CLEFS CEA - N°50/51 - HIVER 2004-2005 104 La filière hydrogène De façon plus ou

CLEFS CEA - N°50/51 - HIVER 2004-2005 104 La filière hydrogène De façon plus ou moins structurée et volontariste, des stratégies de mise en place d’une filière hydrogène se dessinent dans les pays industrialisés les plus impliqués, d’abord en Amérique du Nord et au Japon. En Europe, les initiatives pour une approche mieux coordonnée accompagnent d’importants efforts nationaux et régionaux, en particulier en France. Quelles stratégies industrielles pour la filière H2? L ’hydrogèneapparaît comme une solution très attrac- tive à une série de problèmes critiques comme le changement climatique global et la sécurité d’approvi- sionnement en combustibles. Le champ des acteurs étant très morcelé (constructeurs automobiles, opéra- teurs énergétiques,entreprises liées aux infrastructures, gestionnaires de flottes de véhicules, gouvernements, etc.), une coordination des différents intervenants est un prérequis à la mise en œuvre de l’hydrogène comme nouveau combustible pour véhicules. Les gouvernements doivent prendre l’initiative pour délimiter les frontières et créer des conditions suscep- tibles de garantir une sécurité aux investisseurs.La for- mulation d’une stratégie doit,en conséquence,considérer les constantes de temps sous-jacentes à une transition vers des combustibles et des systèmes de propulsion plus propres. Il s’agit, d’une part, d’évaluer la durée minimale de cette transition et,d’autre part,d’estimer le temps qu’il faudra pour éviter de sérieux problèmes. Les champs d’action sont nombreux. Pour n’en citer que quelques-uns:les politiques de réduction des gaz à effet de serre (GES), la taxation des carburants, les normes de consommation des véhicules, les incita- tions au développement de capacités de génération d’énergies renouvelables et de composants pour les infrastructures de distribution de l’hydrogène, etc. États-Unis: des initiatives décisives Les États-Unis, particulièrement depuis les attentats du 11septembre 2001,voient dans la sécurité d’appro- visionnement en combustibles un problème majeur,ce qui a donné une impulsion significative à l’hydrogène. Des activités déjà existantes dans le domaine de la pro- pulsion alimentée par des piles à combustible (PAC) se sont ainsi trouvées directement liées à l’hydrogène comme combustible de choix.La décision de General Motors (GM) de choisir l’hydrogène comme le GM Un véhicule Opel (groupe General Motors) équipé d’une pile à combustible a récemment traversé l’Europe entre Hammerfest, au nord de la Norvège, et Cabo da Roca, au Portugal, point le plus occidental du continent européen. Chacun avec ses spécificités, les pays développés jettent les bases du tissu industriel qui devra transformer en réalités concrètes les fruits de la R&D dans la filière hydrogène. Les stratégies de R&D et de mise en œuvre en Amérique du Nord, au Japon et en Europe CLEFS CEA - N°50/51 - HIVER 2004-2005 105 combustible propre des véhicules équipés de piles à combustible (FCV) est de toute première importance. La “feuille de route”établie par le gouvernement amé- ricain prend ces besoins et ces décisions stratégiques en compte quand il essaie de résoudre les questions critiques en suspens (par exemple,la production et le stockage de l’hydrogène,la réduction du coût des piles, l’infrastructure de distribution, etc.) d’ici 2015 afin d’encourager un vaste déploiement de FCV produits en grande série vers 2020 au plus tard. C’est dans ce cadre qu’est envisagée la création d’un “couloir de l’hydrogène”de la Californie au Colorado, avec des stations-service tous les 160 km environ. Le gouverneur de la première a déjà signé un ordre exécutif obligeant le gouvernement à installer 200 stations d’ici 2010.Plusieurs États américains (en particulier la Floride, le Michigan et l’Illinois) développent des projets de démonstration de flottes de véhicules à hydrogène. Canada: investissements dans l’infrastructure Au Canada, dans le cadre des financements destinés à assurer le respect par Ottawa de ses obligations de réduction des émissions de GES en application du protocole de Kyoto,quelque 130 millions de dollars canadiens sont dédiés à des projets de développe- ment et de démonstration dans le secteur des piles à combustible,une part significative de cette somme allant aux investissements dans l’infrastructure hydro- gène. Un projet prévoit de relier la frontière avec les États-Unis au domaine skiable de Whistler (Colombie britannique) pour les Jeux olympiques d’hiver 2010, un autre de relier Windsor (Ontario) et Montréal (Québec) par un corridor “hydrogène” de plus de 900 km. Idéalement, ces corridors permettraient de tester localement des véhicules et l’infrastructure hydrogène dans les zones stratégiques de l’Ontario bordant le Michigan (par exemple, Stuart Energy, Hydrogenics et GM) et de la Colombie britannique (comme Ballard et Methanex). Japon: une politique bien structurée En tant que deuxième marché automobile mondial, le Japon a une approche bien structurée et coor- donnée dans les domaines de l’hydrogène et des PAC. Celle-ci fait l’objet d’un accord entre l’industrie, le gouvernement et la société civile.Le développement de la technologie pour les véhicules à pile à combus- tible est considéré comme étant principalement du ressort de l’industrie tandis que la mise en place initiale de l’infrastructure de distribution relèverait d’initiatives soutenues par le gouvernement.Plusieurs conditions sont structurellement très favorables à l’introduction de véhicules équipés de PAC à l’hydro- gène: le Japon est un archipel, les distances routiè- res moyennes y sont plus courtes et les vitesses maximales moins élevées qu’en Europe ou aux États- Unis. C’est pourquoi les technologies déjà existantes de stockage de l’hydrogène permettent des autono- mies suffisantes.Des systèmes électriques et les infras- tructures d’entretien connexes sont mis sur le marché par le biais de véhicules hybrides électricité/essence. Une approche coordonnée existe entre l’industrie et le gouvernement, alors que le pays importe toute l’énergie pour la production du combustible de ses véhicules. Ce sont là les ingrédients d’une commercialisation réussie de véhicules équipés de piles à combustible et qui ne dépendrait même pas de marchés à l’exportation. Europe: une approche plus coordonnée L’Europe,en manque de stratégie cohérente sur l’hydro- gène et les piles à combustible,n’a que récemment engagé une approche plus coordonnée à travers la plate-forme européenne pour les technologies de l’hydrogène et des PAC de la Commission européenne (European hydrogen and fuel cell technology platform). D’autre part, l’Union européenne s’est donné l’obli- gation de produire 12% de la totalité de ses besoins énergétiques à partir de sources renouvelables d’ici 2010. Elle s’est en outre fixé pour objectif de couvrir d’ici 2020 au moins 20 % de tous les besoins en combustibles du secteur des transports à partir de sources non pétrolières, dont 5% avec l’hydrogène. Les premières stations-service distribuant de l’hydro- gène dans l’Union sont mises en place à travers les programmes européens Cute et Ectos. D’autres sont en construction à Berlin, Munich, Malmö et Milan. Elles devraient fournir une occasion idéale de consti- tuer des groupes locaux de fourniture d’hydrogène. > Reinhold Wurster L-B-Systemtechnik Ottobrunn (Allemagne) JHFC Station hydrogène de Yokohama-Daikoku (alimentée par une unité de reformage à la vapeur) mise en service dans le cadre du projet japonais JHFC (Japan Hydrogen and Fuel Cell demonstration project). Shell Hydrogen Une dizaine de villes européennes, dont ici Amsterdam, ont commencé à tester des bus électriques Citaro équipés de piles à combustible alimentées en hydrogène. R ien ne se perd, rien ne se crée», écrivait en son temps Lavoisier, père de la chimie moderne. Cet adage vrai pour les espèces chimiques l’est tout aussi pour l’énergie. En effet, l’énergie est une entité multiforme qui peut se transformer sous de très divers aspects. Toutefois, les énergies pri- mairesdirectement accessibles dans la nature sont en nombre limité: ce sont les énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz), l’énergie nucléaireet lesénergies renouvelables(hydraulique,biomasse, solaire, éolien, géothermie, énergie des marées). Ces énergies primaires consti- tuent ce que l’on appelle le mix ou le bouquet énergétique (figure 1). Pour la plupart des applications, il est nécessaire de convertir l’énergie afin de la rendre compatible avec l’usage envisagé. Bien évidemment la nature, très ingénieuse, a mis au point les tout premiersconvertisseurs énergétiques que sont les êtres vivants. Les plantes, par la photosynthèse, assurent la conversion de l’énergie rayonnante de la lumière en énergie chimique. Le corps humain lui-même permet, en parti- culier, de convertir l’énergie chimique en énergie mécanique via le système musculaire. Par la suite, l’homme a inventé de très nombreux convertis- seurs (figure2). Le premier en date est tout simplement le feu qui convertit de l’énergie chimique (combustion) en lumière et chaleur. Plus récemment un poste de télévision assure la conver- sion de l’électricité en énergies lumi- neuse (images) et mécanique (sons). En fait, de nombreux systèmes éner- gétiques sont l’association de plusieurs convertisseurs, comme par exemple une centrale nucléaire qui réalise la conversion de l’énergie nucléaire en énergie thermique (réacteur) puis en énergie mécanique (turbine) et enfin en énergie électrique (alternateur). Malheureusement, le second principe de la thermodynamiquenous enseigne que toute transformation de l’énergie a un coût: une partie plus ou moins impor- tante de l’énergie est dissipée sous forme de chaleur inutilisable (le frottement dans un système mécanique par exem- ple). Dans le cas d’une centrale nucléaire de la génération actuelle, l’énergie élec- trique produite ne représente qu’envi- ron un tiers de l’énergie nucléaire initiale contenue au sein du combustible. Mais il serait bien évidemment trop sim- ple que l’énergie puisse être consom- mée au fur et à mesure sur le lieu même de sa production. Dans de très nom- breux cas, les sites de consommation de l’énergie uploads/Ingenierie_Lourd/ lt-k.pdf

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