CONFREP-2002-12-0200-A-01-Fr.doc CHAPITRE III LIBERTÉ DU TRAVAILLEUR DE DISPOSE
CONFREP-2002-12-0200-A-01-Fr.doc CHAPITRE III LIBERTÉ DU TRAVAILLEUR DE DISPOSER DE SON SALAIRE À SON GRÉ 164. La protection de la liberté du travailleur de disposer de son salaire à son gré est l’un des aspects fondamentaux de la convention. Dans la pratique, il ne servirait pas à grand-chose que les travailleurs soient payés en monnaie ayant cours légal, à intervalles réguliers ou encore intégralement si ces derniers n’étaient pas en mesure de dépenser leurs gains comme ils l’entendent. L’article 5 de la convention prescrit que le salaire sera payé directement au travailleur intéressé à moins que la législation nationale, une convention collective ou une sentence arbitrale n’en dispose autrement ou que le travailleur intéressé n’accepte un autre procédé. L’article 6 interdit catégoriquement à l’employeur de restreindre la liberté du travailleur de disposer de son salaire à son gré, et l’article 7 reconnaît le droit du travailleur de ne subir aucune contrainte tendant à ce qu’il fasse usage de l’économat lorsqu’il en existe un dans l’entreprise. Ce même article requiert en outre que l’autorité compétente prenne des mesures appropriées afin que lesdits économats ne soient pas exploités dans le but d’en retirer un bénéfice mais dans l’intérêt des travailleurs intéressés, et que les marchandises vendues et les services fournis dans ce cadre le soient à des prix justes et raisonnables lorsqu’il n’est pas possible d’accéder à d’autres magasins ou services. Ces dispositions sont complétées par le paragraphe 9 de la recommandation no 85, aux termes duquel des mesures appropriées devraient être prises pour encourager les dispositions assurant la participation des représentants des travailleurs intéressés, et en particulier des membres des comités d’entreprise et d’organisations similaires, là où il en existe, à la gestion générale des économats ou services semblables créés, dans une entreprise, pour la vente de marchandises ou la fourniture de services aux travailleurs de ladite entreprise. Dans les paragraphes qui suivent, la commission analyse la portée de ces dispositions, avant d’examiner dans quelle mesure la loi et la pratique de chaque Etat Membre leur fait porter effet. 1. Le paiement du salaire directement au travailleur intéressé 165. Comme on peut s’y attendre, le principe selon lequel le salaire doit être payé directement au travailleur intéressé a toujours été largement reconnu. Toutefois, on s’était également accordé sur le point que ce principe devait admettre certaines exceptions, qui seraient définies par la législation ou la réglementation nationale ou encore par l’autorité publique, dans le cas où ce 96 Rapport de la commission d’experts CONFREP-2002-12-0200-A-01-Fr.doc pourrait être dans l’intérêt même du travailleur que son salaire soit versé à quelqu’un d’autre, par exemple lorsque ce travailleur est un condamné, un mineur ou une personne sous tutelle, ou encore lorsque des mesures destinées à assurer l’entretien de sa famille ont été prises 1. 166. L’article 5 établit donc le principe du paiement direct, tout en autorisant des dérogations par voie de législation, de conventions collectives ou de sentences arbitrales et même moyennant accord avec le travailleur. Cette disposition semble donc ménager une flexibilité considérable quant aux modalités de sa mise en œuvre. Cependant, si un employeur, sans y être dûment autorisé conformément à l’une des possibilités énumérées à l’article 5, venait à verser à une tierce partie le salaire dû à un travailleur, cela ne constituerait probablement pas un règlement valable de la dette à l’égard du travailleur. Une question peut donc se poser – savoir si le paiement du salaire par transfert bancaire est compatible, entre autres, avec la règle prévoyant que le salaire est payé directement au travailleur intéressé. La commission est d’avis que tout arrangement formel réglant le paiement du salaire par transfert postal ou bancaire semble s’inscrire dans les dérogations admises par l’article 5 (c’est-à- dire celles qui concernent la législation nationale, ou avec le consentement du travailleur), et ne pose donc pas de problème au regard de cet article 2. 167. De plus, la commission est d’avis que l’article 5 doit se lire séparément des articles 8 et 10, lesquels concernent les retenues sur les salaires et la saisie ou la cession du salaire, même si ces aspects paraissent rentrer dans son champ d’application. L’article 5 de la convention vise la manière dont s’effectue le paiement du salaire, plutôt que les conditions et limites sous lesquelles le salaire peut fait l’objet de retenues, d’une saisie ou d’une cession. Par conséquent, il ne doit pas être interprété comme prescrivant que ce qui doit être payé directement au travailleur intéressé c’est le montant total du salaire mais plutôt tout montant effectivement dû une fois opérées les retenues, saisies ou cessions éventuelles prévues par les règles et règlements applicables. En tout état de cause, en admettant des dérogations au principe du paiement direct du salaire selon ce que prévoira «la législation nationale, une convention collective ou une sentence arbitrale» ou ce qu’acceptera le travailleur concerné, l’article 5 laisse une place suffisante pour que puisse intervenir la saisie ou la cession du salaire dans les cas prévus par les articles 8 et 10 de la convention, sous réserve, naturellement, que soient respectées les prescriptions du paragraphe 2 de ce dernier article. 168. Si l’on procède, maintenant, à un tour d’horizon des législations et pratiques nationales, on constate que dans beaucoup de pays la législation du travail comporte une disposition prévoyant expressément le paiement direct de la 1 Voir CIT, 31e session, 1948, Compte rendu des travaux, p. 483, et CIT, 32e session, 1949, Compte rendu des travaux, p. 501. 2 Il convient de noter que cette question a été abordée dans le cadre d’un avis informel donné par le Bureau en 1974 pour répondre au gouvernement du Japon. Liberté du travailleur de disposer de son salaire à son gré 97 CONFREP-2002-12-0200-A-01-Fr.doc rémunération au travailleur intéressé. Ce que font ressortir les différentes formulations adoptées, c’est la règle prévoyant le paiement direct. Les législations nationales prévoient tantôt que «le salaire est payé au salarié en personne», tantôt «payé au salarié lui-même», tantôt «effectivement payé à lui». Une telle disposition se retrouve, par exemple, en Belgique 3, au Costa Rica 4, en Malaisie 5, au Mexique 6, en Fédération de Russie 7 et à Sri Lanka 8. En Bolivie 9, la loi dispose que les travailleurs à domicile perçoivent leur salaire directement et intégralement, mais aucune disposition du même ordre n’existe en ce qui concerne les autres travailleurs. Dans beaucoup de pays qui n’ont pas ratifié la convention, la législation prévoit là aussi le versement directement au travailleur intéressé de la rémunération qui lui est due au titre du travail accompli. Tel est le cas au Mozambique 10, au Pérou 11, au Rwanda 12, à Singapour 13 et au Viet Nam 14. En Namibie 15, la loi veut que le salaire soit remis au travailleur dans une enveloppe close. Au Qatar 16, le salaire doit être versé au travailleur en personne, 3 (1), art. 5. Il en est de même dans les pays suivants: Bahamas (1), art. 60, 1); Barbade (1), art. 5; Botswana (1), art. 83, 1); Bulgarie (1), art. 270, 3); Colombie (1), art. 139; Cuba (1), art. 124; République dominicaine (1), art. 196; Dominique (1), art. 5; Equateur (2), art. 86; France (3), art. 1239; Guatemala (2), art. 94; Guyana (1), art.18, 2); Honduras (2), art. 370; Hongrie (1), art. 158, 3); Iraq (1), art. 49, 1); Israël (1), art. 6 a); Malte (1), art. 19, 2); République de Moldova (2), art. 19, 1); Nicaragua (2), art. 81; Ouganda (1), art. 33; Panama (1), art. 154; Paraguay (1), art. 237; Pays-Bas (1), art. 1638F; Philippines (1), art. 105; Pologne (1), art. 86, 3); Royaume-Uni: Montserrat (21), art. 5; Slovaquie (1), art. 130, 1) et 4); Soudan (1), art. 35, 8); Suriname (1), art. 1614F; Swaziland (1), art. 46, 1); République tchèque (1), art. 120, 1); (2), art. 11, 1); Venezuela (1), art. 148; et Zambie (1), art. 44, 1). 4 (1), art. 171. 5 (1), art. 25, 1). 6 (2), art. 100. 7 (1), art. 136, 5). 8 (1), art. 19, 1) a); (2), art. 2 a). 9 (2), art. 26. La commission demande depuis vingt ans au gouvernement d’indiquer les mesures prises pour assurer que le salaire soit payé directement à tous les travailleurs. 10 (1), art. 53, 3). Il en est de même dans les pays suivants: Chine (1), art. 6; République de Corée (1), art. 42, 1); Estonie (2), art. 31, 2); Finlande (1), chap. 2, art. 16; Japon (2), art. 24; (5), art. 53; Kenya (5), art. 4, 1); Oman (1), art. 54; Royaume-Uni: Gibraltar (11), art. 17, 1); Jersey (17), art. 5; Slovénie (1), art. 135, 1); et Zimbabwe (4), art. 11, 1). Au Canada (1), art. 178 et 247, l’obligation de payer le salaire directement au travailleur intéressé concerne la plus grande partie de la population active; voir également Territoires du Nord-Ouest (10), art. 12, 1); Nouvelle- Ecosse (12), art. 79, 1) a); Ontario (14), art. 11, 3), 112, 1); Québec (16), art. 44; Saskatchewan (17), art. 47, 1). 11 (3), art. 1. 12 (1), art. 93. 13 uploads/Industriel/ rep-iii-1b-3.pdf
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