HAUDECOEUR Manon L2 Lettres Modernes 02/04/2014 1 Le XVIIIème siècle, siècle de
HAUDECOEUR Manon L2 Lettres Modernes 02/04/2014 1 Le XVIIIème siècle, siècle des Lumières est une période de progrès de l'esprit humain qui passe par le développement de la raison et la prise de distance avec l'obscurantisme religieux. Avec ses Lettres persanes, publiées en 1721, Montesquieu donne un parfait exemple de cette volonté de changement. Il met en scène deux persans venus visiter l'Europe, échangeant des lettres entre eux et avec leurs amis restés en Perse. Ils vont alors découvrir les pays occidentaux en plein mouvement. Ce dynamisme est explicité par Jean Starobinski : « La mobilité, la curiosité, le goût de la nouveauté, le plaisir de rompre et de recommencer sont dans l'air du siècle. Leur expression exemplaire est le libertinage, dont le mouvement et le désir ne connaissent pas de repos. ». Dans cette citation, la volonté d'une société nouvelle semble être un simple amusement pour les européens. Nous pouvons alors nous demander si les Lettres persanes sont la simple illustration de la dynamique du siècle. Certes les Lettres persanes sont une représentation du mouvement constant du siècle, mais elles sont également une critique de la transformation de la société qui n'est pas suivie par l'évolution des institutions, gelées et devenues non adaptées. Avant tout, les Lettres persanes sont un témoignage des changements du siècle. Pour cela, elles se présentent sous forme de roman épistolaire qui rend compte du passage du temps et met en scène la mobilité et la curiosité ambiante de l'époque. En premier lieu, les Lettres persanes sont un roman qui s'inscrit dans une tradition littéraire, très en vogue au XVIIIème siècle, le récit de voyage. Ce récit crée la surprise parce qu'il est inversé par rapport à la norme. En effet, le plus souvent, ces romans mettent en scène des européens partis visiter des pays exotiques comme les récits de Chardin et Tavernier dont Montesquieu s'est inspiré. Mais d'autres récits de voyage suivent le même sens que les Lettres persanes, tels que L'esploratore turco de Giovanni Paolo Marana. Tous ces récits sont des fictions basées sur des recherches très poussées afin d'obtenir un effet de couleur locale. Ensuite, l'œuvre est sous forme épistolaire polyphonique, c'est-à-dire qu'elle est constituée par un échange de lettres entre plusieurs personnages. Les principaux sont Usbek et Rica, l'oncle et le neveu qui voyagent en Europe. Rhédi, leur ami voyage également mais reste un personnage secondaire qui intervient bien moins que les deux premiers. D'autres personnages sont également présents : Ibben (lettre XIII), Mirza (lettre X), Nessir (lettre VI) et Rustan (lettre I), des amis persans; les femmes de Usbek, Zachi (lettre III), Zéphis (lettre IV), Fatmé (lettre VII) et Roxane (CLXI) qui vivent dans leur sérail en Perse; leurs gardes, les eunuques (lettre II), et autres esclaves de Uskek; et plus rarement des prêtres (lettre XVI) à qui s'adresse Usbek pour des questions religieuses. D'autre part, les indices temporels et spatiaux de la lettre renseignent d'emblée le lecteur sur le caractère épistolaire du roman. Par exemple, dans la lettre I, on trouve « De Tauris le 15 de la lune de Saphar, 1711 ». Les lettres suivent le calendrier lunaire établi par Chardin. En bilan, nous pouvons donc affirmer que le premier objectif des Lettres persanes est de divertir le lecteur tout en lui donnant l'impression de réalité et donc de véritable témoignage. En second lieu, le roman se base sur un exotisme partagé qui témoigne de la mobilité et de la curiosité générale au XVIIIème siècle. Il apparaît clairement que les persans sont attirés par l'occident puisqu'ils font un long voyage pour en découvrir tous les aspects. La première lettre montre bien cette curiosité : « Rica et moi sommes peut-être les premiers parmi les Persans que l'envie fait sortir de leur pays ». Le désir de découvrir les européens et leur culture ne s'apaise pas DISSERTATION Sujet : A propos de Montesquieu, Jean Starobinski note : « La mobilité, la curiosité, le goût de la nouveauté, le plaisir de rompre et de recommencer sont dans l'air du siècle. Leur expression exemplaire est le libertinage, dont le mouvement et le désir ne connaissent pas de repos. » Dans quelle mesure selon vous cette remarque peut-elle s'appliquer aux Lettres persanes ? HAUDECOEUR Manon L2 Lettres Modernes 02/04/2014 2 lors de l'arrivée en France, loin de là, car nous trouvons plusieurs exemple d'intérêt de leur part, notamment dans la lettre XXVIII « Je vis hier une chose assez singulière, quoique elle se passe tous les jours à Paris » et dans la lettre XLI « J'entrai l'autre jour dans une église fameuse qu'on appelle Notre-Dame: pendant que j'admirais ce superbe édifice, j'eus occasion de m'entretenir avec un ecclésiastique que la curiosité y avait attiré comme moi ». En ce qui concerne le voyage des persans, celui-ci est décrit également dans la lettre liminaire: « Nous n'avons séjourné qu'un jour à Com » puis « et hier, vingt-cinquième jour de note départ d'Ispahan, nous arrivâmes à Tauris ». Ensuite, la lettre IV continue le récit de voyage : « A une journée d'Erivan, nous quittâmes la Perse » puis « Douze jours après nous arrivâmes à Erzeron où nous séjournerons trois ou quatre mois ». Le trajet se poursuit dans la lettre XIX « Nous n'avons séjourné que huit jours à Tocat; après trente-cinq jours de marche, nous sommes arrivés à Smyrne » ainsi que dans la lettre XXIII « Nous sommes arrivés à Livourne dans quarante jours de navigation ». Enfin, le voyage s'achève à Paris dans la lettre XXIV : « Nous sommes à paris depuis un mois ». Il est nécessaire de noter que les persans suivent l'itinéraire inverse du voyage de Jean- Baptiste Tavernier en Perse, la source d'inspiration de Montesquieu se distingue donc très nettement. Non seulement les persans sont attirés par l'Europe mais les européens sont curieux de la venue des persans et s'intéressent à eux. C'est le cas dans la lettre XXX, où Rica se fait remarquer dans la foule : « Les habitants de Paris sont d'une curiosité qui va jusqu'à l'extravagance », « je fus regardé comme si j'avais été envoyé du Ciel: vieillards, hommes, femmes, enfants, tous voulaient me voir », « je voyais aussitôt un cercle se former autour de moi », « je ne me croyais pas un homme si curieux et si rare ». On retrouve cet intérêt des européens pour les persans dans la lettre XXVIII où une chanteuse d'opéra déshonorée prie Rica de l'emmener en Perse : « J'ai appris, par une homme de votre suite, que l'on faisait un cas infini, dans votre pays, d'une danseuse, et que, si j'étais à Ispahan, ma fortune serait aussitôt faite. Si vous vouliez m'accorder votre protection et m'emmener avec vous dans ce pays-là (…) ». En revanche, nous remarquons que l'intérêt des européens pour les persans relève soit d'une curiosité malsaine soit de motivations personnelles. De plus, la chanteuse semble mépriser la Perse avec l'expression dépréciative « ce pays-là ». En dernier lieu, le passage du temps illustre le progrès dans l'œuvre Tout d'abord, les lettres parviennent à circuler grâce aux progrès de la poste à l'époque, en effet, elle se développe progressivement notamment en France. Les lettres voyagent également entre les continents grâce aux bateaux et nous pouvons observer ce phénomène dans la lettre XXVII : « J'envoie mes lettres à Marseille, d'où il part continuellement des vaisseaux pour Smyrne; de là il envoie celles qui sont pour la Perse par les caravanes d'Arméniens qui partent tous les jours pour Ispahan ». Cette expansion de la communication est un parfait exemple du progrès ambiant. De plus, le passage de temps est démontrer par le temps entre les lettres, qui mettent plusieurs mois de transfert entre Ispahan et Paris. On retrouve ce décalage à chaque lettre : par exemple, la lettre V de Rustan à Usbek écrite « d'Ispahan, le 28 de la lune de Rebiab 1, 1711 » c'est-à-dire en mai ne trouve de réponse qu'en août « le 20 de la lune de Gemmadi 2, 1711 ». Cependant, le décalage devient évident à la fin du roman lorsque Usbek tente de rétablir l'ordre dans le sérail mais que ces consignes arrivent en retard. L'exemple le plus frappant est lors de la mort du grand eunuque qui dirigeait le sérail d'une main de fer. Son prédécesseur, Narsit, écrit à Usbek « le 5 de la lune de Gemmadi 1, 1718 » c'est-à-dire en juillet alors que Usbek avait écrit à l'eunuque « le 11 de la lune de Zilhagé, 1718 » c'est-à-dire en février, 5 mois plus tôt. Narsit écrit dans la lettre CXLIX : « Le Grand Eunuque vient de mourir, magnifique seigneur. Comme je suis le plus vieux de tes esclaves, j'ai pris sa place (…) » puis « on m'apporta une de tes lettres qui lui était adressée ; je me suis bien gardé de l'ouvrir ». Le problème de communication est évident dans cet extrait. Même avec l'expansion de la circulation des biens et uploads/Litterature/ dissertation-lettres-persanes-montesquie 1 .pdf
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- Publié le Oct 27, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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