Petites leçons de culture générale PAR Éric Cobast Agrégé de l'Université Profe

Petites leçons de culture générale PAR Éric Cobast Agrégé de l'Université Professeur de littérature dans les classes de Lettres supérieures du lycée Madeleine Danièlou (Rueil) et de Culture générale à l'Ipesup-Prépasup 4e édition Presses Universitaires de France COLLECTION MAJOR DIRIGÉE PAR PASCAL GAUCHON DU MÊME AUTEUR Leçons particulières de culture générale, coll. « Major », PUF. Premières leçons sur Candide, coll. « Major Bac », PUF. Mémento du bachelier, coll. « Major Bac », PUF. Les dieux antiques de Stéphane Mallarmé, coll. « Major », PUF. ISBN 2130466184 Dépôt légal : 1ère édition : 1994, juin 4e édition : 1998, Avril © Presses Universitaires de Franco, 1994 108, boulevard Saint-Germain, 75006 Paris SOMMAIRE Petites leçons de culture générale Introduction Autorité Banlieue Bonheur Châtiment Contrat Culture Décadence et Déclin Démocratie Despotisme Droit Droits de l'homme Écologie Éducation Engagement État Éthique Exclusion Famille Guerre et paix Héros Histoire Humanisme Individu Intellectuel Langue Libéralisme Liberté Maîtres et valets Matérialisme Modernité Mythe Nation Peuple Politique Progrès Propriété Racisme République Révolution Sacré Sauvage Socialisme Société civile Spectacle Travail Vieux Lexique des termes utiles (qui ne font pas l'objet d’une définition particulière au cours de l’ouvrage) Bibliographie Introduction Présentées selon l’ordre alphabétique des thèmes qu’elles abordent, ces « petites leçons particulières » se veulent à la fois autant d’initiations aux questions que soulève notre modernité et des instruments de révision commodes pour ces oraux de « Culture générale » que de nombreux concours inscrivent à leurs programmes. Elles s’adressent donc à l’» homme pressé » et curieux comme à l’étudiant qui cherche à gagner du temps. L’un et l’autre pourront en effet trouver ici des éléments destinés à stimuler une réflexion plutôt qu’à la conduire. C’est dans cette perspective que chacune de ces « petites leçons » est articulée selon quatre « moments ». On lira sous la rubrique Définir une approche étymologique et historique du concept étudié. Il s’agit simplement de montrer qu’une analyse précise de la substance sémantique d’un mot ouvre à l’exercice de problématisation. Ensuite la section Composer proposera un rapide développement d’une question qui se donne sous la forme d’une esquisse de dissertation. La définition d’un terme conduit naturellement au questionnement. Approfondir suggérera une lecture détaillée d’une œuvre philosophique déterminée, présentée exclusivement dans l’optique du thème étudié. Pour composer cette « petite bibliothèque » de base nous ne nous sommes interdit aucune direction, suggérant autant de revenir à l’étude des « grands textes » qu’à celle d’essais contemporains qui nous ont paru particulièrement éclairants. Qu’on ne soit donc pas surpris de découvrir Aristote côtoyer par exemple Luc Ferry ou Alain Finkielkraut. Enfin, Actualiser recherche dans notre quotidien des motifs d’« étonnement » philosophique qui illustrent, si besoin était, l’idée selon laquelle ces réflexions auxquelles nous ont convié nos études sont bien vivantes. Définir, Composer, Approfondir, Actualiser, la déclinaison veut ouvrir le plus largement possible la curiosité du lecteur, condition nécessaire à une approche « scolaire » ou simplement « libérale » de cette discipline que l’on ne s’offusque désormais plus de désigner sous l’expression de « Culture générale ». Autorité Définir Le pouvoir de s'imposer Quoi de plus difficile à cerner que les raisons de l’ascendant qu’un homme sait exercer sur d’autres hommes ? Dans La crise de la culture H. Arendt manifeste d’ailleurs son embarras : « S’il faut vraiment définir l’autorité, alors ce doit être en l’opposant à la fois à la contrainte par la force et à la persuasion par arguments. » Il y a en effet quelque chose qui résiste à l’analyse lorsqu’il s’agit de définir cette forme de pouvoir qui requiert l’obéissance en même temps qu’elle exclut violence et persuasion. Ce n’est pas faire preuve d’autorité que de s’imposer par la menace ou bien de conduire son interlocuteur à la Raison. L’autorité demande à qui s’y soumet de le faire volontairement et indépendamment de toute forme de calcul. De fait, l’auctoritas ne peut émaner que de celui que l’on reconnaît comme auctor, celui qui soutient et permet de se développer (augere : augmenter, faire croître, en latin). L’autorité est bien une force que celui qui l’accepte reconnaît comme indispensable à son épanouissement : ne dit-on pas « je m’en remets à votre autorité » pour signifier « je réclame de vous protection » ? Composer Le pouvoir politique peut-il se défaire d'une Autorité de référence ? ► Dès l’Antiquité... SPQR, lit-on sur les aigles romaines : Senatu Populoque Romano, « Au nom du Peuple et du Sénat de Rome ». La formule ne laisse pas d’être frappée, pour le regard du moderne, du sceau de l’équivocité : comment peut-on parler d’une même voix au nom de l’ensemble des Romains et d’une minorité de privilégiés ? De fait, Rome qui n’a quasiment jamais cessé de se revendiquer républicaine brouille-t-elle nos repères : Qui gouverne ? Qui détient le pouvoir ? Le Peuple ? Le Sénat ? L’Empereur ? Dans De legibus, Cicéron s’efforce de préciser la répartition des rôles : Cum potestas in populo auctoritas in senatu sit. « Tandis que le pouvoir réside dans le peuple, l’autorité appartient au Sénat. » H. Arendt dans La crise de la culture relève la citation pour déterminer, non pas la spécificité de la vie publique à Rome, mais la nature de l’autorité, définie ainsi par opposition au pouvoir. ► ... le pouvoir cherche à s’adosser à l’Autorité... Ce que Cicéron constate, c’est que l’autorité — au contraire du pouvoir — a des racines dans le passé. Qui sont en effet les Sénateurs ? Les latins les nomment « Pères conscrits » (Patres conscripti), ce sont les « Pères » de la Cité, ceux qui descendent des fondateurs de Rome et qui apparaissent comme l’instance même de la sacralité placée ainsi au cœur de l’activité politique. Car les sénateurs débattent et donnent des avis qui sont davantage que des conseils moins que des ordres. Parce qu’ils participent du caractère sacré de la Fondation, les sénateurs sont détenteurs de cette autorité charismatique dont le peuple a besoin et à laquelle le pouvoir politique s’adosse. ► ... pour se doter d’une dimension sacrée. De fait, le Sage est l’homme d’autorité dont l’homme de pouvoir se réclame et que celui-ci « produit » lorsqu’il fait défaut, tant la politique semble ne pouvoir se passer de l’idée d’Autorité. En effet, parce que notre Sénat manque de hauteur (les sénateurs sont désignés par un suffrage, même si son caractère indirect paraît lui retirer de sa légitimité démocratique) nos politiques paraissent avoir un besoin de créer une nouvelle catégorie administrative, totalement indépendante du pouvoir : l’Autorité administrative indépendante. Ce sont la Commission de opérations de Bourse (1968) ou le Conseil supérieur de l’audiovisuel (1989) dont l’ancêtre portait un nom plus évocateur (Haute Autorité de la Commission audiovisuelle). Quel intérêt le pouvoir politique trouve-t-il à se mettre lui-même à l’écart ? La réponse est peut-être à trouver dans ce contact au sacré que lui apporte toute instance de l’Autorité. Comme si la politique n’en finissait pas de nous dire sa nature irrationnelle. Approfondir Le métier et la vocation d'homme politique MAX WEBER (1919) Max Weber commence par rappeler quel rôle joue l’État moderne : « ... il faut concevoir l’État contemporain comme une communauté humaine qui, dans les limites d’un territoire déterminé revendique avec succès pour son propre compte le monopole de la violence physique légitime. » Ce monopole fait de l’État l’instrument indispensable de ceux qui visent la détention du pouvoir politique. En ce sens, l’analyse de Weber prolonge celle des marxistes, voire elle la radicalise puisque le politologue allemand ne craint pas de faire de la domination la seule raison d’être de l’État : « L’État ne peut exister qu’à la condition que les hommes dominés se soumettent à l’autorité revendiquée chaque fois par les dominateurs. » Pas de pouvoir politique sans le contrôle de l’appareil d’État, mais pas d’État sans la soumission des uns à l’autorité des autres. En un mot, Weber prend soin de distinguer le pouvoir politique de l’autorité, condition nécessaire à l’existence de l’État, c’est-à-dire à l’exercice du pouvoir politique, précisément. Pour penser le Pouvoir, il faut d’abord penser l’autorité. Il existe, selon Weber, trois moyens grâce auxquels les hommes peuvent imposer leur domination, la rendre légitime. Tout d’abord la tradition. L’habitude, les coutumes, cet « éternel hier », « pouvoir traditionnel » qu’exercent les féodaux. En second lieu, Weber insiste sur l’autorité que fonde la grâce personnelle d’un individu, le charisme : « Elle se caractérise par le dévouement tout personnel des sujets à la cause d’un homme et par leur confiance en sa seule personne en tant qu’elle se singularise par des qualités prodigieuses... » L’autorité charismatique donne à la domination politique de celui qui en est investi une dimension irrationnelle. L’autorité garante du pouvoir adosse la politique au sacré. Enfin la légalité apparaît comme le troisième moyen par lequel les gouvernants s’imposent aux gouvernés. Elle repose sur la croyance en la validité d’un « statut légal » du pouvoir (c’est sur cette croyance que s’est développé l’État moderne). Actualiser uploads/Litterature/ petites-lecons-de-culture-generale-by-cobast-eric.pdf

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