1 L’écriture personnelle Littéraires ou non, les écrits personnels permettent d

1 L’écriture personnelle Littéraires ou non, les écrits personnels permettent de parler de soi, de ses émotions, de ses sentiments, de son passé, de son rapport aux autres 1.L’autobiographie Romain GARY (1914-1980) Quand il publie La Promesse de l'aube, Romain Gary a quarante-six ans. Il est à cette époque consul à Los Angeles depuis quatre ans. Écrivain renommé, il a déjà publié une oeuvre romanesque importante. Né en Russie, Romain Gary est arrivé en France à quatorze ans. Il rejoint la Fronce libre dès 1940. Entré dans la diplomatie en 1945, il écrit des romans tout en menant une carrière diplomatique jusqu'en 1961. Il parcourt ensuite le monde et publie des romans sous le nom d'Émile Ajar. Malgré le succès de ceux-ci, il ne dévoile pas sa véritable identité. Ce n'est qu'après sa mort qu'on découvrira qu'il était l'auteur talentueux de deux oeuvres romanesques très différentes. 5 10 15 20 25 30 Engagé dans l'aviation en 1938, Romain Gary rejoint la France libre en 1940. En attendant de passer en Angleterre, il est avec son escadre à Meknès, au Maroc. Ce fut alors que je vécus ce qui fut, sans doute, la plus brève histoire d'amour de tous les temps. Dans un bar du quartier européen où j'étais entré boire un verre, la bairmaid blonde à laquelle, au bout de deux minutes, je faisais naturellement des confidences, parut particulièrement touchée par ma sérénade' enflammée. Son regard se mit à errer sur mon visage, s'attardant à chaque trait avec une expression de tendresse et de sollicitude qui me donnait le sentiment de sortir soudain de l'ébauche pour devenir enfin un homme complet. Pendant que ses yeux passaient de mon oreille à mes lèvres, pour remonter rêveusement à la racine de mes cheveux, ma poitrine doubla d'ampleur et mon coeur de vaillance, mes muscles se gonflèrent d'une force que dix ans d'exercice n'eurent pu leur donner et la terre entière devint un piédestal'. Comme je lui faisais part de mon intention de me rendre en Angleterre, elle ôta de son cou une chaîne avec une petite croix en or et me la tendit. Je fus brusquement et irrésistiblement tenté de plaquer là ma mère, la France, l'Angleterre et tout le bagage spirituel dont j'étais si lourdement chargé, pour demeurer auprès de cet être unique qui me comprenait si bien. La bairmaid était une Polonaise venue de Russie par le Pamir et l'Iran, et je mis la chaîne autour de mon cou et demandai à ma bien-aimée de m'épouser. Nous nous connaissions alors déjà depuis dix minutes. Elle accepta. [...] Nous décidâmes de nous marier immédiatement et de passer ensuite en Angleterre ensemble. J'avais rendez-vous à trois heures et demie avec un camarade qui était allé voir le Consul anglais à Casa pour lui demander de nous aider. Je quittai le bar à trois heures pour aller rejoindre mon camarade et lui dire que nous allions être trois et non deux, comme prévu originairement. Lorsque je revins au bar à quatre heures et demie, il y avait déjà du monde et ma fiancée était très occupée. J'ignore ce qui avait bien pu se passer pendant mon absence - elle avait du rencontrer quelqu'un - mais je voyais bien que tout était fini entre nous. Sans doute n'avait-elle pas pu supporter la séparation. Elle était en train de parler à un beau lieutenant de spahis': je suppose qu'il était entré dans sa vie pendant qu'elle m'attendait. C'était bien ma faute : il ne faut jamais quitter une femme qu'on aime, la solitude les prend, le doute, le découragement, et ça y est. Elle avait dû perdre confiance en moi, s'imaginant peut-être que je n'allais pas revenir, et elle avait décidé de refaire sa vie. J'étais très malheureux, mais je ne pouvais lui en vouloir. Je traînai là un peu, devant mon verre de bière, terriblement déçu tout de même, car je croyais bien avoir résolu tous mes problèmes. La Polonaise était vraiment jolie, avec ce quelque chose d'abandonné et de sans défense dans l'expression qui m'inspire tellement, et elle avait un geste pour chasser de son visage ses cheveux blonds qui m'émeut encore maintenant quand j'y pense. Je m'attache très facilement. Je les observai un moment, tous les deux, pour voir s'il n'y avait pas d'espoir. Mais il n'y en avait pas. ROMAIN GARY, La Promesse de l'aube, 1960. Éditions Gallimard. 2 Vocabulaire : sérénade : discours amoureux piédestal : socle d’une statue Casa : Casablanca (ville du Maroc) saphis : cavaliers de l’armée française en Afrique du Nord. Etude de l’extrait :     Le passé recréé : 1. Lis la biographie de l’auteur. ● Quel âge a-t-il lors des événements qu’il relate ? ● Où se trouve-t-il ? ● Quelles circonstances l’ont amenée dans cette ville ? 2. Résume les faits. Pourquoi Romain Gary dit-il qu’il s’agit de la plus brève histoire d’amour de tous les temps ?     L’expression des sentiments : 1. a) Qu’est-ce qui fait naître l’amour du jeune homme ? b) Il se montre naïf et crédule : à quels détails le lecteur le remarque-t-il ? 2. Le comportement de la jeune femme laisse à penser au jeune homme qu’elle a le coup de foudre pour lui. Relevez les gestes et attitudes qui l’invitent à le croire. 3. « Je croyais bien que tout était fini entre nous » constate le héros. Qu’éprouve-t-il alors ? Relevez les termes indiquant ses sentiments 4. Comment interprète-t-il le brusque changement d’attitude de la jeune femme ? Et toi, comment l’expliquerais-tu ?     Regard sur le passé : 1. Quel âge a Romain Gary quand il publie son autobiographie ? Quelle phrase du texte fait allusion à l’homme qu’il est au moment où il écrit et à ses goûts ? 3 2. Quelques pages plus loi, Romain Gary écrit : « Vingt ans sont passés et l’homme que je suis, depuis longtemps abandonné de sa jeunesse, se souvient avec beaucoup moins de gravité et un peu d’ironie de celui que je fus alors avec tant de sérieux, tant de conviction » Relève dans le texte les détails humoristiques ou ironiques montrant que l’auteur se moque de sa naïveté d’autrefois. L’autobiographie : C’est le récit qu’une personne fait de sa vie passée : un certain temps (parfois des dizaines d’années) sépare les événements et le moment où ils sont racontés (le temps de la narration). L’auteur plus âgé, plus expérimenté, fait un effort de mémoire, remet en ordre ses souvenirs. Il commente son passé, porte un jugement sur le moi qu’il était alors. La situation d’énonciation : Quelques notions :     Enoncé= message verbal oral ou écrit  s’interroger sur la situation d’énonciation, c’est chercher qui a émis l’énoncé (= l’énonciateur), à qui est-il destiné (= le destinataire), où, quand et dans quelles conditions il a été produit. a) Qui sont les personnages de cet extrait ? Par quels pronoms sont-ils désignés ? b) Y a-t-il communication directe entre les personnages désignés par Je et les autres personnages ? c) Y a-t-il présence du pronom tu dans l’extrait ? d) Relève les indications temporelles dans le texte ? Renvoient-elles au moment où le narrateur raconte ou au moment où les personnages vivent l’histoire ? e) Quels sont les temps utilisés dans cet extrait ? SYNTHESE : On dit qu’un énoncé est COUPE de la situation d’énonciation quand il ne présente aucune référence au moment de l’énonciation (moment où l’énoncé est produit). Ses caractéristiques : ● emploi d’un système de temps dont le passé simple est le temps de référence ● présence de la 3ème personne (on trouve « je » quand le narrateur est en même temps le personnage de l’histoire) ● les indications de lieu et de temps sont coupées du moment de l’énonciation (le lendemain, la veille, ce jour-là, alors, …) 4 Travail d’écriture : Ecrire à partir d’une photographie d’enfance Ton objectif : En t’inspirant du texte de Georges Pérec, tu vas écrire à partir d’une de tes photographies d’enfance. Tu expliqueras à quelle occasion la photographie a été prise, tu la décriras avec précision puis tu évoqueras les souvenirs que tu y associes. La [photographie] a été faite par Photofeder, 47, boulevard de Belleville, Paris, 11e. Je pense qu'elle date de 1938. Elle nous montre, ma mère et moi, en gros plan. La mère et l'enfant donnent l'image d'un bonheur que les ombres du photographe exaltent. Je suis dans les bras de ma mère. Nos tempes se touchent. Ma mère a des cheveux sombres gonflés par-devant et retombant en boucles sur la nuque. Elle porte un corsage imprimé à motifs floraux, peut-être fermé par un clip. Ses yeux sont plus sombres que les miens et d'une forme légèrement plus allongée. Ses sourcils sont très fins et bien dessinés. Le visage est ovale, les joues bien marquées. Ma mère sourit en découvrant ses dents, sourire un peu niais qui ne lui est pas habituel, mais qui répond sans doute uploads/Histoire/ 13-10-07l-ecriture-personnelle.pdf

  • 32
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Mai 01, 2022
  • Catégorie History / Histoire
  • Langue French
  • Taille du fichier 1.4170MB