David NOËL Université de Caen Année scolaire 2015-2016 La « première victime du
David NOËL Université de Caen Année scolaire 2015-2016 La « première victime du fascisme » : Retour sur l’assassinat de Joseph Fontaine Mémoire de Master 2 d’Histoire Parcours Recherche Historique Sous la direction de M. Michel BOIVIN « La première victime du fascisme » : retour sur l’assassinat de Joseph Fontaine 2 « La première victime du fascisme » : retour sur l’assassinat de Joseph Fontaine 3 REMERCIEMENTS La rédaction d’un mémoire de master 2 nécessite de nombreuses heures de travail personnel de recherche dans les fonds d’archives et d’écriture. Pour leurs conseils et leur disponibilité, je tiens à remercier le service des archives municipales d’Hénin-Beaumont ainsi que le service des archives départementales du Pas-de- Calais. Mes remerciements vont aussi à Christian Opigez, qui s’est immédiatement proposé de m’accompagner pour rencontrer les témoins qu’il connaissait. Merci à lui pour ses suggestions et son aide précieuse. Je tiens également à remercier Jacques Kmieciak qui m’a fait découvrir Thomas Olszanski. Nos échanges ont toujours été fructueux et je lui souhaite bonne continuation pour la suite de ses travaux de recherche. Merci à Pierre Outteryck pour ses connaissances encyclopédiques sur l’histoire du Parti communiste et de la Résistance dans la région et pour ses conseils avisés. Merci à mon directeur de recherche, M. Michel Boivin, pour avoir accepté de m’encadrer et m’avoir prodigué aide et conseils qui m’ont permis d’achever ce travail. Enfin, un merci tout particulier à mon épouse Frédérique pour sa patience, ses encouragements et son soutien sans faille qui m’a porté tout au long de la rédaction de ce mémoire de master 2. « La première victime du fascisme » : retour sur l’assassinat de Joseph Fontaine 4 SOMMAIRE Introduction Première partie : Un drame à Hénin-Liétard A. Hénin-Liétard, 1934 B. Le drame du 11 avril C. Une ville et une région ébranlées Deuxième partie : L’enquête et les procès A. L’enquête B. Les procès C. Des verdicts qui ne passent pas Troisième partie : Après l’affaire A. L’union est un combat B. De la répétition des cantonales à la victoire du Front Populaire C. L’affaire Joseph Fontaine dans la mémoire collective Conclusion Sources et bibliographie Table des illustrations Table des matières « La première victime du fascisme » : retour sur l’assassinat de Joseph Fontaine 5 INTRODUCTION Si les événements parisiens du 6 février 1934 sont bien connus et ont donné lieu à plusieurs études, tout le monde a aujourd’hui oublié l’affaire de l’assassinat de Joseph Fontaine, à Hénin-Liétard, le 11 avril 1934. La mort d’un mineur communiste dans une rixe avec les Camelots du Roi au cours d’une contre-manifestation antifasciste, deux mois après les événements du 6 février, avait pourtant à l’époque fait la une de la presse régionale et nationale qui s’était passionnée pour les procès devant le tribunal correctionnel de Béthune et la cour d’assises de Saint-Omer. Le drame d’Hénin-Liétard s’inscrit dans un contexte : celui de l’après 6 février 1934. L’année 1934 marque en effet l’apogée de l’activité ligueuse dans une région du Nord alors confrontée à la crise économique et à la montée du chômage qui s’accompagne, dans le bassin minier, d’expulsions de travailleurs étrangers, essentiellement des mineurs polonais. Au plan international, tous les regards se tournent vers l’Allemagne hitlérienne où le chef communiste allemand Ernst Thaelmann, emprisonné depuis le 3 mars 1933, doit être jugé devant un tribunal nazi. Le 30 juin 1934, c’est la nuit des longs couteaux : sur l’ordre Hitler, Röhm, le chef des S.A., plus d’une centaine de ses hommes et plusieurs personnalités comme le général Von Schleicher sont assassinés par les S.S. A peine un mois plus tard, à la mort du président Hindenburg, le 2 août 1934, Hitler se proclame président-chancelier sans rencontrer d’opposition. Au plan national, parti communiste et parti socialiste SFIO sont confrontés à des dissidences. Depuis novembre 1933, plusieurs personnalités de la SFIO favorables à la participation gouvernementale comme Adrien Marquet et Marcel Déat ont été exclues et ont fondé un parti dit « néo-socialiste » - officiellement Parti Socialiste de France-Union Jean Jaurès – qui entraîne plusieurs parlementaires dans la dissidence. Au parti communiste, le député-maire de Saint-Denis Jacques Doriot entre également en dissidence. Ses propositions de front unique contre le fascisme avec la SFIO afin d’exploiter les divisions des socialistes sont condamnées par la direction du parti communiste. Convoqué à Moscou pour s’expliquer, Doriot refuse de s’y rendre et prend part à la création du comité de vigilance antifasciste de Saint-Denis avec la SFIO et la CGT. Au congrès de juin 1934, il est exclu du parti communiste alors que, paradoxalement, la ligne politique qu’il prônait d’unité d’action avec la SFIO contre le fascisme est adoptée par l’Internationale communiste à la fin du mois de juillet 1934. Dans ce contexte, l’assassinat de Joseph Fontaine n’est pas qu’un malheureux fait divers, c’est un événement politique qui ébranle toute une région dans laquelle les luttes politiques entre socialistes et communistes, entre syndicalistes confédérés et unitaires ont été particulièrement âpres. Le clivage opposant réformistes et révolutionnaires dans le bassin houiller du Pas-de-Calais est un clivage, ancien, structurant, qui n’est pas né en décembre 1920 avec le congrès de Tours, mais remonte aux années d’avant-guerre, quand le « Jeune syndicat », la Fédération « La première victime du fascisme » : retour sur l’assassinat de Joseph Fontaine 6 syndicale des mineurs du Pas-de-Calais, animé par Benoît Broutchoux s’opposait au « Vieux syndicat » du député-maire de Lens Emile Basly. Dans le bassin minier plus qu’ailleurs, « l’union est un combat » pour reprendre une célèbre formule d’Etienne Fajon qui date de 1975, mais pourrait tout à fait s’appliquer au processus de rapprochement entre organisations ouvrières qui va du 6 février 1934 à la victoire du Front populaire en mai 1936. Un fascisme français ? Sur la plaque commémorative rendant hommage au militant communiste assassiné, le texte ne laisse aucun doute sur la manière dont les organisations ouvrières ont perçu l’assassinat de Joseph Fontaine. Pour elles, Joseph Fontaine a été la « première victime du fascisme ». Pour la gauche locale, l’activité ligueuse dans la région du Nord et du Pas-de- Calais, fût-elle le fait d’une organisation réactionnaire royaliste comme l’Action française, relève du fascisme. Mais pour l’historien, le terme de fascisme est à manier avec précaution. Il nous faut donc au préalable examiner la question de l'existence d'un fascisme français qui divise l’historiographie depuis plusieurs années. Le débat a plus de trente ans et remonte à la publication par Zeev Sternhell de son livre La droite révolutionnaire (1885-1914). Les origines françaises du fascisme (1978). Dans cet ouvrage qui a fait date, Zeev Sternhell s'inscrit en faux contre la thèse de René Rémond d'un fascisme français marginal au sein d'une droite nationaliste héritière du bonapartisme. L'historien israélien considère qu'un « pré- fascisme » apparaît en France à la fin du XIXe siècle. Maurice Barrès, chantre d'un nationalisme sentimental teinté de socialisme apparaît comme une des figures de proue de la droite révolutionnaire française. Cette droite révolutionnaire française est antiparlementaire et d'une certaine manière se veut l'héritière du bonapartisme. La crise boulangiste (1886-1891) témoigne à la fois de la prégnance d'un culte du chef - l'homme fort qui régénérera la nation - et du goût de l'extrême droite française pour la violence et les coups d'Etat. C'est aussi la rencontre (constitutive du fascisme) d'hommes de droite et d'hommes de gauche comme le journaliste et ancien communard Henri Rochefort. La droite révolutionnaire est xénophobe. Elle se convertit à l'antisémitisme à la fin du XIXe siècle. Elle est marquée par l'œuvre d'Edouard Drumont et s'engage dans l'Affaire Dreyfus dans le camp des antidreyfusards. Au lendemain de la première guerre mondiale, des militants issus du syndicalisme révolutionnaire et influencés par la pensée de Georges Sorel comme Gustave Hervé vont basculer à l'extrême droite et donner au nationalisme une coloration anticapitaliste (qui disparaît rapidement). Loin d'avoir été « immunisée » contre le fascisme, c'est la France qui aurait « inventé » le fascisme, un fascisme qui ne se limite donc pas aux quelques groupes marginaux comme le Faisceau (qui a quand même compté 20 000 membres) ou le francisme, mais caractérise d'importants mouvements comme les Croix-de-Feu du colonel de La Rocque héritiers du « pré-fascisme » des années 1890. « La première victime du fascisme » : retour sur l’assassinat de Joseph Fontaine 7 La thèse de Zeev Sternhell a été combattue par de nombreux historiens français (Pierre Milza, Michel Winock, Serge Berstein, Antoine Prost) qui s'intéressent moins aux convergences idéologiques qu'aux organisations et à leur implantation. La plupart des historiens français dressent donc le portrait d'une France « allergique au fascisme » (Serge Berstein), même si une certaine forme d' « imprégnation fasciste » a touché toutes les ligues nationalistes des années 30. Antoine Prost montre de façon très claire que les Croix-de-Feu, en raison de leur nationalisme affiché, occupent une place tout à fait marginale au sein du mouvement des anciens combattants organisé autour de l'Union Fédérale (proche des radicaux et qui compte 950 000 adhérents en 1939) et de uploads/Geographie/ noel-premiere-victime-du-fascisme.pdf
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- Publié le Mai 02, 2022
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