Rebut: 28-III-2008 Acceptat: 24-V-2008 Estudis Romànics [Institut d’Estudis Cat
Rebut: 28-III-2008 Acceptat: 24-V-2008 Estudis Romànics [Institut d’Estudis Catalans], Vol. 32 (2010), p. 7-27 DOI: 10.2436 / 20.2500.01.45 APPROCHE CONTRASTIVE DES CONSTRUCTIONS VERBALES IMPERSONNELLES (DOMAINE FRANÇAIS-ROUMAIN) Gabriela Scurtu Université de Craiova 1. INTRODUCTION La question de l’impersonnel, bien qu’elle ait fait couler beaucoup d’encre, nous paraît toujours actuelle, vu la fréquence de ce type de structure et les problèmes théori- ques et pratiques qu’elle ne cesse de soulever. Il existe sans conteste, dans beaucoup de langues, dont les deux prises en compte dans cet article, une grande variété de structures syntaxiques impersonnelles, qui ont été envisagées sous une diversité d’approches: tra- ditionnelle, structurale, transformationnelle, catégorielle, fonctionnelle, etc. Et le champ de recherche peut encore être élargi, en joignant à la description synchronique d’une langue particulière l’enrichissement certain que signifierait la prise en compte de la di- mension historique ou, dans notre cas, comparatiste. 2. BUTS VISÉS Le présent article est une tentative de relever les zones convergentes et les zones divergentes dans la structuration du domaine de l’impersonnel, dans deux langues ro- manes – le français et le roumain. Cet objectif ne saurait se réaliser sans une préalable mise au point théorique, en principal les tentatives de: a. définir la phrase imperson- nelle en français et en roumain en tant que phrase asubjectale (il vide de référence, ‹sujet postiche› en français /vs./ ‹sujet zéro› en roumain, mais aussi sujet nominal ou propositionnel postposé au verbe); b. relever les principales positions de différents auteurs concernant cet aspect; c. prendre en compte les typologies impersonnelles éta- blies pour les deux langues. Estudis Romànics [Institut d’Estudis Catalans], Vol. 32 (2010), p. 7-27 DOI: 10.2436/20.2500.01.45 8 GABRIELA SCURTU La démarche proposée voudrait illustrer, dans le domaine particulier de l’imperson- nel, l’assertion de Maria Iliescu concernant, d’une part, la spécificité marquée du rou- main par rapport aux autres langues romanes (en l’occurrence le français), et, de l’autre, sa participation à des traits qui le relient à l’ensemble de la romanité: «Le roumain peut être caractérisé non seulement par sa spiccata inidividualità, comme on le fait d’habitu- de, mais aussi par la façon dont il participe à des traits qui caractérisent les autres langues romanes » (2007: 231). 3. DIFFICULTÉS RELEVANT DE LA DÉFINITION DE L’IMPERSONNEL L’une des difficultés auxquelles on se heurte en abordant cette question consiste justement à définir l’impersonnel dans les deux langues. 3.1. Le cas du français En général, les grammaires de type ‹classique› s’accordent pour définir l’imperson- nel sur la base de la présence du pronom impersonnel il en position préverbale. Entre les différentes ‹générations› de linguistes et, suivant l’école (linguistes de sou- che ‹traditionnelle› et linguistes ‹modernes›), il y a un évident écart en ce qui concerne l’interprétation de il et l’assignation d’une fonction syntaxique à ce pronom. Sujet ‹véri- table› (cf. Le Bidois)1, sujet ‹postiche› (Gaatone)2, ‹explétif› (Guéron)3, un simple ‹régis- seur verbal› (Maillard, 1985: 65) ou même sujet ‹nul› (Maillard)4, telles sont en grandes lignes les qualifications de il chez les divers auteurs considérés. Quoi qu’il en soit, la grande majorité des grammairiens reconnaissent l’originalité suffisante du il impersonnel5. Ils soulignent tous sa vacuité référentielle: c’est une «mar- que actancielle», mais c’est un actant ‹vide›, c’est-à-dire qui ne peut être explicité par aucun substantif: «il est dépourvu de contenu sémantique» (Lazard, 1994: 140-141). Les chercheurs s’accordent en général pour stipuler sur «l’absence de sujet référentiel» (Lé- toublon / Maurel, 1985: 7). Maillard décrit même la phrase impersonnelle comme étant 1. «il est véritablement sujet, le sujet, et le seul sujet» (Le Bidois, éd. 1971: 176). 2. «l’impersonnel est une structure qui se construit avec un sujet ‹postiche› il» (Gaatone, 1994: 42). 3. «Est impersonnelle toute phrase avec (...) un sujet pronominal qui ne fait pas partie d’une chaîne associée à un thêta-rôle» (Guéron, 1996: 54). Un tel sujet, dit ‹explétif›, s’oppose au sujet argu- mental (Il pleut /vs./ Il pleure) (Idem: 55). 4. «Dans les langues dites ‹à sujet nul› – comme le latin, l’italien, le portugais ou l’espagnol – la position sujet reste naturellement vide à l’impersonnel» (Maillard, 1994: 48). 5. «Faute de contenu sémantique, il ne s’interprète ni comme l’agent ni comme le siège du procès exprimé» (Riegel et al., 1994: 445). «Sa définition est généralement négative par rapport au il person- nel: il ne varie pas en genre, ni en nombre: il n’a pas de valeur de représentant, on ne peut lui substituer un nom» (Willems, 1985: 167). Estudis Romànics [Institut d’Estudis Catalans], Vol. 32 (2010), p. 7-27 DOI: 10.2436 / 20.2500.01.45 APPROCHE CONTRASTIVE DES CONSTRUCTIONS VERBALES IMPERSONNELLES 9 formée avec un prédicat asubjectal: les «formes proclitiques (il ou ça) sont davantage des morphèmes préfixés au verbe ou des ‹flexis de personne› que des pronoms proprement dits, occupant la place d’un constituant sujet» (1994: 48). Il en résulte, selon l’auteur cité, qu’en français le verbe impersonnel est tout aussi asubjectal qu’en latin ou en grec. 3.2. Le cas du roumain La typologie linguistique permet d’expliquer la situation des phrases impersonnel- les en roumain, qui, à la différence du français, est une langue ‹pro-drop› (tout comme l’espagnol, le portugais, le catalan, l’occitan ou l’italien)6. Les grammairiens emploient des dénominations variées pour dénommer cette situation: ‹absence du sujet› (GA1 II, 1966: 94), ‹sujet zéro› (Draûoveanu, 1974: 8), ‹sujet inexistant› (Avram, 1986: 260), ‹su- jet phonétiquement nul› (Dobrovie-Sorin, 1987: 209), ‹sujet vide› (Pana Dindelegan, 1992: 64), ‹absence du rapport à un sujet personnel› (GA2 II, 2005: 140). Les études transformationnelles ont d’abord décrit cette situation comme résultat d’une transformation de la structure profonde en structure de surface (Vasiliu / Golo- penüia Eretescu, 1969: 77, Pana Dindelegan, 1974: 62). D’autres démarches proposent de renoncer à référer à un sujet. On a ainsi essayé de démontrer que le sujet est subor- donné au prédicat, dépendant d’une valence correspondante du verbe: «L’existence de constructions à sujet vide est une particularité de la langue roumaine» (Pana Dindelegan, 1992: 64). Dans le même sens, Gaitanaru (1994) propose d’introduire une nouvelle sous- classe: ‹le prédicat verbal absolu›, qui exclut la nécessité de référer à un sujet7. La relation Flexion-sujet nul permet de relier le paramètre de ce type de sujet à la posi- tion qu’il occupe par rapport au verbe (Dobrovie-Sorin, 1987: 218-219). Il existe une cer- taine corrélation entre le paramètre du sujet nul et l’inversion libre: «seule une langue qui permet des sujets nuls peut admettre l’inversion libre» (Rizzi, ap. Dobrovie-Sorin, 1987: 239), ou plutôt inversement, «l’inversion libre permet l’apparition d’un sujet nul» (ibid.). 4. TYPOLOGIE DES VERBES IMPERSONNELS (VI) ET DES CONSTRUCTIONS VERBALES IMPERSONNELLES (CI) 4.1. Le cas du français Les auteurs sont en principe d’accord sur la typologie des VI dans cette langue, sauf des différences de terminologie, mais qui se rapportent aux mêmes faits de langue. 6. Une langue ‹pro-drop› (< pronoun-dropping) est une langue à sujet nul, qui permet donc de ne pas lexicaliser le sujet d’un verbe à un mode prédicatif (v. Chomsky, Noam (1981): Lectures on Go vernment and Binding: The Pisa Lectures. Holland: Foris Publications). 7. V. aussi le concept de ‹verbe zérovalent›: verbe qui a la capacité de former des constructions indépendantes en l’absence du sujet (Pana Dindelegan, 1978: 64). Estudis Romànics [Institut d’Estudis Catalans], Vol. 32 (2010), p. 7-27 DOI: 10.2436/20.2500.01.45 10 GABRIELA SCURTU Nous adoptons la typologie établie par Riegel / Pellat / Rioul (1994: 445), conformé- ment à laquelle les VI se répartissent en deux grandes classes. La première regroupe les verbes ‹essentiellement› impersonnels, renfermant: les verbes météorologiques (il neige) et les locutions verbales impersonnelles ou les impersonnels ‹fixes› (et qui s’opposent à l’im- personnel ‹ostensionnel›), selon la terminologie de Damourette et Pichon8 (Il y a de l’orage dans l’air, Il faut de la patience, etc.), toutes formes verbales qui ne s’emploient qu’avec un sujet impersonnel. La deuxième classe regroupe des verbes personnels qui peuvent fonc- tionner comme pivots verbaux dans des CI (Un grand malheur est arrivé → Il est arrivé un grand malheur). Ces constructions, ‹accidentellement› impersonnelles, renferment, à leur tour, différents types de verbes pivots, principalement des V [-trans] (Il est tombé quelques gouttes de pluie), des V [+trans] sans GN2 (Il mange chaque jour une dizaine de personnes dans ce restaurant), le passif impersonnel (Il a été publié plus de dix grammaires), les constructions pronominales passives (Il s’est vendu beaucoup de disques). D’autres chercheurs utilisent une terminologie propre, tels Willems (1985: 168), qui précise que les grammaires traditionnelles opposent les constructions ‹statuairement› im- personnelles aux constructions ‹accidentellement› impersonnelles, ou Gaatone (1994: 42) qui parle des ‹impersonnels figés› (essentiellement impersonnels) et des ‹impersonnels non figés› (accidentellement impersonnels). A leur tour, les grammairiens de l’école gé- nérativiste et transformationnelle distinguent les structures impersonnelles de base des structures impersonnelles par transformation. 4.2. Le cas du roumain Les opinions concernant la typologie des CI dans cette langue sont assez divergentes. La classification opérée dans la grammaire de l’Académie (GA2 I, 2005: 226 et II, 2005: 140-143) délimite nettement une voix impersonnelle et les autres CI caractérisées par un trait commun: l’absence de rapport à un sujet personne. La voix impersonnelle comprend uploads/Ingenierie_Lourd/ 1-pb-pdf.pdf
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- Publié le Jui 01, 2022
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