CHAPITRE 19. UNE DÉMARCHE DE FORMATION : CHANGER DE REGARD SUR LES « DIFFICULTÉ

CHAPITRE 19. UNE DÉMARCHE DE FORMATION : CHANGER DE REGARD SUR LES « DIFFICULTÉS DE MOTIVATION » DES ÉLÈVES Patrick Picard in Benoît Galand et al., (Se) motiver à apprendre Presses Universitaires de France | « Apprendre » 2006 | pages 217 à 232 ISBN 9782130558637 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/se-motiver-a-apprendre---page-217.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Presses Universitaires de France. © Presses Universitaires de France. Tous droits réservés pour tous pays. 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Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Lille - - 194.254.129.28 - 09/02/2020 01:25 - © Presses Universitaires de France Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Lille - - 194.254.129.28 - 09/02/2020 01:25 - © Presses Universitaires de France Introduction E n guise de conclusion, l’expérience présen- tée ci-après illustre comment un certain nombre des principes théoriques et pédago- giques développés dans les chapitres précé- dents peuvent être intégrés et mis en œuvre sur le terrain. Si l’expérience en question s’appuie explicitement sur les travaux sociologiques de l’équipe de Paris VIII présentés dans le chapitre de J. Bernardin ci-dessus, nous aurons néanmoins l’occasion de constater qu’elle touche également de très près à d’autres apports, davantage psychologiques, présentés dans l’ouvrage. Elle propose des pistes concrètes, pour l’accompagnement des élèves face à leurs « difficul- tés » de motivation, mais également pour l’accompagnement et la formation des enseignants confrontés à ces élèves et à ces « difficultés ». Mais à présent, place aux acteurs. Savoir lire les demandes de formation pour les rendre opératoires Suite au constat de difficultés récurrentes des élèves face à l’écrit, un dispositif innovant a été mis en place dans Chapitre 19 Une démarche de formation : changer de regard sur les « difficultés de motivation » des élèves Patrick Picard Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Lille - - 194.254.129.28 - 09/02/2020 01:25 - © Presses Universitaires de France Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Lille - - 194.254.129.28 - 09/02/2020 01:25 - © Presses Universitaires de France l’Yonne (France) en 2005-2006 à l’adresse d’enseignants de cycle 2 (5 à 7 ans) exerçant en zone d’éducation prioritaire (ZEP). Visant à engager des transformations durables, cette formation a été pensée en termes d’accompagnement, avec l’aide de formateurs du GFEN1. Sollicitant l’engagement d’équipes de cycle, elle s’inscrivait dans la durée, faisant alterner six sessions de deux jours réparties dans l’année avec le travail dans les classes. Fortement appuyée sur la réalité du terrain vécue et perçue par les enseignants alors concernés, cette démarche de formation n’a eu de cesse, d’une session à l’autre, de viser un retour à l’action « outillé » sur les plans théorique, stratégique et pratique, en utilisant les réussites (des élèves comme des enseignants) comme moteur de cette dynamique de transformation. Nous n’évoquerons ici que quelques éléments stratégiques de ce processus de formation, les appuis théoriques qui les fon- dent, les incidences sur les pratiques enseignantes et leurs effets auprès des élèves2. Lorsque nous les rencontrons en situation de formation continue, nombre d’enseignants énoncent les difficultés de motivation des élèves comme une de leurs préoccupations essentielles : « Ils ne font pas attention », « certains oublient régulièrement la consigne », « ils ne se sentent pas concernés », « ils n’ont pas confiance en eux »… Cap- ter l’attention par différents artifices, encadrer davantage les décrocheurs, alterner plus rapidement les séances pour contourner la dispersion sont des réponses pédagogiques souvent citées, mais qui, engendrant un morcellement des temps de classe, sont jugées fatigantes et peu efficaces par les enseignants eux-mêmes. Avant d’envisager quelques pistes alternatives, nous pro- posons au groupe en formation de faire un détour par le rap- port des élèves à l’activité scolaire, afin de mieux com- prendre l’origine de ces comportements. Pour cela, nous nous appuyons sur un matériau simple à recueillir : les paroles des élèves. Quelques questions simples sont posées aux élèves de chacun des degrés du cycle 2 (5-7 ans), dès la rentrée : « Que penses-tu apprendre au CP ? Comment fait-on pour apprendre ? Selon toi, à quoi ça sert de lire ? »3 (Se) Motiver à apprendre 218 Malgré les difficultés de moyens, comment faire de la formation continue des enseignants un accompagnement aidant les acteurs de terrain à prendre appui sur leurs connaissances ? Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Lille - - 194.254.129.28 - 09/02/2020 01:25 - © Presses Universitaires de France Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Lille - - 194.254.129.28 - 09/02/2020 01:25 - © Presses Universitaires de France En dépouillant eux-mêmes les réponses de leurs élèves lors d’une première session de formation, les enseignants sont interpellés par l’hétérogénéité des réponses. Beaucoup d’élèves pensent apprendre « en écoutant bien la maî- tresse » ou « en allant à l’école », alors que peu imaginent que c’est « en essayant », « en s’entraînant », « en deman- dant de l’aide ». Certains ont envie d’apprendre « pour faire plaisir aux parents » ou « pour aller dans la classe suivante », quand d’autres pensent déjà apprendre « pour pouvoir raconter des histoires », « pour grandir », « pour savoir des choses ». Au-delà des différences interindividuelles qui s’expri- ment, ce sont des conceptions différentes de l’école et de l’apprentissage qui se révèlent (voir les chapitres de J. Ber- nardin et de J.-Y. Donnay dans cet ouvrage). Certains élèves ont compris qu’apprendre s’inscrit dans la durée, est un pro- cessus qui nécessite engagement personnel et persévérance, est fait d’essais successifs et d’erreurs progressivement rec- tifiées ; ils savent qu’un exercice n’est qu’un prétexte pour apprendre, asseoir ou vérifier une acquisition. Si ces élèves sont en phase avec les exigences scolaires, dans une conni- vence culturelle implicite avec l’enseignant, tous ne sont pas dans ce cas. D’autres, dans un rapport bipolaire au savoir (« tu sais ou tu sais pas »), se centrent sur la tâche en oubliant son but, vivent les activités successives sans en per- cevoir la continuité, recherchent l’assistance de l’enseignant considéré comme seul juge de la qualité du travail. Faute de repères et de points d’appui, la relation pédagogique est ainsi bien souvent minée par une quête affective parasitant le travail intellectuel. Comment en sortir ? Lever les malentendus On s’étonne parfois de la résistance des élèves à tirer parti des corrections, à réécrire un premier jet. Est-ce une preuve de leur mauvaise volonté ou le symptôme d’un mal- entendu sur le but de l’activité ? Si la consigne est enten- due uniquement du côté du « faire », rien d’étonnant à ce que l’enseignant doive lutter avec le « combien de lignes ? » des élèves, n’arrivant pas à faire partager son objectif de développement des compétences scripturales. Et si la Une démarche de formation 219 Premier objectif, donner à lire aux enseignants le réel de la classe en s’appuyant sur les paroles des élèves, qui dévoilent leurs conceptions de l’École. Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Lille - - 194.254.129.28 - 09/02/2020 01:25 - © Presses Universitaires de France Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Lille - - 194.254.129.28 - 09/02/2020 01:25 - © Presses Universitaires de France (Se) Motiver à apprendre 220 En France, le ministère organise depuis plusieurs années une passation d’évaluation nationale standardisée pour les élèves de CE2 (8 ans) et de 6e (1 1 ans) à l’entrée au collège. Un récent rapport de l’Inspection générale, constatant les pratiques, recommande de développer celles qui permettent aux élèves d’expliciter leurs erreurs et de mesurer leur progrès par rapport aux objectifs d’enseignement, par exemple en gardant trace de leurs productions significatives ou en utilisant des outils informatiques (rapport complet à ftp://trf.education.gouv.fr /pub/edutel/syst/igen/a cquis_des_eleves.pdf). L’expérience ci-dessous tente de se situer dans cet objectif. Partant du principe qu’il est difficile aux enfants de situer leur niveau par rapport au groupe- cours et par rapport aux compétences attendues en fin de cycle, je fais passer chaque année les évaluations CE2 aux trois cours de ma classe (8 ans, 9 ans, 10 ans). L’objectif est de faire changer la représentation qu’ont les élèves de ce qu’est l’évaluation : non plus un moyen de classement, mais une aide pour savoir ce qu’on vient faire à l’école. Après les passassions, les corrections sont faites collectivement. Le codage des items et le report dans un logiciel sont faits par les élèves, afin qu’ils prennent conscience de toute la démarche d’évaluation. Ce temps de travail dure environ deux semaines (une heure par jour). Les élèves ont été uploads/Litterature/ une-demarche-de-formation-changer-de-regard-sur-les-difficultes-de-motivation-des-eleves.pdf

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