t I I autrepart I Les arts de la rue dans les sociétés du Sud Éditeurs scientif
t I I autrepart I Les arts de la rue dans les sociétés du Sud Éditeurs scientifiques : Michel Agier et Alain Ricard Cahiers des sciences humaines Nouvelle série numéro 1 Couverture : Antoinette Sturbelle Photo Élisabeth Deliry-Antheaume, O ORSTOM O Éditions de l’Aube, ORSTOM, 1997 ISBN 2-87678-328-2 ISSN 1278-3986 Sommaire Michel Agier, Alain Ricard : Introduction ............................................................................ 5 Julie Cavignac : Romances d’exil. Littérature de cordel et migrations au Brésil ........................................................................................................................... 15 Michel Agier : Cosmographies africaines. Le samba des Noirs brésiliens ........................................................................................................................................................ 41 Janet Topp Fargion : À Zanzibar, le taarob des gens c( sans nom >> . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59 Carol Muller : Bottes en caoutchouc, migrants et Fred Astaire : danse ouvrière et style musical en Afrique du Sud ............................................................. 71 Peter Probst : Danser le sida. Spectacles du nyuu et culture populaire chewa dans le centre du Malawi ..................................................................................................... 91 Marie-José Jolivet : Tenue de ville, vêtements de fête, ou l’art créole du paraître .................................................................................................................. 113 Jean-François Werner : Les tribulations d’un photographe de rue africain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 ............................................................ 129 François Grignon : Les pierrots du bidonville, peintres de matabu à Nairobi, Kenya ........................................................................................................................................................... 151 Résumés .................................................................................................................................................... 16 1 Hors-texte : L ’ a r t des rues. Murs peints en Afrique du Sud, Texte et photos d’ÉZisabeh Deliry-Atttheaatne ................................................................... I-XVI Introduction Michel Agier * , Alain Ricard ** Les villes des pays du Sud sont souvent décrites en termes de rupture, de crise, de pauvreté ou de conflit. Quel que soit son bien-fondé, cette approche reste incomplète, car il existe aussi, dans ces villes, des dynamiques qui rendent pour chacun la vie plus supportable, les drames quotidiens plus compréhensibles et qui peuvent même être porteuses d’espoir. Ce premier numéro d’Aictrepart (Cahiers des sciences humaines de YORSTOM) vise à recenser différentes formes d’art populaire et non officiel qu’on appelle les << arts de la rue D . I1 s’agit de saisir la présence fugace de nouveaux cadres rituels d’expression (danses, carnavals, théâtres de rue, etc.), l’émergence de nouvelles valeurs morales (exprimées dans les poèmes, les chansons, les peintures murales) et l’expression de nouvelles solidarités (qui sont à l’origine d’un entrepreneuriat culturel relevant en grande partie de I’économie familiale et << informelle s). La vie urbaine favorise les innovations culturelles, hétérodoxes. Ces innovations ne sont-elles pas précisément liées au changement social rapide et à la multiplication des contacts que chaque individu ou chaque groupe tisse avec diverses espèces d’altérité (ethnique, linguistique, raciale, socio-économique, etc.) ? Miroir des identités, la ville est aussi un cadre ouvert, pluriel et syncrétique. Les articles réunis dans ce volume décrivent et analysent diverses créations artistiques populaires observées sur le terrain, en Afrique et en Amérique du Sud. Nous les présentons selon un ordre de proximité esthétique. Proches du langage et de la vie de tous les jours, les livrets de poèmes en prose (les cordel du Brésil) [ J . Cavignac] parlent des migrations, du ( < manque de la terre d’origine )>, comme on dit en portugais, et de l’immoralité des grandes villes ressentie par les poètes migrants. Ils nous conduisent logiquement vers d’autres poèmes populaires brési- liens, mis en chanson dans les sambas de carnaval des Noirs de Bahia, qui asso- cient le texte, la musique et la danse pour former un style dit africanisé [M. Agier]. Le sens social de la musique et de la danse de rue est encore étudié dans les textes qui traitent de deux grands styles de danses populaires, observés cette fois en Afrique : à Zanzibar, les nombreuses transformations et sécularisa- tions du Taarab, qui est à l’origine une musique de transe [ J . Fargion], et la danse # Anthropologue, directeur de recherche à I’ORSTOM, membre du SHADYC (CNRS-EHESS), Centre de la Vieille Charité, Marseille. +* Spécialiste des littdratures et du theltre de l’Afrique noire, directeur de recherche au CNRS, membre du CEAN, IEP, Bordeaux. Autrepart (I), 1997 : 5-14 6 Michel Agier, Alain Ricard des mineurs d’Afrique du Sud exécutée dans la rue avec des bottes en caoutchouc Cgzlmboots) [C. Muller]. En passant de la danse aux formes élémentaires de mise en scène, et de l’Afrique du Sud au Malawi, on découvre l’incorporation, dans des rituels de sortie de masques, de nouveaux personnages qui parlent de I’épidémie du sida [ I ? Probst]. La mise en scène, au sens goffmanien, introduit plus générale- ment à la présentation de soi, dont traite I’étude des parures et du paraître dans la culture créole, en Guyane, abordés à partir de la promotion par des associations actuelles d’un habillement féminin traditionnel et distingué [M.-J. Jolivet]. L‘image de soi est encore celle qui est façonnée à bon marché par la bourgeoisie dioula de Bouaké en Côte d’Ivoire, grâce au travail infatigable des photographes de rue et de famille [J.-E Werner]. Enfin, c’est par l’image graphique que s’expri- ment les peintres sur véhicules (les matata, taxis collectifs) à Nairobi [E Grignon], laissant filer dans les couleurs arc-en-ciel de leurs tableaux mobiles les héros et les rêves de leurs commanditaires. Manières de faire et performance Une dimension de ce projet nous paraît aujourd’hui essentielle. I 1 s’agit de faire émerger à l’attention scientifique des types de problématiques trop absentes de la production des sciences sociales contemporaines en France, sur l’Afrique et 1’Amé- rique latine en particulier. Elles furent pourtant bien ébauchées dans les années cinquante. C’est le cas par exemple avec les films Jagzm- [1954] ou Noi zm Noir [1957] de Jean Rouch, qui rendirent compte de la vie des migrants d’Accra et des travailleurs d’Abidjan tout autant que le firent ses écrits scientifiques. On le voit également avec les travaux de Pierre Verger [1957, 19811 ou de Michel Leiris [1958] sur les aspects théâtraux et esthétiques des rituels de possession. Certes, ces auteurs vécurent une rencontre toute particulière entre des trajectoires artistiques individuelles (qui allaient les conduire respectivement vers le cinéma, la photogra- phie et la littérature) et l’histoire des groupes et petites sociétés qu’ils étudièrent. Ils en recherchèrent la part esthétique plus attentivement sans doute que ne l’au- raient fait d’autres chercheurs dans les mêmes situations ethnographiques. Que Leiris, par exemple, ait vu du < ( théâtre vécu >> et < ( montré )), selon ses termes, dans la mise en transe des adeptes du xcir en Éthiopie [ o p . c i t . : 351, ne tient pas seulement au caractère de ce qui était observé mais à la manière d’observer. Comme en écho à cette attention des ethnologues-artistes africanistes, les tra- vaux de Michel de Certeau [1990 (Itre éd. : 1980)] ont représenté une étape importante dans la révélation (au sens photographique du terme) d’une dimen- sion esthétique de l’ordinaire et du quotidien. Les manières d’utiliser et de détourner les choses, les systèmes ou les espaces, les façons de jouer ou de déjouer les impositions, la sagesse de << faire avec )), tout cela compose un < ( art des coups D [ o p . c i t . : 351 qui permet ces <( arts de faire )> que le photographe Bak (dont J.-E Werner, dans ce volume, nous raconte les tribulations urbaines) semble bien connaître ! Michel de Certeau donne l’exemple du phénomène de la << perruque )> : il s’agit, dans les ateliers, du détournement d’une machine pour y réaliser, sur du temps volé au temps de travail et avec des matériaux de récupéra- tion, des objets sans contrainte et sans finalité de profit (tel ce jeune tourneur Introduction 7 togolais qui garde chez lui les petites cartes d’Afrique en métal qu’il réalise sur le tour de son usine). Parce qu’elle est interstitielle et résiduelle, la perruque est cer- tainement représentative de ces arts ( ( ordinaires ) ) et quotidiens par lesquels celui qui les accomplit ( ( ruse pour le plaisir d’inventer des produits gratuits destinés seulement à signifier par son œuwre un savoir-faire propre ) ) [op. d. : 45, souligné par l’auteur]. (( Faire avec ) > est le principe de base de la ( < sociologie du bricolage ) ) de Roger Bastide [1970]. C’est aussi ce qui permet de désigner le lieu de création des arts populaires : le monde quotidien et ordinaire, d’où émergent tant bien que mal des œuvres par le détournement de certaines fonctions (comme la peinture de (e tableaux >> sur les murs, les camions ou les taxis), par l’occupation de lieux inter- médiaires (comme la sortie de la mine où l’on uploads/Geographie/ les-arts-de-la-rue-dans-les-societes-du-sud.pdf
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Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Nov 21, 2022
- Catégorie Geography / Geogra...
- Langue French
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