Histoire et mémoires 1 Histoire et mémoires La mémoire désigne l'ensemble des s

Histoire et mémoires 1 Histoire et mémoires La mémoire désigne l'ensemble des souvenirs d'une expérience vécue par un individu ou une collectivité. Elle reconstruit le passé et est nécessairement partielle et subjective. Elle relève d'un rapport affectif aux événements passés (certains événements sont glorifiés, d'autres sont occultés ou cachés). On peut trouver plusieurs mémoires d'un même événement (mémoires au pluriel). La guerre, avec son lot de traumatismes a profondément divisé les Français. Chaque groupe, les prisonniers de guerre, les collaborateurs, les déportés, les résistants, sont porteurs d'une mémoire et voient le passé en fonction de ce qu'ils ont vécu. Ils interprètent les faits à partir de leur expérience. L'historien s'appuie en partie sur la mémoire individuelle, des témoins pour établir des faits (le témoignage est une source pour l'historien). Cependant, la démarche de l'historien vise à être objective et relève d'un processus de vérité. L'histoire des mémoires permet de montrer l'évolution de représentations qu'un groupe se fait de son passé. Comment se constituent les différentes mémoires, comment et pourquoi évoluent-elles dans le temps ? / Quel est le rôle de l'historien face à ces mémoires ? I- L'historien et la construction des mémoires de 1945 aux années 1970 1. Une mémoire officielle résistante Dès la libération, le général De Gaulle impose une mémoire collective officielle résistancialiste (un mythe selon lequel les Français furent majoritairement et naturellement résistants face à l'occupant). A- La mémoire Gauliste Lors de la libération de Paris le 25 août 1944, De Gaulle créé en quelques phrases la vision gaulliste : une France éternelle, il sous-entend donc que la défaite de 1944 est effacée par la victoire de l'armée française qui a libérer Paris, réuni le peuple sous la direction de l'homme de l'appelle du 18 juin ; les armées du régime de Vichy sont une parenthèse de l'histoire de France qu'il appellera les années noires. La mémoire gaulliste minimise le rôle joué par les alliés pour ne retenir que l'action des résistants français (lié au fait de l'antiaméricanisme de De Gaulle). Pour construire l'unité nationale, De Gaulle va même utiliser la censure (exemple dans le documentaire "nuit et brouillard" montrant la collaboration d'un gendarme français surveillant un camp d'internement, la photo est censuré, maquillée pour masquer le Képi, car il montre la complicité française dans la déportation). La priorité est de rassembler, d'unir. D'ailleurs, les lois d'amnistie annulent les condamnations, cela témoigne de la volonté d'oublier. De plus pour marquer sa place de puissance à l'international, la France doit apparaître comme un pays uni, dans les camps des vainqueurs et faire oublier sa collaboration avec l'Allemagne Nazi. De grandes cérémonies nationales sont organisées pour mettre en place cette mémoire officielle qui est une mémoire héroïsante, des monuments spécifiques sont inaugurés pour rendre hommage aux victimes résistantes de la Seconde Guerre mondiale. En 1964, une grande cérémonie à lieu avec le transfert des cendres de Jean Moulin au Panthéon. Il est le symbole de tous les héros de la France. Il fait figure de martyre. Il est l'image de l'unification, de la résistance, la cérémonie est retransmise à la télévision en présence de De Gaulle. La résistance, c'est De Gaulle, De Gaulle, c'est la France, donc la résistance, c'est la France. Histoire et mémoires 2 B- La mémoire communsite Les communistes se présentent comme le parti des 75 000 fusillés (ce chiffre est en réalité mensonger). Ils mettent en avant le rôle du peuple, de la classe ouvrière et dénoncent le rôle des élites bourgeoises. Pour eux, la résistance s'inscrit dans la lutte des classes. Ils ont leur héros : Jean Moulin, qu'ils célèbrent en tant qu'homme de gauche ; Le colonel Fabien, c'est un militant communiste qui réalise le premier attenta contre un militaire allemand à Paris ; Guy Môquet, militant communiste fusillé à l'âge de 17 ans à Châteaubriant. 2. Des mémoires peu entendues A- La mémoire des soldates de 1940 et des requis du STO La défaite militaire a entraîné la détention de 1,8 millions de soldats français en Allemagne, leur image de vaincus est la preuve de la plus grande défaite que la France ait connue, ils sont condamnés à l'oubli. Quant aux requis du STO (février 1943), ils revendiquent le statut de déportés du travail, dénomination que leur refusent les déportés du système concentrationnaire. B- La mémoire des déportés raciaux En 1945, l'opinion publique n'est pas prête à comprendre ce qui paraît inimaginable : le génocide et la barbarie. Les victimes sont gênantes et gênées (un sentiment de culpabilité du survivant). La population veut tourner la page de la guerre et de ses horreurs et ne fait pas la distinction entre camps de concentration et camps d'extermination. On valorise les résistants qui ont été déportés comme des héros alors que les Juifs déportés sont considérés comme des victimes. 3. La mémoire Vichyste Les défenseurs de Pétain diffusent l'idée fausse d'un double jeu de la part de Vichy. Pétain aurai été le "bouclier" et De Gaulle "l'épée". Dans un contexte de guerre froide, les Vichystes développent la thèse selon laquelle la défaite et l'armistice de la France étaient inévitable et que le maréchal Pétain a résister tant qu'il le pouvait, aux pressions des nazis. Les lois d'amnistie, qui ont condamné des hommes politiques du régime de Vichy, vont leur permettre de reprendre leur carrière. 4. Le travail difficile des premiers historiens Le travail des historiens a du mal à s'affranchir de la pensée dominante ; la guerre est encore trop proche et l'accès aux archives est peu possible. Les mémoires du conflit sont encore vives et sensibles, rendant le travail de l'historien difficile, voire impossible. Les mémoires gaullistes et communistes s'imposent dans l'espace public. C'est ce que l'historien Henry Rousso appelle le résistancialisme. II- A partir des années 1970, l'historien et le renouvellement des mémoires À partir de 1969, la démission de De Gaulle et l'arrivé à l'âge adulte d'une génération née après la guerre marque un tournant dans la mémoire de la Seconde Guerre mondiale. 1. L'affirmation de la mémoire juive La mémoire juive se réveille et s'exprime avec le procès et l'exécution d'Adolf Eichmann en Israël en 1961. Il est accusé d'être l'ordonnateur du génocide juif. C'est à l'occasion de ce procès qu'a été créé le statut des Juste parmi les nations. C'est un statut par lequel l'Etat d'Israël rend hommage aux personnes Histoire et mémoires 3 qui ont aidé à sauver des Juifs de génocide. À ce moment-là, Hannah Arendt revient sur ce qu'on va appeler la banalité du mal, c'est-à-dire la participation à un processus d'extermination dans un effet d'entraînement, sans se sentir responsable d'un crime. À parti des années 1970, des associations juives vont poursuivre des responsables allemands et français, accusés de déportations, de crimes, en s'appuyant sur une loi, celle de 1964 qui déclare imprescriptible les cimes contre l'humanité. Plusieurs procès vont être organisés en France ou en Israël : en 1979, Jean Leguay est le premier Français inculper de crime contre l'humanité, pour sa participation à la raffle du Vel d'hiv (il meurt avant son procès) ; en 1987, Klaus Barbie est le chef de la Gestapo de Lyon, condamné à perpétuité pour ses crimes contre les Juifs et les résistants. À cette même période, apparaissent les thèses négationnistes (ceux qui contre toute évidence nient l'existence des chambres à gaz dans les camps d'extermination et vont jusqu'à nier l'existence même du génocide des Juifs et des Tziganes). Il est donc nécessaire de mieux faire connaître le génocide juif et les responsables de Vichy. Le cinéma va jouer un rôle dans la prise de conscience du génocide juif. On peut citer l'exemple du film français "Shoah" (catastrophe) de Claude Lanzmann, construit sur des témoignages qui accélèrent la prise de conscience du drame dont les Juifs ont été victimes. 2. Le resurgissement du passé Vichyste Le cinéma joue un rôle important en 1978, le film/documentaire "Le chagrin et la pitié", fait découvrir une France lâche, pétainiste, collaboratrice et il faudra attendre 1981 pour qu'il soit diffusé à la télévision. C'est un film qui dérange et qui ne s'inscrit pas dans la mémoire d'une France résistancialiste. En 1973, la publication du livre de l'historien américain Robert Paxton, "La France de Vichy", met en avant la politique collaboratrice demandée par Vichy et son rôle dans la Shoah. La publication de cet ouvrage va accélérer la recherche historique sur cette période. Paxton est un étudiant américain arrivé en France dans les années 1960 pour enquêter sur l'attitude des Français face à la collaboration, mais il se heurte très cite aux archives françaises fermées jusqu'en 1981. Il se tourne vers les archives américaines et allemandes et découvre que la collaboration n'est pas une exigence allemande, mais une volonté de Pétain. C'est la fin de la théorie du glaive et de l'épée, qui est l'idée que Pétain était le bouclier qui devait agir pour le bien de la France, en attendant que l'épée, c'est- à-dire De Gaulle, soit assez fort pour vaincre l'Allemagne nazie. 3. L'apport décisif du travail de l'historien Les archives uploads/Histoire/ axe-introductif-histoir-et-memoire.pdf

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  • Publié le Sep 07, 2021
  • Catégorie History / Histoire
  • Langue French
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