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UTC – GSU UR02 – C4 Philippe Dehan oct 2010 1 UR 02 - Cours 4 Philippe Dehan Naissance de l’urbanisme Sommaire : Qu’est ce que l’urbanisme ? Naissance de l’urbanisme Le pré-urbanisme La ville idéale comme modèle Des cités ouvrières aux HLM : émergence du logement social Qu’est ce que l’urbanisme ? Comme la ville, le concept d’urbanisme n’est pas facile à définir. Le terme d’urbanisme apparaît vers 1910 dans une revue suisse. Quelques décennies auparavant, l’ingénieur espagnol Idelfonso Cerda avait déjà employé un terme proche, celui d’urbanisacion, mais avec un double sens : à la fois urbanisme et urbanisation. Selon Françoise Choay, dans son anthologie Utopies et réalités parue en 1965, l’urbanisme naît bien au tournant du siècle : « vers la fin du XIXe siècle l’expansion de la société industrielle donne naissance à une discipline qui se distingue des arts urbains antérieurs par son caractère réflexif et critique et par sa prétention scientifique ». Dans son choix de textes, elle distingue d’ailleurs les pré urbanistes des urbanistes, qu’elle classe en trois catégories : progressistes, culturalistes et organiques. Elle oppose donc cette discipline nouvelle, qui serait une science ou tout au moins une technique, à l’art urbain qui aurait prévalu auparavant avec un souci esthétisant. C’est peut être vrai en Europe pour la période juste antérieure, au XVIIe et au XVIIIe siècles, en Europe où l’art urbain se limite bien souvent à la création de places royales ou d’axes monumentaux. Mais ce n’est pas vrai pour toutes les villes coloniales, par exemple les villes espagnoles d’Amérique du sud, qui sont des créations globales, à partir d’un plan qui gère l’expansion de villes entières. Depuis les temps les plus reculés de la civilisation, et dès l’antiquité à Sumer, en Egypte ou en Grèce, l’homme crée des villes entières et cherche à définir des dispositions ordonnées de l’espace urbain selon différents concepts qui n’ont parfois rien à envier à ceux de l’urbanisme contemporain. Ainsi, les romains avaient des pratiques de fondation des villes qui incluaient des rites religieux, ils dessinaient les ensuite les voies qu’ils aménageaient avec des pavés, des trottoirs, des égouts, comme on peut le voir à Pompéi ou Herculanum. Ils avaient des principes d’alignement et de régulation des hauteurs et savaient composer un forum et des quartiers fonctionnels. Les pratiques de planification des phénomènes urbains sont donc bien antérieures à l’apparition du mot urbanisme et au moins une partie de l’objet qu’il recouvre existe donc depuis bien longtemps, même si on peut noter quelques différences. UTC – GSU UR02 – C4 Philippe Dehan oct 2010 2 Dans son Que sais-je sur l’urbanisme, Pierre Merlin souligne ce problème : « n’y aurait-il eu auparavant aucune action, aucune pratique, visant à créer une disposition ordonnée de l’espace urbain, recherchant l’harmonie et l’efficacité ? On sait qu’il n’en est rien (…) »1. C’est une forme de description des pratiques antérieures à l’invention officielle de l’urbanisme, mais de manière étrange, après avoir noté que l’urbanisme apparaît à la fin du XIXe siècle, Pierre Merlin, ne les distingue pas vraiment de l’urbanisme. C’est d’ailleurs courant : beaucoup d’auteurs, en particuliers des historiens, adoptent le terme urbanisme pour parler des pratiques de planification des villes antérieures : « l’urbanisme au moyen âge », « l’urbanisme au 18e siècle », etc. C’est une position qui contredit totalement celle de Françoise Choay pour laquelle l’urbanisme se distingue des méthodes antérieures qui n’ont pas de nom. C’est pourquoi je propose d’adopter le terme de planification des villes2, pour qualifier les actions antérieures, car il met en relief le fait que pour l’essentiel, les pratiques antérieures à l’urbanisme reposaient sur l’adoption du plan composé soit selon une grille permettant de gérer aisément les évolutions, soit à partir de composition urbaines basées sur des préceptes esthétiques (perspectives, mises en valeur de monuments) qu’on a souvent appelé l’art urbain. Définitions de l’urbanisme Qu’est ce qui distingue l’urbanisme de la planification des villes ? Pour Françoise Choay, c’est la prétention scientifique et réflexive de l’urbanisme. Dans Utopie et réalités elle explique que les doctrines de l’urbanisme se fondent sur une analyse formalisée des besoins et des conditions de la réalisation urbaine. Ce serait donc le caractère analytique des contraintes et des besoins qui distinguerait l’urbanisme des pratiques antérieures de planification des villes. La définition des dictionnaires est un peu moins précise. Le Larousse définit l’urbanisme comme « l’art d’aménager et d’organiser les agglomérations humaines » et « l’art de disposer l’espace urbain ou rural (…) pour obtenir son meilleur fonctionnement et améliorer les rapports sociaux ». Dans ces définitions il s’agit d’aménager, c’est à dire, de « disposer avec ordre ». C’est un acte volontaire qui veut créer une situation ordonnée jugée préférable à celle résultant du jeu spontané des acteurs. Cette définition est assez proche de ce que pouvait prétendre la planification des villes, sauf peut-être la question de l’amélioration des rapports sociaux qui était rarement explicitement présente dans les pratiques de planification antérieures. Bien qu’on en trouve des exemples, comme la création du Mellah, le quartier juif de Marrakech, qui répond à une volonté de protection et de contrôle de cette population allant vers une amélioration des rapports sociaux. Le petit Robert est plus explicite. Il confirme l’apparition du mot en 1910 et propose la définition suivante : Etude des méthodes permettant d’adapter l’habitat urbain aux besoins des hommes ; ensemble des techniques d’application de ces méthodes. Cette définition est intéressante car elle se limite à la question de l’adaptation, sans parler directement d’aménagement. L’urbanisme serait donc l’ensemble des méthodes et des techniques permettant de mieux adapter la ville aux besoins des hommes que se soit pour la création ou la transformation. 1 Merlin Pierre, L’urbanisme, Que sais-je / PUF, 1991 p.7 2 Le mot planification lui-même est récent puisqu’il apparaît en 1938, appliqué à l’économie, selon le Robert. Mais la définition de planifier, « organiser selon un plan » est celle qui convient le mieux pour décrire les pratiques antérieures de création et de développement urbains. Il faut par contre éviter d’employer le terme de planification urbaine qui est généralement utilisé pour décrire des actions de programmation complexes pour des opérations d’urbanisme. UTC – GSU UR02 – C4 Philippe Dehan oct 2010 3 De la planification des villes à l’urbanisme Je propose ce diagramme explicitant les relations entre l’ensemble planification des villes et urbanisme : l’urbanisme intègre les pratiques antérieures de la planification des villes (sauf les rites de fondations) mais lui ajoute une phase d’analyse et de diagnostic devant fonder une programmation urbaine à partir de laquelle le projet urbain est bâti. A l’origine il y a le site avec ses atouts et ses contraintes ; lorsque les hommes s’installent sur le site, ils impriment au site différentes dynamiques qui le transforment. Le processus de planification de la ville commence par la décision politique de base, celle de la création, de la ville ou du secteur urbain, qu’il s’agisse d’un choix collectif démocratique ou de la décision autoritaire d’un homme ou d’un groupe. UTC – GSU UR02 – C4 Philippe Dehan oct 2010 4 Dans de nombreux cas, de l’antiquité à la création des villes coloniales d’Amérique du sud3, la phase de création intègre des rites religieux de fondation des villes, invocation, cosmogonie et rites solaires, etc. visant à créer la ville sous de bons hospices (voir chapitre infra). La planification de la ville passe ensuite par le processus d’élaboration du plan, que ce soit un damier ou une forme plus complexe ; Les contraintes du site (relief, sol et sous-sol, végétation, hydrologie, cours d’eau, climat, vents dominants) sont prix en compte de manière variable. C’est ainsi que la grille du plan de San Franscisco est indifférente au relief et que, dans de nombreux plans des villes coloniales sud-américaines, c’est plus la cosmologie solaire qui détermine les choix d’implantation que les particularités du relief ; La réalisation concrète du plan sur le site implique la mise en œuvres des différentes techniques urbaines liées à la création des voies : prise en compte des contraintes naturelles vents, des inondations, … ; conception et réalisation des infrastructures. Voirie, ponts et réseaux sont les principaux objets car, la distribution d’eau (pas chez chaque particulier) et l’assainissement existent depuis l’antiquité. Ces infrastructures peuvent être de dimension territoriale comme le montre les grands aqueducs romains. Les îlots créés par les infrastructures font ensuite l’objet découpage parcellaire adapté aux différentes programmes des bâtiments qui sont construits sur de ce socle. La production bâtie intègre une dimension spatiale, formelle et esthétique, qui prend forme dans la géométrie du parcellaire et ses déformations, mais aussi dans des desseins urbains volontaires : axes de composition urbaine, etc. ; parallèlement les règlementations d’alignement et de hauteur ont souvent contribué (de manière plus ou moins contrôlée) à la 3 A ce sujet voir le livre de Giuliano della Pergola, Le città antiche cosmogniche, universale di Architettura, mars 2000 et l’article de Marcello Fagiolo, « La fondazione della città latino-americane gli archetipi della giustizia et della fede », uploads/Geographie/ qu-x27-est-ce-que-l-x27-urbanisme.pdf

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