Argumentaire du colloque & Résumés des communications Le concept d’Homo Univers

Argumentaire du colloque & Résumés des communications Le concept d’Homo Universalis dans le soufisme opératif Annaba/Hippone/Bône 11, 12 & 13 Décembre 2010 Initié en Algérie par le grand alchimiste bônois abû al-‘Abbâs Ahmed ben ‘Alî al-Bûnî, auteur de shams al- ma‘ârif al-kubrâ شمس المعارف الكبرى (le soleil de la gnose) et de manba‘ usûl al-hikma منبع أصول الحكمة (Les Sources de la Sagesse), né à Bône (Hippone = actuelle Annaba) et mort à Tunis (ou en Egypte) en 622H/1225, avant de gagner l’Orient, le houroufisme surgit dans le Caucase vers le XIVe siècle où il connut un succès considérable grâce au charisme exceptionnel du grand soufi Fadlallah Naîmî Astrabâdî, l’un des continuateurs de l’enseignement de Halladj, d’Avicenne, de Ghazali, d’ibn Arabi et de Roumi à travers son œuvre capitale Jawîdân-nameh جاودان نامه ou "le Livre de l’Eternité" avant d’être exécuté par Miran Shah le fils de Tamerlan en 1394 près du château d’Alinja dans la province du Nakhitchevan en Azerbaïdjan. Mais le soufisme houroufi diffusé par son disciple le poète Imaduddin Nasîmî survécut en Anatolie et dans les Balkans où son héritage spirituel est préservé jusqu’à ce jour dans le Bektashisme, يةhhhالبكتاش (en Turc Bektaşilik ; en Albanais : Bektashizmi ou Bektashizëm) ordre chevaleresque auquel étaient affiliés les Janissaires issu du milieu militaire des archers de Bagdad. A l’Est, le houroufisme atteindra la Transoxiane en Asie centrale par l’Afghanistan grâce à l’œuvre missionnaire du célèbre poète mystique Qâsim al- Anwâr. Or, après avoir été rapidement intercepté par les kabbalistes d’Andalousie et de Provence à leur tête Abraham ben Samuel, plus connu sous le nom d’Abû al-‘Âfia (1240-1291), il aura fallu attendre les années 1950, pour que le houroufisme atteigne l'Europe occidentale sous la forme du mouvement hypergraphique ou métagraphique, basé sur l'organisation des lettres et des signes élaboré par l’écrivain, cinéaste et poète français Jean-Isidore Goldstein. Renonçant à l'usage des mots, le lettrisme, successeur du dadaïsme et contemporain de l’existentialisme, s'attache, à la poétique des sons, au mouvement et à la musique de l’alphabet. Tant en Orient qu’en Occident, le houroufisme continue de développer de nouvelles conceptions esthétiques, littéraires, poétiques, scientifiques et théologiques et n'aura de cesse d'élargir ses recherches à l'ensemble des branches du savoir et de l'existence : architecture, psychologie, physique, chimie, etc. Le houroufisme (الحروفية) marque le paroxysme de la méditation mystique sur l’alphabet. Le mouvement tire son nom de l’arabe hurûf حروف (lettres). Il divinise les lettres et les nombres. Pour cette doctrine, les lettres sont au principe de l’univers. Dieu créa le monde au moyen de deux lettres (k) + (n) = (KN) / (ك) + (ن) = (كن) ce qui signifie en arabe " sois ". Les lettres sont en rapport avec l’univers entier. Celles-là même qui se lisent sur le visage et la main. Toutes les lettres de l’alphabet, tous les écrits sacrés et Dieu Lui-même sont ainsi présents en Sa Majesté l’Homme considéré comme un modèle réduit (microcosme du grec : micros μικρός, "petit" et cosmos κόσμoς, "monde") de l’univers (macrocosme du grec : macros μακρός, "grand" et cosmos κόσμος "monde"). Il s’agit là des prémices théoriques de la notion d’Homo Universalis. Or les propriétés les plus singulières des lettres viennent de leur valeur numérique. Les Arabes se servent des lettres pour écrire les nombres à l’instar des Grecs et les peuples sémitiques qui leur sont proches tels que les Araméens et les Assyriens. Ils attribuent à chacune de celles-ci une certaine valeur. C’est là, dans la gématrie, le principe de la gēmatriyā du grec γεωμετρία (art de mesurer tout ce qui est dans le ciel et sur la terre). Les lettres peuvent ainsi livrer le secret de leurs vertus magiques par le procédé de ‘ilm istintâq al-hurûf علم إستنطاق الحروف (l’instruction des lettres). Car celui qui possède l’arcane des lettres détient les clés de l’univers. Ainsi, le phonème qui constitue la plus petite unité dépourvue de sens que l’on peut délimiter dans la chaîne parlée devient dans la phraséologie coranique un monème. Cette morphosyntaxe atypique est contraire à la phonématique universelle qui requiert que ces unités ne se présentent jamais isolées mais se combinent selon un rapport syntagmatique à d’autres traits phoniques. Celles-ci semblent être ici sémantiquement autonomes. Elles accèdent ainsi au statut d’unité significative désignée dans la linguistique sous le terme de morphème lexical ou lexème. Le système de codage sur lequel reposent ces signes coraniques est toutefois non conventionnel puisque indéchiffrable. Le sens des ces monogrammes, on ne le connaît pas vraiment et, on ne le connaîtra peut-être jamais même si certains maîtres de la cryptologie visionnaire pensent qu'il pourrait s'agir de lettres qui entrent dans la composition alchimique du Nom Suprême de Dieu que seul le Prophète et ses Apôtres seraient en mesure d’établir l’équation. D'autres spécialistes des sciences occultes pensent que toutes les lettres de ce genre constituent un secret de Dieu, comparable aux codes que certains auteurs humains insèrent dans leur ouvrage. Cependant, en tant que forme qui permet la transmission d’un message, d’une information, le code phonatoire doit pouvoir être compris par le récepteur- décodeur afin que s’effectue l’opération de décodage, au cours de laquelle ces signes se voient assigner un sens de façon à ce que la communication puisse s’établir. Or, l’on est face à un phénomène où le lecteur ne possède pas la capacité cryptanalytique ni dans le passé ni dans le présent. Ces lettres introductrices ont reçu plusieurs interprétations qui buttent toutes sur l’affirmation que celles-ci relèvent d’un secret coranique que Seul Dieu connaît. L’interprétation gématrique, laquelle n’est, par l’étude des divers noms de Dieu, qu’une étape vers la gnose prophétique. Bien que Abd al-Karîm al-Jîlî (767-832H/1265-1328) fût le premier à avoir théorisé la notion d’homme cosmique en islam et en avoir fait le lien avec l’alphanumérologie qu’il qualifie de Science des Saints le principe existait déjà chez d’autres penseurs et philosophes, si ce n’est dans la forme dans le fond. Cette doctrine axiale dans l’anthropologie coranique se manifeste de façon évidente à travers la définition donnée par la confrérie des Frères de la Pureté hإخوان الصفا aux attributs de l’Homme Parfait tel qu’elle apparaît dans la vingt-deuxième épître de leur célèbre corpus theosophicus rédigé dans la deuxième moitié du IVe siècle de l’hégire/Xe siècle de l’ère commune. Nous sommes en plein système microcosme/macrocosme. L’homme, en tant que réplique identique du cosmos dans ses caractéristiques morphologiques et psychologiques, totalise à la faveur d’une série de projections existentielles le principe cosmothéiste ou théocosmique qui régit l’univers lequel se base sur le contraste harmonisé évoqué par les sages indiens et philosophes grecs repris postérieurement par les gnostiques et les hermétiques. D’où l’intégration de ce schéma en astronomie telle qu’il apparaît dans les cartes du ciel sous forme d’homme sidéral ainsi que dans les formules magiques comme dans la cosmologie chinoise et la philosophie taoïste sous le rapport yin/yang qui conduit, de façon remarquable, à la conciliation des facteurs contraires dont on trouve écho dans le dénombrement des Noms Sublimes de Dieu. Or, chaque élément antinomique comporte en lui le germe de l’altérite si bien qu’au moindre déséquilibre parmi ces contrastes surgit une crise et un dérèglement au niveau de l’activité inhérente au précepte oppositionnel de la matière et de l’énergie dont est issu le mouvement. Au point que le philosophe abû Ya‘qûb Sijistânî décèle dans le crédo de foi musulmane : lâ ilâh illa Allah = Nullus deus nisi Deus par l’alternance des phases négative et affirmative le modèle expressif de l’isomorphisme sur laquelle se base toute la dialectique de islam laquelle estime que « tout est dans tout ». Une telle vision solidaire des options philosophiques, religieuses ou artistiques cherche à établir un lien entre le visible et l'invisible, l'apparence et l'essence ; joue sur les analogies, les symboles, les médiations, les ressemblances ; échappe aux déterminations restreintes et part à la conquête de l’unité expansive contenue au sein même du Logos ou al-haqîqa al-muhammadiya الحقيقة المحمدية (Réalité muhammadienne). L’alchimiste algérien Ahmed al-Bûnî, qui est sans conteste le plus grand cryptologue de l’islam, nous délivre les correspondances des lettres avec les quatre éléments de la nature, avec les sphères célestes et les planètes, avec les constellations zodiacales et les différentes ipséités archangéliques. Etant au nombre de 28, les lettres arabes sont aussi en rapport avec les mansions lunaires. La science des lettres est donc une science de l’univers. C’est la base de la simiyâ’ hيمياءhhhالس ou l’arithmomancie longuement exposée par ibn Khaldûn dans ses célèbres prolégomènes muqaddimaالمقدمة , véritable magie blanche au sens usuel de ce mot dont la forme semble philologiquement dériver de la kīmiyā’ كيمياء qui désigne en arabe l’alchimie. Il est superflu de rappeler ici les théories pythagoriciennes, probablement importées de Grèce en Egypte. Son œuvre, volontairement cryptique, traduite en plusieurs langues et rivale du Picatrix ou Ghâyat al-hakîm ة الحكيمhغاي (L’intention du sage) composé au milieu du XI e siècle puis traduit en latin sous Alphonse X de Castille dit le savant à la fin des années 1250 attribué au mathématicien alchimiste et astronome arabe al-Majrîtî (950-1008) continue à uploads/Litterature/ la-doctrine.pdf

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