Le symbolisme dans les Lais de Marie de France – par Jacques RIBARD. MdF elle-m

Le symbolisme dans les Lais de Marie de France – par Jacques RIBARD. MdF elle-même encourage le récepteur à chercher un sens aux récits : cf. Prologue où « elle invite explicitement à gloser la lettre1 et à lui appliquer le surplus de connaissance qui en éclaire l'interprétation. » Elle a écrit des Fables qui fonctionnent justement sur le même principe d'interprétation. De même, elle affirme souvent que les Lais sont porteurs d'une vérité qui pourrait être ce que Marie veut sauver de l'oubli. « Remembrance et vérité – en étroite collaboration avec aventure – sont les maîtres mots qui reviennent sans cesse sous la plume de MdF. » Cf. Bisclavret vv.115-118 ; Guigemar v.19 ; Chievrefoil vv. 111-118… « Mais de quelle vérité s'agit-il donc ? Pas d'une vérité, bien sûr, dogmatiquement exposée, mais bien d'une érité tout existentielle qui, à la fois, se manifeste et se cache sous les ambages pulcherrimae d'une histoire qu'on nous laisse la liberté et la responsabilité d'interpréter, de gloser – à l'instar du modèle pregnant de cet époque, les fameuses paraboles évangéliques. » cf Chievrefoil et la branche porteuse d'un message, Laostic et son petit oiseau, symbole d'un amour assassiné. Il faut d'une part extraire le sens de chaque lai mais aussi regarder les jeux d'échos entre chaque lai pour dégager une constante : cette fameuse vérité. Pratiquement tout les lais commencent par un avant-texte où règne le calme et l'ordre (Bisclavret), même quand la suite des récits infirme cet état de fait (Equitan; Eliduc ; Bisclavret). Les chevaliers ont toujours les bonnes qualités, les dames sont sages et courtoises. Dans Yonec, c'est par le fantasme de la femme frustrée qui rêve de cette vie parfaite que commence le lai. « C'est une sorte de rappel des « origines », de l'Âge d'or, du Paradis terrestre » qui contraste avec la suite, appuyant la tragédie de la situation des personnages. La théorie de Jacques Ribaud est que le lai est une « présentation romanesque de la destinée de l'homme » et ce début de récit paradisiaque prend tout son sens. Le lancement du récit passe par l'image du blocage : le topoï de l'enserrement dans des tours dans Yonec, Guigemar et dans une certaine mesure Laostic puisque les deux amants sont séparés par ce haut mur de piere bise (v.38) auquel fait écho le grant perrun de marbre bis du Lanval (v.634). La couleur bise semble connoter la lourdeur minérale, froide, comme le mur d'une prison. Les portes qui enferment les prisonnières relèvent du même registre symbolique (Yonec, v.56 ; v.190) avec le lien qui uni enfermement et stérilité, incarné par la vieillesse. 1 Prologue, v. 15 Autres « blocages » qu'est celui de l'exil : Tristan bloqué hors de la cour, le bon soudeier Eliduc (v.1074) rejetté par son seigneur, Lanval luin de son heritage (v.28), prisonnier d'un pays qui n'est pas vraiment le sien. On pense aussi à l'héroïne des Deux Amants ou la Guilliadun d'Eliduc, à qui toute amours sont interdites par des pères abusifs. Il ne s'agit pas de simples motifs pour l'auteur, comme celui de la mal mariée ou du losengiers mais de quelque chose de plus profond, d'un peché originel : Lanval et sa mesaise, ou mieux encore, Guigemar, victime d'une victime inconsciente d'une privation d'amour qui le referme sur lui même. Blocage existentiel génère insatisfaction profonde. Le héros cherche alors à s'évader, en quête d'ouverture, d'une frontière à franchir. C'est l'antithèse aux huis fermés de tout à l'heure, la fenestre de la dame de Laostic – avec ses motifs associés de la veille et du sommeil (vie / mort), de la nuit comme accès secret à l'autre monde du rêve. Cette même fenetre, point de passage et d'évasion, dans la lai d'Yonec : « L'umbre d'un grant oisel choisi / Par mi une eistreite fenestre » (v.106-107). L'oiseau et la fenêtre se supererposent, la fenêtre est aussi le passage pour la dame : Par une fenestre s'en ist. (v.337). Autres frontières : Lanval en quittant la ville vers une ewe curant (v.337), où une messagère de la fée l'entraine dans la tref, demeure provisoire de la fée, que Jean Frappier qualifie de « Frontières humides », comme la mer que traversent Guigemar comme Eliduc. La forêt est un des lieu les plus chargé de sens dans la littérature courtoise (cf Chrétien de Troyes). Elle est notamment présente dans Guigemar et Bisclavret ou encore avec Tristan qui y laisse son message pour Yseult. La saison printanière est aussi chergée de sens : l'apparition du grant oisel / par mi une estreite fenestre dans Yonec sur fond de « reverdie » (cf note 1, p.413). Idem pour l'apparition de l'oiseau de Laostic, associé aux prés reverdis et aux vergiers fluris (vv. 59-60). Cette renaissance de la nature est lié à celle de l'Amour. uploads/Litterature/ resume-le-symbolisme-dans-les-lais-de-marie-de-france-jacques-ribard.pdf

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