Cours 7 La polysémie Doublée par la morphologie lexicale, la structuration séma

Cours 7 La polysémie Doublée par la morphologie lexicale, la structuration sémantique du lexique s’opère sur une triple base : 1. la délimitation et la structuration des différentes significations d’un mot, caractéristique pour la polysémie, la monosémie et la définition ; 2. les relations sémantiques d’identité, d’opposition, d’implication sémantique que les mots engagent entre eux : la synonymie, l’antonymie, l’hyponymie ; 3. l’analyse de l’information sémantique véhiculée par les mots à l’aide des sèmes ou traits sémantiques spécifiques et des classèmes ou traits génériques. Parmi les relations de sens, la polysémie occupe une place tout à fait particulière par le fait qu’elle peut influencer l’analyse des autres relations sémantiques : hyponymie, synonymie, antonymie. Caractéristiques générales La polysémie représente l’état naturel du langage. Elle se présente comme un trait universel des langues naturelles. C’est pourquoi dans la détermination des autres relations sémantiques la polysémie joue un rôle très important. Par ex. le verbe aimer1 s’oppose premièrement à haïr car son axe sémique est /état d’esprit, sentiment/. Pourtant le même verbe peut également s’opposer à détester, déplaire lorsqu’on voit s’actualiser le sème contextuel /attitude vis à vis d’une chose ou d’une situation/. On constate donc que la relation d’antonymie est, par l’existence de plusieurs sens attribués au même mot, dépendante de la polysémie. Ce sera pareil pour les autres relations. Définition On appellera polysémie le fait qu’une même entrée lexicographique recouvre des sens différents. Cette relation peut être définie au sens large et au sens restreint. Au sens large du terme, une unité lexicale est polysémique si elle a plus d’une signification (c-à-d si à un même signifiant correspondent plusieurs signifiés). La polysémie contribue aussi à la 1 délimitation du sens et à l’établissement de la proximité du sens en opérant des distinctions très fines aux niveaux des diverses acceptions du même terme. Au sens restreint du terme, la polysémie est opposée à l’homonymie lorsqu’il s’agit de décider si une forme linguistique manifestant des contenus différents doit être traitée comme un seul ou plusieurs mots. Un mot polysémique est marqué dans le dictionnaire par une seule entrée, tandis que les mots homonymiques sont traités comme formant plusieurs entrées distinctes et comme des mots isolés entre eux par rapport au sens. Par exemple les termes grève et opération bien que tous les deux possèdent plusieurs sens, sont donnés dans le dictionnaire l’un comme homonyme et l’autre comme mot polysémique. Ainsi grève aura deux entrées lexicographiques : grève 1= mouvement d’arrêt volontaire et collectif d’une activité, ayant pour but des revendications ou de protestations ; grève2= terrain plat formé de sable, graviers, situé au bord de la mer ou d’un cours d’eau. Par contre le terme opération apparaît sous une seule entrée mais aligne plusieurs sens : 1. action d’un organe qui produit un effet selon sa nature – opération de digestion 2. acte ou série d’actes (matériels ou intellectuels) supposant réflexion et combinaison de moyens en vue d’obtenir un résultat déterminé – opération chimique ; 3. processus de nature déterminée qui à partir des éléments connus, permet d’en engendrer un nouveau – opération mathématique. 4. Toute action mécanique sur une partie du corps vivant en vue de la modifier – opération chirurgicale 5. Ensemble de mouvements de combats qui permet d’atteindre un objectif, de défendre une position – opération militaire 6. Action portant sur l’acquisition ou la vente des valeurs mobilières, des matières premières – opération commerciale. Le choix des lexicographes de créer une entrée et plusieurs sens ou plusieurs entrées et un sens spécifique a été dû à la proximité du sens. Les connexions dans le cas des mots polysémiques sont assez étroites et claires pour la délimitation des divers sens. Pour les homonymes, les sens sont très éloignés l’un par rapport à l’autre. Dans le cas des mots polysémiques, il est parfois possible de dériver l’un des sens à partir d’un autre, même si le classème change : Ex. cuisine – plusieurs sens : 1. art de préparer les aliments /Je fais la cuisine/ 2 2a . lieu où on pratique cet art /Je suis dans la cuisine/ 2b. aliments préparés selon cet art /c’est une bonne cuisine/ 3. métaphorique : manœvres suspectes /la cuisine électorale/. Approche structurale de la polysémie Analysée dans la perspective d’une sémantique structurale, la polysémie fonctionne en vertu de l’existence d’un noyau sémique commun aux unités en question. Ces invariants sémiques s’actualisent contextuellement, en renvoyant à des référents différents. Dans les énoncés : -C’est un gros livre – le sens du mot livre réfère à l’objet de forme carrée ou rectangulaire, réunissant plusieurs pages... -C’est un livre très dense/difficile – les référents du mot livre est le contenu du livre -Il a ouvert la fenêtre = objet de la réalité qui correspond à la description sémique : « châssis vitré qui ferme l"ouverture faite dans un mur pour laisser entrer l"air, la lumière » - Il est sorti par la fenêtre – renvoie à la porte-fenêtre - Il a ouvert une nouvelle fenêtre sur l’ordinateur – le référent est écran de l’ordinateur et se définit comme partie de l’écran de l’ordinateur, de forme rectangulaire, à l’intérieur de laquelle se trouvent des informations relatives à une tâche déterminée et fonctionnant comme un écran propre. Par rapport à l’homonymie, la polysémie se caractérise par l’intersection de deux ou plusieurs sémèmes. Ex. fenêtre Objet concret fonction linguistique Noyau sémique commun= ouverture sur qqch. 3 Livre objet Contenu noyau sémique : « emmagasiner des informations, destinées à être découvertes par la lecture » On a affaire en ce cas d’un seul signifiant et plusieurs signifiés. Par conséquent il faut poser un noyau sémique commun à partir duquel on dérive les différents sens actualisés en contextes différents ; Le noyau sémique reste commun aux unités polysémiques même dans le cas où les classèmes de la lexie polysémique reflètent : 1. un champ d’application référentiel ; chaque sens renvoie à un autre référent. Ex. fenêtre, copie= reproduction, photocopie ; réf. Objet copié imitation ; réf. Art écrit à partir duquel on compose ; réf. Codage typographique être en manque de copie ; réf. Sujet dans la presse épreuve, devoir d’un élève ; réf. Activité scolaire 2. un changement de catégorie syntaxique : -adj.→nom : bleu /le bleu (ciel) -nombrable animé → non nombrable animé : un mouton/ manger du mouton -non nombrable → nombrable : boire du café/ boire trois cafés -abstrait → concret et inversement : la beauté /des beautés -contenant → contenu : casser un verre d’eau/ boire un verre d’eau -agent humain → outil : perforatrice (personne/ instrument) -espace → temps : Il se trouve après moi/ après ce moment Ces changements de catégorie syntaxique amène des changements de nature sémantique, en mettant en exergue certains métasémèmes trouvés à la base de la métaphore, métonymie, synecdoque, et nous permet de déceler les sources de la polysémie. Sources de la polysémie Dans la sémantique traditionnelle, la polysémie puise les sources dans : -les convergences phoniques ou graphiques des termes ayant un même étymon ; -dans le passage du concret à l’abstrait : ex . la fenêtre est ouverte/ il ouvre des fenêtres vers l’avenir ; 4 -dans les emprunts -dans la spécialisation sémantique : la fenêtre est ouverte/ il ouvre des fenêtres vers l’avenir ; D’après St. Ullmann la polysémie a quatre sources principales : -les glissements de sens métaphore, métonymie : un nid d’amour (lieu isolé pour les amoureux) -les expressions figées : un brin de fille/fille très petite/, une pluie de baisers /grande quantité/ -l’étymologie populaire -les influences étrangères : réaliser= 1. Rendre réel, effectif ; 2. Comprendre (sous l’influence de to realise –angl.) Fonctionnement de la polysémie Les mots polysémiques sont le résultat de la convergence graphique de deux ou plusieurs unités de distribution distinctes ou, d’après Cl. Dubois, « une confusion graphique de deux ou plusieurs invariants ». Ex. le mot tête à l’intérieur des diverses expressions qui le contiennent.→ polysémique. On conserve ainsi l’invariant : -« partie supérieure du corps » dans des structures telles que : tête nue, fendre la tête ; -« être vivant » : une tête couronnée (empereur), payer sa tête « subir les conséquences d’une action fâcheuse » « membres d"un groupe » (par métonymie) : il a cent têtes dans son troupeau -« siège des idées » : se mettre qqch dans la tête( s’entêter à faire qqch) ; la tête en l’air (étourdi). Ces diverses significations seront actualisées en fonction du contexte (référent) spécifique. On obtient à partir de l’analyse componentielle de ce genre de mots ; des paradigmes sémiques, définis par l’existence d’un noyau sémique commun à tous ou à une partie des sens, et des sèmes différenciateurs ou référentiels. On dit que noyau sémique est commun lorsque les différences entre les classèmes ou restrictions sélectives de la lexie polysémique reflètent : 5 1. un champ d’application référentielle ; le lexème valeur a de valeurs différentes dans les diverses sciences ; de même structure connaît des définitions différentes en sciences humaines ou en mathématique 2. un changement uploads/Litterature/ cours-7.pdf

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