A LA RE CHERCHE D’UNE DANSE MODERNE Isabelle LAUNAY Université de Paris 8 Janvi

A LA RE CHERCHE D’UNE DANSE MODERNE Isabelle LAUNAY Université de Paris 8 Janvier 1997 RUDOLF LABAN MARY WIGMAN A Loz 1 A LA RECHERCHE D’UNE DANSE MODERNE Isabelle LAUNAY Université de Paris 8 Janvier 1997 RUDOLF LABAN MARY WIGMAN A Loz Ce travail est le fruit direct des aventures intellectuelles que sont les pensées du mouvement (en mouvement) de Michel Bernard, Hubert Godard et Laurence Louppe, enseignants à l’Université de Paris VIII-Saint-Denis. Sans ce trio aussi généreux que passionné, cette recherche n’aurait tout simplement pas vu le jour. Laure Guilbert, Léo et Michel Launay, Patrick De Vos et Emmanuel Lozerand ont eu part à ce texte, ce dont pour chacun, très particulièrement, je sais gré. Et que soient aussi remerciés pour leurs critiques ou leurs encouragements, Dominique Dupuy, Béatrice Picon-Vallin, Daniel Dobbels, Le Quatuor Knust, Karin Waehner et pour leur ultime relecture Jean-Marc Adolphe et Isabelle Ginot. "Le Nouveau vient selon des voies particulièrement complexes. Il est considéré ici en lui-même, même dans ce qui lui fait obstacle, mais surtout dans la brèche involontaire et dans quelques-uns de ses signes chatoyants". Ernst Bloch "Qu’on ne se moque pas ici en bloc de «l’irraison», mais qu’on l’occupe". Ernst Bloch 2 A la recherche d’une danse moderne - université de paris 8 saint-denis - département danse - Isabelle Launay - 1997 SOMMAIRE chapitre I : DANSE, HISTOIRE, MODERNITÉ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 I. Approches . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 II. De l’histoire de "la" danse moderne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 III. La mémoire des traces textuelles. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28 IV. A la recherche de modernité de la danse "moderne" . . . . . . . 30 chapitre II : LABAN, OU LA DANSE MODERNE COMME "PENSÉE MOTRICE" . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 I. "DANSE MODERNE" ET PRESENT : CRITIQUE DE LA CIVILISATION "MODERNE" . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 II. La danse "moderne" comme expérience de danse . . . . . . . . . . 69 III. La danse moderne comme art majeur allemand . . . . . . . . . . . 104 Conclusion : la cathédrale en mouvement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 124 chapitre III : WIGMAN, OU LA DANSE MODERNE ENTRE ROYAUME D’HADES ET FEUX DE LA RAMPE . . . . 126 I. La danse "moderne" comme danse du présent . . . . . . . . . . . . . . 126 II. La danse moderne comme "danse d’expression" ? . . . . . . . . . 143 III. Le spectacle d’une danse moderne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171 IV. La danse moderne comme objet de croyance . . . . . . . . . . . . . . 198 PAUSE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 227 BIBLIOGRAPHIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 240 3 A la recherche d’une danse moderne - université de paris 8 saint-denis - département danse - Isabelle Launay - 1997 1 DANSE, HISTOIRE, MODERNITÉ 1 Dominique Dupuy, danseur, chorégraphe, pédagogue français, ancien membre des "Ballets 38" de Jean Weidt (danseur alle- mand, exilé en France dans les années trente), fut responsable de la danse à l’Institut Pédagogique Musical et Chorégraphique de La Villette (I.P.M.C.) à Paris. Préface à L’Aventure de la danse moderne en France, 1920-1970 de Jacqueline Robinson (Paris, Bougé, 1990, p. 14). 2 Essentiellement en Suisse et en Allemagne. I. APPROCHES Histoire d’un trou de mémoire On croupit sous une histoire de la danse faite de potins et de bibelots, articles de boudoirs, porcelaines de Saxe et autres pendants de cheminée, [ ... ]. (Demain, sommes-nous voués à crouler sous les étagères de gadgets électroniques qui rempliront dansothèques, choréothè- ques et autres arsenals de l’archivage technologique !). On vit dans un cocon de danse qui nous vient tout droit du XIXe siècle, avec un corps-machine à échauffer, (ah ! l’échauffement !) traininger, placer (ah! le placement préalable de cet objet que l’on espère déplacer !), martyriser un corps voué à la transpiration, aux bobos, au malheur, mais qu’on s’ingénie à dorloter, régimer, panser, soigner, réparer...1 Quand un danseur s’insurge ainsi contre l’interdiction de mémoire qui touche l’histoire de la danse en France, il souligne autant la responsabilité des danseurs eux-mêmes que l’indigence des historiens. Il s’in- terroge sur une manière d’écrire l’histoire de la danse, histoire biographique et hagiographique, qui ne se- rait finalement capable que de creuser un vaste et poussiérieux trou de mémoire. Rien ne sert à l’historien de retravailler sur des archives, des partitions notées, ou des films et des vidéos, s’il ne questionne d’abord le type de regard qu’il est en droit de poser sur l’histoire de la danse et sur la finalité de sa démarche. Comment donc faire l’histoire de la danse, et en particulier celle de la danse dite "moderne", qui apparut au tournant du siècle aux Etats-Unis et en Europe2 ? Cette mémoire momifiée de l’art chorégraphique est d’abord étroitement liée à la conception d’un corps-outil qui laisse croire à l’existence "du" corps comme entité anatomique unique et permanente, fonctionnant selon les seules lois biomécaniques. Il s’agit donc de penser le corps du danseur autrement qu’en termes de moyen ou d’objet, que l’on fabriquerait (en le chauffant, l’étirant, le plaçant, le sculptant) pour exprimer quelque chose, un sentiment ou une émotion. Contre l’opinion autorisée qui définit la danse comme un art éphémère et, par un raccourci commode, comme un art sans mémoire, Dominique Dupuy ne suggère-t-il donc pas la possibilité de saisir ce qui, dans le mouvement même du corps dansant, indique un travail de la mémoire : à quelles conditions la danse contient-elle, et féconde-t-elle, de la mémoire ? Cette interrogation fut, semble-t-il, au cœur des préoccupations des danseurs-chorégraphes, Rudolf Laban et Mary Wigman, généralement présentés comme les "inventeurs" européens, dans les années dix à trente, d’une danse "moderne". L’étude des questions qu’ils se posèrent au sujet de la modernité de leurs 4 A la recherche d’une danse moderne - université de paris 8 saint-denis - département danse - Isabelle Launay - 1997 3 A la suite des réflexions de Michel Bernard (Le Corps, Paris, Editions Universitaires, 1972), nous emploierons le mot "corporéité" de préférence à "corps", L’exemple de la danse, parmi d’autres, montre en effet que le "corps" est à penser comme une matière modulable, un réseau sensoriel, pulsionnel et imaginaire, inséparable d’une histoire individuelle et collective. 4 Préface à L’Aventure de la danse moderne en France, op. cit., p. 15. 5 Walter Benjamin, Paris, capitale du XIXe siècle - Le livre des passages, Paris, Cerf, 1989, trad. fr. de Jean Lacoste, p. 409. 6 Voir à ce sujet Antoine Compagnon, Les Cinq paradoxes de la modernité, Paris, Seuil. 1990, Ch. 3, "Théorie et Terreur", pp. 79-110. 7 Ils travaillèrent ensemble lors de leur formation en Suisse dans la communauté utopique du Monte-Verità de 1913-1919, puis en 1929, lors du Deuxième Congrès National des danseurs à Essen, sous la direction de Kurt Jooss, ils signent au nom de leurs syndicats concurrents un projet d’école commun qui ne verra jamais le jour. Ils se retrouvent encore lors du congrès suivant en 1930 à Munich. Ils participent dans le cadre des Jeux Olympiques de uploads/Litterature/ launaydansemoderne-site.pdf

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