Réponse à Edouard-Marie Gallez au sujet de « la question des deux Marie » Pourq
Réponse à Edouard-Marie Gallez au sujet de « la question des deux Marie » Pourquoi Marie est-elle dite sœur d’Aaron dans le Coran ? AHMED AMINE, le 20 juin 2017 Introduction Je présente ici une courte réponse au papier du Dr EM Gallez publié sur academia1, qui relance à nouveau la question de l’identification de l’auteur du Coran de Mariam mère d’Issa/Jésus avec la Myriam Biblique, suite à sa découverte d’une nouvelle iconographie où Marie est peinte près d’un puits. L’idée est de combler une lacune à l’introduction de son livre « le Messie et son prophète » où cette question a été traitée pour orienter le lecteur vers l’existence d’une tradition qui serait ni juive rabbinique ni vraiment chrétienne mais qui serait résolument judéo-nazaréenne dans le cadre de ce qu’il désigne de phénomène post-chrétien. Sur base d’une analyse inter-textuelle des versets coraniques relatifs à Mariam d’une part et d’une mystérieuse lettre de Paul de Tarse aux Corinthiens d’autre part, il s’agit tout particulièrement du passage 1Cor 10: 3-4 où Jésus est identifié au Rocher (Puits) déambulant qui suivait la prophétesse Myriam sœur d’Aaron. Dans cette réponse rapide, nous ne reviendrons pas sur les détails (cf tableau ci-dessous) de la supposée confusion2 du Coran entre Mariam mère d’Issa et Myriam sœur d’Aaron de l’AT car cela nécessite un long développement. Avant de rentrer dans le vif du sujet, on peut saluer la subtilité du Dr Gallez qui n’a pas vu en cette identification allégorique, une malheureuse confusion de l’auteur du Coran, qui serait ainsi la preuve de l’ignorance patente de ce dernier des textes chrétiens. Cette conclusion hâtive est très souvent utilisée dans les forums islamophobes sur internet afin de pointer les anachronismes du Coran. Bible hébraïque Coran Mariam fille d’Amram sœur d’Aaron et de Moise / Nombres 26 :59 Mariam sœur d’Aaron/ Exode 15:20 Mariam fille d’Imran/ Coran 66 :12 Mariam sœur d’Aaron/ Coran 19 :28 Aaron frère de Moise/ Coran 19 :53 Tableau résumant les données de la question des deux maries I- L’exégèse traditionnelle musulmane On va essayer de résumer ici, l’exégèse traditionnelle qui se base essentiellement sur un Hadith prophétique, qui nous le savons n’a aucune valeur historique aux yeux du Dr Gallez, il peut toutefois témoigner que la controverse était déjà connue à l’époque de l’émergence des Hadiths. 1 https://www.academia.edu/33530744/Pourquoi_Marie_est-elle_dite_soeur_dAaron_dans_le_Coran 2 Exemple d’un site chrétien traitant le sujet : http://islam.faq.free.fr/islam/marie-mere-jesus-soeur-aaron.htm Plusieurs réponses ont été données par les exégètes musulmans anciens comme contemporains à cette double identification de Mariam Coranique avec la Myriam Biblique mais la plupart de ces exégèses souffrent d’un déficit de compréhension du problème lui-même car la réponse vise seulement à résoudre la partie « sœur d’Aaron », en essayant de lui attribuer un sens métaphorique sans faire attention à l’identification via le père ‘Imran/Amram. La seule exégèse qui semble prendre en compte le double rattachement de Mariam par son frère Aaron et son père ‘Imran/Amram est celle qui s’appuie sur une tradition prophétique qui fait valoir l’idée que c’était une habitude chez les juifs de donner à leurs enfants les mêmes noms que leurs vertueux ascendants : « Al-Mughîra ibn Shu’ba raconte : « Le Prophète (sur lui la paix) m’envoya à Nadjran [Yémen]. Là-bas on me dit : « Vous récitez ce passage : « O Sœur de Aaron » [Coran 19/28] ; pourtant, entre l’époque de Moïse et celle de Jésus il y a eu le temps que chacun connaît ! » Je n’ai pas su quoi leur répondre. Lorsque je rentrai (à Médine), je questionnai le Prophète à ce sujet. Il me dit : « Tu les aurais informés qu’ils se donnaient comme noms ceux des prophètes et des pieux ayant vécu avant eux. » (Rapporté par Muslim, n° 2135, At-Tirmidhî, n° 3155 et Ahmad, n° 17491). On peut schématiser l’interprétation traditionnelle sous la forme d’un arbre généalogique : Abraham Isaac Jacob Levi Amram 1er Yokébed Moise Aaron Mariam 1ère Abdias (?) Amram II / Joachim Anne (?) « Joseph »(?) Mariam II Elisabeth Zacharie Jésus Jean Baptiste Ceci étant dit, nous sommes entièrement d’accord avec le constat du Dr Gallez concernant le caractère absurde des tentatives de certains auteurs musulmans de nier cette identification, parfois même en invoquant des explications vraiment hallucinantes comme celle qui fait vivre la Myriam Biblique plus de 12 siècles ! Du coté Chrétien on peut faire le même constat chez certains auteurs ésotéristes comme Claire Heartson3 dans un livre sur la Anne grand-mère de Jésus, elle a avancé l’aidée que Saint Anne aurait vécue 600 ans grâce à un procédé de régénération cellulaire, secret gardé des thérapeutes esséniens ! L’absurde -qui agresse l’intelligence - est cette fois-ci , habillé par une pseudoscience issue directement des moines esséniens du Mont-Carmel !. Le Dr Gallez est bien placé pour affirmer l’énorme invraisemblance de ce mythe (cf Dossier Essénien, le Messie et son prophète, tome 1) Si l’on admet l’identification allégorique faite par l’auteur du Coran, il persiste des détails qui restent à éclaircir comme l’identification implicite de ‘Issa avec Yashu’ /Jésus, de ‘Imran avec Amram mais passons, cela nous éloignera de l’objet de cette réponse. Il est remarquable de constater l’habilité avec laquelle, le Père Gallez traite les mots et les concepts théologiques, comme le fait de passer d’un Rocher déambulant à un Rocher-Puits pour aboutir enfin à un Puits fixe représenté dans l’iconographie chrétienne qui est assez abondante mais non spécifique de la figure de Marie. Les fresques de Jésus avec la Samaritaine peuvent servir comme un contre-exemple éclairant. Ici Marie est absente du paysage, ou plutôt remplacée par une samaritaine alors que le puits est quasi-présent dans cette représentation. On peut dire que c’est Jésus qui est le puits qui symbolise « l’eau, source de vie éternelle » mais là le lien qui rattache les deux Maries devient totalement fortuit du moins sur le plan iconographique. Bien entendu, il n’est pas question de dire que les chrétiens auraient du s’abstenir de toute représentation du puits sans inclure Marie, il est question que le puits n’est pas synonyme de rapprochement entre les deux Maries. Jésus et la samaritaine fig 1 fig 2 Nous avons également l’icône de la samaritaine seule devant le puits, ci-après : 3Anna, grand-mère de Jésus, auteur Claire Heartsong, Ed Ariane 2009 http://editions-ariane.com/products-page/catalogue-items/anna-grand-mere-de-jesus/ Fig 3 : La Samaritaine au puits (Doura-Europos) Ci-dessous, on constat le puits (sans marie) sur une mosaïque de la nef commandée par Sixte III, représentant des scènes de l'Ancien Testament, datent du Vème siècle représentant : Abraham, Melshisedek, Jacob, Moïse, Josué et David Fig 4 On peut observer donc, que le Dr Gallez est assez sélectif comme c’est souvent le cas, il avance une hypothèse et puis il va sélectionner dans les sources littéraires ou iconographiques ce qui va appuyer son idée du départ. II-Une tradition syro-araméenne ou un Midrash Biblique ? Nous allons se pencher à présent sur la conclusion du Père Gallez, compte tenu de son importance, d’ailleurs c’est l’objet réel de notre réplique: « Espérons que ces « explications » qui constituent une agression contre l’intelligence disparaîtront vite, ce qui amènera à reconnaître l’enracinement de l’islam dans l’histoire réelle, celle d’un milieu syro-araméen ex-hébréo-chrétien où le rapprochement entre les « deux Marie » coulait de source (si l’on ose dire ici). » Fin de citation. 1-Histoire réelle ou théologie réelle ? Le père Gallez ne précise pas dans ce petit article annexe à son article original4, s’il aborde la question d’un point de vue historique ou purement théologique, nous ne la savons pas réellement. Sur le plan théologique, personne ne peut reprocher à Gallez cette analyse pertinente d’un rapprochement allégorique entre deux figures bibliques fusionnant ainsi une figure du nouveau avec celle de l’ancien testament. Par contre s’il pense que cette analyse est du domaine de l’histoire réelle, là le propos devient très ennuyeux à moins que Gallez adopte une approche hybride théologico- historique ce qui ne manque pas d’originalité ! Sur le plan historique, nous admettons volontiers l’absurdité de l’explication islamique d’une Myriam à longévité légendaire (1250 ans !), ceci est vraiment agressif pour l’intelligence humaine, soit mais que penser alors d’un puits qui se balade à la poursuite de cette Myriam des temps anciens ? Et puis historiquement que savons-nous sur Moïse, Josué, Myriam et même sur Marie et Paul de Tarse avons-nous la moindre trace historique ? Il faut se rendre à l’évidence, l’histoire s’arrête là où commence la théologie. 2-Le Midrash Evangélique, sur les traces de l’auteur du selon Saint Luc… Est-ce que l’identification de Mariam coranique avec la Myriam Biblique est le seul cas de figure dans les textes religieux ? La réponse est non, et on va vite comprendre pourquoi, il est frappant de constater la similitude entre La double annonciation au début de l’Evangile selon St Luc et la double annonciation qui figure au début de la Sourate Mariam, dans les deux récits il s’agit de l’annonce faite dans l’ordre à Zacharie puis à Mariam. Signalons au passage que le Dr Gallez a fait remarquer dans l’introduction uploads/Litterature/ reponse-a-edouard-marie-gallez-au-sujet-pdf.pdf
Documents similaires
-
20
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Jul 15, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
- Taille du fichier 0.8057MB