MONNAIES MÉROVINGIENNES DU GÉVAUDAN PAR MM. LE VICOMTE DE PONTON D'AMÉCOURT BT
MONNAIES MÉROVINGIENNES DU GÉVAUDAN PAR MM. LE VICOMTE DE PONTON D'AMÉCOURT BT E. DE MORE DE PRÉVIALA. EXTRAIT De VAnnuaire de la Société française de Numismatique et d'AixhéoloQie 1883. PARIS IMPRIMERIE PILLET ET DUMOULIN 3, HUE DES GRANDS-AUGU3TÎNS, 5. 1883 MONNAIES MÉROVINGIENNES DU GÉVAUDAN PAR M. LE VICOMTE DE PONTON D'AMÉCOURT ET M. E. DE iMORÉ DE PRÉVIALA. Le nom de Gévaudan est formé de deux mots primitifs : Gabal et tan dont le premier est le nom d'mi peuple gaulois, nommé par César Gabali^ et le second un radical commun à plusieurs bran- ches de la famille linguistique indo-européenne, qui peut se traduire par « région desn. L'agglomération de ces deux substan- tifs, latinisée dans la forme Gabaletanum^ signifie donc : pays des Gabales. On trouve, dans des contrées bien diverses des compo- sés analogues : en France, le Lavedan (pays de Lourdes), le Gabardan (pays de Cabaret), le Grésivaudan (pays de Grenoble); dans la presqu'île Ibérique, la Lusitanie ; en Afrique, la Mauré- tanie, et il nous paraît probable que l'indoustan, le Turkestan, l'Afganistan, leBéloutcliistan,etc., sont des noms composés de la même manière. Nous verrons, par les légendes des monnaies, que le mot Gava- letanum ou Gabaletanum eut un second sens indiquant une qualité et qu'il remplit le rôle d'adjectif pour désigner « ce qui est Gabale » ; dans ce sens, analogue à celui des mots Samaritain^ Métropolitain^ Tripolitain^ Tingitati, etc., la formule que nous rencontrerons souvent : BANNACIACO GAVALETANO doit se traduire par Bannassac le Gabalitain; 2 MONNAIES MÉROVINGIENNES DU GÉVAUDAN. s'ilii'en étaitpas ainsi, la numismatique mérovingienne nousoffri- raitune autre formule qui serait BANNACIACO • IN • GAVALE- TANO, coraraeelle nous donne les formes WICO • IN-PONTIO (Vie en PonthieuouQuentovvic), NASIO • IN -BARRINSE (Naix en Bar- rois), CANNACO-INRVTENECIVE(Cannac dans la cité Rutène). Les Oabales étaient un peuple de la première Aquitaine. Leur cité ou diocèse avait pour limites : à TEst, le territoire des Ilelviens (Viviers), qui faisait partie de la Viennoise, et celui des Vellaves (Le Puy), dépendant de la première Aquitaine; au Nord, la haute Auvergne, de la première Aquitaine ; à l'Ouest, le pays des Rutènes (Rodez), encore de la première Aquitaine; enfin, au Sud, les dio- cèses de iXîmes et d'Uzès, de la première Narbonnaise. Le terri- toire des Cabales correspondait à peu près au département actuel de la Lozère et au diocèse de Mende^ On sait que la métropole de la première Aquitaine était Bourges ; le nom gaulois de la capi- tale des Cabales était A 7identum, mais ce nom qui est inscrit sur la table de Peutinger et dans Ptolémée (raêaXoi xal r.okk Avoscioov) a disparu, comme la plupart des noms des villes gau- loises, pour faire place au nom du peuple; Andcritum est devenu Gabalus, parce que toute la vie politique de la citoijentieié Gabale, la civilas, comme on disait alors, la cité, comme on dit aujour- d'hui sans bien comprendre souvent le sens complexe de ce mot, se concentrait dans son enceinte. L'emj;lacement ainsi que le nom de cette antique capitale se retrouvent dans le village de Javols. Le siège de la cité et de l'évêché fut transporté plus tard à Mende [Mimas) à cause du martyre de l'évoque saint Privât, qui eut lieu en cette ville, en 408. Strabon et Pline donnent une autre forme grammaticale au nom du peuple Cabale, le premier écrit raga>v£iç, le second Cabales. 1. Lorsqu'on a formé le département de la Lozère, on a enlevé tout le canton de Saugues, qui appartenait au Gévaudan et on l'a donné à la Haute-Loire. Par com- pensation on a donné à la Lozère une panie du canton de Villefort, qui appartenait à rancic-u diocèse d'Alais, ainsi qu'une portiju du canton de Meyrueis qui dépen- dait de l'évèclic de Vabres. MONNAIES MÉROVINGIENNES DU GKVAUDAN. 3 Les Cabales étaient intelligents, industrieux et très aptes au commerce. Peu favorisés par leur sol montagneux, de difficile accès et souvent couvert de neiges {terram Gabalum satis nivo- sam, disait Sidoine Appolinaire), ils émigraient périodiquement vers des régions plus fortunées et rapportaient chez eux le produit de leur travail; de même que les Auvergnats allaient exercer cer- taines industries dans les régions septentrionales de la Gaule, eux, qu'on appelait les Auvergnats du Sud, se répandaient dans les provinces méridionales et au delà des monts pour se livrer aux travaux les plus pénibles; pendant tout le moyen âge et jusqu'à nos jours ils ont continué à parcourir l'Espagne, exerçant diverses professions, notamment celles de rétameurs, marchands de parapluies, etc. On les désignait sous le nom de Gavaches, Gavac/ios, et ce n'est pas sans un certain mépris que les espa- gnols prononçaient ce mot, parce que les hommes du Gévaudan ne reculaient pas devant les plus humbles métiers. Donnons quelques notes historiques rapides sur le Gévaudan et particuUèrement sur la nature de la domination qu'exercèrent plusieurs rois francs sur cette petite région. Des dix-sept provinces qui composaient la Gaule à la fin de rEm[)ire, et qui furent presque toutes conquises par Clovis et par ses fils, dix seulement fiu'ent transformées en quatre royaumes au profit des premiers descendants de ce prince. La première et la deuxième Germanie (Mayence et ( Pologne) avec la première Belgique (Trêves), plus une partie de la deuxième Belgique (Reims) formèrent à peu près en bloc le royaume d'Austrasie et la part de Thierry 1". Le reste de la deuxième Belgique, dont Noyon fut en quelque sorte la métropole sous l'évêque saint Éloi, et toute la deuxième Lyonnaise (Rouen) formèrent également en bloc le royaume de Neustrie. La quatrième Lyonnaise (Sens), puis la première (Lyon) et la Séquanaise (Besançon), enfin la Yiennoise (Vienne) et les Alpes Grecques et Pennines (Moutiers et Martigny) formèrent, au moyen de plusieurs remaniements, au premier partage, les royaumes 4 MONNAIES MÉROVINGIENNES DU GÉVAUDAN. d'Orléans et de Paris, et,, au deuxième partage, le royaume de Paris et le deuxième royaume de Bourgogne. Il restait la troisième Lyonnaise (Tours), la première et la deuxième Aquitaine (Bourges, Bordeaux), la Noverapopulanie (Eause),conquisesparCloYis, la première Narbonnaise(Narbonne) appartenant encore aux Wisigoths, la deuxième Narbonnaise(x\ix) et les Alpes maritimes (Embrun) encore occupées par les Ostro- goths. Narbonnene fut jamais soumise aux rois Francs, Embrun ne fut annexé que par Théodebert P''. C'est donc dans le nord de la Gaule que les rois Francs se constituèrent une sorte d'unité territoriale ; ils se partagèrent les cités du Midi à peu près au hasard, comme on se partage des sacs d'écus ou des titres dans une succession, n'en faisant cas, en quelque sorte, que pour le montant du revenu qu'on pouvait en tirer. C'étaient pour eux plutôt des bénéfices que. des domaines. Les habitants du midi de la Gaule n'entrevoyaient leurs rois qu'à de rares intervalles, quand ceux-ci allaient faire la guerre au delà des monts ou venaient réprimer des insurrections, comme celles que fomentaient parfois les turbulents Gascons. Bu reste, profondément fidèles aux mœurs romaines adoucies par le christianisme, c'est-à-dire à la plus haute civilisation que le monde antique ait connue, régis par les fortes institutions qui avaient survécu au grand empire, contemporains et compagnons des Sidoine Apollinaire, des Ausone, des Forlunat, des Grégoire de Tours, des Isidore de Séville et de tant d'autres esprits distin- gués^ gouvernés par les évêques qui exerçaient alors la suprême puissance morale, habitués et résignés par leur foi aux dévasta- tions intermittentes causées par les avalanches de barbares, abri- tés tant bien que mal sous la protection des rois Francs qu'ils croyaient acheter par leur impôt et qui formait leur rempart du côté du Nord, ces peuples sans histoire, et relativement heu- reux, connaissaient à peine le nom de leur monarque et se croyaient toujours les sujets du grand empire. Un siècle s'était écoulé depuis le sac de Rome, ils avaient entendu raconter les MONNAIES MÉROVINGIENNES DU GRVAUDAN. Tj hauts faits du roi Théodoric, des rois Euric et Alaric, du roi Clo- vis, du roi Goiidel)aud, du roi Tliéodebert, mais les noms inscrits sur leurs monnaies étaient encore des noms d'Empereurs : i^nas- tase, Justin l'\ Justinien, Justin II, Constantin, Maurice Tibère, Phocas, Héraclius. Romains de race, puisque depuis six siècles leurs ancêtres avaient fait partie de Rome, ils étaient toujours romains de nation; les rois n'étaient pour eux que des fonction- naires de Rome, des consuls ou despatrices. Leurs pères n'avaient- ils pas vu jadis grandir et passer sa vie au milieu d'eux l'élève de l'orateur Exupère, le premier des princes créés rois par les empe- reurs de Constantinople,le roi Hannibalien, gendre et petit-neveu de Con>tantin? Bien plus, Rome semblait renaître, car soixante ans après sa prise par les barbares, Bélisaire venait de la rendre à l'empire. Les Cabales en paiticulier étaient dans des conditions toutes spéciales pour conserver jusqu'à la dernière extrémité leur caractère romain. Garantis contre les rafales du Nord par l'é- norme massif des montagnes d'Auvergne, ils n'éprouvaient que de faibles remous de ces grands cyclones humains qui, du nf au V siècle, balayèrent tant de fois le littoral de l'Océan et le bassin du Rhône. Ils consentirent comme les uploads/Geographie/ monnaies-merovingiennes-du-gevaudan-par-de-ponton-d-x27-amecourt-et-e-de-more-de-previala 1 .pdf
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- Publié le Mai 21, 2021
- Catégorie Geography / Geogra...
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