< Un inédit de M. Merleau- Pont y », Revue de métaphysique et de morale, n° 4, 1962, p.401-409) Notes de cours -1959-1961 (Gallimard, 1996) Le Primat de la perception et ses conséquences philosophiques (Cynara, 1989) La Prose du monde (Gallimard, 1969) Phénoménologie de la perception (Gallimard, 1945) Résumés de cours-Collège de France, 1952-1960 (Gallimard,1968) Signes (Gallimard, 1960) la Structure du comportement Sens et non-sens (Gallimard, 1996) Le Visible et l'invisible (Gallimard, 1964) Les notes de travail citées sans référence font partie des documents inédits déposés à la Bibliothèque Nationale. Les termes allemands figurant dans les citations ont été traduits entre crochets. 4 Chair La notion merleau-pontienne de chair n'est pas étrangère à l'usage cou- rant du terme, car elle correspond en partie à ce que la phénoménologie appeIIe « corps vécu» ou « corps animé» (S 287), c'est-à-dire le corps percevant et se mouvant, désirant et souffrant; mais elle s'écarte du sens habituel dans la mesure où elle vise, non pas la différence entre le corps- sujet et le corps-objet, mais plutôt, à l'inverse, l'étoffe commune du corps voyant et du monde visible, pensés comme inséparables, naissant l'un à l'autre, l'un pour l'autre, d'une « déhiscence» (VI 190, note) qui est l'ouverture du monde. La chair nomme donc proprement et fondamenta- lement l'unité de l'être comme « voyant-visible ». ** Radicalisant les acquis de la catégorie de structure (où s'efface l'opposition de l'extériorité spatiale et de l'idée, du pur dehors et du pur dedans), la chair nomme d'un même mouvement 1/ l'être « paradoxal» de notre corps comme « être à deux feuillets» «chose parmi les choses et, par ailleurs, celui qui les voit et les touche» (VI 180), visible et voyant, corps phénoménal et corps objectif, dedans et dehors; 2/ l'être paradoxal du monde qui est aussi un « être des profondeurs, à plusieurs feuillets ou à plusieurs faces », surface et profondeur, visible et invisible, fait et « essence charnelle», phénomène et « être de latence», donation et retrait, lumière et ténèbres; et enfin 3/ l'indivision de l'être du corps et de l'être du monde la chair est « l'indivision de cet être sensible que je suis et de tout le reste qui se sent en moi» (VI 309), elle « est le sensible au double sens de ce qu'on sent et de ce qui sent» (VI 313). Mais elle n'est cette indivision que dans la mesure même où elle est aussi la ségrégation ou la fission qui fait naître la masse sensible du corps voyant dans la masse sensible du monde (VI 179). L'unité de cette indivision et de cette fission est « la réversibilité qui définit la chair» (VI 189) l'ontologie de la chair pense le lien entre la chair du voyant - ma chair - et la chair du visible ou du monde, non plus du tout en termes de rapport sujet-objet, mais en termes de «correspondance de son dedans et de mon dehors, de mon dedans et de son dehors» (VI 179, note), de réversibilité (VI 189) ou d'enveloppement réciproque, d'entre- lacs ou de chiasme «Mon corps comme chose visible est contenu dans le grand spectacle. Mais mon corps voyant sous-tend ce corps visible et tous les visibles avec lui» (VI 182). La chair, ajoute Merleau-Ponty, n'a 5 de nom dans aucune philosophie elle ne correspond à aucune des caté- gories de la métaphysique, car elle « n'est pas matière, n'est pas esprit, n'est pas substance» (VI 184), ni composé de corps et d'esprit (VI 185), elle récuse même le partage entre la chose et l'idée, l'individualité spatio- temporelle et l'universalité (VI 184, 188), elle est « élément », au sens où l'étaient le feu, l'air, l'eau et la terre chez les « physiologues » présocra- tiques, « chose générale» (VI 184) ou « dimension» (\II 188). Elle est une « notion dernière» (VI 185), de rang ontologique, non anthropolo- gique (VI 179). *** Le terme de chair, qui reprend la notion husserlienne de Leib, n'apparaît guère, dans la Phénoménologie de la perception, que dans la formule « en chair et en os» (leibhaft). En effet Merleau-Ponty y désigne le « corps animé », par différence avec le « corps objectif », par les termes de « corps propre» ou de « corps phénoménal». Le terme de chair devient une catégorie ontologique fondamentale au moment où Merleau-Ponty comprend que l'ouvrage de 1945 n'a pas réussi à penser l'unité du corps phénoménal et du corps objectif (ou aussi bien du corps sentant et du monde sensible), car le champ transcendantal (malgré tout l'effort de penser une véritable co-originarité du Soi et du monde) est pensé, en dernier ressort, comme suspendu à l'acte d'un sujet, d'une «existence », d'un « esprit », d'une liberté à travers la relation de l'esprit et de la nature (fond inhumain sur lequel l'homme s'installe ou structure « figée» de l'existence), c'est la relation sujet-objet qui, subti- lement, se perpétue. Dès lors il s'agit d'échapper à la subjectivité du transcendantal, de le penser, non plus comme existence, mais comme déhiscence, rapport narcissique du visible à lui-même « qui me traverse et me constitue en voyant» (VI 185). Chiasme * Reprenant un terme de rhétorique (le chiasme est une figure de style comprenant quatre termes dont les rapports sont l'inverse de ce que lais- serait attendre la symétrie, comme être riche en défauts et pauvre en qua- lités), Merleau-Ponty fait intervenir la notion de chiasme à chaque fois qu'il tente de penser non pas l'identité, non pas la différence, mais l'identité dans la différence (ou l'unité par opposition) de termes qui sont habituellement tenus pour séparés, tels que le voyant et le visible, le 6 signe et le sens, l'intérieur et l'extérieur, chacun n'étant lui-même qu'en étant l'autre. ** Le concept de chiasme recueille la vérité phénoménologique de la distinction entre le sens d'être de l'intériorité et le sens d'être de l'exté- riorité, tout en refusant de les considérer comme séparés ou séparables. Ainsi uploads/Geographie/ le-vocabulaire-de-merleau-ponty 1 .pdf

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