Échos d'Orient Traductions de l'Écriture Sainte en néo-grec, avant le XIXe sièc

Échos d'Orient Traductions de l'Écriture Sainte en néo-grec, avant le XIXe siècle Th. Xanthopoulos Citer ce document / Cite this document : Xanthopoulos Th. Traductions de l'Écriture Sainte en néo-grec, avant le XIXe siècle. In: Échos d'Orient, tome 5, n°6, 1902. pp. 321-332; doi : https://doi.org/10.3406/rebyz.1902.3427 https://www.persee.fr/doc/rebyz_1146-9447_1902_num_5_6_3427 Fichier pdf généré le 14/04/2018 TRADUCTIONS DE L'ÉCRITURE SAINTE EN NÉO-GREC AVANT LE XIXe SIÈCLE Les derniers événements d'Athènes ont mis une fois de plus à l'ordre du jour la question, si souvent débattue dans l'Eglise de Constantinople, des versions de l'Ecriture en néo-grec. Toutes les consciences orthodoxes ont été plus ou moins remuées par la « scandaleuse entreprise » d'un homogène qui n'a pas craint de porter une main sacrilège sur le texte vénérable des Evangiles, pour se faire le champion de la plus abominable des causes. M. A. Pallis a commis un attentat contre sa religion et contre sa patrie. Voilà ce que tous les organes de la presse hellénique ont dit et répété à satiété. Deux seuls ont pris parti pour le novateur, et la nation tout entière leur a jeté l'anathème. Le nouvel essai de traduction des Ecritures n'a donc pas eu tout le succès qu'en attendaient ses auteurs ; il a même provoqué de sanglantes protestations; j'en dirai quelque chose dans une autre étude. Mais cette troublante question n'étant pas d'hier, il m'a paru utile d'en faire l'historique et de passer en revue les différentes versions néo-grecques parues avant celle de M. Pallis. Toutes, soit qu'elles aient été élaborées par des auteurs juifs, protestants ou orthodoxes, visaient au même but, mettre la Bible au niveau du peuple. Quand je parle de néo-grec, j'entends ce que l'on est convenu d'appeler I. grec vulgaire ainsi que le grec correct ou relevé. On sait que l'un est la langue parlée., même par la bonne société d'Athènes et de Constantinople; l'autre est la langue écrite, celle des journaux et des livres, sauf de très rares exceptions. Jusqu'ici, les puristes ont pour eux la grande majorité Echos d'Orient. ç° année. — N" 6. de la nation; les vulgaristes, ralliés aux théories de M. J. Psicharis, ne forment pas encore un groupe bien compact, et sont tenus en suspicion par leurs compatriotes. Ils sentent l'étranger, dit-on; ils n'ont plus le pur patriotisme et subissent l'influence des milieux européens dans lesquels ils vivent. Ils ne sont pas les représentants de l'idée grecque. Or, l'Eglise du Phanar est contraire, en principe, à la traduction des Ecritures en l'un ou l'autre de ces dialectes. Elle serait toutefois plus tolérante pour la langue correcte ou relevée; mais là encore, elle se refuserait à une approbation, pour cette raison, dit-elle, que cette langue est à très peu de chose près celle de l'Evangile ou de l'Ancien Testament, et qu'ainsi une traduction de ce genre n'aurait pas sa raison d'être, puisqu'elle ferait comme double emploi avec le texte original qu'elle n'éclaircirait pas. Je reviendrai, dans la suite de ce travail, sur les raisons apportées par l'Eglise grecque, au cours des derniers événements, pour renoulever ses défenses contre toute traduction des Livres Saints. L'une d'entre elles mérite cependant une réponse immédiate à cause de son importance même, et surtout de la confusion qu'elle a pu produire dans quelques esprits. L'organe officiel du patriarcat de Constantinople, en s'élevant énergiquement contre toute tentative qui voudrait profaner par une traduction le texte de l'Écriture, a déclaré, en effet, qu'il se basait en cela sur la pratique identique de l'Eglise catholique. 11 est rare que nos frères séparés appuient leurs jugements ou leurs doctrines sur des fondements aussi solides, et il est réellement malheureux que, pour Septembre 1902. ÉCHOS D ORIENT la circonstance, la comparaison des points j de vue entre les deux Eglises ne puisse pas se vérifier. Pour ma part, je le regrette. Il paraîtrait donc que l'Eglise catholique interdit systématiquement à ses fidèles la lecture des Livres Saints. Le reproche ne date pas d'hier. 11 y a longtemps déjà qu'il a été formulé, soit en Orient, soit surtout en Occident^ par les chefs de la Réforme. Il s'agit de ne rien exagérer et de mettre les choses bien au point. L'orthodoxie — c'est une vérité solidement établie depuis la réponse patriarcale à certaine Encyclique de Léon XIII — aime à emprunter à l'arsenal protestant les armes dont elle a besoin pour défendre ses théories et donner un semblant de justification à la plus funeste des séparations. Or, aux protestants dont s'inspirent aujourd'hui tant d'écrivains orthodoxes, Bossuet répondait déjà victorieusement dans ses Variations, que bien avant les prétendus réformés, il existait dans l'Eglise catholique des versions de l'Ecriture à l'usage des fidèles. Le psautier, les Evangiles, d'autres livres sacrés furent traduits dès le haut moyen âge, et comptent aujourd'hui parmi les plus anciens monuments de quelques langues européennes. Mais ces versions se multiplièrent surtout après la découverte de l'imprimerie. L'Eglise, il est vrai, s'est souvent montrée sévère pour permettre indistinctement aux fidèles la lecture de toutes les parties de la Bible. Mais, à cet égard, elle n'a fait que suivre les règles de la prudence la plus élémentaire. Dès le xne siècle, elle interdisait au peuple certaines parties de l'Ecriture, et pour de bonnes raisons. Parmi les Pères de l'Eglise eux-mêmes, plusieurs pensaient que nos Livres Saints ne doivent pas être mis entre toutes les mains, et que certains passages, loin d'édifier, peuvent scandaliser. En remontant plus haut encore, ne voit-on pas la Synagogue user de ce droit que nous reconnaissons à l'Eglise, et interdire à ses adhérents, pour des raisons d'ordre divers, la lecture des premiers chapitresdelaGenèse, le commencement et la fin d'Ezéchiel, l'Ecclésiaste, le Cantique des cantiques ce dernier jusqu'à Tage de trente ans? Le Concile de Trente, qui avait à lutter contre les théories protestantes, en cette matière comme en bien d'autres, porta les mêmes défenses, et le pape Pie IV publia les règles de l'Index. Mais la discipline ne tarda pas à se radoucir, dès que les troubles provoqués par la Réforme eurent fait place au calme qui suit toujours les grandes et violentes secousses. Benoît XIV fut plus large que ses prédécesseurs. Il permit aux simples fidèles la lecture de la Bible traduite en langues modernes, et deux seules conditions furent exigées pour jouir de cette autorisation : ces sortes de traduction doivent être revêtues de l'approbation de l'autorité compétente et accompagnées de notes tirées des Pères de l'Eglise ou d'autres écrivains catholiques- Or, si j'ai bien compris les documents orthodoxes qui traitent de cette matière, il me paraît que l'Eglise du Phanar n'exige pas autre chose. Il y a même un cercle vicieux dans ce qu'elle enseigne, car si, d'une part, elle impose comme l'Eglise catholique l'approbation préalable de l'autorité compétente, qui est dans le cas présent le patriarche et le Saint Synode, d'autre part, elle se refuse obstinément à approuver n'importe quelle traduction de l'Écriture en grec vulgaire qui est la langue parlée communément par le peuple. Et l'on arrive ainsi à cette conclusion que l'Eglise catholique, accusée par plus d'un fervent orthodoxe de proscrire systématiquement aux fidèles toute lecture de la Bible, non seulement l'autorise moyennant deux conditions forts raisonnables, mais l'admet même dans un texte moderne, ce à quoi l'Eglise de Constantinople se refuse absolument pour ses propres fidèles. L'enseignement de celle-ci a peu varié à cet égard. Certains patriarches, ou d'autres personnalités moins marquantes ont paru, il est vrai, favoriser ces versions ; mais ils n'ont exprimé dans la question que leur opinion individuelle, et les protestations officielles ne laissent aucun TRADUCTIONS DE L'ÉCRITURE SAINTE EN NÉO-GREC AVANT LE XIXe SIÈCLE doute sur les sentiments de la nation tout entière dans le débat qui nous occupe. Toutefois, des essais de versions de l'Ecriture en néo-grec ont été tentés, et depuis bien longtemps déjà. M. Pallis n'est pas un initiateur, mais un nom de plus à ajouter à la liste des traducteurs de l'Ecriture en dialecte populaire. Je n'ose dire s'il faut voir dans son nouvel essai, si brusquement entravé, une inspiration protestante ou peut-être une douce pression de l'influence moscovite qui s'exerce en haut lieu à Athènes, comme chacun sait. La grande sœur orthodoxe n'a pas eu en effet les mêmes scrupules, et il y a longtemps que circulent en Russie les exemplaires du Nouveau Testament avec le visa du SaintSynode. Quoi qu'il en soit, je tiens à signaler dès à présent que toutes- les versions orthodoxes de l'Ecriture en néo-grec, antérieures à celle de M. Pallis, ont toujours été sollicitées et patronnées par des Sociétés bibliques protestantes, et que leurs auteurs n'ont pas eu pour unique mobile le désir, très légitime d'ailleurs, de mettre la parole de Dieu à la portée du peuple. On s'en convaincra dans la suite de ce travail. Si M. Pallis ne s'est laissé influencer par aucune puissance occulte, on peut dire hardiment que sa conduite est sans précédent. Ce modeste travail comprend deux parties: i° versions antérieures à Cyrille Lucaris ; 2° de Cyrille Lucaris à la fin du xvme siècle. 1° VERSIONS ANTÉRIEURES A CYRILLE LUCARIS uploads/Litterature/ xanthopoulos-th-reb-5-6-1902-traductions-de-l-x27-e-criture-sainte-en-ne-o-grec-avant-le-xixe-sie-cle.pdf

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