1 5. Les modalités d’énoncé. 5.1. Modalités. Notions fondamentales. Le carré de
1 5. Les modalités d’énoncé. 5.1. Modalités. Notions fondamentales. Le carré des oppositions (Aristote1). Les notions fondamentales relatives à la proposition et aux modalités sont formulées par Aristote en particulier dans Peri Herméneias (lat. De Interpretatione). Nous citerons ici la traduction en français par Jules Barthélémy Saint-Hilaire (1866, Paris : Ladrange), sous l’intitulé Herméneia. Traité de la proposition2. Dans les Premiers Analytiques avaient été explorées les relations entre modalités et syllogismes. Mais, sauf qualification contraire, nous nous limiterons dans cette brève présentation aux vues exprimées dans l’Herméneia. La modalité admise dans les Premiers Analytiques devait également figurer dans l'Herméneia. Si la démonstration se fonde sur la théorie du syllogisme, la théorie même du syllogisme se fonde sur celle de la proposition. Qu'est-ce donc que la proposition? Quelles en sont les espèces? quelles formes principales peut-elle revêtir? voilà ce que l'Herméneia recherche et devait rechercher. Les propositions sont par elles-mêmes absolues ou modales, comme elles le sont dans le syllogisme. Il fallait donc étudier les modales, tout comme les propositions absolues. Seulement ici, Aristote a très justement encouru la censure de son critique; et quand il s'est demandé comment se suivent mutuellement les idées de contingent, de nécessaire et d'impossible, c'est de la métaphysique qu'il a fait bien plutôt que de la logique. C'est un écueil dont il aurait dû se garantir; c'est une des très rares erreurs qu'il ait commises. (Préface par Jules Barthélémy de Saint-Hilaire à la Logique d’Aristote. Organon, tome I, les « Catégories », suivies de l’« Herméneia », p. 21) 5.1.1. Classement des « énonciations » : par énonciation, Aristote comprenait tout jugement prédicatif (c’est-à- dire : toute proposition), lieu du vrai et du faux. Cette réduction se laisse comprendre, dans la mesure où le philosophe n’étudiait de toute manière que les énonciations déclaratives, décrivant un état de chose réel, par opposition aux énoncés interrogatifs ou impératifs, qui ne sont par hypothèse ni vrais ni faux. Il distingue deux sortes d’« énonciations » : - l’énonciation simple (une énonciation « simplement une », « absolue », qui affirme ou nie une seule chose d’une seule (autre) chose : L’homme est un animal, plus connue sous le nom d’énonciation ou de proposition catégorique) - l’énonciation multiple (une énonciation par conjonction, qui comporte une condition : Si l’homme est, il est animal ; ou par disjonction, qui comporte une alternative : ou bien l’homme est juste, ou bien il est injuste – catégorie plus connue sous le nom d’énonciation hypothétique). De fait, pour Aristote (Herméneia, chap. VIII et XI), sont des « propositions multiples » aussi : L’homme est blanc et musicien = L’homme est blanc il est musicien L’homme et le cheval sont blancs = L’homme est blanc et le cheval est blanc André est un bon tanneur = André est tanneur et il est bon (comme tanneur) La reformulation de la distinction aristotélicienne <énonciation simple/ énonciation multiple> en termes d’énonciation/proposition catégorique vs énonciation/proposition hypothétique est le fait de la logique médiévale : on la retrouve chez Thomas d’Aquin, dans De propositionibus modalibus, mais elle était déjà présente chez Boèce, à qui l’on doit aussi le premier classement des propositions catégoriques en modalisées et non modalisées (modales et « de inesse »). Dans l’Herméneia, les propositions modales (selon le nécessaire ou selon le contingent notamment) sont opposées aux propositions « absolues », et la modalité est posée comme modification d’une proposition absolue ; la notion de proposition « simplement une » et de « proposition absolue » semblant se recouvrer. 5.1.2. Structure des propositions catégoriques : (Quantificateur) Sujet-(Copule)-Prédicat3 (Quelque homme est juste (=Certains hommes sont justes)). ● Le sujet (S) est ce à quoi l'on attribue le prédicat. ● Le prédicat (P) est ce qui est attribué au sujet. 1 Philosophe grec du IVe siècle avant Jésus Christ (av. J.-C.). La mise en forme traditionnelle des écrits d’Aristote relatifs à la logique, édités sous le nom d’Organon (gr. « outil, instrument ») vers 60 av. J.-C., par Andronicus de Rhodes, ayant été le fait de Boèce (cinq siècles plus tard, soit au Ve siècle après Jésus Christ (apr. J.- C.)), le carré logique (ou : carré des oppositions) est encore connu, dans la littérature, sous le nom de « carré de Boèce ». Sont particulièrement concernés, pour ce qui est de la définition des différentes espèces de propositions (appelées, dans le texte d’Aristote : énonciations), et des oppositions entre celles-ci, deux traités : De l’interprétation, d’une part, et les Premiers analytiques, de l’autre. 2 En ligne : http://www.documentacatholicaomnia.eu/03d/-384_-322,_Aristoteles,_La_proposition_Hermeneia,_FR.pdf (consulté le10 février 2019). 3 Tous les énoncés du langage ordinaire ne présentent pas spontanément la structure< Sujet-(Copule-) Prédicat>. Il faudrait donc les transformer pour les rendre conformes à cette structure logique. Parmi les procédés utilisés, le plus simple est celui de la transformation du <verbe> en <copule + participe présent> : Quelque Grec vit (Certains Grecs vivent) devient ainsi Quelque Grec est vivant (Certains Grecs sont vivants). 2 ● Le quantificateur exprime la quantité de la proposition : s'agit-il de tous les hommes (proposition universelle) ou seulement de certains d'entre eux (proposition particulière)? ● La copule exprime la qualité de la proposition (affirmative ou négative : est ou n'est pas). 5.1.4. Théorie de l'inférence immédiate : analyse des relations nécessaires entre propositions. ● raisonner = inférer. ● inférer = tirer d'une ou de plusieurs propositions données et connues comme vraies ou comme fausses (qu'on appelle prémisses) une ou plusieurs propositions nouvelles (qu'on appelle conclusions) jugées vraies ou fausses en fonction de la relation logique que l'on a établie entre elles et les prémisses. ● inférences immédiates = inférences qui partent d'une seule proposition (à valeur de vérité arrêtée : ou bien elle est vraie, ou bien elle est fausse) ; inférences dites médiates (cas particulier : syllogisme) = inférences qui partent de deux propositions au moins (deux exactement, dans le cas du syllogisme). ● Structure de l’inférence immédiate. L’inférence immédiate est un raisonnement composé de deux propositions : une prémisse et une conclusion, unies par un lien de conséquence logique. ● Une série d'inférences immédiates sont rassemblées sous la forme traditionnelle du carré logique. Ce carré donne un nom aux relations inférentielles qui existent entre une proposition universelle affirmative (A), une proposition universelle négative (E), une particulière affirmative (I) et une particulière négative (O – les abréviations venant des premières voyelles des termes latins affirmo et nego). Carré logique (ou : carré de Boèce) TOUT HOMME EST JUSTE [universelle affirmative] TOUT HOMME N’EST PAS JUSTE [universelle négative] QUELQUE HOMME EST JUSTE [particulière affirmative] =NON (TOUT HOMME EST NON JUSTE) (NON-TOUT) HOMME EST (NON- JUSTE) QUELQUE HOMME N’EST PAS JUSTE [particulière négative] =NON (TOUT HOMME EST JUSTE) (NON-TOUT) HOMME EST (JUSTE) s u b c o n t r a i r e s s u b a l t e r n e s c o n t r a i r e s s u b a l t e r n e s contradictoires 3 5.1.5. Théorie de l'inférence immédiate : définition des relations inférentielles (chap. VII de L’Herméneia, « Des propositions universelles, particulières, indéterminées et singulières ») ● La relation de contradiction oppose deux propositions de quantité et de qualité différentes. Les contradictoires ne peuvent être ni vraies en même temps, ni fausses en même temps (prenant toujours des valeurs de vérité différentes). Tout homme est juste [universelle affirmative] – contradictoires – Quelque homme n'est pas juste [particulière négative] Aucun homme n'est juste [universelle négative] – contradictoires – Quelque homme est juste [particulière affirmative] ● La relation de contrariété oppose deux propositions de même quantité (universelle) mais de qualité différente. Les propositions contraires ne peuvent être vraies en même temps, mais peuvent être fausses en même temps. Tout homme est juste [universelle affirmative] – contraires – Aucun homme n’est juste [universelle négative] ● La relation de subcontrariété oppose également deux propositions de même quantité (particulière) mais de qualité différente. Les propositions subcontraires ne peuvent être fausses en même temps, mais peuvent être vraies en même temps. Quelque homme est juste [particulière affirmative – subcontraires – Quelque homme n'est pas juste [particulière négative] ● La relation de subalternation oppose (de prime abord) deux propositions de même qualité (ou bien affirmative, ou bien négative) mais de quantité différente. La vérité de la subalterne inférieure (particulière) suit de la vérité de la supérieure (universelle). Tout homme est juste [universelle affirmative] – subalternes (à supérieure affirmative) – Quelque homme est juste [particulière affirmative] Aucun homme n’est juste [universelle négative] – subalternes (à supérieure négative) – Quelque homme n'est pas juste [particulière négative] Pour rendre justice aux distinctions logiques pertinentes (QUANTITE : quantification universelle/ quantification existentielle ; QUALITE : négation/ affirmation), plutôt qu’aux limitations des langues naturelles employées comme métalangues (d’où deux formes de quantificateur universel, selon l’environnement affirmatif (tout) ou négatif (aucun)), nous proposons de reformuler explicitement le quantificateur universel des propositions négatives aucun en termes du quantificateur universel tout, soit : aucun N4 n’est A5 = tout N est non-A. Voir l’équipollence nullus homo iustus est = omnis uploads/Litterature/ phrase-modalisee-modalites-d-enonce-2019-version-abregee.pdf
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- Publié le Aoû 26, 2022
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