Lona Charles Ouattara Le drame d’Inata au Burkina Faso Absence indicible de vis

Lona Charles Ouattara Le drame d’Inata au Burkina Faso Absence indicible de vision stratégique Préface de Christian Chaulet Le drame d’Inata au Burkina Faso Lona Charles Ouattara Le drame d’Inata au Burkina Faso Absence indicible de vision stratégique Préface de Christian Chaulet © L’Harmattan, 2022 5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris http://www.editions-harmattan.fr ISBN : 978-2-14-029595-9 EAN : 9782140295959 7 PRÉFACE Le terrorisme islamique est un véritable cancer qui s’est progressivement installé depuis une dizaine d’années dans les pays de la bande sahélienne. Il a un but politique précis et cherche à l’atteindre par tous les moyens possibles. Si le Burkina Faso n’a pas été le premier pays touché par le terrorisme, la situation actuelle fait de ce pays une cible de choix et le climat sécuritaire s’y trouve de nos jours particulièrement dégradé. De simples enlèvements, on est passé rapidement à des escarmouches et maintenant on peut, hélas, voir des attaques en règle contre les struc- tures de l’État. De l’attaque de la gendarmerie de Samorogouan en avril 2015 on est vite arrivé à l’attaque de l’état-major général en mars 2018. Face à ces drames, les réactions des autorités politiques n’ont pas été à la hauteur. Fort de son expérience tant mi- litaire que politique, le colonel Ouattara nous propose ici non pas un pamphlet mais une critique constructive de tous les éléments qui ont mené à la situation délétère dans laquelle se trouve malheureusement le pays. Après avoir souligné l’absence de vision stratégique du conflit dans toute la zone sahélienne tant de la part des politiques que des militaires, le colonel Ouattara met en exergue l’inadaptation des structures de l’armée face à ce type de conflit, inadaptation qui n’est que le résultat des mauvaises politiques militaires menées de nombreuses années. 8 L’absence de réaction face aux différentes attaques ter- roristes, notamment le drame de Solhan qui fit 160 morts le 5 juin 2021, illustre bien l’immobilisme dans lequel se trouvent enfermées une hiérarchie et une classe politique bien établies plus enclin à défendre ses prérogatives qu’à soutenir toute évolution positive pour le bien du pays. Cette attitude mènera d’ailleurs au coup d’état du 24 Jan- vier 2022. Pour faire face à la situation actuelle, la nécessité d’un plan logistique stratégique se fait chaque jour un peu plus évidente. Il faut absolument remettre à niveau les infras- tructures de mobilité du pays (rail, routes et aéroports) afin qu’elles puissent réellement faciliter les opérations mili- taires. Au plan opérationnel, il faut mettre en place un vé- ritable Service du Matériel, mobile et efficace, ainsi que des unités de transport dotées de matériel moderne. Ces unités fonctionnelles devront être dotées d’un comman- dement unique, gage de flexibilité et d’adaptation. L’essentiel de la mission de l’armée réside dans la libé- ration totale, c’est-à-dire la reconquête des territoires per- dus, par la force car le dialogue avec les islamistes ne fonctionne pas. Face à l’impréparation militaire totale qui a prévalu depuis plusieurs années, le colonel Ouattara pro- pose ici la création de structures militaires adaptées (no- tamment au niveau de la brigade) avec renouvellement du matériel (Terre et Air). Cette réorganisation devrait se faire parallèlement avec un esprit nouveau dont le moteur serait uniquement l’intérêt du pays et le service de la na- tion. Parmi tous les drames qui ont eu lieu depuis plusieurs années, le cas d’Inata (14 Novembre 2021) est l’illustration parfaite de toutes les défaillances constatées et auxquelles il faudra remédier. Il appartient aux poli- tiques et à la hiérarchie militaire de tout faire pour que la situation sécuritaire s’améliore. Pour cela, il faut une vo- lonté sans faille, une ouverture d’esprit sans équivoque et 9 l’acceptation d’une remise en cause des structures. C’est un point de passage obligé auquel il faudra se soumettre, faute de quoi, le Burkina Faso verra malheureusement son avenir s’assombrir. Lcl (ER) Christian Chaulet ESM St Cyr 72/74 11 SIGLES ET ABRÉVIATIONS BRM : Bataillon de réparation du matériel CAED : Commission des affaires étrangères et de la défense CCR : Convention de concession révisée CCT : Compagnie de commandement et des transmissions CFOP : Chef de file de l’opposition politique CMA : Coordination des mouvements de l’Azawad CODER : Coalition pour la démocratie et la réconciliation CPCO ; Centre de planification et de conduite des opérations DDR : Désarmement, démobilisation, réinsertion DOT : Défense opérationnelle du territoire EMAT : État-major de l’armée de terre ERI : Études et réalisations industrielles FAN : Forces armées nationales FDS : Forces de défense et de sécurité FLN : Front de libération nationale FSA : Fusil semi-automatique GATIA : Groupe d’autodéfense des Touaregs Imghas et alliés GF : Groupement des forces GFN : Groupement des forces du Nord GTIA : Groupement tactique interarmes GPRA : Gouvernement provisoire algérien IED : Engins explosifs improvisés MAA : Mouvement des Arabes de l’Azawad MINUAR : Mission d’assistance des nations unies pour le Rwanda MINURCA : Mission des nations en république centrafricaine 12 MINUSMA : Mission des nations unies de stabilisation au Mali MONUC : Mission des nations unies au Congo MPSR : Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration MPLA : Mouvement populaire de libération de l’Angola MPP : Mouvement du peuple pour le progrès OCRS : Organisation commune des régions sahariennes OTAN : Organisation du traité de l’atlantique nord PC : Poste de commandement TED : Tableau des effectifs et des dotations UNAMIR: United Nations assistance mission for Rwanda UNAVEM: United Nation angolan verification mission UNITA : Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola UNOSOM: United Nations operation in Somalia UPC : Union pour le progrès et le changement VDP : Volontaire pour la défense de la patrie 13 AVANT-PROPOS Le président Blaise Compaoré s’était nommé ministre de la défense lors du dernier remaniement ministériel de son gouvernement en 2014. Membre de la commission parlementaire des affaires étrangères et de la défense (CAED), je l’avais interpellé lors d’une séance de ques- tions au gouvernement. La question était de savoir com- ment il comptait défendre les frontières nord, est et ouest du Burkina Faso avec seulement un millier d’hommes qui y étaient déployés. Il s’agissait de protéger une frontière longue de quatre mille kilomètres, avec l’effectif d’un demi régiment. Cela équivalait arithmétiquement à confier la défense de quatre kilomètres à un soldat. En guise de réponse, le secrétaire général du ministère qui le représentait face aux parlementaires me fit com- prendre qu’il s’agissait d’un dispositif dissuasif. Pourtant, nul n’ignore que la dissuasion n’est effective que si elle est crédible. Dans le cas d’espèce, il aurait suffi que tout en- nemi du Burkina dispose d’un bon système de renseigne- ment pour s’apercevoir de la supercherie. Rien n’y fit cependant. Ce dispositif militaire fut maintenu jusqu’à la chute du régime. Ce ne seront ni le régime de la transition ni celui du président Kaboré qui remettront en cause un tel dispositif supposé dissuasif. Lorsque nous fûmes attaqués par surprise, sans décla- ration de guerre donc, personne ne prit la menace au sé- rieux. Étymologiquement parlant, le terrorisme est 14 l’emploi de la violence pour atteindre un but politique. Le but politique peut consister en la simple revendication de droits civiques, en l’occupation ou la partition du pays, en passant par le renversement de régime. Du déclenchement du phénomène en 2015 à nos jours, aucune réflexion sé- rieuse n’a été faite dans cette direction. L’on se satisfait dans toutes les sphères de la société du concept de terro- risme qui nous frappe et nous endeuille. Plus des deux tiers du territoire national sont occupés par l’ennemi sans qu’on ne se penche sur ses motivations profondes. Il ne sert à rien de se voiler la face en faisant la politique de l’autruche. Les mouvements de libération ont toujours commencé leur lutte par du terrorisme, la stratégie du faible au fort, la stratégie de l’asymétrie en quelque sorte. L’ennemi commence d’abord par tester votre dissua- sion militaire par un harcèlement constant de vos positions ou d’objectifs non militaires avec des effectifs très réduits. Sa stratégie vise l’usure et la rupture du moral des troupes si aucune réponse robuste n’est proposée dans l’immédiat pour l’empêcher de s’installer. Sur le terrain, sa structure de base est la cellule. Elle est limitée dans son effectif, et est plus que jamais tenue à des règles très strictes de sécu- rité et de secret. Les communications directes entre cel- lules sont par exemple interdites, une condition essentielle pour mener à bien les activités clandestines de propagande et d’infiltration face aux forces de défense et de sécurité burkinabè. Au tout début du conflit, le berger est le dernier maillon de la cellule de base composée de trois personnes. Comme tout ennemi, le nôtre a la liberté de choix entre différentes formes de stratégie en vue de nous imposer ses conditions. Il peut recourir à l’un ou l’autre des modèles stratégiques exposés au chapitre 1er, ou à la combinaison de plusieurs en fonction de l’objectif poursuivi et des moyens dont il dispose. A la lueur de ce qui se passe de- puis uploads/Litterature/ lona-charles-ouattara-le-drame-d-inata-au-burkina-faso.pdf

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