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DATE DOWNLOADED: Fri Oct 16 07:15:56 2020 SOURCE: Content Downloaded from HeinOnline Citations: Bluebook 21st ed. Dominique Gros, Gardien de al Loi, Selon Kafka, Le, 14 LAW & LITERATURE 11 (2002). ALWD 6th ed. Gros, D. ., Gardien de al loi, selon kafka, le, 14(1) Law & Literature 11 (2002). APA 7th ed. Gros, D. (2002). Gardien de al loi, selon kafka, le. Law and Literature, 14(1), 11-24. Chicago 7th ed. Dominique Gros, "Gardien de al Loi, Selon Kafka, Le," Law and Literature 14, no. 1 (Spring 2002): 11-24 McGill Guide 9th ed. Dominique Gros, "Gardien de al Loi, Selon Kafka, Le" (2002) 14:1 L & Literature 11. MLA 8th ed. Gros, Dominique. "Gardien de al Loi, Selon Kafka, Le." Law and Literature, vol. 14, no. 1, Spring 2002, p. 11-24. HeinOnline. OSCOLA 4th ed. Dominique Gros, 'Gardien de al Loi, Selon Kafka, Le' (2002) 14 Law & Literature 11 Provided by: University of Michigan Law Library -- Your use of this HeinOnline PDF indicates your acceptance of HeinOnline's Terms and Conditions of the license agreement available at https://heinonline.org/HOL/License -- The search text of this PDF is generated from uncorrected OCR text. -- To obtain permission to use this article beyond the scope of your license, please use: Copyright Information Le "gardien de la loi," selon Kajka Dominique Gros* Est-il ndcessaire de le signaler? Nous sommes tous places, d'une mani~re ou d'une autre, devant la loi, qu'elle permette ou qu'elle interdise, qu'elle punisse ou qu'elle protege. Le petit texte de Franz Kafka dont je vais vous parler, Vor dem Gesetz, Devant la loi, peut etre lu dans cette banalit6 littdrale. C'est partir de cette banalit6 que je voudrais interroger, par une lecture naifve, d~barrassde de tout appareil critique, ces deux ou trois pages (selon les 6ditions) de Vor dem Gesetz, et tenter de vous faire partager mon sentiment de lecteur. Vor dem Gesetz, est 6crit en 1916, en m~me temps qu'un autre rdcit, Le gardien du tombeau dont nous ne savons rien, si ce n'est que Franz Kafka en aurait donn6 lecture Oskar Blum. Ce trs court rdcit, Devant la loi, est publi6 dans Ein Almanach neuer Dichtung au tout ddbut de l'anne 1917 et l'auteur 6voque alors, dans une lettre t Kurt Wolf, sa volont6 de l'insdrer dans un ensemble de "rdcits courts" intitulk Un midecin de campagne. Iinsertion se fera plus tard dans Le Procs et formera la partie essentielle du chapitre intitulk A la cathidrale. Le rdcit, plac dans la bouche d'un abb6, qui ajoute (sous la plume de Kafka) des gloses ou commentaires inattendus, devient une sorte de parabole. De quoi s'agit-il? I'histoire est si dense et si courte que l'on devrait en administrer la lecture avant d'en parler, mais i m'a sembl6 que je devais produire un "rsum," ce qui aurait seulement pour effet de montrer comment, simple lecteur, je me suis plac6 devant cette Pcriture, avec ou sans majuscule initiale. Entrer dans la loi Voici la premiere ligne du rdcit: "Devant la loi se dresse le gardien de la porte." Que se passe-t-il? Un homme de la campagne se prdsente et demande entrer dans la loi (urn Eintritt in das Gesetz); il s'agit bien d'entrer, comme on pdn&re dans une pi-ce, par une porte, pr~cisdment. Ce gardien n'est pas un gardien au sens administratif, militaire ou pdnitentiaire. Le texte de 1916 dit simplement der Tiirhiiter; c'est dire le portier, ou bien la rigueur le gardien d'un passage, d'une propri&t, un concierge - fonction ddrisoire au regard de la majest6 de la loi .... fonction subalterne que certains traducteurs ont dlev6, dans la version du Proc&s, au rang de "sentinelle." Ce gardien refuse i l'homme de la campagne 'entr& qu'il sollicite, ou plut6t lui oppose une rdponse continuellement dilatoire: plus tard .... pas maintenant; puis le gardien s'efface devant la porte grande ouverte, "comme toujours" pr&ise le texte. Uhomme n'ose entrer. On l'a prdvenu, le gardien est puissant; derri&e cette porte il y a d'autres gardiens de plus en plus puissants. L'homme est surpris, il croyait la loi "accessible a. tous et touj ours" (]edem und immer zugdnglich). I1 se r~signe a une attente inddfinie, suspendue i une trs problkmatique permission d'entrer. Par lui-meme, le gardien n'a rien d'impressionnant: manteau de fourrure, barbe tartare pleine de puces, nez pointu, visage ridicule et grossier. Mais le justiciable attend des jours, des ann~es, esp~rant tre admis a entrer; il multiplie les tentatives infructueuses, subit de petits interrogatoires (kleine Verhore) et ne semble avoir aucune autre activit6 que ce ressassement de vaines suppliques. Toutefois, l'homme ne ndglige aucune possibilit6 de parvenir ses fins y compris la corruption. Le gardien accepte I'argent mais seulement, dit il, pour que l'homme soit certain "de n'avoir rien oubli"! IEhomme ne cesse d'observer le gardien comme s'il 6tait le seul obstacle (das einzige Hindernis) i surmonter. I1 vieillit, devient aveugle, s'abaisse a supplier les puces du gardien d'intercdder en sa faveur. Enfin, il sent la mort venir et lance dans un dernier effort cette ultime question: "Si chacun aspire a la loi, comment se fait-il que durant toutes ces ann&s personne d'autre que moi n'ait demand6 a entrer?" Le gardien lui hurle sa reponse a l'oreille, avant de s'en aller en fermant la porte: "Ici nul autre que toi ne pouvait pdn~trer, car cette entre n'6tait faite que pour toi." On notera, jusque dans le style, un &range parallklisme des formes: La premiere ligne du texte place un homme devant la loi et la dernire F'en expulse. Mais le texte nous oblige penser en meme temps que cette admission-expulsion se produit lorsque la loi est faite pour celui qui la sollicite ! Cela ddbouche sur un ddrisoire constat d'inaccessibilit6 du droit, vritable contradiction in adjecto qui laisse supposer 'absence de loi ou l'arbitraire sans limite. D'ailleurs, rester une vie entire Vor dem Gesetz, n'est-ce pas le comble de la tyrannie? ou bien, il y aurait une sorte d'aporie juridique que la pense devrait affronter. Est-ce que le texte du Procks nous aide penser cette aporie juridique? Comment est-il possible d'etre le destinataire d'une norme sans jamais y accdder? Est-ce irremediable? Est-ce fatal? Une variante du texte, selon le manuscrit, aggrave la situation. On peut lire ceci: "Le gardien n'a rv61 I'essentiel que quand cela ne pouvait plus servir rien." Ajoutons que l'6criture de ce texte a suffisamment inquit son auteur, Franz Kafka, pour que celui-ci l'accompagne d'une triple meditation dans Le Proc~s: celle de monsieur K. sur son propre sort, celle de l'abb6 dont il attend en vain le secours, celle des prdtendus commentateurs ou glossateurs de Ltcriture que cite l'abb6 - mais aucun dieu n'est invoqu6, aucune "6criture sainte." Loin de l'entrieprincipale Parlons d'abord de cet abb6. I commence par vitupdrer, du haut de la chaire parce que - dit-il - pour un tel pr6ne, il se sent oblig6 de "commencer par parler de loin." Toutefois, monsieur K. compte sur lui pour sortir de l'encerclement du Proc~s. L'abb6 dnonce la mdprise de monsieur K. en lui rdcitant la parabole de Vor dem Gesetz. I prdsente ce rdcit comme provenant des "6crits qui pr&dent la loi." Ensuite l'abb6 prdsente habilement plusieurs commentaires de Vor dem Gesetz et les soutient tour tour contre l'opinion de monsieur K., c'est dire - aux yeux d'un lecteur naif tel que vous et moi - l'encontre de tout bon sens et mme de toute bonne foi. Dans cette dispute doctrinale, Monsieur K. observe une attitude critique et de protestation, qui tranche avec l'attente soumise de r'homme de la campagne dans le rdcit Vor dem Gesetz; monsieur K. d~nonce les tromperies du gardien, son incompdtence, sa duplicit6, son incoherence, son insolente prdtention et ddnonce finalement la complaisance de la doctrine juridique l'6gard des propos du gardien, doctrine qui revient "6lever le mensonge la hauteur d'une r~gle du monde." Voyons la chose de plus pros : Que disent les glossateurs cites et approuvs successivement par l'abb? 1) I1 n'y a pas de contradictions entre le fait de refuser 'entre dans la loi et le fait de d~clarer: "Cette entr& n'&ait faite que pour toi." Ce n'est pas d&aisonnable; le justiciable peut ne pas avoir rempli toutes les conditions d'acc~s au droit dont il se pr~vaut. On voit cela tous les jours. 2) Le gardien est un homme naif, sans mdchancet6, dont la patience est exc~de par les suppliques incessantes du justiciable, qu'il prend toutefois en piti6 en lui offrant une chaise. Cette remarque n'est pas ddraisonnable; la personne du gardien est distincte des exigences de sa fonction. Uabb6 ajoute une longue dissertation sur le point de savoir si le gardien est d~j entr6 lui-meme dans la loi, s'il a &6 ou non nomm6 "de l'int&ieur," s'il est ou non sup&ieur 'homme de la campagne. Ce sont des questions de comp&ence, qui permettent d'6voquer un 6ventuel exc~s de pouvoir. Mais la question de la tromperie est plusieurs fois examinee puis 6cart& pour des motifs si inquiktants qu'ils font douter de l'existence d'un litat de droit dans un tel contexte; par exemple, uploads/Litterature/ gros-le-gardien-de-la-loi-selon-kafka-2002.pdf

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