Bria-Berter Estelle LML3 La langue sauvée est le premier volet autobiographique
Bria-Berter Estelle LML3 La langue sauvée est le premier volet autobiographique d’Elias Canetti. Romancier, poète, dramaturge, essayiste, historien et critique littéraire, ce dernier est né en 1905 en Bulgarie, d’une famille séfarade d’origine espagnole. Canetti grandit dans un milieu multiculturel et extrêmement plurilingue. Homme de toutes les langues, il restera attaché plus particulièrement à la langue sauvée, qui n’est autre que l’Allemand, que sa mère lui a appris lors d’un été en Lausanne. Le chapitre que nous allons étudier est ce dernier s’intitulant « Allemand au lac Léman ». Il survient juste après la mort subite de son père et donc du départ de Manchester. Cet extrait est tout à fait significatif dans la vie de Canetti, il est alors annonciateur du devenir et de la structuration de sa personnalité. Il est le moment de transition entre la vie familiale avec son père et cette séparation brutale qui les amènent à Vienne. De par l’apprentissage de cette langue qui est l’Allemand, Canetti va passer du monde enfantin des contes au monde de la culture, des penseurs, après être passer par un apprentissage tout à fait douloureux, rappelant le deuil bien présent dans leur vie. Nous pouvons ainsi nous demander en quoi l’apprentissage des langues et surtout de l’Allemand chez Canetti est assimilé à une seconde naissance. Dans un premier temps, nous verrons que cet apprentissage de la langue est vu comme un voyage, une transition rude et complexe amenant des sensations et émotions de terreur chez l’enfant. Puis nous parlerons dans une second temps, de la relation complexe entre la mère et l’enfant qui amènera ce dernier à naître à nouveau et à former sa personnalité. Dès le début de l’extrait, nous pouvons voir que le voyage est directement évoqué pour montrer la transition indéniable qui va se produire, ici, dans la vie de Canetti. L’apprentissage de l’allemand est ainsi mis en avant, il nous est aussi montré que cette apprentissage sera des plus rapide de par le court séjour à Lausanne « il s’agissait d’apprendre l’allemand pendant ce bref laps de temps » p.92. La rapidité est ainsi l’une des premières caractéristiques de cet apprentissage particulier, inculqué par la mère de Canetti « elle était décidée à me l’inculquer au plus vite » p.92. Il sera d’une rapidité inimaginable pour un enfant et se fera par l’intermédiaire d’un livre, qui est pour Canetti l’élément essentiel de sa fascination pour les lettres, comme nous avons pu le voir dans le chapitre « Une intention meurtrière » p.43-46, ce passage évoquant la fascination de l’enfant de cinq ans pour les lettres du cahier de sa cousine Laurica. Fascination qui l’amènera à une intention meurtrière dû à la « très forte attirance » de l’enfant pour les lettres. Ce chapitre est alors à l’instar de celui que nous étudions, constructeur du personnage que deviendra par la suite Canetti, son amour pour les lettres commençant par cette pulsion pour les cahiers de sa cousine. Ici, sa passion irrévocable pour la langue allemande commence par cet apprentissage forcé et rapide que lui enseigne sa mère. Pourtant, ce livre ne pourra en aucun cas aider Canetti dans les premiers jours de son apprentissage car sa mère le lui refuse. Cela enfermera une nouvelle fois l’enfant dans un certain désespoir, car l’apprentissage ne se fera qu’oralement. Page 1 sur 6 COMMENTAIRE CANETTI - « Allemand au lac Léman » P.92-97, de « Notre Voyage » à « ô combien exclusif ! » La scène à la p.93 est ainsi saisissante car l’enfant de huit ans se retrouve bloqué à une table étroite avec sa mère. Tout ici nous montre que l’apprentissage ne va pas être est un moment agréable. Il est comme enfermé dans cette pièce, et voit par la fenêtre au loin le lac et les voiliers qu’il aime temps et qui le rendent heureux. Ils représentent la liberté, l’évasion alors que cette pièce est vu comme un lieu d’apprentissage où rien ne peut venir troubler l’enfant, un lieu sombre où la rapidité et la rigueur sont de mise. Le procédé d’apprentissage sera un procédé d’ingurgitation et se répétera plusieurs fois lors de ce séjour à Lausanne. L’enfant sera obligé de retenir les phrases dictées oralement par sa mère et d’en retenir leur signification en anglais. Le sarcasme dont fait preuve la mère envers son enfant, peut être vu comme un châtiment et ce passage est ainsi teinté de violence. Ceci est vu par l’enfant comme un supplice, que seule la mère peut arrêter, dira la gouvernante de ce dernier, Miss Bray. Le lieu de Lausanne qui était vu comme idyllique devient un lieu de transition, de formation pour le jeune Canetti. La langue allemande sera une langue vu comme exigeante, une langue de l’élite, qui s’acquière après de larges sacrifices. Ici, le sacrifice est l’innocence d’un enfant qui doit apprendre une langue de manière violente, cela entraîne la peur de ne pas pouvoir retenir toutes les phrases inculquées par sa mère . Nous verrons ainsi que l’enfant va être « sauvé » par Miss Bray, de par son intervention auprès de la mère de l’enfant. Cette dernière m’étant en avant l’envie de l’enfant d’apprendre les caractères gothiques p.95-96, va aider l’enfant dans cette apprentissage rude. C’est ainsi que l’enfant réussira à apprendre la langue plus facilement, étant fasciné par les lettres. Ainsi Canetti de par sa fascination pour les lettres va utiliser tout au long de cet extrait le caractère de la mémoire visuelle, pour ressentir les émotions et sensations qu’il ressentait à ce moment-là. Nous pouvons voir que l’apprentissage de la langue est encrée visuellement dans la mémoire de l’enfant de par le contexte et le lieu dans un premier temps. Le lieu étant comme nous avons pu le voir plus tôt, un lieu clôt qui oblige dans une certaine mesure, l’enfant a écouter et subir l’apprentissage. Les sentiments tout au long de l’extrait sont facilement décelables car il sont dit clairement. La souffrance ressentit par l’enfant de par les sarcasmes de sa mère mais également la peur de ne pas réussir, plonge l’enfant dans un certain désarroi. Les menaces de la mère ici vont être constantes et répétées comme une sentence. La faiblesse et l’idiotie vont être un point important de peur chez l’enfant dans cet extrait. Ainsi, il rattachera le mot « idiot » dont le traite sa mère, à sa cousine Elsie dont il avait entendu les adultes dire qu’elle resterait toujours idiote. Ainsi, les idiots sont ceux qui ne peuvent parler ou à peine parler. L’enfant sera ainsi tout au long de l’extrait et de son apprentissage dans la crainte et même la terreur de ne pouvoir réellement apprendre à parler comme évoqué par ce dernier p.94. Cette terreur troublant l’enfant vient alors du comportement que la mère entretient avec son fils lors de cet apprentissage, ce qui amène un certain paradoxe dans la relation que l’enfant entretient avec sa mère. Mathilde Canetti, après la mort subite de son époux, décide de revenir à Vienne avec ses trois fils. Elle décide donc d’apprendre l’allemand, sa langue de cœur, à Elias Canetti, son fils ainé, pour qu’il ne soit pas refusait à l’école. Nous pouvons alors voir que cette langue qui apparaissait à l’enfant comme une langue inaccessible, une langue réservée à l’amour et au couple que formait ses parents, lui devient subitement accessible. Cette acquisition de l’allemand va donc former l’enfant. Appris dans la douleur cette langue deviendra pour l’enfant le lieu privilégié de l’intimité avec sa mère. Cela peut ainsi nous renvoyer à la disparition de son père. La douleur dans cette apprentissage peut faire référence tout d’abord à la perte d’un mari, d’un père, à la douleur de cette perte. Sa mère qui a perdu son mari de manière brutale, se retrouve dans un certain désarroi. Elle ne peut plus pratiquer la langue de l’amour, de son cœur, car elle ne pouvait communiquer qu’avec son mari en allemand. Page 2 sur 6 Elle décide donc d’apprendre cette langue à son fils, pour dans un premier temps, l’instruire mais également retrouver ce qu’elle a perdu lors de la disparition soudaine de son mari. Ainsi, la relation entre la mère et le fils prend une tournure assez particulière, car l’enfant de huit ans rentre dans le lieu privilégié de l’intimité du couple. Il remplace d’une certaine façon l’absence de son père. Une sorte de complexe d’Œdipe fait alors son apparition, car l’enfant va prendre la place du père, et la mère va remplacer son mari et le dialogue qu’elle pouvait avoir avec lui en apprenant l’allemand à son fils. Malgré cela, l’enfant est au début troublé et peureux face à la mère, plutôt que proche et fusionnel car la mère va utiliser la souffrance et le sarcasme pour apprendre cette langue de l’amour à son fils. Nous pouvons ainsi faire le lien entre l’obsession tyrannique de la mère pour la pureté et la perfection de la maitrise de la langue avec les origines de ses derniers. Étant juif, ils uploads/Litterature/ canetti-prepa-20-11.pdf
Documents similaires










-
33
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Jan 21, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
- Taille du fichier 0.0782MB