1 Introduction à l’histoire générale des littératures orientales Félix Nève 184

1 Introduction à l’histoire générale des littératures orientales Félix Nève 1844 Exporté de Wikisource le 10 avril 2022 2 INTRODUCTION À L ’ H I S T O I R E G É N É R A L E DES LITTÉRATURES ORIENTALES. 3 INTRODUCTION À L ’ H I S T O I R E G É N É R A L E DES LITTÉRATURES ORIENTALES, LEÇONS FAITES À L’UNIVERSITÉ CATHOLIQUE DE LOUVAIN PAR 4 F. NÈVE, PROFESSEUR À LA FACULTÉ DE PHILOSOPHIE ET LETTRES, MEMBRE DE LA SOCIÉTÉ ASIATIQUE DE PARIS. LOUVAIN, CHEZ VANLINTHOUT ET VANDENZANDE, IMPRIMEURS DE L’UNIVERSITÉ. POUR LA FRANCE, POUR L’ALLEMAGNE, BENJAMIN DUPRAT, LIBRAIRE DE LA BIBLIOTHÈQUE ROYALE, RUE DU CLOÎTRE SAINT-BENOÎT, NO 7, À PARIS. ADOLPHE MARCUS, LIBRAIRE, À BORN SUR LE RHIN. MDCCCXLIV. PRÉFACE 5 Les Leçons que nous offrons au public appartiennent à un Cours qui doit figurer à l’avenir dans le programme des études spéciales du Doctorat en Philosophie et Lettres : la loi sur l’enseignement supérieur en Belgique, discutée dans les Chambres et promulguée en 1835, a consacré sous le titre d’Introduction à l’étude des Langues Orientales une nouvelle branche d’étude destinée à compléter la partie littéraire du même programme qui comprend les littératures Grecque et Latine ainsi que l’Histoire des Littératures modernes. Si les termes de la loi permettent des interprétations diverses, il est évident que, sans faire violence à la pensée du législateur, il faut attribuer à cette matière de l’examen une valeur et un but littéraires : on ne concevrait pas que l’obligation d’acquérir une connaissance élémentaire des langues principales de l’Orient fût imposée indistinctement aux futurs docteurs, soit que la force de leur esprit les portât aux études philosophiques, soit qu’une vocation prononcée les appelât à l’enseignement de l’histoire ou des langues anciennes dans les établissemens d’instruction moyenne ; l’étude nécessairement imparfaite de la grammaire de quelques langues ne pourrait qu’être stérile pour tous ceux qui ne seraient point poussés par un goût personnel et déterminé à leur étude approfondie. Il parait donc indispensable, pour rendre l’article de la loi susceptible d’application et l’enseignement de cette branche profitable au plus grand nombre, de la mettre en rapport avec les autres études qu’exige l’épreuve du Doctorat : 6 communiquer une connaissance générale de l’Orient littéraire, n’est-ce pas à la fois satisfaire aux besoins immédiats de la majorité et procurer à quelques esprits les moyens de poursuivre avec succès des études et des recherches spéciales ? C’est ce qui a été bien compris par mon collègue, Monsieur G. A. ARENDT, qui a donné ce Cours dans les premières années de la fondation de l’Université Catholique sous le titre d’Introduction aux Langues Orientales : ayant été au nombre des premiers auditeurs de Mr ARENDT, je suis heureux de redire ici comment, en accordant une place plus grande aux faits littéraires qu’aux faits de linguistique, il a réussi à inspirer un intérêt soutenu pour un sujet jusqu’alors négligé dans notre patrie et il a donné dans l’accomplissement de cette tâche des preuves nouvelles d’un talent déjà connu. Suspendu quelques années à cause de la non-application de la loi nouvelle sur le Doctorat, le Cours vient d’être repris en vue des examens pour lesquels les dispositions de cette loi seront mises en vigueur. Je demeure convaincu de la nécessité de maintenir dans ce Cours la prédominance du point de vue littéraire et, pour ne pas laisser de doute sur la nature et la portée des leçons commencées, j’ai cru devoir substituer à l’expression vague de la loi les mots d’Histoire générale des Littératures Orientales ; la matière conserve ainsi son utilité première, celle d’introduction à l’étude des langues elles-mêmes, soit des langues Sémitiques, dont l’enseignement a été confié depuis plusieurs années à Mr J. Th. BEELEN, soit d’autres 7 langues Asiatiques, telles que le Sanscrit, l’Arménien, le Persan, qui, en raison de leur intérêt littéraire ou historique, figurent justement dans le cadre des travaux universitaires. En publiant les premières leçons du Cours qui vient de commencer, j’ai pour but de signaler à quel point de vue l’histoire des littératures Orientales forme une étude importante et bien distincte, quelles en sont les limites, quelles en sont les grandes divisions : j’ai aussi en vue de rattacher cette étude à l’histoire des littératures anciennes dont je suis chargé depuis trois années. L’histoire littéraire a des procédés analogues partout où on la transporte et on l’applique ; pour fournir à la critique quelques idées fécondes, elle exige tout d’abord un plan bien arrêté et ces divisions claires qui ont la valeur et les avantages d’une bonne définition. J’ai dû par conséquent expliquer le principe de division littéraire que j’ai puisé dans l’histoire des religions ; j’ai voulu le soumettre à l’appréciation du public instruit qui a quelquefois tourné ses vues vers les littératures de l’Asie. Il ne m’a point paru inutile non plus de présenter des données précises sur la classification des langues Orientales en l’absence de livres élémentaires et méthodiques : c’est indiquer les matériaux qui doivent servir à chaque étude prise à part, c’est chercher dans le langage le lien extérieur de ces études diverses. Faire embrasser d’un coup d’œil tout le développement des études Orientales depuis le moyen âge jusqu’à notre époque qui est celle de leur renaissance, c’est montrer la place qu’elles ont prise aujourd’hui dans le cercle agrandi des 8 études scientifiques, c’est offrir un ensemble d’idées générales indispensable à quiconque veut entendre avec fruit toutes les parties du Cours. Louvain, 1er Décembre 1844. DISCOURS D’OUVERTURE[1]. MESSIEURS, À la faveur du travail intellectuel qui a depuis un siècle prodigieusement agrandi le champ de toutes lès sciences, les études historiques et les études littéraires, fortes désormais par leur alliance, ont réclamé à leur tour une juste part dans l’activité générale des esprits ; elles ont dû leur rapide accroissement à la découverte des faits nouveaux qui ont été soumis à l’examen des critiques avant d’être proposés au jugement des philosophes : aussi ont-elles déjà fourni beaucoup de résultats importans, destinés à éclaircir les origines et à caractériser dans leurs phases principales les révolutions du monde social et religieux. 9 Depuis l’époque de la renaissance des lettres jusques au milieu du XVIIIe siècle, non seulement la connaissance en quelque sorte exclusive de l’antiquité classique était restée la base de l’érudition ; mais encore elle apparaissait au plus grand nombre comme la condition d’une haute culture de l’intelligence. Il restait à la pensée Européenne un seul point de contact et pour ainsi parler une seule voie de communication avec le mystérieux Orient d’où lui était venue la lumière : c’était la Bible, dépôt des vérités et des promesses de la Révélation, c’était encore l’étude de l’hébreu et des langues de l’Asie Occidentale, étude progressive et féconde qui était appelée par la science chrétienne à rendre hommage à la véracité des Livres saints ainsi qu’à leur interprétation authentique et traditionnelle. Le voile qui dérobait encore la plus grande partie du continent Asiatique aux regards de l’Europe savante ne devait être levé qu’au moment où la lutte des dogmes religieux et des opinions philosophiques eut provoqué dans son sein un mouvement extraordinaire qui entraîna les penseurs dans des recherches plus étendues sur la vie des anciens peuples et sur l’histoire des pays les plus reculés. Dans le but d’apprécier le degré de civilisation de tous les peuples anciens et modernes, on se mit à comparer non seulement leurs croyances, leurs lois, leurs usages, mais encore les formes littéraires dont ils avaient revêtu leur pensée ; c’est alors que leurs langues diverses furent successivement recueillies, bientôt livrées à une analyse, systématique et classées d’après les données générales de 10 l’ethnographie : interrogées comme les plus sûrs témoins des relations primitives des peuples qui les parlaient, elles sont devenues les meilleurs interprètes de leur civilisation. L’étude du vieux monde Oriental, naguère dédaignée parce que son importance était en partie inconnue, devait occuper une des premières places dans le nouvel héritage que la science Européenne allait joindre à ses richesses et approprier à ses œuvres ; son histoire devait fournir l’introduction nécessaire à l’histoire universelle ; elle s’offrait comme la clef de tant d’énigmes qu’on n’avait pu résoudre jusqu’alors sur l’origine des races et des religions, sur l’invention des arts, sur le premier développement des sciences. C’est sous l’empire d’une telle pensée que de nombreux travaux étaient entrepris sur les monumens déjà connus des nations Asiatiques, et tandis que des voyageurs visitaient dans l’intérêt de la science des régions encore inexplorées, des savans essayaient de reconstruire d’après les sources authentiques les annales du continent qui vit naître le premier homme et qui fut peuplé par les premières familles humaines : la religion et la philosophie, la politique et la législation, les mœurs et les usages, les arts et la poésie, l’histoire et la géographie, tels furent les points principaux sur lesquels s’exerça tour à tour leur profonde sagacité, et que souvent ils s’efforcèrent d’embrasser à la fois dans leurs ardentes investigations. Citer le nom d’Anquetil Duperron[2], c’est rappeler uploads/Litterature/ introduction-a-l-x27-histoire-generale-des-litteratures-orientales-texte-entier.pdf

  • 22
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager