LA BIBLIOTHÈQUE ESSENTIELLE 26 Le classicisme français au XVIIe siècle L’idéal

LA BIBLIOTHÈQUE ESSENTIELLE 26 Le classicisme français au XVIIe siècle L’idéal classique Au XVIIe siècle, l’honnête homme se doit de possé- der la seule vraie noblesse, celle du cœur. L’écrivain classique est un honnête homme, qui doit remplir un double but : plaire aux honnêtes gens et les ins- truire. En effet, il est interdit de diffamer la religion, les mœurs ou les affaires d’État. Louis XIV protège les écrivains en leur distribuant des rentes ou des bourses, mais les imprimeurs doivent recevoir une autorisation du chancelier du Roi avant de pouvoir éditer un livre. À cette époque écrire, de même que peindre, dessiner ou sculpter, s’apprend par un en- seignement strict qui respecte des règles défnies par les auteurs de l’Antiquité. Ainsi la tragédie classique doit respecter trois uni- tés : le lieu, l’action et le jour. À cette cohésion, s’ajoute une composition formelle puisqu’une tragédie comporte cinq actes, écrits en alexandrins. Une pièce ne représente obligatoirement que des événements qui se déroulent dans une journée, et un roman sur un an. Sur scène, pas de fantaisie ni d’excen- tricité, tout doit paraître vraisemblable et rien ne doit choquer le spectateur. La tragédie et la comédie Toutefois, ces règles strictes n’empêchent pas les auteurs d’affrmer leur différence. Ainsi, bien loin des héros grecs, Corneille dans le Cid transporte son lecteur en Espagne avec des envolées lyriques qui font oublier la régu- larité des phrases rédigées en alexandrins. Racine, dans Phèdre, nous invite à la passion des sentiments, où les personnages sont toujours emportés par l’amour qui bouscule tout et conduit à la fn tragique des héros. Molière dé- Voltaire appelait le siècle de Louis XIV le courant littéraire français qui se donnait comme idéal l’imitation des auteurs gréco-latins, surnommés pom- peusement les Anciens. Pour se souvenir de ces auteurs, les vieux profes- seurs de français avaient coutume de réciter ce petit poème à leurs élèves : « La Racine de La Bruyère Boit-l’eau de La Fontaine Molière, sur laquelle est perchée une Corneille de Bossuet appartenant à Mme de Sévigné. » DR Nicolas Boileau. 27 Le classicisme français au XVIIe siècle sire, dans ces comédies, « peindre d’après nature les mœurs contemporaines » de la Cour, de la bourgeoisie parisienne ou provinciale. En 1664, il devient le fournisseur des divertissements royaux, mais lorsqu’il dénonce les excès des ligues religieuses dans Tartuffe ou de la fausse dévotion, dans Dom Juan et Le Misanthrope, il s’attire les foudres du clergé qui obtient du roi que ces pièces se jouent en privé. Molière rédige alors des comédies d’intrigue, Les Fourberies de Scapin ou L’Avare, où les situations cocasses s’entremêlent et emportent le spectateur dans un magnifque tourbillon. La peinture des mœurs Au XVIIe siècle, la fable et la satire, oubliées depuis les empereurs romains, trouvent un nouveau public à la cour de Versailles. Boileau, qui s’inspire de l’écrivain romain Juvénal, publie des Satires qui brocardent les travers de la société et n’hésite pas à traiter de « lamentables » les écrits de certains de ses contemporains. Dans la préface des Fables, La Fontaine affrme : « Je me sers des animaux pour instruire les hommes. Je tâche d’y tourner le vice en ridicule, ne pouvant l’attaquer avec les bras d’Hercule. » À l’instar de Charles Perrault, il ne cache pas l’infuence de l’auteur de la Grèce antique, Ésope : « Je chante les héros dont Ésope est le père, troupe de qui l’histoire, encore que mensongère, contient des vérités qui servent de leçons ». Mais petit à petit il s’affranchit de son mo- dèle pour rédiger des petits contes où de nombreux personnages apparaissent comme dans Le Marchand, Le Gentilhomme, Le Pâtre et le Fils de roi. Loin de la fable ou de la satire, certains auteurs se consacrent à la rédac- tion de chroniques qui relatent les événements politiques du Royaume ou la vie de la Cour. Madame de Sévigné s’est fait une spécialité de ce genre littéraire. Outre son aspect historique, elle insère dans son récit une descrip- tion bucolique de la nature, qui tranche avec l’histoire offcielle. Plus acerbe, La Bruyère, dans Les Caractères, s’attache à peindre son contemporain qui « peut regarder à loisir ce portrait que j’ai fait de lui d’après nature et, s’il se connaît quelques-uns des défauts que je touche, s’en corriger ». Dans son récit s’animent les personnages de la Cour, leurs costumes, leurs manies, leurs petits mots qui rendent si vivants ces hommes du passé. La littérature classique impose des règles strictes de rédaction. Les écri- vains du siècle suivant s’efforceront de briser ce carcan en donnant une place centrale à l’émotion ou aux sentiments. Adjudant-chef Jean-Paul Talimi Rédacteur au CESA uploads/Litterature/ la-classicisme-francaise.pdf

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