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CHRONIQUE Autour de juan luis vives. Publications récentes Vrin | « Revue des sciences philosophiques et théologiques » 2015/1 Tome 99 | pages 155 à 178 ISSN 0035-2209 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-des-sciences-philosophiques-et- theologiques-2015-1-page-155.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Vrin. © Vrin. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. 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Sa vie et son œuvre font de lui un humaniste européen au sens fort du terme : né à Valence dans les années de la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb et de l’expulsion des Juifs d’Espagne, Vives, issu d’une famille de juifs convertis, ne dut sans doute son salut qu’à une vie passée en exil : il se forme et enseigne à Paris, puis à Bruges, à la cour du futur Charles Quint ; il participe à l’aventure du Collège Trilingue à Louvain et occupe un poste de lecteur à l’Université d’Oxford, avec un succès qui lui vaut d’être introduit à la cour de Henry VIII, où il fait plusieurs séjours. C’est à Bruges, où il meurt en 1540, qu’il termine un de ses ouvrages majeurs, le De disciplinis. La parution simultanée, aux Belles Lettres, de la traduction française des deux premiers livres du De disciplinis par Tristan Vigliano et de celle de la biographie intellectuelle de Vives par Carlos G. Noreña (1970), réalisée par Olivier et Justine Pédeflous, a donné lieu à une journée d’études organisée par le Centre d’Histoire des Systèmes de Pensée Moderne de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et par le Centre d’Études en Rhétorique, Philosophie et Histoire des Idées de l’ENS de Lyon, au cours de laquelle a été exposée une sélection d’ouvrages tirés des fonds de la Bibliothèque Interuniversitaire de la Sorbonne et de la Bibliothèque Cuzin de l’UFR de philosophie de l’Université Paris 1. Enrique González González a dressé un bilan sur l’état actuel des éditions critiques de Vives. Enfin, la première traduction française de La Cause des pauvres (1545) de Domingo de Soto par Édouard Fernandez- Bollo (Dalloz, 2013) a permis de mettre en perspective les positions du dominicain de l’École de Salamanque avec celles de Vives, dans De l’assistance aux pauvres (1526). Les contributions qui suivent sont issues de cette journée d’études qui s’est déroulée le 14 juin 2014, à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, en présence des traducteurs. Dominique COUZINET Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 83.45.235.133 - 20/05/2020 21:20 - © Vrin Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 83.45.235.133 - 20/05/2020 21:20 - © Vrin 156 CHRONIQUE LES ÉDITIONS CRITIQUES DE JUAN LUIS VIVES : DES RÉUSSITES ET DES ATTENTES Dès son enfance, l’humaniste valencien Juan Luis Vives (1492/93-1540) respire l’odeur de l’encre d’imprimerie. Un des souvenirs de sa ville natale, quittée à l’âge de quinze ans, est celui d’un libraire qui étalait ses exemplaires sur une pierre devant la porte de l’université 1. Plus tard, à Paris, une des capitales de l’imprimerie, il laisse lui-même un témoignage de son rapport avec des libraires et imprimeurs de qualité modeste, qu’il aurait fréquentés au moins en 1514, et chez qui il aurait imprimé ses premiers écrits 2. À Louvain, où il arrive vers 1515, il rencontre Dirk Martens, prototypographe des Pays-Bas, grand imprimeur, qui est cependant déjà sur le déclin de sa très longue carrière auprès des presses. En outre, Louvain se trouvait en marge des grands circuits du livre dont Anvers est une des autres capitales. C’est là que Vives tente sa chance en 1520, aux côtés de Johannes Theobaldus, avec de si mauvais résultats qu’il se prend de colère contre le calcographus, qu’il aurait surnommé cacographus. Il a plus de chance avec le grand imprimeur et éditeur Michiel Hillen, bien que, même en 1536, il se plaigne du manque de vision et de l’avarice des artisans de la ville de l’Escaut. Finalement, en 1536, à la mort d’Érasme, il réussit à se mettre en contact avec les presses de Bâle, où il est accueilli par un imprimeur de la qualité et de l’érudition de Johannes Oporinus et de ses associés. C’est à lui qu’il confie les manuscrits de ses derniers écrits, lui donnant à réaliser des versions corrigées des œuvres préalablement imprimées. Il rencontre ainsi un éditeur auquel il peut faire confiance, aussi bien pour l’édition soignée de ses écrits que pour l’ampleur de leur diffusion 3. Une autre preuve du grand souci de Vives pour le soin typographique est la lettre écrite en espagnol à son ami Diego Ortega. Celui- ci avait traduit en espagnol les Preces et meditationes, et lui demande de réviser sa version. L’humaniste refuse, en affirmant qu’il était « si mal 1. Sur les premières années de Vives, et en général sur sa biographie, voir Enrique GONZÁLEZ GONZÁLEZ, « Juan Luis Vives. Works and Days », dans Charles FANTAZZI (éd.), A Companion to Juan Luis Vives, Leiden-Boston, Brill, 2008, p. 15-64. Je voudrais remercier Carlos Bonfil pour la traduction de mon texte et Marc Cheymoll, Tristan Vigliano et Dominique Couzinet pour leurs remarques pertinentes. Je remercie aussi cette dernière pour la patience infinie avec laquelle elle a affronté les imprévus du travail éditorial. 2. Enrique GONZÁLEZ GONZÁLEZ, « Juan Luis Vives sur les presses parisiennes et le dialogue Sapiens (1514) », Réforme, Humanisme, Renaissance 80 (juin 2015), sous presse. 3. Pour une vue d’ensemble de la production éditoriale de Vives, ainsi qu’une description de la quasi totalité de ses premières éditions, voir Enrique GONZÁLEZ GONZÁLEZ, Salvador ALBIÑANA et Víctor GUTIÉRREZ, Vives : Edicions Princeps, Valencia, Universitat de València, 1992 (à partir de maintenant : Edicions, suivi de la page ou du paragraphe). Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 83.45.235.133 - 20/05/2020 21:20 - © Vrin Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 83.45.235.133 - 20/05/2020 21:20 - © Vrin AUTOUR DE JUAN LUIS VIVES 157 éprouvé » dans des tâches de correction, qu’il préférait « faire une œuvre nouvelle plutôt que de corriger celle d’autrui ». Et il lui conseille ensuite de « prévoir un bon correcteur, de peur que l’imprimeur et ses aides, étant des Flamands, ne commettent dans l’impression des fautes irréparables » 4. Si Vives était si pointilleux pour la publication correcte de ses livres, faisant toujours appel à d’excellents éditeurs, l’entreprise d’en proposer une édition critique a-t-elle un sens ? Ne serait-il pas suffisant d’accéder – maintenant que les possibilités du réseau sont quasiment illimitées – à des facsimilés de l’édition définitive de chacun de ses écrits ? Il faut savoir que le Valencien a coutume de réviser ses traités précédents chaque fois qu’il doit les apporter de nouveau à l’imprimerie. Cela tient peut-être à son souci du style, à une évolution de sa pensée, ou à un changement d’opinion politique. Seule une édition consignant de manière systématique ces variantes peut permettre de voir de près l’évolution de ses idées au fil du temps. Et même lorsqu’une œuvre de Vives n’a été publiée qu’une seule fois de son vivant, comment savoir si les éditeurs successifs sont restés fidèles au texte d’origine ou s’ils ont introduit, pour des raisons diverses, des errata, des suppressions ou des variantes ? Par ailleurs, une véritable édition critique ne se limite pas à apporter un texte fiable. Elle doit également identifier les sources littéraires dont l’auteur s’est servi. Elle doit rendre compte des passages comportant une citation nominale aussi bien que de ceux où un autre auteur est sous-jacent, que ce soit d’une manière volontaire ou involontaire. Ainsi, pour citer un exemple bien connu, le frère Louis de Granada s’est abstenu, dans son Ecclesiastica rhetorica, de citer sa source principale, qui n’était autre que le protestant Philippe Melanchthon. Il est aisé d’imaginer le sort que ce frère aurait encouru auprès de l’Inquisition si une dette intellectuelle aussi compromettante avait été dévoilée… Souvent, plusieurs auteurs se sont bien gardés de rendre explicite la paternité de certains paragraphes qu’ils se sont appropriés dans leur œuvre, en empruntant un passage, parfois littéralement, à un tiers dont le nom est gardé secret pour des raisons diverses. Seule une authentique édition scientifique est en mesure de consigner systématiquement l’origine de ces emprunts uploads/Litterature/ autour-de-juan-luis-vives-publications-recentes-rspt-99-2015-155-178.pdf
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- Publié le Mar 29, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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