Ronan Pensec toucha la gloire du bout des doigts en 1990. Maillot jaune du Tour

Ronan Pensec toucha la gloire du bout des doigts en 1990. Maillot jaune du Tour deux jours à suivre, il fit chavirer de bonheur la Bretagne tout entière qui se reconnaissait dans ce Douarneniste grand teint, épais comme une lame de couteau et qui n'avait pas peur de bousculer l'ordre préétabli. La France pédalante, en mal de vedette, découvrait Pinpin et ce petit-fils de penn-sardin avait tout pour la séduire : un franc-parler décoiffant, un look de rocker, une pêche d'enfer. Récit d'une aventure qui fait date dans l'histoire du cyclisme breton. Bon anniversaire Pinpin, porteur du maillot « Z », avait programmé sa prise de pou- voir sur papier millimétré. Ce maillot jaune auquel il tenait com- me à la prunelle de ses yeux, il le prendrait le 10 juillet à Saint-Ger- vais et pas ailleurs. Une façon comme une autre, pour lui, de fêter, de façon exceptionnel- le, son vingt-septième anniversai- re. Aussi ne fut-on pas autrement sur- pris de le voir attaquer au jour « J », pied au plancher, la montée du Bettex. Le Douarneniste, lucide, fut exact au rendez-vous : appliqué comme un élève passant son brevet élé- mentaire, il lâchait à la pédale le Canadien Steve Bauer qu'il dépouillait, au passage, de son beau maillot jaune au moment même où Thierry Claveyrolat s'en allait cueillir un succès de prestige. Du travail bien fait qui augurait de lendemains qui chantent. De fait, vingt-quatre heures plus tard, il était à nouveau dans les points. Alors que la grande étape alpestre était pour lui celle de tous les dangers, il gravit sans encom- bre la Madeleine, le Glandon et, surtout, l'Alpe d'Huez où il fit jeu égal avec les plus grands. Ronan-le-Douarneniste était tou- jours Maillot jaune et un observa- teur aussi avisé que l'était Luis Oca- na le voyait déjà vainqueur à Paris. Il est vrai que le Breton avait épaté son monde dans l'Alpe où il avait fait merveille dans le sillage de Robert Millar, poisson-pilote admi- rable. Le petit Ecossais, souple et puissant, rendait au centuple à Ronan Pensec ce que celui-ci lui avait donné auparavant. Les rôles étaient inversés, tout simplement. L'accroc de Villard-de-Lans Changement de décor le lende- main : l'épopée tournait au cauche- mar. Le Douarneniste, victime d'une panne de jambes, laissait ses espérances dans la célèbre montée de Villard-de-Lans gravie contre la montre. Un jour sans qu'il ne s'explique toujours pas : « Le matin, rappelle-t-il, j'avais eu des sensations extraordinaires à l'entraînement. Je me voyais réali- ser une performance de haut niveau... » Las, l'après-midi, le protégé de Roger Legeay signa une contre-per- formance qui fait date dans la car- rière d'un coureur : 49e seulement de la spéciale chronométrée du Vercors, il rentrait dans le rang pour se mettre sans arrière-pensée au service de son chef de file, Greg LeMond. Le brave Ronan, dépité à chaud, releva toutefois très vite la tête. Au point de jouer un rôle-clef dans la victoire finale de l'Américain. L'histoire est la suivante : LeMond ne savait comment piéger Claudio Chiappucci, qui faisait désormais figure de vainqueur du Tour. Pensec, qui n'était plus que l'ombre de lui-même, se dévoua, alors, pour jouer les bons Samari- tains en se lançant à l'abordage dans les monts du Pilat. Un coup de poker qui s'avéra être un coup de génie : l'Italien, aux abois, pani- qua et s'épuisa à courir lui-même après le Breton dans une chasse éperdue. L'occasion rêvée pour LeMond qui, bientôt, cueillit Chiappucci comme un fruit mûr. C'est ce jour-là, à Saint-Etienne, que l'Américain gagna le Tour même s'il n’assit définitivement son succès qu'à Vas- sivière où se déroulait le dernier chrono. Son chef-d’œuvre Ce Tour 90 reste forcément le point d'orgue de la carrière de Ronan Pensec qui tira partie d'une échappée au long cours qui s'était développée lors de la première éta- pe au Futuroscope. Ce jour-là, il coupa la ligne d'arrivée aux côtés de Maassen, de Bauer et de Chiap- pucci fort d'un avantage de 10'35'' sur un peloton endormi. Tout bénéfice pour les quatre hom- mes qui portèrent le maillot jaune à tour de rôle. Avant qu’ils ne s’ef- facent devant Greg LeMond. Pierre Le Bars Le palmarès de Ronan Pensec l Le 10 juillet à Saint-Servais, Ronan Pensec s’empare du maillot jaune. La plus belle des façons de fêter son 27e anniversaire : s’offrir soi-même le bouquet. 84 : Paris-Vailly, Paris-Connéré, champion de France des 100 km CLM. 85 : Etoile des Espoirs, une éta- pe au Circuit de la Sarthe, cham- pion de Bretagne de cyclo-cross. 86 : champion de Bretagne de cyclo-cross, deuxième du Daupi- né et du Tour du Limousin, sixiè- me du Tour de France. 87 : Etoile de Bessèges, troisiè- me du Dauphiné et du Tour de Romandie. 88 : GP de Rennes, Route du Sud, deuxième de Paris-Nice, septième du Tour de France. 89 : quatrième de Milan-san- Remo, sixième de la Flèche Wal- lonne. 90 : Ronde d'Aix, maillot jaune dans le Tour de France, une éta- pe au Tour Méditerranéen, Cir- cuit de l'Aulne. 92 : GP de Plouay, deuxième du Tour Méditerranéen. 94 : deuxième du Dauhiné Libé- ré (vainqueur d'une étape), lau- réat de la Coupe de France, qua- trième de Paris-Nice. l Ronan Pensec était un spécialiste du Tour : sixième en 1986, septième en 1988, il porta non seulement le maillot jaune mais aussi le maillot à pois. 1990. L’âge d’or de Ronan Pensec LA LÉGENDE DU SPORT BRETON TOUTES • Dimanche 9 novembre 2003 • Le Télégramme 23 uploads/Litterature/ pensec.pdf

  • 14
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager