COMMENTAIRE ARGONAUTIQUES - Le texte que je vais commenter est extrait des Argo
COMMENTAIRE ARGONAUTIQUES - Le texte que je vais commenter est extrait des Argonautiques, une épopée composée en quatre chants par Apollonios de Rhodes au 3ème siècle avant notre ère et elle raconte le périple des Argonautes menés par Jason dans leur quête pour trouver la toison d’or. - Ici nous sommes au chant III, dans lequel les Argonautes viennent d’aborder en Colchide et où Héra et Athéna ont convaincu Aphrodite d’envoyer Éros pour que la magicienne Médée, fille d’Aiétès, tombe amoureuse de Jason. Jason se rend au palais d’Aiétès mais ce dernier refuse de lui laisser la toison d’or et lui impose des épreuves impossibles. Jason dans ses épreuves trouvera l’aide de Médée qui l’aime et qui lui prépare un onguent censé le protéger : c’est là que se situe notre extrait. - Le texte met en avant un farmakon que Médée possède, mais plus que cela, et c’est ce qui constituera ma problématique, le texte met en avant la duplicité de la figure de Médée qui est en fait entre deux mondes : la terre (gaia) et le monde divin souterrain (xton) - Lecture / traduction - Au début de l’extrait nous nous situons dans un monde mortel et intime ; en effet, le terme φωριαμός au vers 844 désigne un coffre dans lequel l’on range des vêtements et des effets personnels : de fait, nous somme sans doute chez elle. - Mais le vers suivant contraste avec le premier car il est question d’un farmakon, ce qui place notre personnage parmi les magiciennes ; mais ce farmakon n’est pas commun puisqu’il tient son nom d’un personnage mythologique très connu qui n’est autre que Prométhée : ainsi l’espace scénique commence doucement à se déplacer vers un monde divin. - Ce basculement du côté divin se produit via les thueessin du vers 846 qui sont faits en l’honneur de Daira, surnom donné soit à Perséphone soit à Hécate, mais l’adjectif mounogeneian ne permet pas de trancher entre ces deux divinités puisqu’il peut s’appliquer aux deux. Dans les deux cas il s’agit de déesse chtonienne, mais il est plus probable qu’il s’agisse d’Hécate car dans l’histoire c’est dans son temple que Médée se rend, d’autant plus qu’Hécate est bien plus associée au monde la sorcellerie. Cela dit, il est intéressant de noter que cette déesse est considérée comme une passeuse d’âme, une psychopompe ce qui ajoute à cet effet de passage d’un monde à l’autre que créait déjà le fait de sacrifier. - On entre dans l’univers du mystique d’autant plus qu’il s’agit d’un monde de « on dit » comme le montre le verbe fasi au vers 845, par lequel on entre effectivement dans le muthos au sens littéral et littéraire. - En effet, l’histoire de ce farmakon nous transporte dans le mythe de Prométhée à partir du vers 852, qui est directement situé eni knèmois kaukasioisin (sur les flancs du Caucase), un lieu qui est à la frontière entre le mythologique puisque P y est enchaîné et le réel puisqu’il s’agit d’une réelle chaîne de montagne qui permet de situer Médée sur cette frontière puisqu’elle va recueillir le suc de cette fleur mythologique juste après là- bas avec la xolxw kaspiè (étant donné que la mer caspienne se trouve à proximité du Caucase) - Dans le mythe de P, le fait que le sang coule au sol fait penser à la thusia, rapprochant textuellement ce que doit faire Médée de ce qui se passe chez P. - De plus ne pourrait-on voir en la fleur une préfiguration du personnage de Médée : tout comme elle est didumos (double) ; le verbe exefaantè au vers 855 est important : le verbe ekfainw désigne ce qui est montré, ici une fleur couleur de safran, à cela s’oppose ce qui est caché, le suc ikmada au 858 qui lui est kelainos : de même, Médée le jour est une femme normale alors que la nuit, à laquelle nous pouvons raccrocher le champ lexical de la noirceur comme kelainos, Médée est une sorcière. - Nous pourrions aller jusqu’à dire que puisque c’est l’ichor, donc le sang divin, de Prométhée qui a donné naissance à la fleur, et que la fleur ressemble à Médée, on peut donc dire que c’est le muthos qui nourrit le personnage de Médée. - A la fin, le texte va même jusqu’à assimiler Hécate (désigné par Brimo) et Médée et cela se fait dans la structure de la phrase : au vers 859 le sujet du verbe amèsato est bel et bien Médée, qui est également le sujet des participes loessamenè et agkalesasa, mais le fait que l’on accorde autant d’épithètes à Brimo au ver 862 brouille les piste quant au vers qui suis : à qui se réfère lugaiè… ? sans doute à Médée, mais cela pourrait tout à fait se rapporter à Brimo, faisant presque de Médée et de Brimo une seule et même entité, en tout cas du point de vue syntaxique. En définitive, le texte opère un déplacement du personnage de Médée du monde d’ici bas vers un monde qui appartient à la Brimo xthonièn. En plus de transposer le mouvement qu’elle fait effectivement dans l’histoire, puisqu’elle s’apprête à aller au temple d’Hécate, le texte donne à voir la dichotomie d’un personnage qui tel la plante est divisée en deux. Elle se trouve à la frontière du réel et du mythologique et fait figure d’entre-deux. Au départ, elle est celle qui est dévouée à la déesse, notamment via les verbes aressamenos et thueessin mais à la fin elle devient une figure chtonienne et nocturne qui possède les attributs de Brimo et presque son nom, provoquant dans la syntaxe un enthousiasme au sens étymologique. uploads/Litterature/ commentaire-argonautiques.pdf
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Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Apv 13, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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