ECOLE NATIONALE SUPERIEURE DES BIBLIOTHEQUES 1975 - 1976 LE DISCOURS DE LA CRIT

ECOLE NATIONALE SUPERIEURE DES BIBLIOTHEQUES 1975 - 1976 LE DISCOURS DE LA CRITIQUE Essal d'analyse du discours de la critique litt^raire dans les p^riodiques d'informationf h partir de deux exemples. Note de synthfese pr6sent£e pour 1'obtention du Dipldme Sup^rieur de Biblioth^caire par Claude JOLLY Directeur de Recherche ; J. BRETON P L A N •t30WC5**BEPMI 1. Introduction 2. Les silences de la critique 3. Les titres 4. Structure de la critique 5. Un discours traversS par les poncifs 6. Un langage vide 7. Lee variations id6ologiques de la critique 8. Conclusion : Nature de la critique - 1 - Introduction 1. Les critiquea litt^raires de la preaee d*information constituent un instrument de travail important pour les biblioth^caires. Par ailleurs, elles influencent fortement le (s) public (s), tout en Stant en m&ne temps un reflet relativement exact de ce qu'il (s) pense (nt) (1). On conviendra, dans ces conditione, qu'il n'est pas superflu de ce livrer k 1'analyse de ce type de diecours et d'assayer d'en ddterminer la nature : que dit-il, que cache-t-il, que ddforme ou transforme-t-il ? 2. C'est ainsi que nous nous proposons d'analyser les critiques parues & propos de deux ouvrages i - un roman, L'Ind6sirable, par Rdgis Debray (2) ; - un documentaire, Maurice Thorez. vie secrfete et yle publlque, par Philippe Robrieux (3)« Nous avons choisi ces deux ouvrages pour des raisons pr^cises. Ils ont connu ce que Chavalarias a appeld une sur*-critique (4)> ou si l'on prdffcre, une inflation critique. De plus, tant les auteurs que les sujets de ces livres sont de nature h mobiliser puissamment la presse. On peut donc esp^rer que la critique dtivoilera mieux que dans dfautres cas sa vSritable nature. Nous avons recens^ et dtudie les articles paPus dans la presse d*information, qu'elle soit - professionnelle (ex : Le Bulletin crltique du livre franqals) - litt^raire et / ou b. pr^tention culturelle (ex i Le Magazine litt^raire ; Le Monde) - de grande diffusion et / ou sans pr4tention culturelle (ex : France-soir j Marie-CLaire) On trouvera en annexe, la photocopie de toutes ces critiques. 3. Avant d1entreprendre cette analyse, un probl&me doit Stre prdalablement soulevd» En effet, toute ttnalyae d*un discoura suppose un diecours second qui pr£side k son Slaboration Toute analyse de langage suppose un mdtalangage. Dans ces conditions, dans notre analyse du discours de la critique, depuis quel lieu parlerons-nous ? Dans le cadre de cette 6tude, nous ne pensons pas devoir rdpondre dsuis le detail h cette question, au demeurant fort complexe. Disons seulement deux choses. D'abord, on ne peut prdtendre sans abus qu®il existe une th^orie scientifique de la littdraturej, theorie 41abor6e et a fortiori achevtie. N<Sanmoins, on peut affirmer qu'il existe des elSments pour une th^orie h venir de la litt^rature. Ceux-ci sont 6pats et h£t<£rogenes, unilat^raux et partiels,, Ils ont 6t6 construits par des auteurs comme Lukacs, Goldmann, Barthes et quelques autres (5)« Mdrne si notre Stude restera, par certains aspects, positiviste, c'est, en dernifere instance, depuis ces lieux, sans doute mouvants et incertains, que nous condui rcnt notre analyse. NOTES (1). Cf. Jacqueline Piatier t les Fr£uiqais et la lecture in Le Monde> 2-3 Mai 1976. Cet article examine notamment 1'impact de la critique sur le choix des lecteurs. (2). Le Seuil, 1975 (3). Fayard, 1975 (4). Bavardage des Sditeurs ... Silence de la critique, in Le Discours social, n° 1. Chavalarias montre, entre autres choses, que le roman dit "classique" et "historico-politique ainsi que le genre biographique, sont particulidrement pristis par la critique. Les deux ouvrages choeis rentrent pr£cis3ment dans ces cat^gories. (5)« Voir la bibliographie. - 3 - 2. Les silences de la critique 1. Nous avons ddpouille 30 p^riodiques parmi les plus importants, ou, en tout cae, parmi les plus repr^sentatifs (d*une 6cole de pensde, d'un groupe social, etc...). On compte 3 p^riodiques professionnels, 18 p^riodiques littdraires et / ou 4 prStention culturelle, 9 p^riuvilques Si grand tirage et / ou sans pr^tention culturelle. Le tableau ci-dessous confirme que l'on est bien en pr^sence drun ph^nomdne de sur-critique, m&ne si certalnes absences doivent 6tre constatdes. riodiques asionnels Roman de Debray Documentaire de Robrieux riodiques asionnels critique propremerfc dite Interview de 1'auteur Bonnes PeuiUes Commert. sur la parutiai critique aropreneit dite Interview de 11auteur Bonnes PeuiDes Commerfc sur la saritLon riodiques asionnels Lletin cri- iue du li~ 3 frangais X 3 livres X 3 Notes iliogra- Lques X - 4 - Roman de Debray Documentaire de Robrieux •iodiques aireset / •r&ten-fcion •elle critique proprem. dite Interview de 11auteur Bonnes feuiDes Comment» sur la parution critique proprem. dJLte Interview de 1'auteur Bonnes feuillee Commer 5ur la DarutLa Croix X X Ixpress X X X Figaro X X ince ivelle X lumanit6 X X •e X X Magazine ;t6raire X Monde X X Nouvel servateur X X i Nouvelle *itique X j Peuple *an<;ais X i Point X X >litique >bdo X X t Quinzaine .tt&raire X X ; Quotidien s Parie X X >uge X X »ibune icialiste X ileura ;tuelles X X - 5 - Roman de Debray Documentaire de Robrieux 'iodiques ld tirage >u sans ition *elle critique promprem. dite Interview de 1'auteur Bonnes feuiHes Commert. sur la paru- tion critique proprem. dite Interview de 11auteur Bonnes feujlles Commert sur la paru- tion Aurore X X Canard ichalnS X le X •ance-Soir X X X bdration rie-0.air< » x nute X roir de histoire X Nouveau -Match 1 X ? 2. II apparait que le roman de R4gis Debray a davantage connu les honneurs de la critique que le documentaire de Philippe Robrieux. Cela e'explique fort bien et ne fait pas probl&me. On sait d'abord que les analyses de romans sont plus nombreuses dans la presse que les analyses de documentaires (1). Cela est dcuis 1'ordre des choses puisque le roman est le genre pr^fSrd du public (2), De plus, il est normal qu'un texte de R6gis Debray personnalit^ situ^e au confluent de 1'Universit^, de la politique, du journalisme et du monde "parisien", d^fraie $ius la chro nique qu'une th6se universitaire sur la vie d'un dirigeant politique, m6me si celle-ci peut prSter mati&re a une cartaine sensation. On ne s^etonnera pas de ne pas trouver d'analyse de 1' Ind^sirable dans certains p^riodiques. Les revues sp<Scialis£es (La Houvelle critique, le Peuple francaiis, etc...) ne publient jamais de critiques de romans. Quant a Lib^ration, sa rubrique litt&raire est plus que r^duite. Par contre, les analyses de Blle, - 6 - Marie-ClaZre, Paris-Match» etc#.., semblent indiquer que la critique s1accommode fort bien d'un certain parieianisme mondain, superficiel et primaire» Nous aurons k nous interroger sur cette dimension parisienne de la critique. Les silences k propos de Maurice Thorez t vie secrfete et vie publique sont plus complexes a analyser. L'absence de toute critique dans les periodiques professionnels s'explique par un phdnom&ne de retard, fr6quent dans ce type de publication. On sait que ce retard tient h des raisons exclusivement techniques (3) et qu'11 n'y a pas lieu de rechercher d'autres explications. Le faible nombre de critiques dans la cat^gorie des pSriodiques & grand tirage et / ou sans pr^tention culturelle ne fait pas non plus probl&me. Cet ouvrage est ap^ - trop difficile a ces titres de trop bas niveau. Pour cette raison, il ne faut gu&re voir ici de la malveillance ou une volont^ de censure, et cela d'autant plus que ce livre pouvait autoriser des lectures "croustillantes" ou malsaines (certaines critiques, par exemple celle de 1•Aurore, ne s'en sont pas privSes I). De la m6me fagon, il n'y a pas a rechercher une signification particulifcre dans le silence du Magazine littdaraire : on sait que celui-ci a toujours privil4gi6 le roman par rapport aux autres genres litttiraires (4)« En revanche, 1'absence de toute critique du livre de Philippe Robrieux dans 11Humanit^ et France Nouvelle, pdriodiques communistes, fait probl&mej surtout eu 6gard au sujet. H ne sfagit pas, tt proprement parler, de censure politique puisque d'autres p^riodiques conmunistes (La Nouvelle critique, les Cahiers d^Histoire de 1'Institut Maurice Thorez) ont publid des analyses. N^anmoins, tout se passe comme si seuls les pdriodiques pour intellectuels avaient k en rendre compte et non ceux qui s*adressent & un public plus large et plus indiffdrencid (5). II y a lh, h coup sflr, une question* Y r^pondre exigerait que l'on se pase le probldme du rapport que le parti communiste entretient avec son propre passd et que l'on se livre h une auialyse de la nature de ce parti» On comprendra aisdment que ce n'est pas ici que l'on peut mener h bien un tel travail. Dans le cadre de cette 6tude nous ne pouvons que poser le probl&me, certainement pas lui donner sa solution. - 7 - 3. Si la plua sflre fagon de rester ailencieux consiste ne rien dire, ce n'est en tout cas pas la seule. II existe en effet, une mani&re de rendre compte d'un ouvrage, (et m6me d'en rendre compte avec 6clat), sans srexprimer soi-m6me : il sufflt pour cela de laisser la parole h quelqu'un d*autre. C*est ce uploads/Litterature/ discours-de-la-critique.pdf

  • 21
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager