1 2 Pierre Grimbert LE SECRET DE JI Volume 2 MNEMOS 3 ICARES L’aventure imagina
1 2 Pierre Grimbert LE SECRET DE JI Volume 2 MNEMOS 3 ICARES L’aventure imaginaire © Les Éditions Mnémos, novembre 1999 15, passage du Clos-Bruneau 75005 PARIS info@mnemos.com www.mnemos.com ISBN : 978-2-35408-030-3 4 À ceux de mon clan. Vous n’êtes pas dans l’histoire, mais vous y étiez toujours… 5 6 7 Le lecteur trouvera en fin de volume un glossaire définissant certains termes utilisés par le narrateur, ainsi que des précisions complémentaires n’apparaissant pas dans le récit… mais ne dévoilant pas l’intrigue, loin s’en faut. La lecture de la Petite Encyclopédie peut donc être faite en même temps que celle de l’histoire, aux moments que le lecteur trouvera opportuns. 8 Première partie L’OMBRE DES ANCIENS 9 UN ZÜ N’AVOUE SON NOM QU’A SES SEMBLABLES… et aux gens qu’il s’apprête à tuer. Voici le mien. Je suis le judicateur Zamerine, chef des messagers de Zuïa pour les Hauts-Royaumes. Mon pouvoir s’étend sur six des plus riches contrées du monde connu. Je dispose de quatre cents hommes dévoués jusqu'à la mort, tous porteurs de la hati sacrée. Quatre cents combattants d’élite, redoutés jusque dans les moindres villages du monde connu. Les plus grands rois eux-mêmes n’osent me défier. Ils craignent le jugement de Zuïa. Ils me craignent. J’estimais être le personnage le plus puissant au nord de la mer Médiane. À tort. Je pense que mon maître est un dieu. Ou, tout au moins, une incarnation. Celle de Zuïa, bien entendu, même si mon maître se gausse de cette idée. Il l’ignore peut-être, mais il sert les desseins de la déesse, tout comme moi. J’en suis convaincu. Je dois en être convaincu… Ma vulnérabilité est déjà suffisamment lourde à porter. Mon maître dispose de quiconque à son gré. Il est invulnérable. Il lit dans les pensées. Il peut prendre le contrôle d’un autre corps. Il peut tuer d’un frôlement… et même d’un simple regard. Ce n’est pas une légende. Je l’ai déjà vu faire. Il pouvait faire de moi un esclave. Un de plus, s’ajoutant aux dizaines de milliers de misérables qu’il entasse dans ses camps. J’ai préféré devenir son allié. J’ai mis mon intelligence à son service. Mon influence dans les Hauts-Royaumes lui est utile. Et ma présence à ses côtés renforce son emprise sur la horde de barbares qui constitue son armée… Notre armée. J’ai fait mes preuves. Mon maître sait se montrer reconnaissant. Il m’a octroyé une garde personnelle, en attendant que mon assistant nous rejoigne avec mes meilleurs hommes. Bientôt, cent messagers seront réunis dans un même 10 lieu. Je n’ai pas assisté à un tel spectacle depuis les arènes du Lus’an. Mon maître m’a offert mille esclaves. J’essaie de les faire cohabiter selon la loi de Zuïa. C’est une expérience intéressante. Je crois qu’il en reste un peu plus de six cents. Mon maître a de grands projets. Tout ce qu’il entreprend est grand. Hors de portée du commun des mortels. Attaque-t-il une ville, il la brûle entièrement. Punit-il un traître, l’homme est torturé sur la carène pendant plusieurs décades. Tout ce qu’il entreprend, il l’achève. Sans hésitation. Sans faiblesse. Mon maître sait parfaitement ce qu’il veut. Même s’il n’en dit rien à personne. Il est le plus secret des hommes. Je ne connais même pas son visage. Je sais seulement son nom. Il s’appelle Saat. * * * Le roi des Guoris n’avait pas la réputation d’un homme facile à vivre. Ossrok, l’Arque commandant l’ensemble de la flotte mercenaire du Beau-Pays, eut une nouvelle occasion de le vérifier. ŕ Je ne vous félicite pas, s’emportait le roi. Ainsi, une fois encore, des inconscients ont abordé l’île Sacrée. Et ce, malgré votre prétendue vigilance ! ŕ L’île d’Usul est sans surveillance aucune depuis plus de deux lunes, se permit d’objecter le mercenaire. Suivant vos ordres, Majesté… ŕ Je n’ai jamais ordonné que l’on cesse les patrouilles ! rugit le roi indigène. Je vous ai simplement demandé un peu plus de discrétion. Osez prétendre le contraire ! Ossrok sut s’en abstenir, bien que son employeur fût de mauvaise foi. L’idée d’origine était de faire tomber l’île Sacrée dans l’oubli, et nécessitait donc de déplacer les navires ancrés près de ses rivages. Seule une simple frégate passait chaque jour s’assurer du bon ordre des choses… et nourrir les monstres qui gardaient l’endroit. Pourtant, ce jour, l’équipage de la frégate avait trouvé des traces d’une incursion clandestine. 11 ŕ La plupart sont sûrement morts, annonça le mercenaire sur un ton qui se voulait rassurant. Avec un peu de chance, un seul a pu s’échapper, ce qui expliquerait pourquoi nous n’avons pas retrouvé leur bateau… Mes hommes ne se sont pas aventurés jusqu’au centre de l’île, bien sûr, mais je suis prêt à parier qu’ils y auraient trouvé plusieurs cadavres. ŕ Vous ne comprenez donc rien ! bondit le roi. Je ne souhaite pas la mort de ces gens ! Ossrok réfléchit avant de répondre. Effectivement, il ne comprenait pas. ŕ Majesté… Pardonnez mon audace, mais… Les rats de Farik ne sont pas des animaux de compagnie. Ils sont si agressifs que les Estiens les utilisent sur les champs de bataille, vous le savez. Une simple morsure peut être mortelle, si l’animal porte la maladie. Et plusieurs des individus que nous avons libérés sur l’île étaient atteints, j’en suis sûr. Et maintenant… maintenant, vous me dites que vous ne voulez pas tuer ? ŕ Non, bien sûr que non, soupira le roi, sincèrement désolé. Les rats devaient seulement servir à effrayer… ŕ Le sort de ces étrangers servira d’exemple, alors, répliqua le mercenaire. Comptez sur mes hommes pour raconter cette histoire à qui voudra l’entendre. Le roi acquiesça lentement et congédia son commandant d’un simple geste. Il avait épuisé toute sa colère. Il ne lui restait plus que l’amertume de la culpabilité. ŕ Majesté… insista Ossrok. Pourquoi tant se soucier d’eux ? Des étrangers, qui ont sciemment transgressé l’un des plus grands interdits du Beau-Pays. Ne pensez-vous pas qu’ils n’ont que ce qu’ils méritent ? ŕ Les rats ne sont rien, Ossrok. Mieux vaut peut-être pour ces étrangers qu’ils meurent de la maladie. Car s’ils ont vu Usul sans en périr, leurs tourments ne font que commencer. Je pleure de n’avoir pu empêcher cela. Je pleure… par compassion. Le commandant mercenaire quitta son roi en secouant la tête. Les Guoris formaient décidément un peuple étrange. * * * 12 Je me souviens des arènes du Lus’an… Je venais d’entamer ma onzième année. J’étais donc déjà un homme responsable. Assez intelligent, en tout cas, pour comprendre qu’il n’y avait aucun avenir à Zuïa pour le bâtard d’une esclave. Un jour, un messager est venu porter la sentence à ma mère. Sur la demande de mon père présumé. Je n’ai rien fait pour l’en empêcher. J’avais déjà une foi profonde en la déesse. Comme je l’ai dit, j’étais un homme responsable. J’ai demandé au messager de m’emmener dans un des temples. Je n’avais qu’un désir : lui ressembler. Devenir un prêtre de Zuïa, faire partie de l’élite de ce monde. J’ignorais alors qu’il me faudrait affronter la mort. Pas seulement celle des autres, dont je me souciais peu, en toute logique. Mais l’éventualité de la mienne… Mon séjour au temple des novices fut très court. J’y travaillais beaucoup, avec d’autres hommes de mon âge, à divers travaux de ferme. J’y appris surtout la méfiance et l’intrigue. Assez pour me former diverses alliances, volontaires ou forcées, avec les garçons les plus influençables. Un talent que je cultive depuis toujours, et auquel je dois d’être encore en vie. Un jour, tous les novices ont pris la route du Lus’an. Nous allions à pied, sous un soleil oppressant, répétant les lois de Zuïa selon les consignes. C’est-à-dire suffisamment fort pour couvrir le bruit des chevaux des messagers. Le voyage prit quatre jours. Six garçons périrent d’épuisement ou de soif. Les abreuver ne les aurait pas sauvés. Trop faibles, ils auraient de toute manière péri quelques jours plus tard. Mieux valait pour eux finir ainsi. Deux autres prétendirent abandonner. Mais nous étions entrés dans le Lus’an. Ne peuvent en sortir que des messagers… Les deux garçons perdirent leur titre de novice et, d’égaux, devinrent alors nos esclaves. Je crois que le deuxième survécut onze jours. 13 Pour ma part, je mettais à profit le temps du voyage pour assurer mes alliances. Promesses pour les plus crédules, menaces pour les plus faibles, et chantage pour quiconque m’en donnait l’occasion. J’encourageais les rivalités, et prenais parti pour les plus forts. Je flattais les sensibles, achetais les cupides, jurais amitié aux stupides. Si bien qu’au terme du voyage, sur les soixante- sept novices restants, douze m’étaient fidèlement attachés : ma garde. Vingt et un autres m’étaient redevables : mon peuple. Et une vingtaine d’autres craignaient de me déplaire : mes esclaves. La dizaine restante représentait le groupuscule d’ennemis que même l’homme le plus vertueux ne peut manquer d’avoir. Aucun parmi nous n’avait encore entendu parler des arènes. Mais au soir de notre arrivée dans le mythique temple de la Grande uploads/Litterature/ grimbert-pierre-le-secret-de-ji-2-1997-ocr-french-ebook-alexandriz.pdf
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- Publié le Aoû 31, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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