Colloque de Brest du 18 au 20 novembre 2010 « Ecritures de l’officier de Marine
Colloque de Brest du 18 au 20 novembre 2010 « Ecritures de l’officier de Marine » «Les officiers de la marine néerlandaise : Sujets et Acteurs de la littérature au XVIIe siècle»1 Roberto Barazzutti Administrateur à la Société Française d’Histoire Maritime Texte non encore publié. Ne pas le faire sans autorisation. Entre la fin du XVIe siècle et le début du XVIIIe siècle, les Provinces Unies sont une puissance maritime mondiale tant commerciale que militaire. L’histoire économique et maritime de ce succès a fait l’objet de nombreux travaux2. Depuis les années 1980-1990, les historiens s’intéressent de plus en plus aux navigants et à leurs familles. L’aspect culturel et social connaît entre la fin du XXe siècle et le début du XXIe siècle, un essor qui se traduit par des études et des publications sur la vie et les pratiques culturelles des marins et de leurs familles3. Cette dynamique prend parfois un tout autre visage. Ainsi des projets comme l’établissement de bases de données des équipages et surtout le dépouillement, la numérisation et l’étude d’un immense fond d’archives en Grande-Bretagne, celui des prises4, permettront de mieux connaître la réalité de cette société maritime ! Cette quantité de document, existant dans un seul fonds à l’étranger, reflète, en quelque sorte, la pratique courante des Néerlandais d’écrire. Plusieurs voyageurs de la seconde moitié du XVIe siècle furent surpris de découvrir que d’humbles personnes de ce pays sachent lire et écrire. En 1567, Ludovico Guicciardini, dans sa description des Pays-Bas dit 5 : La plus grande partie de la population détient quelques connaissances en grammaire ; presque tout le monde, même les paysans, savent ici lire et écrire. Par-dessus tout, ce qui est admirable c’est la connaissance que les Néerlandais ont des langues étrangères. On ne compte pas les gens qui ne sont jamais allé à l’étranger mais qui parlent quand même des langues étrangères. Ici les gens sont habitués avec le français ; beaucoup de néerlandais connaissent l’allemand, l’anglais, l’italien et l’espagnol ; d’autres parlent des langues des pays lointains6. 1 Je souhaite dédier cet essai tout particulièrement à ma grand-mère néerlandaise décédée peu de temps avant cette communication. 2 La bibliographie consacrée à ces thèmes est vaste. Voici quelques ouvrages de référence : Jonathan Irvine Israel, The Dutch Republic. It’s rise, greatness and fall 1477-1806 ; Oxford, Oxford University Press, 1998; Jan de Vries et Ad van der Woude, Nederland 1500-1815. De eerste ronde van moderne economische groei ; Amsterdam, Uitgeverij Balans, édition de 2005. Nous renvoyons aussi aux travaux des professeurs Jaap Ruud Bruijn et Pieter Emmer dont certains sont publiés en anglais ou en français. 3 Danielle Van den Heuvel, « Getrouwd met Jan Compagnie. Oost-Indievaarders en hun echtegenotes in Enkhuizen en omgeving (1700-1750) », Tijdschrift voor zeegeschiedenis, n°23, 2004-1, p. 30-42 ; Annette De Wit, « Zeemansvrouwen aan het werk. De arbeidsmarktpositie van vrouwen in Maassluis, Schiedam en Ter Heijde (1600-1700) », Tijdschrift voor sociale en economische geschiedenis, n°3, 2005-2, p. 60-80. 4 Ce fond contient près de 40 000 lettres, courriers et pièces diverses pris sur des navires néerlandais et conservés sur une période de 1638-1815. À notre connaissance, aucun chercheur n’a effectué d’inventaire ni d’étude des documents dans ce fonds concernant la France. Sachant que l’Angleterre a été l’ennemie de la France plus longtemps qu’avec les Provinces-Unies, on ne peut qu’imaginer la richesse des informations que l’on puisse y trouver alors. Voir sur ce programme et son évolution le site de l’université de Leiden aux Pays-Bas. 5 Ce marchand florentin installé à Anvers depuis 1542, publie une description des Provinces-Unies à la veille de la guerre dite de 80 ans. Il n’était pas le seul à s’étonner du niveau culturel des habitants : de retour de France, Peter Scriverius (Pieter Schrijver 1576-1660) fut surpris à la fin du XVIe siècle de découvrir que la servante de l’auberge où il avait fait halte sache alors écrire et lire. 6 Cette citation traduite par mes soins est issue du livre de Roelof van Gelder, Zeepost. Nooit bezorgde brieven uit de 17de en 18de eeuw, Olympus, Amstel Uitgever, 2010, p. 22. Les autres citations dans l’article sont des 1 Les archives et les bibliothèques néerlandaises et étrangères contiennent de nombreux documents de la main des officiers. C’est une documentation variée comportant des missives, des récits, des journaux de bords7, des pamphlets, et des documents privés comme la correspondance destinée à des proches ou à des relations. L’ampleur de cette information rend difficile de résumer en une seule communication l’étendue et la diversité des informations que les historiens peuvent extrapoler de cette documentation. L’approche choisie a consisté à fournir quelques éléments à partir d’un corpus constitué d’une série de textes publiés tels que des journaux de bords et des extraits de lettres de Michiel Adriaen De Ruyter8, Witte de With9, Maerten et Cornelis Tromp10, Piet Hein11, de ceux des membres de la famille Evertsen12 ; des lettres échangées par Eland du Bois avec sa femme13, et quelques autres marins14. Deux axes guident cette démarche : l’officier de marine néerlandaise acteur de littérature, mais aussi dans quelle mesure il a été un sujet de littérature à cette époque et pourquoi il l’a été. traductions de mon fait provenant des différents ouvrages cités. 7 La Linschoten Vereniging, créée en 1908 dans la foulée de la création de la Hakluyt Society en 1846, a pour but de publier et d’éditer des récits de voyages, par mer ou par terre. Son nom provient Jan Huygen van Linschoten (1563-1611) qui publie le premier en 1595-1596 son livre Itinerario. Voyage ofte Schipvaert van Jan Huygen van Linschoten naar Oost ofte Portugaels Indien, ses voyages dans les Indes Orientales. Il faut savoir qu’à l’époque l’accès et la diffusion de ces récits pouvaient en être restreint voir interdit dès lors que ceux-ci révélaient les routes commerciales. Voir Herman Ketting, Leven, werk en rebellie aan boord van Oost- Indiëvaarders (1595-1650), Amterdam, Het Spinhuis, 2002, p. 9. Les journaux étaient abondants, les imprimeries et « maisons d’éditions » nombreuses alimentaient la population par de nombreux récits de voyages ou de pamphlets. En 1597, il sera publié deux récits des premières expéditions néerlandaises vers les Indes Orientales dont un contient 62 pages avec 10 gravures et 5 cartes. En 1598 Gerrit de Weer écrit un récit des 3 expéditions vers le Spitzberg (Barendz, Heemskerck). Il y aura 8 éditions entre 1599 et 1650. C’est en janvier 1602 qu’est publiée la circumnavigation d’Olivier van Noort (1598-1601) ainsi qu’un autre livre décrit la côte de Guinée. L’Amérique n’est pas oubliée avec la parution en 1603 du voyage d’Hendrick Ottsen au Brésil en 1598. Au cours de la période 1630-1650, il est publié en moyenne entre 3-5 récits de voyages ou journaux écrits par des officiers, mais aussi des matelots, soldats, des chirurgiens. C’est le cas en 1636 du récit de voyage de François Caron. 8 Ronald Prud’Homme van Reine, Rechterhand van Nederland. Biografie van Michiel Adriaenszoon De Ruyter, Amsterdam, De Arbeiderspers, 1996 et Leenderts Koelman, Michiel De Ruyter in eigen woorden, Franeker, Uitegeverij van Wijnen, 2007. 9 Les archives de la fin de la vie de ce personnage se trouvent en Suède. En effet, il décède lors de la bataille du Sund en 1658. Son navire est capturé par les Suédois. Les documents sont saisis et gardés alors que le corps de cet officier général sera restitué l’année d’après. Anne Doedens, Witte de With 1599-1658 Werelwijde strijd op zee in de Gouden Eeuw, Hilversum, Uitgeverij Verloren, 2008. Anne Doedens et Henk Looijesteijn, Op jacht naar Spaans zilver. Het scheepsjournaal van Willem van Brederode, kapitein der mariniers in de Nassause vloot (1623-1626), Hilversum, éditions Verloren, 2008. 10 Anne Doedens et Liek Mulder, Tromp het Verhaal van een zeeheld. Marteen Harpertszoon Tromp 1598-1653, Baarn, Uitgeverij Hollandia, 1989. Ronald Prud’Homme van Reine, Schittering en Schandaal. Biografie van Maerten en Cornelis Tromp, Amsterdam, De Arbeiderspers, 2001. 11 Ronald Prud’Homme van Reine, Admiraal Zilvervloot Biografie van Piet Hein, Amsterdam, De Arbeiderspers, 2003. 12 Soit des officiers d’origine zélandaise (Ruyter et Evertsen) et hollandaise (Tromp et Witte de With tous les deux originaires de Den Brielle), sans compter quelques informations de par les lectures sur les autres officiers cités. Doeke Roos, Twee Eeuwen varen en vechten 1550 – 1750. Het Admiralengeslacht Evertsen, Vlissigen, éditions ADZ, 2003. Robert D. Hanslacht et Donald G. Shomette, Raid on America. The Dutch Naval Campaign of 1672-1674, Columbia, University of South Carolina Press, 1988. 13 Les lettres d’Eland du Bois à son épouse sont l’unique source ayant fait l’objet d’un examen global par Jaap Ruud Bruijn et E.S van Eyck van Heslinga, « Aan Wijffje lief. Brieven van zeekapitein Eland du Bois aan zijn vrouw (1669-1674) », Nederlandse Historische Bronnen, n°5, 1985, p. 111-144. 14 Voir la bibliographie complémentaire à la fin de cet article. 2 Les officiers acteur et producteur d’écrit Les rares travaux concernant le niveau d’alphabétisation de la population néerlandaise montrent que celui ci était bien supérieur à celui d’autres pays riverains. En 1583 à Amsterdam, 55% des époux et 38% des uploads/Litterature/ les-officiers-de-la-marine-neerlandaise-sujets-et-acteurs-de-la-litterature-au-xviie-siecle-libre.pdf
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- Publié le Apv 10, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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