«Des Cannibales» Essais Montaigne, 1588 Cortez se rendant auprès de Moctezuma à
«Des Cannibales» Essais Montaigne, 1588 Cortez se rendant auprès de Moctezuma à Tenochtitlan (Mexico), 1519, enluminure, Paris, Bibliothèque nationale. Akg-images. Explication linéaire 2 Justification du cannibalisme et comparaison d’avec la bar barie dont font preuve les Portuguais. Description du traitement réservé aux prisonniers par les Amérindiens. Essais, livre I, chap. 31 « Des Cannibales » : Justification du cannibalisme 5 10 15 20 25 30 Chacun rapporte pour son trophée la tête de l’ennemi qu’il a tué, et l’attache à l’entrée de son logis. Après avoir longtemps bien traité leurs prisonniers, et de toutes les commodités dont ils se peuvent aviser, celui qui en est le maître, fait une grande assemblée de ses connaissants; il attache une corde à l’un des bras du prisonnier, par le bout de laquelle il le tient éloigné de quelques pas, de peur d’en être offensé1, et donne au plus cher de ses amis l’autre bras à tenir de même ; et eux deux, en présence de toute l’assemblée, l’assomment à coups d’épée. Cela fait, ils le rôtissent et en mangent en commun et en envoient des lopins2 à ceux de leurs amis qui sont absents. Ce n’est pas, comme on pense, pour s’en nourrir, ainsi que faisaient anciennement les Scythes ; c’est pour repré senter3 une extrême vengeance. Et qu’il soit ainsi4, ayant aperçu que les Portugais, qui s’étaient ralliés à leurs adversaires, usaient d’une autre sorte de mort contre eux5, quand ils les prenaient, qui6 était de les enter rer jusques à la ceinture, et tirer au demeurant7 du corps force coups de trait, et les pendre après, ils pensèrent que ces gens ici de l’autre monde, comme ceux qui8 avaient semé la connaissance de beaucoup de vices parmi leur voisinage, et qui étaient beaucoup plus grands maîtres qu’eux en toute sorte de malice, ne prenaient pas sans occasion9 cette sorte de vengeance, et qu’elle devait être plus aigre que la leur, commencèrent de quitter leur façon ancienne pour suivre celle-ci. Je ne suis pas marri10 que nous remarquons l’horreur barbaresque qu’il y a en une telle action, mais oui bien de quoi11, jugeant bien de leurs fautes, nous soyons si aveugles aux nôtres. Je pense qu’il y a plus de barbarie à manger un homme vivant qu’à le manger mort, à déchirer par tourments et par gênes12 un corps encore plein de sentiment, le faire rôtir par le menu13, le faire mordre et meurtrir aux chiens et aux pourceaux (comme nous l’avons non seulement lu, mais vu de fraîche mémoire, non entre des ennemis anciens, mais entre des voisins et concitoyens, et, qui pis est, sous prétexte de piété et de religion), que de le rôtir et manger après qu’il est trépassé. 1 offensé : frappé et blessé. 2 lopins : morceaux. 3 représenter : exprimer. 4 et qu’il soit ainsi : comme preuve qu’il en est bien ainsi. 5 contre eux : Les Cannibales. 6 qui : une autre sorte de mort... 7 au demeurant : sur le reste. 8 comme ceux qui : en hommes qui = étant donné qu’ils. 9 sans occasion : sans motif. 10 marri : fâché, contrarié. 11 mais oui bien de quoi : mai certes je suis bien marri de ce que. 12 gênes : tortures. 13 par le menu : en détail, lentement. Donnez un titre au mouvement 1 : Donnez un titre au mouvement 2 : Donnez un titre au mouvement 3 : Montaigne donne son avis. Il condamne les Portugais, et plus largement les Européens, qui ont tôt fait de dénon cer les pratiques cannibales alors qu’eux-mêmes sont loin d’être exempts d’actes de barbarie. Reformulez la thèse de l’auteur : Tableau - explication linéaire : l. Citation Identifi cation Interprétation 1-2 «trophée», «ennemi», «tué» champ lexical de la guerre Le contexte dans lequel s’inscrit la pratique que l’auteur s’apprête à décrire est un contexte de guerre. «bien traité» terme mélio ratifs Montaigne réalise la description du traite ment qui est fait aux prisonniers : il relève qu’ils sont «bien traités». 1- 10 «rapporte», «attache», «fait», «at tache», «tient», «assomment», «rôtissent», «mangent», «envoient» succession de verbes d’action au présent d’énonciation La succession de verbes d’action permet de décrire un rituel. Montaigne s’attache à faire une description précise et objective des pratiques de torture et de cannibalisme des Amérindiens. 4- 10 «grande as semblée» puis : «au plus cher de ses amis» l. ... «en pré sence de toute l’assemblée» l. ... «en com mun» l. ... «à ceux de leurs amis qui sont absents» l. ... champ lexical de la communauté Montaigne met l’accent sur l’aspect collectif et communautaire du rituel, auquel chacun va participer, même les absents. Cette pratique revêt donc un caractère social puisqu’elle permet à l’ensemble du groupe de se réunir. L’insistance de Montaigne sur ce champ lexical permet de souligner le caractère collectif et généreux de ce peuple. 9 «cela fait» connecteur temporel L’auteur marque les étapes du rituel avec une volonté didactique. 10 «comme on pense» incise avec une propo sition subor donnée circonstan cielle de com paraison Montaigne renverse les préjugés des Européens sur les Indiens prétendument barbares. 11 «ainsi que faisaient an ciennement les Scythes» proposition subordonnée de comparai son L’auteur, comme il en a l’habitude, cite un exemple antique pour relativiser la pra tique anthropophage du peuple amérin dien. 1/4 - Complétez le tableau de l’explication linéaire : Essais, livre I, chap. 31 « Des Cannibales » : Justification du cannibalisme 5 10 15 20 25 30 Chacun rapporte pour son trophée la tête de l’ennemi qu’il a tué, et l’attache à l’entrée de son logis. Après avoir longtemps bien traité leurs prisonniers, et de toutes les commodités dont ils se peuvent aviser, celui qui en est le maître, fait une grande assemblée de ses connaissants; il attache une corde à l’un des bras du prisonnier, par le bout de laquelle il le tient éloigné de quelques pas, de peur d’en être offensé1, et donne au plus cher de ses amis l’autre bras à tenir de même ; et eux deux, en présence de toute l’assemblée, l’assomment à coups d’épée. Cela fait, ils le rôtissent et en mangent en commun et en envoient des lopins2 à ceux de leurs amis qui sont absents. Ce n’est pas, comme on pense, pour s’en nourrir, ainsi que faisaient anciennement les Scythes ; c’est pour repré senter3 une extrême vengeance. Et qu’il soit ainsi4, ayant aperçu que les Portugais, qui s’étaient ralliés à leurs adversaires, usaient d’une autre sorte de mort contre eux5, quand ils les prenaient, qui6 était de les enter rer jusques à la ceinture, et tirer au demeurant7 du corps force coups de trait, et les pendre après, ils pensèrent que ces gens ici de l’autre monde, comme ceux qui8 avaient semé la connaissance de beaucoup de vices parmi leur voisinage, et qui étaient beaucoup plus grands maîtres qu’eux en toute sorte de malice, ne prenaient pas sans occasion9 cette sorte de vengeance, et qu’elle devait être plus aigre que la leur, commencèrent de quitter leur façon ancienne pour suivre celle-ci. Je ne suis pas marri10 que nous remarquons l’horreur barbaresque qu’il y a en une telle action, mais oui bien de quoi11, jugeant bien de leurs fautes, nous soyons si aveugles aux nôtres. Je pense qu’il y a plus de barbarie à manger un homme vivant qu’à le manger mort, à déchirer par tourments et par gênes12 un corps encore plein de sentiment, le faire rôtir par le menu13, le faire mordre et meurtrir aux chiens et aux pourceaux (comme nous l’avons non seulement lu, mais vu de fraîche mémoire, non entre des ennemis anciens, mais entre des voisins et concitoyens, et, qui pis est, sous prétexte de piété et de religion), que de le rôtir et manger après qu’il est trépassé. 1 offensé : frappé et blessé. 2 lopins : morceaux. 3 représenter : exprimer. 4 et qu’il soit ainsi : comme preuve qu’il en est bien ainsi. 5 contre eux : Les Cannibales. 6 qui : une autre sorte de mort... 7 au demeurant : sur le reste. 8 comme ceux qui : en hommes qui = étant donné qu’ils. 9 sans occasion : sans motif. 10 marri : fâché, contrarié. 11 mais oui bien de quoi : mai certes je suis bien marri de ce que. 12 gênes : tortures. 13 par le menu : en détail, lentement. Tableau - explication linéaire : 2/4 Complétez le tableau de l’explication linéaire : Essais, livre I, chap. 31 « Des Cannibales » : Justification du cannibalisme 5 10 15 20 25 30 Chacun rapporte pour son trophée la tête de l’ennemi qu’il a tué, et l’attache à l’entrée de son logis. Après avoir longtemps bien traité leurs prisonniers, et de toutes les commodités dont ils se peuvent aviser, celui qui en est le maître, fait une grande assemblée de ses connaissants; il attache une corde à l’un des bras du prisonnier, par le bout de laquelle il le tient éloigné de quelques pas, de uploads/Litterature/ 22des-cannibales-22-explication-line-aire-2-correction.pdf
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- Publié le Jul 17, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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