2 Le choix de l’auxiliaire dans la conjugaison du présent composé1 : étapes suc

2 Le choix de l’auxiliaire dans la conjugaison du présent composé1 : étapes successives à la préparation d’une leçon de français langue étrangère INTRODUCTION Le présent composé est l’un des temps du passé les plus utilisés en français. En effet, conservant les emplois qui lui étaient attribués, il s’est peu à peu emparé de ceux réservés au passé 1 et domine aujourd’hui tant à l’oral qu’à l’écrit (le passé 1 ayant été « exilé » quasiment au seul emploi de la troisième personne dans la narration). Dès lors, la communication étant un des points privilégiés aujourd’hui par l’enseignement du français langue étrangère, il nous a semblé intéressant d’étudier ce temps de la conjugaison dans le cadre de notre travail. Néanmoins, les difficultés que suscite l’emploi du présent composé sont nombreuses. Nous avons dès lors pris le parti de fonder notre exposé sur un problème propre à l’apprenant en FLE2, à savoir le choix de l’auxiliaire dans la conjugaison de ce temps (question en effet peu ardue pour un francophone). Nous tenterons donc ici de trouver une explication logique à ce point grammatical. Pour ce faire, nous passerons par plusieurs étapes. Nous commencerons par étudier de manière critique le discours produit par les manuels de FLE (nous nous interrogerons sur sa validité ainsi que sur sa possible assimilation et application par l’apprenant) et sa mise en pratique au travers des exercices proposés. Tirant parti de nos conclusions, nous construirons ensuite le discours grammatical sur lequel nous baserons notre leçon. Enfin, nous décrirons, de manière détaillée, cette leçon. 1 Tout au long de notre travail, nous utiliserons la terminologie de Marc Wilmet en ce qui concerne les temps de la conjugaison française. Bien que l’étiquette « présent composé » s’expose à certaines réticences, nous pensons que la nouvelle nomenclature des formes verbales, mise en place par Marc Wilmet, est plus logique que celle que la tradition a imposée et permet dès lors sa meilleure compréhension et assimilation. 2 Afin d’éviter les longueurs, nous emploierons l’abréviation FLE pour signifier « français langue étrangère ». 3 Première partie : état de la question critique sur base de cinq manuels de français langue étrangère Notre état de la question critique se fondera sur les cinq manuels de FLE (niveau 1) suivants : Bonne Route !3, Cadences4, Mosaïque5, Le Nouvel Espaces6 et Studio 1007. Pour chaque ouvrage, nous articulerons notre commentaire en trois parties. Premièrement, nous produirons une synthèse du discours grammatical tenu8. Deuxièmement, nous nous intéresserons à sa « mise en forme » (place consacrée à la grammaire, usage de tableaux de synthèse,…) et à la méthodologie du manuel. Troisièmement, nous analyserons la « mise en pratique » du point étudié, à travers notre observation critique des exercices proposés. 1. Bonne Route ! 1.1. Le discours grammatical Ce manuel propose comme règle générale de formation du présent composé l’adjonction d’un participe 2 à un auxiliaire (avoir ou être). Il distingue ensuite trois cas de figure. Premièrement, « [l]es verbes avec un complément d’objet direct emploient toujours l’auxiliaire avoir. (…) Mais quelques verbes n’ont pas de complément d’objet direct et pourtant emploient l’auxiliaire avoir : coûter, dormir, marcher, plaire, sembler, voyager9…» Deuxièmement, les auteurs de Bonne Route ! soulignent que les verbes pronominaux ainsi que les verbes qui n’ont jamais de complément d’objet direct se conjuguent au présent composé avec l’auxiliaire être. Enfin, le dernier cas abordé est celui des verbes pouvant utiliser les deux auxiliaires. Le manuel prend l’exemple de sortir et semble10 donner pour explication que, si le verbe est construit avec un 3 GIBERT Pierre et GREFFET Philippe, Bonne Route ! 1 : méthode de français (avec la collaboration d’Alain Raush et de Danielle van Zundert), Paris, Hachette, 1988, 258 p. 4 BERGER Dominique et MÉRIEUX Régine, Cadences : méthode de français (niveau débutant), Paris, Didier, 1994, 224 p. 5 JOB Béatriz, Mosaïque 1 : méthode de français (avec la collaboration de Jean-Pierre et Frédéric Hatchondo), Paris, CLE international, 1994, 208 p. 6 CAPELLE Guy et GIDON Noëlle, Le Nouvel Espaces 1 : méthode de français (avec la collaboration d’Annie Coutelle et de Sylvie Pons), Paris, Hachette, 1995, 206 p (« Français langue étrangère »). 7 LAVENNE Christian et alii, Studio 100 : niveau 1 (méthode de français), Paris, Didier, 2001-2004, vol. 1. 8 Nous y utiliserons la terminologie de Marc Wilmet, bien que la nomenclature traditionnelle soit conservée dans chacun de ces manuels. 9 GIBERT Pierre et GREFFET Philippe, op. cit., p. 122. 10 Aucune explication explicite n’est fournie. L’apprenant doit déduire ce propos à partir de l’indication de la nature des termes de l’exemple. Nous retranscrivons cet extrait en annexe (1.1.). 4 complément d’objet direct, il se conjuguera avec l’auxiliaire avoir ; dans le cas contraire, avec l’auxiliaire être. Nous pouvons résumer les règles énoncées par le tableau ci-dessous : Règle générale de formation du présent composé d’un verbe : auxiliaire (avoir ou être) + participe 2 Formation avec l’auxiliaire avoir Formation avec l’auxiliaire être Formation possible avec les deux auxiliaires - verbes avec COD - certains verbes construits sans COD (marcher, dormir,…) - verbes pronominaux - quelques verbes sans COD Exemple du verbe sortir Ce discours grammatical peut être loué pour plusieurs raisons : d’une part, il prend en compte tous les cas possibles de choix de l’auxiliaire dans la conjugaison du présent composé et dès lors n’omet pas celui des verbes utilisant, selon leur construction, avoir ou être ; d’autre part, par son travail sur le complément d’objet direct, il évite l’étiquette hasardeuse de « verbes de mouvement » destinée à rassembler les verbes employant l’auxiliaire être dans leur formation du temps étudié. Malgré ces points positifs, nous ne pouvons cependant que critiquer le discours tenu. Dans un premier temps, nous déplorons le fait que la règle générale ne précise pas que l’auxiliaire se conjugue au présent de l’indicatif et que le participe 2 est celui du verbe à conjuguer. Dans un second temps, nous remarquons que si les règles énoncées sont exactes, elles sont néanmoins très peu précises. En effet, elles laissent une intersection floue (rendue visible par les déterminants certains et quelques) en ce qui concerne les verbes construits sans complément d’objet direct. Dès lors, le discours grammatical n’est ni aisément assimilable, ni centré sur la production de l’apprenant (quel auxiliaire doit-il utiliser s’il souhaite conjuguer au présent composé les verbes rêver ou aller construits, tous les deux, sans complément d’objet direct ?). 1.2. Méthodologie et mise en forme du discours grammatical Le point de grammaire est étudié de manière explicite et progressive. En effet, trois leçons sont consacrées à notre sujet : la première (leçon 17 « Passe ton bac 5 d’abord ! ») est centrée sur le présent composé conjugué avec l’auxiliaire avoir ; la deuxième (leçon 18 « Tous partis ! ») sur le présent composé conjugué avec l’auxiliaire être ; et la dernière (leçon 24 « D’amour et d’eau fraîche ») étudie les verbes pronominaux, et notamment leur conjugaison au présent composé. Cependant, les auteurs du manuel ne reviennent pas sur les points vus précédemment (un seul renvoi au chapitre précédent (plus précisément aux verbes construits sans complément d’objet et se conjuguant non pas avec être mais avec avoir) est fait à la leçon 18 (p. 128)) : la progression suivie n’opère donc pas un mouvement spiroïdal. Nous remarquerons que la grammaire est étudiée au sein de la leçon (le manuel n’est pas doté d’une annexe reprenant, sous la forme d’une synthèse, la matière étudiée) : chacune des trois leçons consacre à peu près une page à un aspect de la formation du présent composé (« Pour pratiquer la grammaire ») sur laquelle se mêle discours grammatical et exemples. Enfin, aux vues des exercices (cf. point suivant), nous pouvons affirmer que l’ouvrage se fonde principalement sur une approche de type biéveuriste. 1.3. Mise en pratique du discours grammatical : les exercices Tout d’abord, la thématique de la leçon (respectivement pour les trois leçons : l’enseignement, le voyage et les relations sociales) est mise en place par un texte (non- authentique) à écouter et à lire, et par des exercices de compréhension. Cette première phase, qui précède l’étude du point grammatical, n’en est cependant pas une première approche, ce que nous regrettons. En effet, les textes des leçons 17, 18 et 24 contiennent très peu de verbes au présent composé (quatre verbes conjugués avec avoir dans le texte de la leçon 17 ; deux fois la forme « est parti » dans le texte de la leçon 18 ; et seulement quatre verbes pronominaux, dont deux au présent composé, dans celui de la leçon 24) ; de même, pour les exercices de compréhension du texte. Dans un deuxième temps et faisant suite au discours grammatical, l’apprenant est confronté à des exercices de drill qui peuvent être l’objet de plusieurs critiques. D’une part, ils ne sont pas en lien avec les thématiques des leçons et ne permettent dès lors pas l’acquisition et l’utilisation du vocabulaire qui y est lié. En outre, il s’agit majoritairement d’exercices uploads/Ingenierie_Lourd/ choix-auxiliaire-fle.pdf

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