49 12. La narration La narration répond à la question : « Comment est racontée

49 12. La narration La narration répond à la question : « Comment est racontée l’histoire ? » Celui qui raconte l’histoire est le narrateur. Il peut être soit un personnage de l’histoire, soit extérieur au récit. Si le personnage est extérieur à l’histoire, il s’exprime le plus souvent à la troisième personne : Il. Si le narrateur est un des personnages, il s’exprime le plus souvent à la première personne. Il existe des cas rares où le roman est raconté à la deuxième personne : Tu / Vous. Pour identifier le narrateur, on peut se poser les questions suivantes : 1. Qui voit ? 2. Où se trouve-t-il ? 3. Que sait-il des faits ? 4. Que sait-il des pensées des personnages ? Qui voit ? Observateur extérieur = narrateur à la 1re personne Personnage = narrateur à la 1re personne Être omniscient = narrateur à la 3e personne Où se trouve-t-il ? Hors de l’histoire = narr. intradiégétique / homodiégétique Dans l’histoire = narr. intradiégétique / homodiégétique Hors du récit = narr. extradiégétique / hétérodiégétique Que sait-il des faits ? Ce qu’il peut observer = point de vue restreint ou limité Ce qu’il peut voir en tant que personnage = point de vue restreint ou limité Tout = narr. omniscient Que sait-il des pensées des personnages ? Rien = focalisation externe Uniquement les siennes = focalisation interne Tout = focalisation zéro Exemple d’analyse 1. Décidez qui voit, où se trouve-t-il et que sait-il des pensées des personnages et des faits dans les exemples suivants. Madame Vauquer, née de Conflans, est une vieille femme qui, depuis quarante ans, tient à Paris une pension bourgeoise établie rue Neuve-Sainte-Geneviève, entre le quartier latin et le faubourg Saint- Marceau. Honoré de Balzac – Le Père Goriot A 50 2. Quels sont les avantages et les inconvénients de la narration à la première personne ? Observez-les dans le texte suivant : 3. Quels sont les avantages et les inconvénients de la narration à la troisième personne ? Observez-les dans le texte suivant : La petite ville de Verrières peut passer pour l’une des plus jolies de la Franche-Comté. Ses maisons blanches avec leurs toits pointus de tuiles rouges s’étendent sur la pente d’une colline, dont des touffes de vigoureux châtaigniers marquent les moindres sinuosités. Stendhal – Le rouge et le noire Aujourd’hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. J’ai reçu un télégramme de l’asile : « Mère décédée. Enterrement demain. Sentiments distingués. » Cela ne veut rien dire. C’était peut- être hier. Albert Camus- L’Étranger Il arriva chez nous un dimanche de novembre 189... Je continue à dire « chez nous », bien que la maison ne nous appartienne plus. Nous avons quitté le pays depuis bientôt quinze ans et nous n’y reviendrons certainement jamais. Alain Fournier – Le Grand Meaulnes La première fois que je me vis dans un miroir, je ris : je ne croyais pas que c’était moi. À présent, quand je regarde mon reflet, je ris : je sais que c’est moi. Et tant de hideur a quelque chose de drôle. Mon surnom arriva très vite. Je devais avoir six ans quand un gosse me cria, dans la cour : « Quasimodo ! » Fous de joie, les enfants reprirent en choeur : « Quasimodo ! Quasimodo ! » Pourtant, aucun d’entre eux n’avait jamais entendu parler de Victor Hugo. Mais le nom de Quasimodo était si bien trouvé qu’il suffisait de l’entendre pour comprendre. On ne m’appela plus autrement. (Amélie Nothomb : Attentat) Deux hommes paraissent au fond du boulevard de Courcelles, en provenance de la rue de Rome. L’un, de taille un peu plus haute que la moyenne, ne parle pas. Sous un vaste imperméable clair et boutonné jusqu’au cou, il porte un costume noir ainsi qu’un nœud papillon noir, et de petits boutons de manchette montés en quartz-onyx ponctuent ses poignets immaculés. Bref il est très bien habillé mais son visage livide, ses yeux fixés sur rien de spécial dénotent une disposition d’esprit soucieuse. Ses cheveux blancs sont brossés en arrière. Il a peur. Il va mourir violemment dans vingt-deux jours mais, comme il l’ignore, ce n’est pas de cela qu’il a peur. L’autre qui l’accompagne est d’apparence tout opposée : plus jeune, nettement moins grand, menu, volubile et souriant trop, il est coiffé d’un petit chapeau a carreaux bruns et beiges, vêtu d’un pantalon décoloré par plaques et d’un chandail informe porté a même la peau, chaussé de mocassins marbrés d’humidité. (Jean Echenoz, Au piano) C D B 5 10 5 10 51 4. Quelle stratégie narrative est employée dans le conte La Main ? 5. Le récit encadrant est-il nécessaire ? Quelle est sa fonction ? Imaginez que le récit commence là où commence le récit raconté par Bermutier : « J’étais alors... ». Quel effet produit-on si le récit encadrant est enlevé ? Qu’est ce qu’on perd/gagne ? 6. Quelle stratégie narrative est employée dans le récit encadré ? Quelles sont ses fonctions ? Réponses : 1. A. Honoré de Balzac – Le Père Goriot 3e personne – extradiégétique – point de vue omniscient – focalisation zéro B. Stendhal – Le rouge et le noir 3e personne – extradiégétique À noter : pour que le lecteur puisse identifier le point de vue restreint ou limité et la focalisation interne il faut lire un passage plus long. C. Albert Camus – L’Étranger 1re personne – point de vue du personnage principal– intradiégétique – focalisation externe D. Alain Fournier – Le Grand Meaulnes 1re personne – point de vue restreint ou limité du personnage secondaire – intradiégétique – focalisation interne * * * 2. La narration à la première personne produit une excellente première impression. Très souvent, ce type de narrateur introduit l’action dès le début. Dans le roman d’Amélie Nothomb, le narrateur, dont l’identité est inconnue, lance une première phrase qui choque et devrait éveiller immédiatement l’intérêt du lecteur. Même si on ne sait quasiment rien sur le cadre dans lequel l’histoire se déroule, la phrase dévoile probablement le moteur de toute action – la laideur du personnage. Au lieu de donner des informations, le texte incite le lecteur à se poser des questions. Qu’est-ce qui le rend laid ? Sa laideur est-elle vraiment aussi grave ? Est-il vraiment laid ? Les deux dernières questions sont bien justifiées parce que le narrateur n’est pas obligé de dire toute la vérité et il peut même mentir. Le lecteur est enclin à s’identifier au narrateur à la première personne quelle que soit sa fiabilité, mais l’inconvénient principal du narrateur à la première personne découle du fait qu’il ne peut pas raconter l’histoire de la perspective d’un autre personnage, connaître toutes les circonstances, etc. Ce type de narrateur ne peut pas prétendre tout savoir. * * * 3. Les narrateurs à la troisième personne donnent presque toujours l’impression qu’ils en savent plus que ce qu’ils disent. Cet effet est produit dans le cas où leur vision est restreinte à tel point qu’ils suivent un seul personnage tout au long du roman (les narrateurs stendhaliens), mais aussi dans le cas où le narrateur tente de présenter le monde dans sa totalité, en ne préférant aucun personnage (les narrateurs balzaciens). Parfois, le sentiment que le narrateur ne dit pas tout ce qu’il sait est bien justifié. Cependant, à la fin du roman tout le mystère est d’habitude enlevé. Cette sorte de certitude, qu’à la fin de la lecture on aura des réponses et pas 52 seulement encore plus de questions qu’au début, comme cela peut être le cas dans les romans racontés à la première personne, est une des raisons pourquoi certains lecteurs et auteurs préfèrent les narrateurs à la troisième personne. Un autre avantage de la narration à la troisième personne est qu’on peut compter sur l’objectivité du narrateur parce qu’il n’a aucune raison de se mentir . Dans l’incipit du roman policier Au Piano, le narrateur sait que le personnage va mourir dans vingt-deux jours et qu’il (le personnage) l’ignore. Le lecteur peut chercher les indices précédant le crime parce qu’il peut être sûr du fait que la mort se produira à un certain instant dans l’histoire (il est possible de « connaître l’avenir » pour un narrateur à la première personne, mais un récit pareil doit être inévitablement une rétrospection). En bref, ce narrateur dit la vérité même s’il ne la dévoile pas immédiatement. Le narrateur à la troisième personne convient aussi dans les situations où l’auteur souhaite introduire dans le récit de longues descriptions objectives. * * * 4. Le conte représente un cas particulier parce que le texte encadre un autre récit. Le début et la fin du texte sont constitués du récit encadrant, tandis que le récit situé entre les deux est appelé le récit encadré. Pour les deux parties, deux stratégies narratives différentes sont employées. La phrase « On faisait cercle ... » introduit un narrateur collectif qui, après l’introduction, laisse la parole à un narrateur personnel, au uploads/Litterature/ la-narration-il-si-le-narrateur-est-un-des-personnages-il-s-x27-exprime-le-plus-souvent-a-la-premiere-personne.pdf

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