LES NORTHMANS EN AMÉRIQUE LES VIKINGS DES GRANDES ÉTAPES EST-CE VRAI? À Me Hono

LES NORTHMANS EN AMÉRIQUE LES VIKINGS DES GRANDES ÉTAPES EST-CE VRAI? À Me Honoré Parent, avocat, C.R. Directeur des Services de la Cité de Montréal Hommage d'un rêveur au réalisateur. EUGÈNE ACHARD. Les récits qu'on va lire n'appartiennent pas au domaine du roman. Ils sont tirés des Sagas (1) ou chroniques des moines islandais dont les récits, s'appuyant sur des monuments authentiques, remontent à l'année 1150. (1). Saga est un mot de racine germanique qui signifie dire, récit, chronique, à proprement parler tradition orale. Les Sagas sont, en quelque sorte, les chansons de geste des nations du nord de l'Europe. Chaque pays occupé par les Scandinaves a ses Sagas particulières dont l'exactitude a été confirmée au cours des siècles, par les découvertes géologiques faites au Danemark, en Norvège, en Islande, au Groenland et en Amérique. Mais, en aucun pays, ces chroniques ne sont aussi nombreuses, aussi importantes ni aussi bien contrôlées qu'en Islande. Leurs auteurs, les vieux moines islandais, assure Gravier, n'avançaient rien au hasard, ne suppléaient jamais, par l'imagination, à l'absence de documents certains et préféraient laisser un point inexpliqué plutôt que de l'étayer de preuves incertaines. Aussi les découvertes historiques ou archéologiques faites dans la suite sont-elles toujours venues confirmer et corroborer leurs assertions. Leurs -#PAGE - 1 Sagas sont simples, claires, précises, purgées de ce merveilleux qui produit si souvent des doutes sur l'intelligence ou la sincérité des chroniqueurs monastiques des autres pays. Rafn, un des auteurs scandinaves qui ont étudié les Sagas avec le plus de soin, écrivait, en 1837: « La langue des Sagas est pure, la structure des phrases, simple et naturelle. Les poèmes encastrés dans le texte portent tous le caractère d'ancienneté. On a le spectacle d'écrivains persuadés de la vérité des événements qu'ils racontent (1). » (1). Rafn: Antiquitates americanoe. Lors de l'ouverture de la « World's Columbian Exposition », première exposition universelle de Chicago, un navire de guerre des États-Unis alla, en grande pompe, au Danemark, pour prendre livraison des Sagas Scandinaves, au nombre de vingt-quatre, réunies dans le «Flatey Book»(2), parchemin in-folio, conservé au musée royal de Copenhague et dont la transcription fut terminée cent quarante ans avant la première expédition de Christophe Colomb. (2). Flatey Book ou mieux Flateyjarbook (livre de Flatey). Ce manuscrit est ainsi appelé parce qu'il a été compilé et écrit, vers 1380, par des moines, dans la petite île de Flatey, près du Boeyarfjord, en Islande. Ce précieux manuscrit, objet des plus grands honneurs qui aient été jamais rendus à une exposition historique de l'esprit humain, devait figurer en vedette à la « World's Fair » et être ensuite rendu à ses possesseurs, mais, au dernier moment, une campagne de presse fut menée, au Danemark, sur les dangers qu'allaient encourir les manuscrits et le gouvernement danois, impressionné, refusa de s'en dessaisir. Tout ce qu'il crut pouvoir faire fut d'envoyer un drakar -#PAGE - 2 (1), construit sur le modèle de ceux que montaient les anciens vikings. Ce drakar a figuré à l'exposition, à côté des caravelles de Christophe Colomb, des nefs de Cabot, de Jacques Cartier et de Hendrik Hudson. (1). Ce drakar fut hissé à bord d'un transatlantique et, par conséquent, ne fit pas le voyage de lui-même, mais, en 1930, trois Norvégiens, partis de leur pays, dans une embarcation à voile de 46 pieds de largeur, construite sur le modèle des anciens drakars, arrivèrent à New York, après 80 jours de navigation, ayant suivi la direction probable de Biorne, lors de son premier voyage en Amérique vers l'an 980. Les Sagas sont en langue nordique (2) mais on en possède plusieurs traductions latines scrupuleusement établies sur les originaux. (2). La langue nordique est une vieille forme de langage d'où sont sorties les langues suédoises et danoises modernes. Le nordique était écrit au moyen de caractères cunéiformes appelés runes. On y trouve l'histoire fidèle de la découverte de l'Amérique par les Northmans, vers l'an mille. Cependant les Sagas ne sont pas les seules sources où nous ayons puisé. Voici les noms d'anciens auteurs scandinaves qui ont écrit en latin, ou dont le texte a été soigneusement traduit: Th. Thorfoeus, Snorre, Sturleson et Anderson. Ils sont les plus anciens après les Sagas. Rafn vient ensuite avec ses Antiquitates americanoe remplies de preuves. Son livre est en latin, de même que son Recueil des faits accomplis par les Vieux Boréaliens, ses Particularités sur le Groënland et son Histoire du Vinland. -#PAGE - 3 Anglais et Américains se sont aussi attelés à l'étude de cette question, entre autres Wheaton, Kohl, Warden, Reamish et, plus récemment, Eben Horton Horsford et sa fille, Miss Cornelia Horsford, qui se sont surtout appliqués à découvrir les vestiges des villages fondés par les premiers Northmans, en particulier par Leif Ericson à qui la ville de Boston venait d'élever un monument. Les Allemands s'en sont mêlés aussi, car il fut un temps où les évêques de Hambourg étendaient leur juridiction spirituelle sur les pays du Nord, à titre de délégués apostoliques. Il y a, dans les archives de Hambourg, un bon nombre de lettres qui se réfèrent plus ou moins directement à ces expéditions d'outre-Atlantique et entre autres plusieurs listes de dîmes et contributions fournies par les Vinlandais(1). Humboldt est celui de tous les érudits allemands qui a traité ce point d'histoire avec, le plus de netteté et de compétence. (1). Des listes semblables, et en bien plus grand nombre, viennent d'être découvertes dans les archives du Vatican, ainsi que le nom de deux évêques, Eric Upsi et Jonus (traduction latine du nordique Jon, équivalent de Jean en français) qui allèrent prêcher la foi au Vinland. Un seul Italien, Ramusio, s'est appliqué à l'étude de ces expéditions. Son récit, puisé aux meilleures sources, est plein de révélations. En France, plusieurs auteurs connus ont parlé des expéditions northmanes en Amérique, entre autres: Depping, Eugène Beauvois, Estancelin, Gaffarel, Margry, Neukomm, Gabriel Gravier, le Père Petitot et tout dernièrement le colonel Langlois (2). (2). Presque tous ces auteurs sont membres de la Société des Antiquaires de Normandie. -#PAGE - 4 Oui, cinq siècles avant Christophe Colomb, des explorateurs northmans ont visité les régions que l'on nomme maintenant Labrador, Terre-Neuve, Nouvelle-Écosse, Maine, Massachusetts, Nouveau-Brunswick et Gaspésie. Ils s'y sont établis, les ont colonisées et s'y sont maintenus pendant près de quatre siècles. Oui, les Northmans ont eu des colonies florissantes dans l'Amérique du Nord. Ils ne l'appelaient naturellement pas de ce nom, puisque Americ Vespuce est venu, près de cinq siècles plus tard, imposer le sien au continent. Ils avaient baptisé leurs établissements transatlantiques: Vinland, Markland, Hvitramanaland. Ils s'établirent donc dans cette contrée, ils y fondèrent des villes, des villages du moins; ils eurent des rois, des évêques; ils payèrent la dîme, le denier de Saint-Pierre; ils contribuèrent au succès des croisades par des souscriptions volontaires dont on conserve les mémoires manuscrits aux archives du Vatican. Mais, nous direz-vous, qu'est-ce qui prouve que le Vinland fût en Amérique, puisqu'au moment où arrivèrent les découvreurs modernes, Verrazzano, Cabot, Hudson, Jacques Cartier, les peuples du Nord n'y étaient plus? Cette question, je l'ai posée, moi aussi, aux auteurs dont j'ai cité plus haut les noms et ils m'ont répondu: --Sa situation d'abord, par rapport au Groënland; puis la parfaite conformité des pays parcourus et colonisés par les Northmans avec ceux que nous connaissons dans l'Amérique du Nord, tant au point de vue de leur configuration géographique que de l'étude du sol, de la flore et de la faune. -#PAGE - 5 Ouvrons la Saga de Leif Ericson; ouvrons en même temps une géographie moderne et nous allons y suivre, pas à pas, le jeune viking dans son voyage de découverte. Voici d'abord le Labrador avec ses champs immenses de pierres plates, ses côtes glacées et ses collines rocheuses aux flancs couverts de neige: c'est bien là le Helluland, la terre des cailloux plats. Voici maintenant la Nouvelle-Écosse, l'Acadie de nos ancêtres, avec ses dunes, ses forêts opulentes dans lesquelles il est aisé de reconnaître le Markland, la terre boisée des Northmans. Après trois siècles d'une exploitation intense, les bois de construction sont encore une de ses principales richesses. Mais reprenons notre voyage, à la suite des Northmans; descendons le long des côtes, franchissons la frontière canado- américaine; nous ne tarderons pas à découvrir le coude formé par le cap Cod. Entrons maintenant dans le détroit aux sables mouvants qui sépare la terre ferme des îles Nantucket et Martha's Vineyard et, la Saga en main, nous remarquerons les deux rives de ce détroit, unies et couvertes, à marée basse, de grandes pierres plates. Entrons dans la baie du Rhode-Island, côtoyons l'île du même nom pour remonter la rivière Pocasset. L'air y est plus doux que dans le reste du Massachusetts et, de nos jours encore, - singulière coïncidence,- on lui garde son nom de paradis de l'Amérique que lui avaient donné les vieux Northmans. La vigne y croît spontanément; elle y produit ces gros raisins bleus dont on fait - dont on faisait - un vin très acceptable sinon de uploads/Litterature/ les-northmans-en-amerique-les-vikings-des-grandes-etapes-est-ce-vrai.pdf

  • 40
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager