7 Chapitre I Synthèse bibliographique sur le calcul d’écrans de soutènement I.1
7 Chapitre I Synthèse bibliographique sur le calcul d’écrans de soutènement I.1 INTRODUCTION Le domaine d’utilisation des écrans de soutènement est très large. Si les murs de soutènement de type poids sont bien adaptés au soutènement de remblais, le domaine d’emploi privilégié des écrans de soutènement est le soutènement des excavations, dont ils accompagnent le développement tout au long du vingtième siècle. Le développement et la diversification de la technique des écrans de soutènement, des rideaux de palplanches aux parois moulées, des parois berlinoises aux lutéciennes et parisiennes et aux rideaux de pieux, et celle de la technique associée des appuis, des butons aux ancrages précontraints, rendront possible la construction d’ouvrages enterrés toujours plus nombreux : infrastructures de transport, réseaux divers, soubassements d’immeubles, parkings souterrains, des tranches de métro ou autres infrastructures enterrées ou encore des murs de quai, etc. (Delattre, 2000). La construction du soutènement lui-même, le creusement de la fouille, l’installation des éléments d’appui et la gestion d’une éventuelle nappe phréatique présente dans le sol ont une influence importante sur l’état des contraintes dans les terrains avoisinants. Les modifications de l’état de contraintes conduisent à des déformations de la structure et du terrain avoisinant, et donc à des déplacements, tant horizontaux que verticaux, de la surface du sol soutenu. Ce développement des technologies et de leurs applications a suscité un développement important des méthodes de calcul. En effet, cette forme d’ouvrage nécessite une diversification des schémas de calcul de la poussée des terres car leur cinématique diffère de celle des murs-poids, ouvrages de soutènement les plus connus jusqu’alors. Malgré les nombreux développements conduits jusqu’à ce jour, la précision avec laquelle on est aujourd’hui capable de prédire ces déplacements n’est pas satisfaisante. La raison est liée à la complexité du problème : l’écran de soutènement présente une des formes d’ouvrage les plus complexes de la géotechnique, pour laquelle, non seulement les appuis de la structure sont constitués par le sol, à l’instar des fondations, mais également le chargement est apporté par le sol (Delattre, 2001). Afin de pouvoir améliorer les méthodes de prévision, il convient donc d’observer ces structures et leurs alentours. Cette observation, et surtout la comparaison de nombreux cas différents, doit permettre d’établir une classification du comportement des ouvrages qui servira de référence pour les calculs numériques et permettra d’affiner les méthodes de calcul empiriques ou semi- empiriques. L’observation du comportement des ouvrages réels met en évidence que ceux-ci sont soumis à des distributions de poussée très différentes de celles que connaissent les ouvrages-poids. La souplesse des écrans, ainsi que leur cinématique, jouent un rôle déterminant dans la distribution des poussées sur l’écran. La recherche de nouveaux modèles de calcul permettant de rendre compte des distributions de la poussée des terres se heurte aux limites des outils alors disponibles. Ainsi, la résultante des efforts auxquels sont soumis les ouvrages, compte tenu de leur cinématique, pourra être approchée avec des méthodes s’inspirant de celle de Coulomb, mais la répartition de ces efforts restera hors de portée des moyens de calcul. Cette distribution d’efforts donnera lieu à une estimation semi- empirique, fondée sur l’observation du comportement d’un grand nombre d’ouvrages. Ultérieurement, cette voie semi-empirique sera appliquée à l’évaluation des déformations des soutènements d’excavations et du massif de sol associé. Le présent chapitre conclut sur les perspectives et les limites de ces méthodes empiriques. Si elles sont relativement grossières, et ne permettent pas de prendre en compte toutes les particularités de Chapitre I Synthèse bibliographique sur le calcul d’écrans de soutènement 8 chaque ouvrage, elles n’en constituent pas moins un référentiel utile du comportement des ouvrages, fondé sur l’observation de la réalité. Pour cette raison, elles connaissent aujourd’hui un nouvel essor, leur utilisation étant conjointe à celle des méthodes numériques. Les ouvrages-poids sont des ouvrages rigides dont les mouvements combinent en général un déplacement latéral et un déversement de l’ouvrage, sous l’action de la pression du terrain soutenu. Le sol se trouve ainsi décomprimé latéralement et amené dans un état d’équilibre limite de poussée (Delattre, 2002). Les méthodes de calcul de la poussée des terres associées à cette cinématique de l’ouvrage ont été proposées par Coulomb, 1776 et Boussinesq, 1882 et ont subi de nombreuses validations expérimentales (Darwin, 1883 ; Feld, 1923, par exemple). À cette cinématique de déversement des ouvrages-poids, rigides, utilisés en soutènement des remblais, les ouvrages de soutènement souples vont opposer des cinématiques plus complexes. Deux facteurs principaux viennent diversifier la cinématique de l’ouvrage (Delattre, 2002) : * leur relative souplesse conduit à une déflexion variable de l’écran, et donc à des redistributions de la poussée entre les niveaux auxquels sont disposés les appuis et les niveaux entre appuis ; * les modalités d’exécution du soutènement provoquent une cinématique d’ensemble qui s’éloigne de la « rotation en pied » (déversement) jusqu’à se rapprocher d’une « rotation en tête». Il a fallu développer des outils originaux pour rendre compte de ces formes nouvelles d’interaction entre l’écran et le sol soutenu. Le problème posé s’avère toutefois ardu. Ainsi, il faut en pratique attendre l’apparition de la méthode des éléments finis pour que les différentes formes d’interactions sol-structure qui sont en jeu puissent être modélisées dans le détail. Dans l’intervalle, des solutions empiriques et semi-empiriques ont été proposées par les ingénieurs. Ces solutions, développées initialement pour le calcul des efforts dans les éléments de la structure, vont dans un deuxième temps être appliquées à l’évaluation des déformations de l’ouvrage et du massif de sol soutenu. Dans ce chapitre, on se propose de rappeler brièvement les différents types d’écrans de soutènement puis sont présentés les facteurs influençant le comportement des ouvrages. Cette partie intègre une recherche bibliographique et présente quelques études empiriques qui démontrent l’influence de chaque facteur d’influence. La dernière partie récapitule ces études synthétiques, toutes plus ou moins inspirées de l’étude initiale de Peck (1969a), qui analysent des expériences faites sur le comportement d’écrans de soutènement dans des cas particuliers (limités à une région ou à une ville, par exemple) ou assez généraux. I.2 RAPPEL SUR LES ÉCRANS DE SOUTÈNEMENT I.2.1 Les types d’écrans de soutènement La notion « d’écran de soutènement » couvre l’ensemble des structures servant à retenir un massif de sol autour d’une excavation à l’aide d’éléments de matériaux résistants à la poussée des terres. Dans la définition de l’Eurocode (EC 7-1, 2004), un « ouvrage de soutènement » retient des terrains (sols, roches ou remblais) et/ou de l’eau. Le matériau est retenu par l’ouvrage s’il est « maintenu à une pente plus raide que celle qu’il adopterait éventuellement si aucun ouvrage n’était présent ». Les trois types d’ouvrages couverts par la norme sont les murs-poids, les rideaux et les ouvrages de soutènement composites. Dans le travail présent, la notion « d’écrans de soutènement » se réfère principalement aux « rideaux ». Les méthodes les plus anciennes – à part de creuser au sein d’une pente non-stabilisée – se servaient de maçonnerie et de bois (Delattre, 2000). Aujourd’hui, ces techniques sont devenues très rares et les matériaux choisis consistent principalement en béton et en acier. En France, les méthodes conventionnelles utilisées pour les écrans de soutènement sont : • les parois berlinoises, faisant appel à des éléments de structure verticaux, généralement des profilés métalliques H, mis en place préalablement à l’excavation, entre lesquelles on Partie 1. Excavation profonde en site urbain, fluvial et maritime 9 dispose, à l’avancement de l’excavation, des madriers horizontaux ou des plaques en béton de blindage du terrain ; • les parois composites (dérivées des « berlinoises »), comportant souvent des pieux (ou même des micropieux) comme éléments verticaux et, par exemple, du béton projeté sur des treillis soudés comme éléments horizontaux ; • les rideaux de palplanches, utilisés principalement en présence d’eau ; • les parois moulées, faisant appel à un pré-soutènement à la boue, remplacé par du béton (armé ou non) ; • les parois préfabriquées, partant du même principe que les parois moulées mais avec une boue contenant du ciment : dans cette suspension sont posés des panneaux préfabriqués (ou des palplanches) ; • les parois constituées de pieux sécants ou de pieux jointifs ; • le clouage, nouvelle technique remplaçant parfois les parois berlinoises : au fur et à mesure de l’excavation, le terrain est « fermé » à l’aide de béton projeté, retenu par un maillage de clous (classiquement des barres passives en acier) battus ou installés dans des forages et scellés dans le terrain avec du ciment ; • les techniques de mélange en place de sol ou de ciment, notamment le « jet-grouting », réalisé par injection à haute pression du coulis de ciment, de façon radiale autour d’un trou de forage qui constitue ainsi l’axe d’une colonne de terrain mélangé au coulis de ciment. Pour les excavations profondes, des écrans de haute rigidité (parois moulées et parois de pieux sécants) sont habituellement utilisées. En France, la technique des parois moulées a progressivement marginalisé l’utilisation des pieux (Guilloux et Kastner, 1995), contrairement à l’Allemagne où les deux méthodes coexistent. Parmi les techniques appliquées en Allemagne, uploads/Ingenierie_Lourd/ chapitre-i-version-finale-2013.pdf
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- Publié le Apv 03, 2021
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