Romain BUCLON 1812, plus loin à l’Est. La perception de l’autre chez les soldat

Romain BUCLON 1812, plus loin à l’Est. La perception de l’autre chez les soldats français lors de la campagne de Russie. Mémoire de Master 2, « Sciences humaines et sociales ». Mention : Histoire Spécialité : HRECI Sous la direction de M. Gilles BERTRAND. Année universitaire 2007-2008 Romain BUCLON 1812, plus loin à l’Est. La perception de l’autre chez les soldats français lors de la campagne de Russie. Mémoire de Master 2, « Sciences humaines et sociales ». Mention : Histoire Spécialité : HRECI Sous la direction de M. Gilles BERTRAND. Année universitaire 2007-2008 Le sort des nations, comme une mer profonde, A ses écueils cachés et ses gouffres mouvants. Aveugle qui ne voit, dans les destins du monde, Que le combat des flots sous la lutte des vents ! Victor Hugo, L’Histoire. Remerciements. Je tiens à remercier toutes les personnes qui m’ont aidé à mener à bien cette étude, en particulier Monsieur Bertrand, mon Maître de mémoire. 5 Sommaire. Sommaire. ................................................................................................................................. 5 Avant Propos. ........................................................................................................................... 6 Introduction. ............................................................................................................................. 8 Partie 1. Les mémorialistes dans le contexte de 1812..................................................... 14 Chapitre 1. Motivations des mémorialistes.................................................................. 15 Chapitre 2. Situation géopolitique de l’Europe en 1812. ............................................ 28 Chapitre 3. A l’est de l’Europe en 1812........................................................................ 42 Conclusion de la Première Partie. .................................................................................... 60 Partie 2. Des Polonais aux Allemands : amis ou ennemis ? ........................................... 61 Chapitre 4. Les Polonais, de solides alliés ? ................................................................. 62 Chapitre 5. Les Juifs : amis ou ennemis ?.................................................................... 74 Chapitre 6. Les Allemands. Entre service et trahison................................................. 85 Conclusion de la Deuxième Partie. ................................................................................... 99 Partie 3. Anthropologie et ethnographie de la Russie. ................................................. 100 Chapitre 7. La barbarie d’un peuple.......................................................................... 101 Chapitre 8. Quelles classes supérieures ?................................................................... 115 Chapitre 9. L’armée russe. .......................................................................................... 128 Conclusion de la Troisième Partie.................................................................................. 143 Partie 4. Les soldats français vus par eux-mêmes. ....................................................... 144 Chapitre 10. La survie dans la retraite : observation des différentes stratégies de conservation. 145 Chapitre 11. La perception de soi et les valeurs morales........................................ 155 Chapitre 12. L’image de Napoléon. .......................................................................... 172 Conclusion de la Quatrième Partie................................................................................. 187 Conclusion générale. ............................................................................................................ 188 Sources imprimées................................................................................................................ 191 Bibliographie......................................................................................................................... 200 Table des cartes et tableaux................................................................................................. 204 Table des matières................................................................................................................ 205 6 Avant Propos. Peu de sujets, en histoire, connaissent de grands succès de librairie. L’histoire de Napoléon et du Premier Empire fait partie de ces exceptions. Stendhal l’annonçait quand il écrivit en 1818: « d’ici à cinquante ans, il faudra refaire l’histoire de Napoléon tous les ans »1. En 2006, le quatrième de couverture du dernier livre de Jean Tulard d’annoncer : « il s'est publié à son sujet [Napoléon] plus de livres qu'il ne s'est écoulé de jours depuis sa mort » 2. Si la constatation est peut-être exagérée, elle marque tout de même une certaine réalité : l’histoire du Premier Empire passionne les lecteurs, scientifiques et curieux. Dans ce cas, comment faire du neuf ? Tout n’a-t-il pas été dit ? Sur Napoléon lui-même, peut-être. Les publications sur l’Empereur foisonnent toujours, le meilleur y côtoyant le pire, et les portraits différant selon les auteurs. Son histoire militaire nous est aussi très bien connue. L’armée napoléonienne a été l’objet de nombreuses études, le plus souvent du point de vue de l’histoire militaire. Quand on a étudié ces hommes, que l’on a voulu esquisser leurs portraits moraux, leurs mentalités, l’on se pencha d’abord sur les « grandes figures » de l’Empire : maréchaux, et généraux. Ce sont les personnes pour lesquelles l’historien dispose du plus de sources. Citons à cet égard le très intéressant essai de Georges Six : Les généraux de la Révolution et de l’Empire3. Cependant, si les hauts officiers de l’armée de Napoléon ont été relativement bien étudiés, force est de constater que nous connaissons très mal les « simples » soldats de Napoléon, notamment dans une approche d’histoire des mentalités. L’instruction n’étant pas ce qu’elle est aujourd’hui, le taux d’analphabétisme des « sans-grade » était très élevé : on pense que seuls 15% des hommes savaient orthographier leur nom4. Ainsi, la majorité de ceux-ci n’ont pas pu laisser de traces de leur passage aux armées de Napoléon. Certains d’entre eux y sont tout de même arrivés, tant bien que mal, apprenant à écrire un français phonétique5. Néanmoins, leurs écrits constituent aujourd’hui une source indispensable pour étudier les mentalités des soldats de l’Empire, mais doivent souvent être complétés par ceux des officiers pour comprendre comment les autres peuples européens furent perçus en 1812. 1 STENDHAL, Vie de Napoléon, Paris, Petite bibliothèque Payot, 2006 (composé en 1817-1818), p. 7. 2 TULARD, Jean, Napoléon : Les grands moments d'un destin, Paris, Fayard, 2006. 3 SIX, Georges, Les généraux de la Révolution et de l’Empire, Paris, Bernard Giovanangeli éditeur, réédition, 2002 (1ère édition : 1947). 4 CROYET, Jérôme, « Le général Daumesnil », Napoléon Ier, Mai/Juin/Juillet 2008, n° 48, pp. 46-51. 5 Le capitaine Coignet, dans ses mémoires, intitulées Cahiers du capitaine Coignet, écrit de nombreux mots, selon Jean Mistler dans la préface, en respectant un alphabet phonétique. Ainsi, Napoléon monte « o o d’un sapin » (au haut d’un sapin). COIGNET, Jean-Roch, Cahiers du capitaine Coignet, présentés par Jean Mistler de l’Académie française, Paris, Arléa, 2001 (1e édition : 1851-1853), p. 11. 7 Et qui, mieux que des soldats, qui parcoururent l’Europe avec Napoléon, pourraient nous renseigner sur ce que les Français pensaient des étrangers ? Nous étudierons donc la vision qu’eurent les soldats français des peuples de l’est de l’Europe et des Russes en 1812, puis nous nous pencherons sur la manière dont ces soldats se virent eux-mêmes. 8 Introduction. 1812, l’année où tout bascule ! Le contraste entre le 1er janvier 1812 et le 31 décembre de cette même année est saisissant. En janvier, l’Empire napoléonien était tout-puissant. Napoléon avait imposé à tous les souverains d’Europe un tribut en argent et en hommes auquel même le Roi de Prusse avait dû consentir. La France comptait alors 130 départements, limités au nord-est par Hambourg et au sud par Rome. A ces 130 départements, qui faisaient de Turin, Florence, Rome, Bruxelles, Genève, Hambourg des chefs-lieux de préfecture comme Orléans ou Grenoble, s’ajoutèrent, le 26 janvier 1812, 4 départements formés par l’ancienne Catalogne. L’on parle de « Grand Empire ». En outre, Napoléon avait divorcé de sa première femme Joséphine à la fin de l’année 1809, et épousé, en 1810, l’archiduchesse d’Autriche Marie-Louise. Ce nouveau mariage – tout politique – répondait à une triple aspiration de Napoléon : sceller une entente avec une vieille monarchie européenne (la famille Habsbourg) pour affermir son trône, avoir à ses côtés un allié en cas de guerre, enfin assurer à la IVe dynastie un héritier. Bien que l’alliance avec l’Autriche laissa à désirer en 1813 et 1814, un grand nombre d’émigrés revinrent en France après le mariage autrichien, un héritier naquit le 20 mars 1811, et, pour l’heure, l’Autriche fournit à l’Empereur des Français un contingent pour la campagne de Russie. Trois ombres au tableau cependant : la crise économique, la querelle avec le Pape et la guerre d’Espagne. L’Europe et la France furent touchées entre 1810 et 1812 par une crise économique d’une certaine vigueur. Nous n’entrerons pas dans les détails, mais, bien que combattue par une politique de grands travaux, de soupes populaires et aussi de répression qui toucha autant les jacobins que les royalistes, cette crise économique dut entamer la confiance des Français en Napoléon. Le Pape, quant à lui, fut placé en résidence surveillée depuis 1809, puis fut emmené captif à Fontainebleau. Si la France gallicane post-révolutionnaire ne s’émut que peu de ce conflit, il cristallisa les rancœurs dans d’autres pays en lutte contre la France, tel l’Espagne. En effet, les armées de Napoléon étaient en guerre dans la péninsule ibérique depuis 1808 (invasion du Portugal en 1807). Exaltés par des prêtres mécontents du sort du Pape, qui virent sans doute le diable en Napoléon, par le patriotisme prôné par une bourgeoisie libérale – on voit ici l’importance de la répercussion de la Révolution française – 9 et soutenus par l’or et les troupes anglaises, les Espagnols entrèrent en résistance6. A défaut d’avoir une armée de taille à lutter contre Napoléon, ils formèrent des guérillas, mues par des convictions catholiques et/ou patriotiques, qui harcelèrent les troupes françaises. Ces dernières étaient supérieures en nombre, en équipement, et n’étaient pas si impopulaires qu’on le lit parfois de nos jours : il existait une guérilla pro-française. Cependant, l’armée française en Espagne souffrit d’un mauvais commandement : les généraux, jaloux les uns des autres, ne communiquaient pas entre eux, et parfois ne se portaient pas secours. Néanmoins, en 1812, la situation était loin d’être désespérée, et il fait peu de doute qu’une descente de Napoléon dans la péninsule, comme il l’avait fait en 1809, avant la campagne d’Autriche, aurait pu tout arranger. Mais revenons à la campagne de Russie. Lorsque Napoléon entra en campagne en juin 1812, il disposait de la plus puissante des armées du monde, réunissant tous les peuples d’Europe. Selon J.-O. Boudon, il fit ainsi passer uploads/Litterature/ 1812-plus-loin-a-l-x27-est.pdf

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