Département de Linguistique Faculté de Sciences Humaines Université Paris V Sor
Département de Linguistique Faculté de Sciences Humaines Université Paris V Sorbonne SITUATION DE L’ÉCRITURE MATHÉMATIQUE Mémoire de maîtrise en Sciences du Langage, sous la direction de Madame le professeur Colette Feuillard - juin 2003 - - R. Loth 2 ABSTRACT Mathematical writing is the expression shaping one of the most successful endeavours of human thought. Until recently, thinkers studying the subject did it outside semiology from their own original standpoint. They demonstrated that this semiotic system played an important part in the construction of mathematics and that the way it operates influences mathematical thought. Semiology being perhaps not established enough to allow us to analyse all the details of this system of writing, this paper probes into the relevance of linguistics in such a study. After exploring the philosophical questions raised by the issue, we will see which linguistic techniques and concepts may be of use for the study of mathematical symbolism. Different work hypotheses for possible future research are also suggested. Meanwhile various aspects of this unique semiotic system will be presented. RÉSUMÉ L’écriture mathématique sert d’expression à l’une des démarches les plus abouties de la pensée humaine. Jusqu’à présent, les penseurs qui ont étudié ce système de signes l’ont surtout fait hors du cadre de la sémiologie, par des démarches originales. Ils ont montré son rôle dans la construction des mathématiques et l’influence de son fonctionnement sur la réflexion mathématique. Partant de l’idée que la sémiologie n’est peut-être pas encore assez établie pour permettre une recherche sur ce système d’écriture dans tous ses détails, nous nous demanderons dans quelle mesure une telle recherche peut se fonder sur les acquis de la linguistique. Après avoir situé l’analyse dans le cadre de thèmes plus larges, nous chercherons les outils d’analyse linguistique et les concepts pertinents pour l’étude du symbolisme mathématique. Nous essayerons aussi d’établir quelques hypothèses de travail pouvant fonder d’éventuels travaux futurs. En chemin, nous découvrirons un peu la complexion de ce système sémiotique unique. STRESZCZENIE Pismo matematyczne jest wykładnią jednego z najudoskolanionych podejść myśli ludzkiej do świata. Dotychczas, matematycy i filozofowie zajeli się tym tematem poza kręgiem semiologii. Wykazali Ŝe pismo matematyczne ma wazną rolę w tworzeniu myśli matematycznej. Wychodząc z załoŜenia Ŝe semiologia nie jest chyba jeszcze na tyle ustanowiona, Ŝeby zbadać to pismo we wszystkich swoich szczegółach, zastanowimy się w jakiej mierze doświadczenie językoznawstwa moŜe posłuŜyć takim badaniom. Zatem po usytuowaniu tematyki w kręgu szerszych zagadnień, poszukamy tych spośród narzędzi analizy językowej, ktore mogą nam przynieść celne podejście do badań nad symbolizmem matematycznym. Następnie postaramy się ustanowić pewne hipotezy robocze mogące słuzyć przyszłym badaniom. W miedzyczasie odkryjemy róŜne - czasem niespodziewane - cechy pisma matematycznego. 3 SOMMAIRE 1 • OBJET D’ÉTUDE............................................................. 10 1.1 Hétérogénéité de l’écriture mathématique....................................10 1.2 L’écriture comme système sémiotique ..........................................12 1.3 Les analyses d’autres sciences humaines........................................15 2 • THÈMES CLASSIQUES................................................... 17 2.1 Nature des objets mathématiques et écriture mathématique.........17 2.2 Perfectionnement de l’écriture mathématique ..............................19 2.3 Interprétations de l’écriture mathématique...................................23 2.4 Réductionnisme contre jeux de langage........................................25 2.5 Rôle complémentaire d’une étude linguistique.............................28 3 • CIRCONSTANCES.......................................................... 30 3.1 Observations sur la diachronie......................................................30 3.2 Didactique et psycholinguistique..................................................35 3.3 Analyse du discours ......................................................................41 3.4 Sociolinguistique..........................................................................47 3.5 Ethnolinguistique.........................................................................53 3.6 Récapitulatif.................................................................................59 4 • SYSTEME.......................................................................... 60 4.1 Sémiographie................................................................................60 4.2 Lexique, ou rien, ou plus ?............................................................65 4.3 Degrés de syntactisation ...............................................................67 CONCLUSION........................................................................... 69 ANNEXES.................................................................................... 69 A.- Champs des mathématiques, d’après le Leksykon Matematyczny..........69 B.- Limitation de l’arbitraire et « multiplication des logiques ».................70 LEXIQUE................................................................................... 74 BIBLIOGRAPHIE ....................................................................... 76 WEBOGRAPHIE......................................................................... 84 4 INTRODUCTION L’expression, et non pas l’explication (…) Faire sens - dans la plupart des cas par une nouvelle expression, superposée sur l’ancienne qui entre temps est devenue incompréhensible. Nietzsche, Nachgelassene Fragmente, XII, 100 Tant pour le linguiste que pour le mathématicien, l’écriture mathématique est bon signe. L’un y voit un domaine de recherche passionnant, l’autre y cherche la bonne expression de ses idées. Cette « bonne expression » n’est d’ailleurs pas simple à mettre en œuvre. Les mathématiques travaillent sur des objets abstraits et les relations entre ces objets ; les signes supportent alors l’essentiel de la manifestation concrète du sens. Le système est régulièrement travaillé pour assurer de manière adéquate son rôle de communication et de symbolisation. Dans ce processus de réécriture, les mathématiciens prennent en compte de nombreuses nécessités interne à leur discipline, afin que la forme soit la plus adéquate possible. On peut dire que l’actualisation de la norme se déroule de manière beaucoup plus volontaire et consciente que dans les langues dites naturelles, d’où la dénomination « langue artificielle ». Mais ceci nous conduit à un premier problème : l’écriture mathématique ne relève pas de la linguistique au sens strict, mais de la sémiologie. Or, sauf rares exceptions, elle n’a pas encore été étudiée dans ce cadre. La sémiologie, sans doute promise à un grand avenir, est pour l’instant une science en formation. Elle doit définir de manière productive ses concepts et sa méthodologie fondamentale et n’a peut-être pas aujourd’hui les outils 5 nécessaires à l’étude d’un système sémiotique aussi grand que l’écriture mathématique. Cependant une branche de la sémiologie, la linguistique, a acquis un grand savoir-faire dans ses recherches sur des systèmes de signes encore plus complexes : les langues. Notre objectif principal est donc de déterminer si les concepts et les techniques des sciences du langage peuvent être utilisés dans une étude de l’écriture mathématique. Lors des travaux préalables à la rédaction de ce mémoire, cette approche nous est apparue fort complexe. C’est un peu naturel, étant donné que les outils d’analyse linguistique ont été scrupuleusement mis en place pour répondre aux questions posées par la nature de la langue et par elle seule. D’ailleurs une des premières démarches de la linguistique a été de délimiter son champ d’investigation pour éviter les dérives peu rigoureuses. Néanmoins ce qui fonde une science, c’est la rigueur, bien sûr, mais c’est aussi la curiosité ; comment concilier les deux ? En l’occurrence, nous avons surtout supposé qu’il était utile d’éveiller la curiosité sur un champ assez ignoré malgré son intérêt potentiel. Ainsi, pour chaque branche des sciences du langage qui pourrait être concernée, ce mémoire propose quelques sujets intéressants à d’étudier. Pour éviter de discuter dans l’abstrait des concepts à utiliser, nous avons exposé ces différents sujets directement du point de vue linguistique et tenté ainsi de mettre en avant les notions et les techniques utiles. Voilà d’une manière générale l’esprit de l’étude qui suit. S’agissant d’un système écrit, de nombreux faits seront différents de ce à quoi nous sommes habitués. Pourtant nous pouvons dès à présent supposer que la syntaxe et la sémantique auront beaucoup à dire et à examiner. Par ailleurs, d’autres sciences humaines se sont déjà intéressées au symbolisme mathématique : l’histoire des sciences, les sciences de l’éducation, la psychologie et la sociologie. Leurs découvertes nous intéresserons pour toutes les questions qu’en linguistique nous appellerions externes. Nous tenons néanmoins à nous démarquer de certains courants des sciences sociales qui tendent à présenter les mathématiques comme … la couverture d’un groupe social qui voudrait assurer sa domination symbolique. Si nous mentionnons ce point c’est qu’il y a du côté de l’étude sémiologique une position qu’on pourrait percevoir comme tout aussi dénigrante : on pourrait dire que les mathématiques ne sont que signes, que les objets mathématiques n’existent pas. Plutôt tentant pour un linguiste, mais pas toujours pour des raisons scientifiques ! 6 Pourtant la question se pose ; elle occupe les philosophes et les mathématiciens depuis longtemps. Nous serons aussi amenés à la considérer et heureusement nous n’aurons pas à y répondre. Bien que l’écriture qui nous intéresse soit modelée par et pour les mathématiques, elle est en dernière analyse arbitraire. L’arbitraire du signe nous évite de répondre à la question de la référence. Les formules mathématiques ne sont pas les mathématiques, on pourrait imaginer parvenir aux mêmes théorèmes avec des notations toutes différentes. Il y a là deux plans qui, s’ils ne sont pas tout à faits indépendants, ne sont pas non plus conécessaires. L’écriture mathématique s’est formée dans le double contexte de cette contingence et d’une recherche d’ergonomie, qui passe par des essais de limitation de l’arbitraire du signe. Synchroniquement parlant, ce qu’on appelle « le symbolisme des mathématiques » se présente comme un ensemble de signes graphiques dont le premier enjeu est d’exprimer succinctement des propositions souvent compliquées. L’objectif est de pouvoir communiquer ces propositions à tout autre mathématicien le plus indépendamment possible des distances entre les cultures, les lieux et les époques. La communication à longue distance explique la recherche constante de conventions universellement partagées. La communication dans le temps justifie l’usage de signifiants graphiques et a fait progressivement de l’écriture mathématique une mémoire de la discipline. Le besoin de concision engage à trouver des expressions graphiques qui au-delà de signifier un concept ou un objet, indiquent aussi certaines de ses propriétés dans les opérations. Pour un linguiste, cela veut dire que chaque signe à ses compatibilités dans le syntagme. Toutefois, parallèlement à ces facteurs voulus et raisonnés qui structurent l’écriture mathématique, elle présente aussi un côté hétéroclite, voire embrouillé. uploads/Litterature/ possibilite-etudes-ecriture-mathematiques.pdf
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- Publié le Mar 27, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
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