Monsieur Daniel Gricourt Monsieur Dominique Hollard Lugus et le cheval In: Dial

Monsieur Daniel Gricourt Monsieur Dominique Hollard Lugus et le cheval In: Dialogues d'histoire ancienne. Vol. 28 N°2, 2002. pp. 121-166. Citer ce document / Cite this document : Gricourt Daniel, Hollard Dominique. Lugus et le cheval. In: Dialogues d'histoire ancienne. Vol. 28 N°2, 2002. pp. 121-166. http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/dha_0755-7256_2002_num_28_2_2475 Résumé Cette étude s'attache aux relations que Lugus, dieu majeur des Celtes, entretient avec les équidés dans l'ensemble du domaine celtique : en Espagne celtibérique, Gaule indépendante ou romanisée, Italie du Nord, zone danubienne, Pays de Galles et Irlande. Elle utilise à cet effet sources écrites et documents figurés. Abstract This study deals with the relationship between Lugus, the main god of the Celts, and the equine family throughout the Celtic area. In Celtiberic Spain, Lugus was called 'equeisos' - that is equestrian or equine. In Gaul, this divinity appeared as the Roman Mercurius and Apollo ; it was given the name of 'Atepomaros' (meaning 'Great Horse'), who founded under this name the town of Lugudunum/Lyons. Broadly speaking, Lugus was also the charioteer that leads horses on most Gallic coins : as such, he was sometimes represented with a solar face or an extensive forearm, a characteristic peculiar to him. This solar charioteer is still found on a Gallo-Roman bronze struck around 266-267 AD, which represents Lugus leaping forward with his spear whilst pulling a horse behind him. The god was also worshipped in Northern Italy and in Gaul under the name of Belenos, 'the Shining', who was linked to a divine horse on Gallic coins. Finally, Lugus was associated in an iconographie and functional way with Epona, 'the (divine) Mare', with whom he protected travellers in particular. For the Celtic islanders, Lugh was the first horseman, who created horse riding and founded horse racing. He was closely linked to the horse goddess (Macha in Ireland and Rhiannon, 'the Great Queen', in Wales), the embodiment of sovereignty, of whom, as a foal, he appears to be the son. In this connection, he could be the twin brother of a sea-creature. Lugh also had relationships with equine women, which may be the expression of some Irish rites of royal consecration. This is confirmed by clear Indo-European parallels in which equine sexuality plays a central role and the presence of the divinity is perceptible. Dialogues d'Histoire Ancienne 28/2, 2002, 121-166 Lugus et le cheval" Résumés • Cette étude s'attache aux relations que Lugus, dieu majeur des Celtes, entretient avec les équidés dans l'ensemble du domaine celtique : en Espagne celtibérique, Gaule indépendante ou romanisée, Italie du Nord, zone danubienne, Pays de Galles et Irlande. Elle utilise à cet effet sources écrites et documents figurés. • This study deals with the relationship between Lugus, the main god of the Celts, and the equine family throughout the Celtic area. In Celtiberic Spain, Lugus was called equeisos - that is equestrian or equine. In Gaul, this divinity appeared as the Roman Mercurius and Apollo ; it was given the name of Atepomaros (meaning 'Great Horse'), who founded under this name the town of Lugudunum/Lyons. Broadly speaking, Lugus was also the charioteer that leads horses on most Gallic coins : as such, he was sometimes represented with a solar face or an extensive forearm, a characteristic peculiar to him. This solar charioteer is still found on a Gallo-Roman bronze struck around 266-267 AD, which represents Lugus leaping forward with his spear whilst pulling a horse behind him. The god was also worshipped in Northern Italy and in Gaul under the name of Belenos, 'the Shining', who was linked to a divine horse on Gallic coins. Finally, Lugus was associated in an iconographie and functional way with Epona, 'the (divine) Mare', with whom he protected travellers in particular. For the Celtic islanders, Lugh was the first horseman, who created horse riding and founded horse racing. He was closely linked to the horse goddess (Macha in Ireland and Rhiannon, 'the Great Queen', in Wales), the embodiment of sovereignty, of whom, as a foal, he appears to be the son. In this connection, he could be the twin brother of a sea-creature. Lugh also had relationships with equine women, which may be the expression of some Irish rites of royal consecration. This is confirmed by clear Indo-European parallels in which equine sexuality plays a central role and the presence of the divinity is perceptible. Dans son étude fondamentale sur le celte Lugus et l'Apollon hellénique, deux divinités souveraines dont il a établi l'identité foncière et l'origine commune, Bernard Sergent passe en revue les animaux qui leur sont pareillement familiers1. Au premier rang de ce bestiaire figurent divers oiseaux parmi lesquels le corbeau, le roitelet et le coq, mais font également partie du cortège le sanglier, les canidés (chien ou loup), l'ours, le serpent et la tortue, le dauphin ou le phoque. En raison du cadre comparatiste adopté par notre collègue, un être pourtant lugien est resté - si l'on peut dire - sur le bord du chemin, dans la mesure où sa relation avec Apollon est fort peu marquée. Il s'agit du cheval, * Daniel Gricourt (Cabinet des Médailles de la Bibliothèque nationale de France) Dominique Hollard (Cabinet des Médailles de la Bibliothèque nationale de France) 1. Sergent 1995a : 75-97. DHA 28/2, 2002 122 Daniel Gricourt - Dominique Hollard dont la place dans l'imaginaire. des Celtes est considérable et dont les données rassemblées dans cette étude semblent démontrer qu'il entretient une relation privilégiée avec le plus important de leurs dieux. Il nous a donc paru utile de dresser un bilan des données, relativement peu nombreuses mais toujours très significatives qui, à travers l'ensemble du domaine celtique, relient Lugus à l'équidé. 1. L'Espagne celtibérique 1.1 Les Celtibères apportent à ce dossier un document majeur avec l'exceptionnelle inscription dédicatoire à Lugus gravée sur la paroi rocheuse du sanctuaire de hauteur de Peňalba de Villastar dans la province de Teruel2. Ce texte en langue celtibérique, rédigé en écriture latine quasi cursive, est daté du Ier siècle avant J.-CA L'inscription, qui a longtemps défié la sagacité des linguistes, est désormais, sinon totalement éclaircie, du moins appréhendée dans sa globalité de façon crédible grâce aux récents travaux de W. Meid. Le texte, qui semble évoquer une procession et la construction d'un monument dédié au culte du dieu4, est d'abord remarquable par le fait que le théonyme y apparaît deux fois au datif singulier (lugueï), alors que les dédicaces relatives à Lugus dans la péninsule ibérique sont généralement au pluriel comme dans l'inscription fameuse des cordonniers d'Osma (Lugovibus)5 ou dans celles aux Lucobo de Santander et aux Luc[o]ubu Arquienis, Arquieno ou Arquienobo de la province de Lugo6. Autre information essentielle, le dieu reçoit dans ce haut lieu de la religion des Celtibères le double qualificatif ďeniorosei equeisuique. Ces épithètes, coordonnées par la copule enclitique -que, peuvent se traduire, pour la première, par « le Montagneux » (litt. « se trouvant sur la montagne ») et, pour 2. Sur ce site (littér. « La Roche Blanche »), voir Cabré 1910 pour les informations essentielles qu'il apporte, et ce, malgré une interprétation erronée du cadre religieux dans lequel il s'inscrit. Sur le caractère proprement celtique et lugien de ce sanctuaire, voir Marco Simon 1986. 3. Sagredo - Hernandez Guerra 1996 : 180. 4. Meid 1995 : 349-353. 5. CIL II, 2818 ; Blázquez Martinez 1962 : 91 ; Sagredo - Hernandez Guerra 1996 : 181. 6. Blázquez Martinez 1962 : 90 ; Sagredo - Hernandez Guerra 1996 : 182 ; Arias Vilas - Le Roux - Tranoy 1979 : 87-89, qui traitent le théonyme comme un datif singulier de type latin « à Lugubus Arquienobus [...], à Lucoubus Arquienis [...] », alors qu'il s'agit bien d'un datif pluriel hispano- celtique en -ubo(s) formé sur Lugu-/Lucu- : Tovar 1982 : 595-596 ; Blázquez Martinez 1986 : 216 ; Olmsted 1994 : 309 ; Marco Simon 1998 : 483. DHA 28/2, 2002 Lugus et le cheval 123 la seconde, par « l'Équestre », « le Cavalier » (cf. lat. eques)7 . Si le caractère de divinité des lieux élevés attribué ici à Lugus est en totale conformité avec les données gauloises et irlandaises8, sa relation directe à l'équidé constitue une donnée moins attendue, dont l'importance est proportionnelle à l'antiquité et au caractère proprement indigène du site et de la langue dans lesquels elle apparaît. La présence symbolique de l'animal dans le sanctuaire est d'ailleurs assurée par une gravure le figurant à l'arrêt à gauche9. Il convient également de souligner que l'épithète equeisos, clairement formée sur le nom le plus ancien du cheval en celtique (*ekwos), peut également être interprétée comme une assimilation du dieu à l'animal. Il ne faut donc pas écarter l'idée que Lugus puisse connaître une épiphanie équine10. 1.2 Par ailleurs, un document lié à la religion des Celtibères, plus récent puisqu'il relève de l'Espagne romaine, mérite à ce stade d'être versé au débat. Il s'agit là encore d'une inscription votive, également placée sur une eminence rocheuse, à l'intérieur d'un ermitage consacré à Saint-Laurent, situé à La Vid, Pola uploads/Litterature/ hollard-lugus-et-le-cheval.pdf

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