Tous droits réservés pour tous pays ©Editions Godefroy de Bouillon Paris - Fran

Tous droits réservés pour tous pays ©Editions Godefroy de Bouillon Paris - France ISBN: 2-84191-057-1 Avant-propos Lorsqu'il s'était rendu au Chili, en 1987, le Pape, comme ille faisait volontiers ailleurs, avait voulu rencontrer la jeunes- se. Venus prématurément au stade Nacional de Santiago, trois à quatre mille militants d'ultra-gauche s'étaient massés dans la tribune qui, quelques heures plus tard, se trouverait dans le champ des caméras de télévision lors de l'intervention du Souverain Pontife. Quand arriva le moment, alors que l'immen- se stade s'était rempli, la tribune s'anima de banderoles hostiles au régime, de tempêtes contre la dictature, de dénonciations passionnées de la tyrannie du général Pinochet. Alors, d'abord sourde, presque inaudible, s'éleva une clameur étrange qui par- courut le stade comme un frisson, grossit, s'enfla, obsédante, martelant pendant de longues minutes ... Mentira !. .. Mentira !... Mentira! ... Mensonge. Ce livre est l'histoire de ce mensonge. Ou, plutôt, de ce faux témoignage que fut la relation de l'histoire contemporaine du Chili, telle qu'elle fut diffusée par certains media, principa- lement dans les pays d'Europe latine et notamment en France, entre 1970 et 1990. J'ai vécu cinq années au Chili, de 1981 à 1986. J'y étais arrivé habité des appréhensions qu'avait fait naître la dénoncia- tion incessante d'un régime implacable, de l'une des dictatures les plus accomplies de la planète. Avant de m'envoler vers l'Aconcagua et les rives du Pacifique, j'avais lu la petite dizaine d'ouvrages qui relataient, avec des accents unanimes, le drame qu'avait vécu ce petit pays du bout du monde quelques années plus tôt et que, dans la terreur, il continuait à vivre ces années- là. J'en avais éprouvé l'immense curiosité de rencontrer les témoins de ces drames et le théâtre de leurs souffrances. A l'an- nonce de ce long séjour que j'allais faire, j'avais perçu autour de moi de l'étonnement, de la commisération, de l'effroi ou même une sorte de réprobation comme si, à partir travailler au Chili 4 Chili 1970-1990, Histoire d'une désinfonnation pour une grande entreprise française, j'allais devenir le compli- ce d'innommables bourreaux. Au bout de quelques semaines, de quelques mois à par- courir le Chili du nord au sud, à rencontrer des gens de toute condition , choqués pour la plupart de l'image qu'on donnait à l'étranger de leur pays, je décidai qu'un jour, j'écrirai cet ouvra- ge. n n'aurait pas été possible il y a dix ans. L'imprécation, permanente des années durant, avait forgé dans l'opinion des convictions qu'il eut été vain de chercher à ébranler. Le cas chi- lien, confisqué, était tabou, scellé, interdit à toute remise en cause. Depuis, le Mur de Berlin effondré et, avec lui, l'idéologie qui avait contribué à l'édifier ; la révolution latino-américaine épuisée ; la démocratie parlementaire restaurée à Santiago ; l'apaisement des esprits venu avec le temps ... le moment per- met-il de l'écrire. On le verra à la lecture de ces pages, il ne s'agit pas de montrer de complaisance pour ce qui fut légitimement dénoncé mais d'apporter un complément d'informations sans lesquelles l'image est déformée et la vérité falsifiée. n s'agit, à travers les faits et eux seuls, sans prétendre refaire l'histoire, de démonter les mécanismes de ce qui constitua l'une des opérations de dés- information les plus achevées de notre époque. Ph.C. Chapitre 1 Entre 1975 et 1990, comparativement à celle de pays d'importance géopolitique comparable, la couverture média- tique de l'histoire du Chili fut écrasante et disproportionnée eu égard au peu de relations politiques, économiques et culturelles que ce modeste pays entretenait alors avec ceux de la commu- nauté internationale. Elle fut aussi partiale :A une ou deux exceptions près, les quelque 1000 notices (1) télévisées diffusées durant ces années-là convergèrent pour composer l'image d'un pays qui, après avoir tenté une expérience socialiste vertueuse soutenue par tout un peuple puis poussée à l'échec par l'impérialisme américain, avait été noyée dans le sang par une armée fasciste avide d'imposer un régime dictatorial. Si cette image n'est pas totalement fausse, on verra qu'elle mérite d'être regardée sous des angles permettant de mettre en lumière ce qui fut délibérément tenu dans l'ombre ou prenant en compte des éléments de connaissance inaccessibles au moment des faits et, aujourd'hui, disponibles. Mais, est-ce possible? En localisant inlassablement l'information sur les vio- lations aux droits de l'homme, toute velléité de remise en cause de l'ensemble historique ne se trouve-t-elle pas, ipso facto, vouée à l'échec ? La moindre inclination à rechercher des causes, a fortiori des explications, en heurtant des convictions soigneu- sement forgées dans le public, ne peut que susciter suspicion à vouloir défendre ou malaise à paraître complaisant. Pourtant, doit-on à ce risque, se refuser à dénoncer ce qui s'apparenta à une manipulation adroite de l'opinion ? L'histoire du Chili des années 70-90 fut présentée de façon tendancieuse donnant à penser qu'elle était une sorte de chasse-gardée des gauches, nationale et internationale. Inspirée par l'intelligentsia, la dénonciation publique du régime chilien, nourrie de la présence d'une diaspora importante de réfugiés politiques et de la sympathie que suscitait alors le mouvement 6 Chili 1970-1990, Histoire d'une désinformation révolutionnaire latino-américain, trouva dans les medias et, sin- gulièrement à la télévision, une caisse de résonance idéale à la diffusion de ses messages. Le battage médiatique, mesuré dans les années 74 et 75 où il aurait eu le plus de légitimité à se mon- trer excessif, enfla considérablement dans les premières années de la décennie 80, années durant lesquelles le Chili atténua sen- siblement les rigueurs de la dictature mais où l'Union de la gauche avait, ici, accédé au pouvoir. Fondé sur des faits, déclarations et données statistiques contrôlables et à ce titre peu contestables, ce livre ne cherche pas à heurter des convictions, mais, en apportant un complément d'informations aujourd'hui disponibles et en restituant les faits dans l'indispensable perspective du temps, à susciter la réflexion sur le phénomène de distorsion de la réalité historique qu'entraîne immanquablement la relation de l'histoire immé- diate par des medias autant esclaves de l'actualité que soumis à l'influence du pouvoir politique. En cette fin de siècle, le Chili se porte plutôt bien. Longtemps considéré par les économistes comme le bon élève du continent sud-américain, il est en passe d'en devenir la star. Qu'on en juge : Pour les dix dernières années, la croissance moyenne annuelle a atteint 7°/o. Pendant cette même période, l'agrégat national est passé de 16 à 73 milliards de dollars et le PIB par habitant, de 1350 à plus de 5000 dollars. L'inflation connaît aujourd'hui des niveaux de l'ordre de 6 à 7% par an jugés naguère illusoires dans un pays habitué à jongler avec des scores à deux, voire trois chiffres. Le taux de chômage, variable difficilement compressible dans une économie à la recherche de compétitivité, a été ramené à une moyenne annuelle de 7,5% depuis plusieurs années. Avec une épargne équivalente à 25% du PIB et un investissement interne à 28% de celui-ci, le Chili détient des taux records pour le continent. Les investissements étrangers - 35 milliards de dollars depuis dix ans, 4 milliards en 1995 - montrent pourquoi, devant des pays comme la Thaïlande et la Corée du sud, le Chili atteint aujourd'hui le... septième rang des nations les plus fiables en terme de compétitivité. En 1996, les exportations de Chapitre I 7 biens allaient atteindre près de 16 milliards de dollars, contre moins de 4, dix ans plus tôt. Enfin le ratio de la dette externe, qui était de 121% du Produit Intérieur en 1985, a aujourd'hui, été ramené à 29% de celui-ci. (2) Comment s'étonner que, dans ces conditions, le Chili ait intégré le Mercosur le 1er octobre 1996 et que, après la signatu- re récente d'un accord de libre-échange avec le Canada, il ne soit particulièrement désigné pour devenir prochainement, avec ce pays, les USA et le Mexique le quatrième partenaire de l' Alena. (3) Tout aussi éclairantes sont peut-être, notamment pour les pays en voie de développement, les situations sociales en matière de santé et d'éducation. Or, ici encore, le Chili présente un bilan qui le situe parmi les tout premiers des pays du continent. L'espérance de vie à la naissance est passée de 63,6 ans dans les années 70/75 à 74,4 ans entre 90 et 95. Les taux de mor- talité infantile qui étaient alors de 68,6 décès pour 1000 nais- sances sont tombés à 14 dans la même période de temps. (4) En matière d'éducation, l'analphabétisme de la popula- tion de plus de 15 ans a décru de 11 à 5,7% dans les 20 dernières années. En 1990, les taux de scolarisation de la classe d'âge 5-24 ans allaient atteindre 60%; 73% dans le secondaire; 23% dans l'enseignement supérieur. (5) Enfin, en terme de protection sociale, sont aujourd'hui, largement développés des systèmes modernes d'assurance maladie, vieillesse, invalidité, publics, privés ou mixtes, associés à une législation du travail proche de celle des pays développés. Cette situation, pour un pays qui s'est donné pour objec- tif d'atteindre à la fin du siècle le niveau moyen des nations de l'Europe du uploads/Litterature/ chesnay-philippe-chili-1970-1990-histoire-d-x27-une-desinformation.pdf

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