Paléontologie humaine M. Michel Brunet, professeur Les hominidés anciens… une n

Paléontologie humaine M. Michel Brunet, professeur Les hominidés anciens… une nouvelle histoire à la lumière des découvertes récentes Origine, évolution, phylogénie, paléoenvironnements, paléobiogéographie, chronologie Leçon inaugurale, le 27 mars 2008 : Origine et histoire des hominidés… Nouveaux paradigmes Depuis 1994, les plus anciens hominidés connus sont passés de 3,6 Ma à 7 Ma aujourd’hui, avec trois nouvelles espèces du Miocène supérieur : Ardipithecus kadabba l’Ethiopien et Orrorin tugenensis le Kenyan, tandis que le plus ancien (7 Ma) est Sahelanthropus tchadensis dit Toumaï, le tchadien. Vers 4 Ma, ces hominidés anciens du Miocène supérieur ont donné naissance aux Australopithèques ; eux-mêmes sûrement à l’origine entre 2 et 3 Ma des premiers représentants, H. habilis et H. rudolfensis, du genre Homo qui va partir (H. erectus) à la conquête du reste de l’Ancien Monde où les plus anciens sont actuellement connus à un peu moins de 2 Ma en Géorgie au Caucase. Vers 800 000 ans on connaît Homo heidelbergensis qui donnera naissance en Europe aux Néanderthaliens, Homo neanderthalensis, qui après une courte cohabitation vont être remplacés vers 28-30 000 ans par les hommes modernes. Herto, le plus ancien (155-160 000 ans) représentant actuellement décrit de notre espèce, H. sapiens idaltu, est également africain (Ethiopie). C’est lui ou l’un de ses frères qui partira à la conquête du reste du Monde avec le succès que nous connaissons. 376 MICHEL BRUNET Cours du 2 avril : L’Histoire de notre Histoire Les Sciences de l’Antiquité confondaient l’Origine de l’Univers, l’Origine de la Terre et l’Origine de l’Homme. Les Sciences modernes ont montré que ces trois évènements étaient en réalité séparés par des milliards d’années. La notion d’Homme fossile n’a été reconnue qu’en 1856, au moment de la mise au jour des premiers restes de l’Homme de Neandertal. Comme l’avait prédit Charles Darwin dès 1871, les plus anciens préhumains fossiles, à ce jour datés de 7 Ma, sont donc bien connus en Afrique et témoignent d’une origine africaine et ancienne (au moins 8 Ma) de l’humanité. Pourtant le courant néocréationniste, habilement grimé en « pseudoscience » sous le nom de dessein intelligent, fait preuve d’une vigueur persistante, non seulement par sa solide implantation sur le Continent Nord Américain, mais aussi dans l’Ancien monde, ainsi qu’en témoignent l’édition et la diffusion récentes d’un album photos couleur de luxe intitulé « Livre de la création ». Cours du 9 avril : Biodiversité des Primates actuels Les Humains sont des Mammifères qui appartiennent à l’ordre des Primates (les Premiers), créé par Linné en 1758. Cet Ordre est actuellement représenté par plus de 200 espèces principalement arboricoles et vivant essentiellement dans les forêts tropicales et subtropicales. Les Primates se divisent en deux grands groupes les Strepsirhini (Lémuriformes s.l.) caractérisés par la présence d’un rhinarium et d’une lèvre supérieure fendue, et les Haplorhini : Tarsiiformes & Simiiformes (= les singes) sans rhinarium et à lèvre supérieure soudée. Les Simiiformes regroupent les singes du Nouveau monde (Platyrrhini) et ceux de l’Ancien monde (Catarrhini). Ces derniers se divisent à leur tour en deux groupes les singes : Cercopithécoïdes (Cercopithèques, Babouins,..), et les grands singes : Hominoïdes (Gibbons, Siamangs, Orangs- outans, Gorilles, Chimpanzés et Humains). Dans le cours, les hominidés (= ensemble des humains actuels et fossiles, et des préhumains) sont considérés comme le groupe frère des Panidés (= les chimpanzés et les bonobos) avec lesquels ils partagent un ancêtre commun. Cours des 16 avril et 7 mai : Primates actuels et fossiles, anatomie, rapports de parenté, biochronologie, biogéographie D’un point de vue paléontologique, les Hominidés se distinguent des grands singes par des caractères anatomiques particuliers de leur denture (canines petites et assymétriques, canine supérieure sans crête aiguisoir, complexe C/P3 non aiguisoir mais de type broyeur, émail des dents plus épais que chez les grands singes,…) et de la base de leur crâne (trou occipital en position antérieure, face nucale très inclinée PALÉONTOLOGIE HUMAINE 377 vers l’arrière) en liaison avec un squelette appendiculaire (notamment au membre postérieur le pelvis, le fémur et le tibia) adapté à une locomotion bipède. Dès 1967 Sarich et Wilson de l’Université de Californie à Berkeley ont montré que notre proximité génétique avec les chimpanzés est si grande (moins de 2 % de différence) que nous partageons un ancêtre commun. Toumaï daté de 7 Ma est sûrement proche de cette dernière dichotomie qui peut, dans l’état actuel de nos connaissances être voisine de 8 Ma. Cette population ancestrale (DAC : dernier ancêtre commun = LCA : last common ancestor) est sûrement Africaine. Elle constitue le groupe frère des Gorilles dont elle s’est séparée vers 9-10 Ma. L’origine de cet ensemble (Gorilles ((Chimpanzés) (Humains))) est généralement considérée comme africaine, mais des découvertes récentes en Eurasie soulèvent la question de la possibilité de leur origine asiatique. Seule la découverte de nouveaux fossiles permettra de choisir entre ces deux hypothèses. Cours du 14 mai : Les Hominidés du Miocène supérieur Depuis 1994, les plus anciens hominidés connus sont passés de 3,6 Ma à 7 Ma. Dès le début du troisième millénaire trois nouvelles espèces ont été décrites dans le Miocène supérieur : Ardipithecus kadabba l’Ethiopien, Orrorin tugenensis le Kenyan, tandis que le plus ancien (7 Ma) est Sahelanthropus tchadensis dit Toumaï, un hominidé tchadien. Depuis 1994 j’ai initié et dirigé la Mission Paléoanthropologique Franco- Tchadienne (M.P .F.T. = une soixantaine de chercheurs de 10 nationalités) qui conduit un programme de recherches transdisciplinaires autour de l’origine et de l’évolution des hominidés anciens et de leurs environnements successifs. La M.P .F.T. prospecte et fouille dans le désert du Djourab au Nord Tchad, 2 500 km à l’Ouest du grand Rift Africain, où successivement elle a mis au jour un nouvel australopithèque, Australopithecus bahrelghazali, surnommé Abel (3,58 Ma), le premier trouvé à l’ouest de la vallée du grand Rift Africain (Brunet et al., 1995) et plus tard un nouvel hominidé Sahelanthropus tchadensis (Brunet et al., 2002) du Miocène supérieur (7 Ma). Ce plus ancien hominidé connu est une découverte majeure qui montre définitivement que les hypothèses d’une origine australe ou orientale du clade humain doivent être reconsidérées. Sahelanthropus tchadensis possède une combinaison unique de caractères primitifs et dérivés qui montre clairement qu’il ne peut être rapproché ni des gorilles, ni des chimpanzés, mais indique au contraire son appartenance au rameau humain et sa proximité temporelle avec le dernier ancêtre commun aux chimpanzés et aux humains. Dans le Miocène supérieur du Tchad, les données sédimentologiques et paléobiologiques témoignent d’une mosaïque de paysages. Actuellement dans le Kalahari central, au Bostwana, le delta de l’Okavango m’apparaît être un bon analogue avec un paysage mosaïque similaire de rivières, de lacs, de marécages, de 378 MICHEL BRUNET zones boisées, d’îlots forestiers, de savane arborée, de prairies herbeuses et de zones désertiques. Dans cette mosaïque les préférences écologiques de Toumaï sont encore en cours d’étude. Notamment l’étude des isotopes stables du carbone (13 C) de l’émail dentaire devrait permettre de mieux préciser son régime alimentaire. Mais très probablement, comme les autres hominidés du Miocène supérieur Toumaï devait fréquenter des espaces boisés. De plus, compte tenu de ce que l’on sait de leur crâne ou de leurs membres, ces trois hominidés du Miocène supérieur sont sûrement bipèdes. Aussi l’hypothèse qui invoquait le rôle déterminant de la savane herbeuse dans l’origine du rameau humain et de la bipédie fait dorénavant partie de l’histoire de notre histoire. Maintenant, il est de plus en plus clair que ces premiers hominidés fréquentaient des environnements boisés et n’étaient pas restreints à l’Afrique Australe et Orientale mais vivaient au contraire dans une zone géographique plus vaste incluant une partie de l’Afrique Sahélo-Saharienne : au moins l’Afrique centrale (Tchad) et probablement la Libye mais aussi l’Egypte et le Soudan. Cours des 21 et 28 mai : Les Australopithèques (1) Dans l’état actuel de nos connaissances on peut penser que vers 4 Ma ces hominidés anciens du Miocène supérieur ont probablement donné naissance aux Australopithèques : A. anamensis pour le moment le plus ancien mais aussi le plus primitif, puis A. afarensis (Lucy), A. bahrelghazali (Abel), A. garhi, etc. ; eux- mêmes sûrement à l’origine entre 2 et 3 Ma des premiers représentants, H. habilis et H. rudolfensis, du genre Homo. Parmi leurs principales caractéristiques anatomiques il faut citer : des incisives et des canines petites / au poids du corps ; une première prémolaire inf. (P3) sans facette aiguisoir pour une canine sup. sans crête aiguisoir ; des molaires plutôt grandes à émail épais et cuspides bulbeuses ; une face grande et un cerveau relativement petit ; une face moins prognathe que chez les grands singes ; Foramen magnum en position antérieure ; locomotion bipède. Toutes les espèces décrites sont africaines. L’espèce type du genre Australopithecus africanus (3,5-2,3 Ma) a été décrite en Afrique du Sud (enfant de Taung) par Raymond Dart en 1925. En Afrique orientale la plus ancienne est Australopithecus anamensis (4,2-3,9 Ma) ; la mieux connue Australopithecus afarensis (3,9-2,7 Ma) dont Lucy (3,2 Ma) est la plus célèbre représentante, une forme plus récente (Bouri, Middle Awash, Ethiopie, 2,5 Ma), Australopithecus ghari, est associée à des artefacts uploads/Litterature/ paleontologie-humaine-m-michel-brunet-professeur-les-hominides-anciens-une-nouvelle-histoire-a-la-lumiere-des-decouvertes-recentes.pdf

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