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HAL Id: halshs-02894232 https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-02894232 Submitted on 8 Jul 2020 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Buddha et la marche sur les eaux : du prodige à la condition de l’arhant Guillaume Ducoeur To cite this version: Guillaume Ducoeur. Buddha et la marche sur les eaux : du prodige à la condition de l’arhant. Archimède : archéologie et histoire ancienne, UMR7044 - Archimède, 2019, pp.29-38. ￿halshs- 02894232￿ ARCHIMÈDE ARCHÉOLOGIE ET HISTOIRE ANCIENNE N°6 2019 DOSSIER THÉMATIQUE : HISTOIRES DE FIGURES CONSTRUITES : LES FONDATEURS DE RELIGION Guillaume DUCŒUR Introduction Philippe SWENNEN Zarathushtra, une construction liturgique Kyong-Kon KIM Laozi. De la figure du maître mythique à la divinité taoïque Guillaume DUCŒUR Buddha et la marche sur les eaux : du prodige à la condition de l’arhant Jean-Marie HUSSER Le martyre de Jean-Baptiste, préfiguration de la Passion du Christ ? Michel TARDIEU Héraclès/Jésus dans la sophistique impériale Anne-Sylvie BOISLIVEAU Mahomet entre exégèse, hagiographie, rite et histoire DOSSIER THÉMATIQUE : JOUER DANS L’ANTIQUITÉ : IDENTITÉ ET MULTICULTURALITÉ GAMES AND PLAY IN ANTIQUITY: IDENTITY AND MULTICULTURALITY VARIA 1 9 16 29 39 48 55 71 213 u ARCHÉOLOGIE ET HISTOIRE ANCIENNE ARCHIMÈDE Archéologie et histoire ancienne N°6 2019 - p. 29 à 38 Dossier « Histoires de figures construites : les fondateurs de religion » 29 Article accepté après évaluation par deux experts selon le principe du double anonymat R CHIMEDE , REVUE BUDDHA ET LA MARCHE SUR LES EAUX : DU PRODIGE À LA CONDITION DE L’ARHANT Guillaume DUCŒUR Professeur en histoire des religions Université de Strasbourg UMR 7044 Archimède gducoeur@unistra.fr The Vinaya of the Sthaviravāda schools contain stories about the life of the founder of Buddhism that pertain to his nonhistorical constructed figure aimed at portraying and living the disciplinary rules imposed on the members of the bhikṣu’s community. The storie of the conversion of Kāśyapa of Uruvilvā in which the Buddha walks on the waters of the Nairañjanā symbolically illustrates the supernatural abilities acquired after the awakening while reminding that the final aim of all bhikṣu remains the obtaining of the condition of the Arhant. Les Vinaya des écoles du Sthaviravāda conservent des épisodes de la vie du fondateur du bouddhisme qui participent de sa figure construite non-historique visant à mettre en scène et à rendre vivantes les règles disciplinaires imposées aux membres de la communauté des bhikṣu. L’épisode de la conversion de Kāśyapa d’Uruvilvā dans lequel le Buddha marche sur les eaux de la Nairañjanā illustre symboliquement les capacités surnaturelles acquises après l’éveil tout en rappelant que le but ultime de tout bhikṣu demeure l’obtention de la condition de l’arhant. Mots-clés Buddha, marche, eau, biographie, miracle, arhant, Nairañjanā, Sāñcī, Kāśyapa, bouddhisme. Keywords Buddha, walk, water, biography, miracle, arhant, Nairañjanā, Sāñcī, Kāśyapa, Buddhism. RÉSUMÉ 30 Buddha et la marche sur les eaux : Du prodige à la condition de l’arhant Depuis le ve s. av. J.-C., la communauté bouddhique (saṃgha) a produit un grand nombre de récits tradi- tionnels sur la vie de son fondateur qui firent l’objet de représentations figurées au moins dès le iie s. av. J.-C. Aux Sūtra et Vinaya du canon des écoles anciennes (sthaviravāda), qui relatent pour certains quelques fragments de sa vie déjà construite de longue date, se sont adjoints des récits de vies antérieures (Jātaka) et d’exploits glorieux (Avadāna) ainsi que des biographies autonomes partielles ou complètes (Carita). Le plein essor de ces biographies autonomes et de l’art figuratif eut lieu entre le ier s. et le iiie s. apr . J.-C. sous le règne des rois Kuṣāṇa en Inde du Nord et Śātavāhana en Inde centrale. Durant cette même période, les tenants du mahāyāna procédèrent à la relecture de la vie tradition- nelle du fondateur en fonction des différents éléments novateurs de leur doctrine. Ces éléments narratifs abondants, pour la plupart emplis de merveilleux, n’ont guère de valeur histo- rique et certains religieux-mendiants (bhikṣu) boud- dhistes [1] en vinrent eux-mêmes à s’interroger sur l’historicité de leur propre fondateur , l’Éveillé (buddha) dont on répétait génération après génération qu’il avait atteint l’extinction complète (parinirvāṇa) au moment de sa mort. De fait, le Buddha historique échappe à celui qui tente d’en restituer la vie, car les sources textuelles bouddhiques ne sont nulle- ment des récits d’événements historiques, leurs auteurs n’ayant jamais prétendu faire de l’histoire au sens où l’entend la discipline historique moderne. Ceci induit que les épisodes de la vie du Buddha ont avant tout une valeur symbolique et surtout didactique fondée sur la doctrine bouddhique qu’ils exposent et rendent vivante avec force conviction auprès des croyants (śraddhin). Le Buddha qui y est décrit incarne donc, pour le véhicule des auditeurs (śrāvakayāna) des écoles anciennes, le bhikṣu idéal typique montrant la voie à suivre afin d’atteindre l’extinction (nirvāṇa) de la soif (tṛṣṇā) d’existence ou, pour le véhicule des bodhisattva (bodhisattvayāna) prôné par les mahāyānistes, le bodhisattva archétypal indiquant le chemin vers le parfait et complet éveil (samyaksaṃboddhi). Pourtant, dès les débuts du xixe s., les indianistes européens essayèrent d’extirper des épisodes biogra- phiques les éléments merveilleux, s’imaginant resti- tuer ainsi une possible trame narrative historique. Le bouddhologue allemand Hermann Oldenberg (1854- 1920), alors professeur à l’Université de Kiel, était convaincu d’y parvenir en ne gardant des sources textuelles pālies que les seuls éléments narratifs les plus rationnels et affirmait alors en réaction à l’ap- proche mythologique [2] de l’indianiste Émile Senart (1847-1928) qui travaillait, quant à lui, sur les textes bouddhiques en langue sanskrite : « La critique historique ne peut pas, là où il n’y a que des probabilités, créer des certitudes. Que chacun décide ou s’abstienne de décider , comme il le trouvera bon ; pour ma part, qu’il nous soit permis de professer l’opinion que nous possédons dans le récit de la manière dont le descendant des Sakyas est devenu le Bouddha, un véritable fragment d’histoire. » [3] En 1949, Alfred Foucher (1865-1952), qui étudia, durant sa carrière académique, la vie du fondateur du bouddhisme à travers les productions artistiques indiennes et centrasiatiques, avait bien saisi l’impos- sibilité de telles restitutions et déclara au sujet de ces approches mythologique et rationaliste : « Dans le Bouddha d’E. Senart c’est l’homme qui manque ; dans celui d’Oldenberg ce qui fait défaut, c’est le dieu. Or , ne nous lassons pas de le répéter , bien que Çâkya-mouni ait lui-même pris soin de nous avertir qu’il n’était qu’un homme, il est non moins certain que l’Inde en a fait un dieu. C’est là le trait dominant de sa destinée, là que réside l’intérêt passionnant de son histoire ; et quiconque en entreprend une étude d’ensemble ne saurait négliger ni l’un ni l’autre de ces deux aspects. » [4] Et, si les brāhmanes se présentaient comme des hommes-dieux (manuṣyadeva [5]) dans la société indo-ārya, si le mari était la divinité de l’épouse (patir hi devatā nāryās [6]), le Buddha était, quant [1] P[ali] T[ext] S[ociety], Milindapañha 70 et 73. [2] Senart 1875. [3] Oldenberg 1903, p. 115. [4] Foucher 1949, p. 13. [5] Śatapatha Brāhmaṇa 2.2.2.6. [6] Rāmāyaṇa 7.48.17c. 31 Buddha et la marche sur les eaux : Du prodige à la condition de l’arhant à lui, la divinité de ses disciples réunis en commu- nauté, à l’égal de nombre de maîtres du courant des ascètes (śramaṇa) qui proposaient à tout un chacun de suivre et d’expérimenter leur voie qui mènerait les êtres humains à la délivrance (mokṣa) de la condition saṃsārique. Aussi les membres du saṃgha construi- sirent-ils la figure de leur maître (śāstṛ) au fur et à mesure des siècles et en fonction des nécessités que leur imposèrent des dissensions internes (saṃgha- bheda), des innovations doctrinales, des implanta- tions territoriales nouvelles et toujours de plus en plus éloignées du Magadha, des demandes de pro- tections royales, des rivalités avec d’autres courants religieux non-bouddhiques, des invasions étrangères, etc. Autant de facteurs historiques qui concoururent à enrichir la figure construite du Buddha. Parmi les nombreux épisodes de la vie du fonda- teur, nous avons choisi de revenir sur celui de la marche sur les eaux qui intéresse particulièrement l’histoire comparée des religions. Depuis la fin du xixe siècle, en effet, dans le double contexte de la découverte des textes bouddhiques et des prémices de la crise moderniste, cet épisode bouddhique a moins été étudié pour lui-même que par rapport à la péricope de Jésus marchant sur les eaux [7] (Mc 6.45-52 ; Mt 14.22-33 ; Jn 6.16-21). Notre pré- sente contribution, quant à elle, aura pour objectif premier de restituer, tant faire se peut, l’histoire rédactionnelle d’un tel exploit glorieux (avadāna), comme nous l’avons déjà fait pour d’autres passages biographiques [8], uploads/Litterature/ dosr03-ducoeur.pdf

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